2. L’examen clinique du check-up
3. Les examens paracliniques du check-up
1. L’anamnèse du check-up
Les questions essentielles sont :
- Pourquoi le patient consulte-t-il aujourd’hui?
- Le patient est-il vraiment asymptomatique?
- Quels sont les antécédents médico-chirurgicaux?
- Existe-t-il des facteurs génétiques particuliers?
- Quelle est la probabilité des maladies cardiovasculaires?
- Quelle est la probabilité du diabète?
- Existe-t-il des facteurs de risque pour un cancer?
- Le carnet de vaccinations est-il à jour?
- La consommation d'alcool est-elle à risque?
- Les rapports sexuels sont-ils protégés?
- Quelle est la probabilité d’ostéoporose?
- Informations peu ou pas utiles dans l’anamnèse
Pourquoi le patient consulte-t-il aujourd’hui?
- A-t-il vécu récemment un événement grave parmi ses proches ?
- A-t-il peur d’une séroconversion VIH à la suite de contacts à risque ?
Le patient ne consulte jamais par hasard ; il est important de pouvoir trouver la raison de la consultation et de répondre à sa demande implicite, qui n’a peut-être rien à voir avec l’idée qu’on se fait habituellement du check-up.
Le patient est-il vraiment asymptomatique?
Revoir les antécédents et l’anamnèse par système de manière détaillée. Les patients banalisent souvent ; il est difficile pour eux de savoir « ce qui est normal ».
Les « découvertes » faites au cours de cette partie de l’entretien doivent être prises en compte pour elles-mêmes, avec les investigations et les traitements qui s’imposent. Elles ne font pas partie du « check-up » au sens strict du terme, le patient n’étant pas véritablement asymptomatique. Se référer aux différents chapitres du livre.
Par exemple, un patient habitué à avoir des difficultés à monter les étages ne signalera pas spontanément cette dyspnée d’effort pourtant pathologique. Une modification du transit intestinal peut passer inaperçue. La notion de normalité en matière de transit est très personnelle ; faire attention en particulier aux changements d’habitude d’exonération à partir de 50 ans.
Quels sont les antécédents médico-chirurgicaux?
Les patients ne parlent pas forcément spontanément de leurs antécédents médico-chirurgicaux, qui pourraient cependant nécessiter un contrôle régulier. Ce chapitre ne peut pas prendre en compte toutes les possibilités spécifiques à chaque patient. On peut prendre l’exemple du diabète de type II, pour lequel un certain nombre de contrôles devraient être organisées régulièrement : hémoglobine glyquée, microalbuminurie, tension artérielle, contrôle des pieds et des yeux, etc.
Existe-t-il des facteurs génétiques particuliers (anamnèse familiale)?
Cette information permet d’évaluer une éventuelle probabilité élevée à certaines affections pour lesquelles il est possible d’intervenir :
- Maladies cardiovasculaires précoces dans la famille proche (parents, frères et sœurs) : homme < 55 ans, femmes < 65 ans. Voir « Probabilité des maladie cardiovasculaires ».
- Diabète dans la famille ? Voir « Probabilité du diabète » .
- Cancers dans la famille. Pour les cancers, on suspecte une tendance familiale en cas d’atteinte à un âge inhabituel et lorsqu’on trouve des cancers multiples chez un individu ou dans une famille. S’il existe à l’anamnèse personnelle ou familiale:
- Un cancer du côlon : déterminer les facteurs de risque pour votre patient. Voir « La détermination des facteurs de risque du cancer colorectal (CCR) ».
- Un cancer du sein chez la/les sœurs ou/et chez la mère : se poser la question d’une mutation BRCA1 ou BRCA2. Voir « Cancer du sein ».
- Un mélanome dans la famille proche ? Evaluer la probabilité de mélanome. Voir « Mélanomes ».
Il existe une agrégation familiale pour d’autres cancers (estomac, pancréas) mais les attitudes ne sont pas définies dans ces situations.
Quelle est la probabilité des maladies cardiovasculaires?
Il est maintenant clairement admis que la décision de commencer un traitement visant à prévenir les maladies cardiovasculaires ne dépend pas de valeurs seuils du cholestérol ou de la tension artérielle, mais bien plutôt de la probabilité de maladie cardiovasculaire. Il faut donc accorder une importance particulière à l’estimation de ce risque. Cette probabilité est évaluée classiquement par :
– les valeurs de tension artérielle
– les valeurs des lipides sanguins
– la présence d’un tabagisme
– la présence de diabète ou d’antécédents de maladies cardiovasculaires
– la présence de maladies cardiovasculaires précoces dans la famille (père < 55 ans et/ou mère < 65 ans).
Des données solides nous permettent de dire que le risque est également modifié par les habitudes alimentaires et l’exercice. Votre évaluation doit donc aussi aborder ces deux derniers points.
Type d’alimentation
Une étude évalue prospectivement dans une cohorte de plus de 22 000 personnes suivies pendant 44 mois, la relation entre régime méditerranéen et survenue de problèmes cardiovasculaires et de cancers (tableau 1). 1
tableau 1 : les 9 critères pour le calcul du score méditerranéen
En prévention secondaire après infarctus, une étude d’intervention, la Lyon’s study, a démontré une réduction de 72% des événements cardiovasculaires. 2
Ces deux études pourraient (devraient) orienter votre anamnèse diététique et probablement vos recommandations.
Index glycémique
Un certain nombre de données nous indiquent que les hydrates de carbone (HC) avec index glycémique (IG) élevé pourraient être en grande partie responsables de l’épidémie d’obésité et de diabète dans nos civilisations occidentales. 3
Les aliments avec IG élevé ont pour conséquences une hyperglycémie post-prandiale et une augmentation de la sécrétion d’insuline. 4
Une intervention diététique avec des aliments à faible IG a été plus efficace (perte de poids et amélioration du profil lipidique) que d’autres régimes. Il existe une table des index glycémiques (voir tableau 2). 5 A noter qu’il est difficile de calculer ces index dans une alimentation normale, qui mélange toutes sortes d’aliments. 6
tableau 2 : exemples d'index glycémiques
Activité physique
Le suivi de 12 516 individus pendant presque 20 ans montre qu’une dépense de 4200 kj/sem (1000 kcal/sem, 30 minutes d’effort modéré (marche rapide), 6-7 jours/sem) diminue la mortalité cardiovasculaire de 20%. Une activité physique régulière même modérée diminue très probablement également la mortalité cardiovasculaire. 8
En prévention primaire, on constate après 4,5 ans une diminution de 44% de la mortalité chez les personnes inactives qui commencent à faire de l’exercice régulièrement (NNT 121). 9
Après un suivi de 25 ans, la diminution de la mortalité cardiovasculaire chez les personnes physiquement actives est de 40% (NNT 157 fumeurs, 333 non fumeurs). Un exercice significatif (transpiration) de 1,5 heure/semaine ou une marche vigoureuse de 3 heures/semaine sont associés à 30-40% de réduction des événements cardiovasculaires dans une étude prospective de 12 ans chez des infirmières 10 (NNT 181-242). 11
D’autre part, une activité physique régulière protège de l’ostéoporose (voir ci-dessous) et améliore la qualité de vie des personnes limitées du point de vue pulmonaire. 12
Enfin, le brisk walking (marche rapide) 1,5 h/sem (3 x 30 min), avec une perte de poids de 7%, diminue de 58% la probabilité d’évolution vers un diabète (NNT = 6,9 pour des patients avec glycémie à jeun entre 5,3 et 6,9). On peut considérer que 30 minutes d’exercice 6 j/7 (marche rapide) diminue le risque cardiovasculaire de 30%. 13
Quelle est la probabilité du diabète?
Une étude basée sur 1791 Mexicains et 1112 non-hispaniques a permis de construire une formule pour la prédiction d’un diabète. Les facteurs prédictifs par ordre d’importance décroissante sont l’appartenance à un groupe à risque, une anamnèse familiale de diabète, le sexe féminin, une glycémie à jeun entre 5,3 et 6,9, un HDL bas, l’âge, un IMC élevé, une hypertension systolique. Le groupe à risque est lié à l’appartenance ethnique (indiens, mexicains, etc.). 14
Le périmètre abdominal (PA) est prédictif d’un syndrome métabolique, qui est un des éléments prédictifs de diabète. Les sujets masculins avec (IMC > 30 + PA > 102 cm) augmentent leur risque d’avoir un diabète de plus de deux fois. 15
Existe-t-il des facteurs de risque pour un cancer?
- Cancer du poumon
- Cancer du sein
- Cancer du col de l'utérus
- Cancer colorectal (CCR)
- Mélanomes
- Cancers oropharyngés
- Cancer de l’endomètre
- Autres cancers avec tendance familiale
Cancer du poumon
Un arrêt de la consommation de tabac diminue la probabilité de cancer du poumon. Cette diminution commence après 5 ans d’abstinence et atteint 80-90% de réduction de risque après 15 ans. A long terme, cette probabilité reste cependant plus élevée que pour des non-fumeurs. 16
Cancer du sein
Sur l’ensemble des femmes avec un cancer du sein, 20-30% ont une parente avec cancer du sein, mais on ne trouve toutefois une tendance familiale réelle que dans 5-10% des cas. La plupart des cancers du sein « familiaux » surviennent donc « par hasard ». Certains facteurs (tableau 3) permettent de prédire une augmentation du risque de cancer du sein.
tableau 3 : facteurs prédictifs de risque diminué de cancer du sein
Une partie du risque évalué ci-dessus est lié à des mutations (BRCA1 et BRCA2). Vous trouverez sur Internet (sites accédés fin 2006) des outils de calcul de probabilité de la présence de ces mutations :
http://www.myriadtests.com/provider/brca-risk-calculator.htm
http://www4.utsouthwestern.edu/breasthealth/cagene
Le tableau 4 montre que pour la petite minorité de personnes porteuses de la mutation, le risque de plusieurs types de cancer est fortement augmenté.
Le conseil génétique reste une intervention délicate. Que proposer à une femme ayant 50% de probabilité de développer un cancer du sein ? Quel est le seuil de probabilité qui permet d’envisager par exemple l’ablation des deux seins ou de commencer une chimiothérapie prophylactique ? Il faut bien réfléchir avant de proposer un conseil génétique. Des consultations spécialisées multidisciplinaires ont été créées un peu partout pour gérer ce problème très délicat.
Dépistage du cancer du sein
Pratiquer une mammographie chaque année après 35 ans en cas de facteurs de risques (voir les « tableau 3 » et « tableau 4 ») ; sinon tous les deux ans entre 50 ans et 69 ans (recommandations genevoises).
Entre 50 et 69 ans, pendant une période d’observation de 12 ans, si une mammographie est pratiquée tous les 2 ans, la mortalité dans le groupe étudié est de 3,9 versus 5,1/1000 dans le groupe témoin (NNT 833). Ces résultats (assez) favorables ne peuvent être obtenus que si la qualité des interprétations (mammographies et histologie) est élevée. Dans certains programmes moins bien contrôlés, on note une absence de bénéfice de la mammographie. 17
Il faut relever que ce résultat (1,2 décès évités pour 1000 femmes radiographiées tous les 2 ans pendant 10 ans) est obtenu au prix d’un grand nombre de biopsies. De plus, 6 femmes devront vivre pendant plusieurs années avec un diagnostic de cancer du sein, mais sans bénéfice, puisque la diminution de la mortalité par le dépistage n’est «que» de l’ordre de 20%. 18
Après 69 ans, le bénéfice relatif (40% de réduction) et absolu (en raison augmentation de probabilité d’avoir un cancer) est plus grand (NNT 373). 19
Avant 50 ans, le bénéfice de la mammographie est probablement identique, mais l’incidence plus faible de cancers impose de faire beaucoup plus de mammographies pour éviter un décès par cancer du sein (NNT beaucoup plus grand). D’autre part, le nombre de faux positifs est plus grand (avec la morbidité qui s’y rapporte). Le dépistage doit donc être discuté individuellement. 20
Cancer du col de l’utérus
On considère actuellement que l’infection par certaines souches de papillomavirus (VPH) est une cause nécessaire pour le développement de ce cancer. Certains types de VPH sont à très haut risque. 21,22 23
Des stratégies de dépistage avec frottis du col et/ou recherche de VPH font l’objet de multiples recherches. Pour prédire une colposcopie pathologique, la recherche de VPH est plus sensible mais moins spécifique que le frottis du col (frottis versus VPH sensibilité 60% versus 90% – spécificité 82% versus 75% pour une prévalence d’anomalies à la colposcopie de 3,2%). 24 Une recherche de VPH négative ne permet pas d’exclure une colposcopie pathologique. Pour l’instant, on recommande encore un dépistage avec frottis du col 1 fois tous les 3 ans, après 2 dépistages annuels négatifs. 24 Il est à noter qu’il n’existe pas d’études randomisées démontrant le bénéfice du dépistage du cancer du col (!). 26
Le dépistage a diminué, mais pas supprimé l’incidence du cancer du col. L’absence de dépistage minimal tous les 3 ans explique environ la moitié des cas de cancer, l’autre moitié s’explique soit par les faux négatifs du frottis, soit par une prise en charge insuffisante des frottis pathologiques (…). 27
Prévention du cancer du col de l’utérus
Une vaccination VPH-16 avant le premier contact sexuel a permis d’obtenir une protection contre les dysplasies cytologiques, résultat très prometteur. 28
Cancer colorectal (CCR)
Le cancer colorectal est la seconde cause de mortalité par maladie tumorale chez l’homme et la troisième chez la femme. Le CCR est responsable de 10% de la mortalité due au cancer. Un tiers des patients avec CCR meurt de sa maladie. Il existe des facteurs de risque du cancer du côlon qui permettent de cibler le dépistage. Voir « 37Coloscopie ».
Prévention du cancer du côlon
– Alimentation
Dans la prévention primaire du CCR, les facteurs de risques environnementaux sont liés à l’alimentation et à l’hygiène de vie. La consommation de viande rouge sur le long terme est associée à une augmentation du risque de CCR, surtout gauche, mais ces données sont contestées. 38 L’abus de tabac et d’alcool augmente le risque de CCR précoce. 39 Le diabète sucré est associé à une augmentation de l’incidence du CCR de 30%. 40 L’effet de la cholécystectomie comme facteur favorisant le CCR est contesté. 41 42
Pour ce qui est des facteurs protecteurs, le rôle de la caféine (thé, café, chocolat) est controversé. Un régime riche en fruits et végétaux ainsi qu’en fibres est souvent proposé mais son rôle protecteur est également discuté 43 , 44 Dans 2 études prospectives, l’adjonction de fibres alimentaires ne baisse pas l’incidence de la récurrence des adénomes, 45 mais d’autres études épidémiologiques arrivent aux conclusions inverses. 46 Un certain nombre d’études suggèrent un effet protecteur de l’acide folique, 47 de la vitamine B6, 48 du calcium et du magnésium 49 sur l’apparition de polypes et du CCR. L’activité physique aurait un effet protecteur sur l’incidence du CCR. 50 51
Sur la base de ces informations, on peut donc recommander dans la prévention du CCR un régime riche en fruits, légumes et fibres, de l’exercice physique régulier avec maintien du poids, d’éviter de fumer et de boire en excès ainsi qu’un régime riche en calcium (3 g/j carbonate de calcium).
– Médicaments
Un grand nombre d’études laisse suggérer que l’aspirine et les AINS offrent un effet protecteur sur l’apparition du CCR. Cependant, la Nurses’ Health Study (100 mg aspirine tous les 2 jours pendant 10 ans) n’a pas montré de bénéfice. 52 Des doses supérieures ou des AINS COX2 spécifiques pourraient être utiles, mais l’étude sur les COX2 a dû être arrêtée en raison de l’augmentation importante de problèmes cardiovasculaires, malgré une action prometteuse sur la rédicive de polypes. Le rôle protecteur des statines n’est pas confirmé. 53 54
Mélanomes
Une histoire familiale de mélanome augmente la probabilité de souffrir de cette affection (10% des mélanomes sont « familiaux »). D’autres facteurs prédictifs ont été démontrés.
Le calcul du risque est basé sur la présence d’antécédents familiaux de mélanomes (RR 2,2), du nombre de nævi normaux (plus de 50 RR = 5, plus de 100 RR = 17) de la présence de nævi atypiques, de la notion de coups de soleils importants avant 20 ans (RR = 2), de l’âge avancé, du sexe masculin et de la couleur des cheveux (blonds RR = 1,5 ou roux RR = 1,9).
Un nævus atypique ou dysplasique est une lésion avec des bords irréguliers, une coloration inhomogène, plus grande que des naevi normaux (qui sont généralement d’un diamètre < 0,6 cm). Une modélisation basée sur la Nurses’ Health Study permet d’estimer le risque de nævus atypique en fonction de ces facteurs. 55
Dépistage – prévention du mélanome
La notion d’un risque individuel élevé devrait faire insister sur les méthodes de prévention connues avec évaluation régulière par un dermatologue.
Cancers oropharyngés
Le risque de ce type de cancer est essentiellement lié à la consommation totale de tabac et d’alcool fort. Le risque peut augmenter de 25 à 35 fois pour les gros fumeurs et buveurs. L’alcool fort augmente davantage le risque que le vin ou la bière. 56 Un ancien fumeur retrouve le risque de la population normale après plus de 20 ans d’arrêt du tabac. 57 Il n’existe pas de stratégie validée de dépistage pour ce type de cancer. La prévention passe de toute évidence par la diminution de la consommation de tabac ou d’alcool (surtout les alcools forts). Le papillomavirus pourrait jouer un rôle. 58 58b
Cancer de l’endomètre
L’obésité dans la période post-ménopausique et la prise d’œstrogènes lors de la ménopause non contrebalancée par des progestatifs sont des facteurs de risque bien connus pour le cancer de l’endomètre.
Il n’existe pas de stratégie validée de dépistage pour la population générale. En cas de syndrome du cancer colorectal familial sans polypose HNPCC – hereditary non polyposis colorectal carcinoma (voir sous Coloscopie), en raison du risque très élevé de cancer de l’endomètre (40-60%), un dépistage annuel à partir de 35 ans par biopsies endométriales pourrait être indiqué.
Autres cancers avec tendance familiale
Il s’agit d’affections rares, comme le carcinome médullaire de la thyroïde, le phéochromocytome et l’hyperplasie parathyroïdienne. En cas d’agrégation familiale, on doit suspecter la présence soit d’un MEN (multiple endocrine neoplasia) de type 1 ou 2 :
- MEN type 1 (MEN1) : la mutation est présente chez 1/100 000 individu. On peut suspecter cette mutation par la présence d’un des cancers suivants chez un patient ou un parent proche avant 50 ans : cancer de la parathyroïde (100% si avant 50 ans), cancer du pancréas ou de l’hypophyse. L’hyperparathyroïdisme est très fréquent chez les personnes porteuses de la mutation, mais représente seulement 1% des hyperparathyroïdismes primaires. Le bénéfice pour les personnes dépistées n’a pas été démontré.
- MEN type 2 (MEN2) : la mutation est présente à une fréquence de 2,5/100 000 dans la population générale. En l’absence d’histoire familiale, 6 à 25% des personnes souffrant de cancers médullaires de la thyroïde ont une mutation. Si le cancer a commencé avant 35 ans, ou en présence d’une histoire familiale, l’incidence augmente. Plus de 90% des personnes porteuses de la mutation auront un cancer médullaire de la thyroïde. Le bénéfice d’un dépistage de la famille n’est pas démontré.
Le carnet de vaccinations est-il à jour? 59
Les causes d’un taux de vaccination insuffisant sont multiples :
– manque d’informations et oublis (diphtérie/tétanos – personnes âgées)
– manque de conviction des médecins (rougeole/pneumocoque)
– mauvaise image dans la presse (rougeole, hépatite B)
– sentiment d’inefficacité chez les patients et les médecins (grippe)
– difficulté de recommencer chaque année (grippe) 60
Il faut se rappeler que les vaccinations sont utiles pour le patient, mais aussi pour la collectivité. Au-dessus d’un certain taux de couverture de vaccination, les épidémies ne peuvent plus survenir. Il s’agit de l’immunité dite « de troupeau ». La vaccination peut donc être considérée comme un « devoir civique ».
Diphtérie et tétanos
Il faut faire au minimum 3 injections puis un rappel tous les 10 ans. Une épidémie de diphtérie en Russie en 1992 (2300 cas en 6 mois) a démontré le danger d’une diminution de la couverture vaccinale. Ce vaccin est très efficace et totalement sans danger, puisqu’il ne s’agit que d’une anatoxine (protéine fabriquée par la bactérie et dénaturée). Il est actuellement conseillé d’associer systématiquement le vaccin contre la diphtérie à celui du tétanos en cas de rappel. 61
Poliomyélite
Le vaccin oral est actuellement déconseillé dans la plupart des pays industrialisés car il s’accompagne d’une incidence de poliomyélite vaccinale de 1 sur 400 000 à 750 000 pour la primo-vaccination, et de 1 sur 5 millions pour les doses suivantes. Cette incidence de poliomyélite vaccinale est plus grande que le risque d’une maladie «sauvage» attrapée accidentellement. Le vaccin inactivé par voie parentérale IPV doit lui être substitué, en tout cas pour les premières doses. L’OMS espère éradiquer cette maladie prochainement. Il est difficile de savoir à quel moment arrêter les programmes de vaccination. 62
Hépatite B
Le vaccin est conseillé pour les personnes en contact avec du sang (professionnels de la santé – patients séropositifs), mais également pour les enfants et les adolescents. Sur plus de 36 millions de doses, aucun lien avec des affections neurologiques n’a pu être démontré. 63 64
Rubéole
Une infection rubéolique au cours d’une grossesse s’accompagne de 7% de malformations… Dans les cas où il est difficile de vacciner (doute pendant une grossesse), le dosage des anticorps avec un taux anticorps anti-rubéole à plus de 1,8 permet de conclure à une immunité et d’éviter ainsi la vaccination. Il n’est pas nécessaire de revacciner.
Attention
S’assurer que la patiente n’est pas enceinte au moment de la vaccination contre la rubéole, et l’avertir de pratiquer une contraception efficace pendant les trois mois qui suivent cette vaccination : il s’agit d’un vaccin vivant.
Grippe
Chez les patients de plus de 65 ans atteints de maladie pulmonaire chronique MPOC (ou COPD pour chronic obstructive pulmonary disease), la grippe s’accompagne de 15% de complications (mortalité, infection des voies aériennes, décompensation cardiaque). Le vaccin entraîne une diminution de 50% des complications chez les personnes vaccinées (NNT 13). Le bénéfice est également démontré pour les personnes plus jeunes, avec une diminution de 42% des journées de travail manquées 65 (NNT 2). 66
Sur plus de 25 000 personnes de plus de 65 ans suivies pendant 3 années d’épidémie, le vaccin (avec environ 50% de couverture vaccinale) diminue les hospitalisations pour pneumonie de 50% (NNT 240), pour infection respiratoire inférieure de 30% (NNT 97) ; il diminue également la mortalité de 50% (NNT 214). Le vaccin diminue l’absentéisme pour le personnel de santé. 67,68 Pratiqué chez les employés, il diminue la mortalité des résidents dans les maisons de retraite. 69 70
Pneumocoque
La vaccination contre le pneumocoque diminue de 50% l’incidence de la pneumonie à pneumocoques (NNT 250), mais pas l’incidence globale des pneumonies. Elle n’a pas d’influence clairement démontrée sur la mortalité. Elle est bien tolérée, et devrait être proposée aux personnes qui supporteraient mal une pneumonie à pneumocoques. On considère par analogie à d’autres vaccins que les patients devraient être revaccinés tous les 5 ans. 71 72
Une étude qui met en évidence que les fumeurs sont à risque très élevé de complications lors d’atteinte à pneumocoque remet en question les données accumulées sur le bénéfice de la vaccination dans ce groupe de patients. La surveillance des souches responsables d’atteinte invasive en Suisse montre que le vaccin 23-valent couvre 92,4% des souches, alors que le vaccin 7-valent n’en couvre que 56,4%. 73 74
Rougeole
Affection hautement contagieuse (pratiquement 100% de transmission), la rougeole entraîne 22,7% de complications, dont 0,1% d’encéphalites et 0,32% de décès. Une épidémie récente (aux Pays-Bas, 2451 cas) s’est accompagnée de 0,1% de mortalité, 0,2% d’encéphalites, 16,9% de complications diverses (pneumonies, hospitalisations). Elle a touché une population particulière : celle qui avait refusé toute vaccination. 75 76
Le vaccin entraîne 1-2 problèmes neurologiques pour 10 millions de vaccinations. Un rappel avant 12 ans est actuellement recommandé, 77 en raison de la fréquence de non-réponse après une seule injection. Le problème de la vaccination, malgré les objectifs de la collectivité (OMS) qui espère éradiquer cette maladie, 78 c’est que les individus refusent souvent la vaccination par peur d’effets secondaires. 79
Papillomavirus
Voir « Cancer du col de l'utérus » .
La consommation d'alcool est-elle à risque?
L’attitude actuelle est fortement influencée par de nouveaux outils concernant la consommation d’alcool. Le questionnaire AUDIT (« tableau 6 ») prend en compte aussi bien la consommation habituelle que l’attitude par rapport à l’alcool. Ce questionnaire identifie quatre catégories d’attitude par rapport à l’alcool :
- abstinence complète
- consommation limitée (femmes < 17 verres/sem ; hommes < 25 verres/sem), avec probablement un effet bénéfique sur le risque cardiovasculaire
- alcool à risque (risque élevé de passage à une dépendance et risque d’accident)
- alcoolisme (dépendance)
Le groupe « alcool à risque » est important, numériquement d’abord, et ensuite parce qu’il existe une intervention validée « l’intervention brève » qui s’adresse à cette catégorie de buveurs. Voir sous « Deuxième consultation » les interventions possibles.
On trouve le questionnaire AUDIT et les conseils pour l’utiliser correctement sur internet : http://whqlibdoc.who.int/hq/2001/WHO_MSD_MSB_01.6a.pdf
Une version française validée se trouve à l’adresse suivante : http://www.unige.ch/cyberdocuments/theses2003/AcciettoC/these_body.html
Pour l’évaluation de ce qu’est un « verre standard » voir la figure 2 dans la « Deuxième consultation »
tableau 6 : questionnaire audit pour la consommation d’alcool
Les rapports sexuels sont-ils protégés?
L’orientation sexuelle du patient ainsi que le nombre de ses partenaires méritent d’être précisés. Ce sujet, parfois délicat, est fréquemment négligé par les médecins, alors qu’il permet l’instauration d’un dialogue souvent efficace sur les mesures de prévention :
– Informer le patient sur les facteurs de risque liés à sa sexualité.
– Personnaliser l’information fournie (homosexualité, hétérosexualité, types de rapports : oraux, anaux).
– Insister sur le fait qu’il n’existe pas de situation « sûre » (l’hétérosexualité est souvent considérée à tort comme non dangereuse) et sur l’importance de l’utilisation systématique du préservatif.
Quelle est la probabilité d’ostéoporose?
Le capital osseux est le plus haut à l’âge de 20 ans. La prévention devrait donc consister à donner le maximum de calcium et à stimuler l’activité physique avant 20 ans pour tout le monde de manière systématique. Pour l’évaluation du problème «ostéoporose», l’attitude actuelle est parfois encore de demander systématiquement une minéralométrie. Ceci pose deux problèmes :
- Le remboursement de l’acte est souvent incomplet ou limité à certaines catégories de patients.
- Des études prospectives ont permis de démontrer que la valeur de densité n’est pas le seul facteur pronostic pour les fractures. D’autres facteurs non osseux sont tout aussi importants. Or ce sont les fractures qui posent problème, pas la diminution de la densité. Certains outils permettent d’évaluer soit la probabilité d’ostéoporose, soit la probabilité de fractures.
Les éléments qui permettent d’évaluer la probabilité d’ostéoporose se retrouvent ci-dessous (tableau 7).
tableau 7 : score prédictif d’ostéoporose à la minéralométrie
D’autres études ont mis en évidence les facteurs non minéralométriques prédictifs de fracture (tableau 8).
tableau 8 : score pour la prédiction de fractures à 5 ans
D’autres études identifient en plus des facteurs de risque de fracture liés aux médicaments (benzodiazépines, anti-épileptiques) et aux troubles de la vue. , 83 Ce risque est probablement lié directement au risque de chute. Vous trouverez sous « 84Deuxième consultation » des propositions de prise en charge, avec ou sans minéralométrie.
Score prédictif de risque de fracture sur ostéoporose
Score prédictif de fracture de hanche à 5 ans après la ménopause |
Informations peu ou pas utiles dans l’anamnèse
Existe-t-il des troubles mnésiques (personnes âgées) ?
Dans la plupart des cas, ce sont les patients ou leur famille qui posent cette question, inquiets à l’idée d’une maladie d’Alzheimer débutante. Entre 65 ans et 85 ans, l’incidence de cette affection passe de 3 à 47%. 85
L’intérêt d’un diagnostic précoce est limité par le peu d’efficacité réel des médicaments dans la vie de tous les jours. L’autonomie des patients n’est pas améliorée de manière sensible, la dégradation des fonctions cognitives n’est au mieux retardée que de quelques mois, l’évolution vers une maladie d’Alzheimer n’est pas modifiée. 86 En revanche, il est important de mettre en place un soutien de l’entourage. 87 88
Existe-t-il des hémorragies sous-arachnoïdiennes (HSA) dans la famille ?
Les familles au premier degré de patients ayant souffert d’HSA sont elles-mêmes à risque de souffrir de cette affection. Une étude portant sur 193 patients ayant souffert d’HSA semble démontrer que le bénéfice du dépistage de toute la famille est discutable. On trouve 18 anévrysmes, qui sont opérés. L’espérance de vie (calculée en fonction du risque connu dans la littérature de mourir d’un anévrysme) est augmentée de 0,9 année. Ce bénéfice est toutefois obtenu au prix de 19 années de fonction diminuée par personne opérée, en raison de l’importance des complications postopératoires. 89
2. L’examen clinique du check-up
L’examen physique n’a qu’un faible rendement dans le contexte d’un bilan de santé. Les conférences de consensus ne proposent que le dépistage de l’hypertension artérielle. Il est cependant probablement utile, même si le bénéfice n’est pas prouvé, d’examiner attentivement le patient pour rechercher :
– une hypertension artérielle (bénéfice prouvé)
– des ganglions (lymphome ?)
– des facteurs de risque pour le cancer de la peau (présence de nævi ?)
– une dysplasie muqueuse dans la cavité orale (pré-cancérose ?)
– des affections dentaires (gingivite ?, éducation au brossage des dents)
– des nodules au niveau des seins (dépistage du cancer du sein)
– un souffle cardiaque (sportifs ? prophylaxie antibiotique ? – voir ci-dessous)
– un anévrisme abdominal
– examen gynécologique ? (voir ci-dessus « Probabilité de cancer du col »)
– une anomalie testiculaire (séminotératome chez les moins de 35 ans ? Si palpation pathologique, pratiquer une échographie des testicules et demander un avis spécialisé)
– une mesure de l’IMC et du tour de taille
– La tension artérielle humérale est prise assis, après 15 minutes de repos. En cas de valeurs pathologiques, demander au patient de revenir à plusieurs reprises se faire prendre la tension. L’urgence de traiter une hypertension en aigu dépend des signes de gravité (angor, dyspnée, céphalées, état confusionnel). En cas de doute, faire un fond d’œil. Un œdème de la papille signe une encéphalopathie hypertensive et motive une admission en urgence à l’hôpital.
– L’intérêt d’une mesure de la TAH continue pendant 24 h – profil tensionnel – n’est pas encore établi en l’absence de données épidémiologiques suffisantes sur le rapport entre cet examen et une augmentation de la morbidité ou de la mortalité cardiovasculaire. Nous proposons cet examen dans les cas où un effet «blouse blanche» est fortement suspecté. La TAH prise à domicile par le patient est souvent utile.
– L’ auscultation cardiaque chez de jeunes sportifs peut amener à proposer une échographie. Une étude italienne a démontré le bénéfice d’exclure de la compétition les patients souffrant de cardiomyopathie hypertrophique afin de limiter le risque de mort subite liée à l’exercice. 90
– Le bénéfice de prescrire une prophylaxie antibiotique chez des patients avec valvulopathie n’a jamais été démontré par des études prospectives. Des données rétrospectives sérieuses mettent en doute l’utilité de prendre ce type de précaution avant traitement dentaire par exemple. Il n’est donc pas certain que la découverte d’un souffle chez une personne non sportive et asymptomatique doive systématiquement faire l’objet d’une échographie. 91
– Chez les patients de plus de 60 ans, si l’aorte abdominale est palpable, pratiquer une échographie ; si l’aorte a un diamètre de plus de 3 cm, demander un avis spécialisé. Le suivi annuel des patients avec un anévrysme de plus de 3 cm n’a pas changé la mortalité globale, mais a réduit la mortalité spécifique. Sur 5 ans, pour éviter un décès sur rupture de l’aorte, il faut faire une échographie chez 500 hommes > 65 ans fumeurs. S’il s’agit de non fumeurs (risque moins élevé), le chiffre est de 1 783. Ce risque est comparable chez les femmes de 80 ans et plus. 92 93
– Le toucher rectal (pour la détection d’un cancer de la prostate) a une sensibilité de 59% et une spécificité de 94%. Ce n’est donc pas un outil de dépistage valide, puisqu’il manque environ la moitié des cancers. Voir ci-dessous sous « PSA ». Moins de 10% des cancers colorectaux sont palpés au toucher rectal. 94
– Le périmètre abdominal (PA) est prédictif d’un syndrome métabolique, qui est un des éléments prédictifs de diabète. Les sujets masculins avec IMC > 30 + PA > 102 cm augmentent leur risque d’avoir un diabète de plus de deux fois. 95
3. Les examens paracliniques du check-up
L’utilité de la plupart des examens biologiques dans le cadre d’un check-up n’a pas été démontrée chez les patients asymptomatiques. Les dosages des lipides et de la glycémie permettent d’évaluer les risques de maladie cardiovasculaire ou de diabète.
- Lipides
- Glycémie
- Transaminases
- Mésusage d'alcool
- PSA (prostate specific antigen)
- Saturation de la transferrine
- Electrocardiogramme de repos
- Radiographie du thorax chez fumeurs
- Fonctions pulmonaires
- Minéralométrie
- Mammographie
- Coloscopie
- Détermination des facteurs de risque du cancer colorectal (CCR)
- Examens de dépistage alternatifs
- En cas de risque élevé de cancer colique d'après l’anamnèse personnelle ou familiale
- Surveillance après polypectomie ou CCR 165
Lipides
Les tables actuelles (SCORE ou Framingham) utilisent soit le cholestérol total seul, soit le rapport HDL/cholestérol total. Le dosage des LDL est délicat, cette valeur est le plus souvent calculée. LDL cholestérol = cholestérol total - HDL cholestérol - (0,45 x triglycérides totaux). Nous proposons un dosage du cholestérol total et des HDL.
Certains auteurs considèrent qu’il est inutile de doser les lipides sanguins avant 40 ans, car quelles que soient les valeurs, le risque sera en dessous du seuil d’intervention. D’autres estiment qu’il faut savoir le plus tôt possible quel est le risque d’un patient pour justifier des interventions notamment comportementales. La fréquence des contrôles ne répond pas à des critères objectifs.
Glycémie
Selon l’American Diabetes Association (ADA), le dosage de la glycémie doit être pratiqué tous les 3 ans chez toutes les personnes âgées de plus de 45 ans. Le dosage sera effectué plus tôt et plus souvent si : 96
– le patient est obèse (≥ 120% du poids idéal ou IMC ≥ 27)
– présence de diabète chez un parent du 1er degré
– le patient appartient à un groupe ethnique à risque (afro-américain, hispano-américain, Indiens d’Amérique)
– il existe une notion de diabète gestationnel ou d’enfant macrosome (> 4,5 kg)
– il existe une hypertension (plus de 140/90)
– le HDL cholestérol < 0,9 mmol/l (35 mg/dl) ou de triglycérides > 2,8 mmol/l (250 mg/dl
– il existe une intolérance au glucose (glycémie à jeun 5,9-6,9 mmol/l)
Certains auteurs estiment qu’il est plus simple d’utiliser l’hémoglobine glyquée (HbA1c) pour le dépistage du diabète, en utilisant une valeur seuil de 7%. En fait, ce test n’est pas très sensible puisqu’il manque 40% des diagnostics. Les promoteurs de cette stratégie de dépistage se basent sur le fait que les diabétiques avec glyquée en dessous de 7% non dépistés ne seraient de toute manière pas traités (but thérapeutique pour les diabétiques parfois considéré comme « atteindre une glyquée < 7% »). 97
Il faut cependant considérer que les prises en charge non médicamenteuses sont importantes dès les premiers stades du diabète, et que le diagnostic de diabète change l’attitude par rapport aux autres facteurs de risque. Pour ces raisons, nous pensons que le dosage de l’HbA1c ne doit pas faire partie de l’arsenal de dépistage du diabète.
Transaminases
Le dosage des transaminases n’est pas recommandé en routine en raison de son faible rendement. Une étude sur 19 877 soldats de l’US Air force n’a permis de détecter que 8 hépatites chroniques. Nous ne recommandons ce dosage que pour les patients qui ont une anamnèse à risque (transfusions, injections, tatouages et sexualité à risque). En plus de détecter une éventuelle atteinte hépatique, le dosage des transaminases a le mérite de sensibiliser les patients au risque encouru lors de pratiques à risques.
Mésusage d'alcool
Certains médecins utilisent des tests biologiques (dosages de la CDT et de la gamma-Gt, mesure du volume globulaire moyen MCV) pour dépister un alcoolisme (tableau 9). Ces tests ont cependant des limites importantes. En pratique, pour le dépistage, il vaut mieux se baser sur le questionnaire AUDIT.
tableau 9 : performances de différents tests biologiques pour le diagnostic d’alcoolisme.
Il faut considérer avec prudence les résultats de ces tests. Avec une probabilité d’alcoolisme de 20% (cabinet de médecine générale), un MCV élevé fait passer la probabilité d’alcoolisme de 20% à 58%. Si le MCV est normal, la probabilité est encore de 13%. Dans la situation d’une alcoolisation aiguë, la probabilité d’un alcoolisme chronique sera beaucoup plus élevée que 20%. Un test anormal permet alors pratiquement d’affirmer la présence d’une maladie alcoolique dans cette situation. 98
PSA (prostate specific antigen)
Une étude a randomisé 695 hommes (âge moyen 64 ans), avec espérance de vie de plus de 10 ans, entre prostatectomie et surveillance (watchful waiting) lors du diagnostic de cancer localisé de la prostate (T1b T1c T2) avec tumeur bien ou modérément bien différenciée. Une scintigraphie osseuse devait être négative (M0). La PSA était supérieure à 4 ng/ml (88%), la PSA moyenne était de 13 ng/ml. 99
Les résultats à 10 ans pour les patients ayant subi une prostatectomie versus pas de chirurgie sont les suivants :
– La mort par cancer de la prostate a été de 9,6% versus 14,9% (NNT19)
– La progression locale a été de 19,2% versus 44,3% (NNT4)
– La progression à distance a été de 15,2% versus 25,4% (NNT10)
Sur le même collectif, après 5 ans, les effets secondaires sont les suivants : 100
– Impuissance 80% versus 45% (NNH3)
– Incontinence 49% versus 21% (NNH4)
L’obstruction est moins fréquente dans le groupe opéré : 25% versus 44% (NNT6). L’état psychologique des deux groupes reste comparable. Pour éviter un mort par cancer de la prostate à 10 ans, il faut opérer 19 hommes. Environ six hommes opérés pour rien (pas de bénéfice sur la mortalité) souffriront d’impuissance. Idem pour l’incontinence. Il est probable que le bénéfice augmente avec la durée d’observation. Chaque chirurgien vous dira que pour lui, l’incontinence et l’impuissance sont des effets secondaires très rares.
Certains milieux recommandent un dépistage dès l’âge de 40 ans. Il semblerait que la valeur de PSA lors de ce premier dépistage prédise la probabilité de développer la maladie. Avec une PSA de base entre 0,7 et 2,5, le risque de cancer augmente de 10 fois (en comparaison avec une PSA < 0,7). Pour une valeur de base entre 2,5 et 4, le risque augmente de plus de 100 fois. 101
La stratégie « classique » de contrôle annuel à partir de 50 ans pourrait être moins efficace qu’un dosage entre 40 et 45 ans suivi d’un contrôle bisannuel entre 50 ans et 75 ans. Une valeur de PSA de 4-5 ng/ml est proposée comme seuil d’intervention (biopsies). Une augmentation de la PSA de moins de 1 ng/ml/an est rassurante. Lorsque l’espérance de vie à 10 ans est faible, il faut abandonner la surveillance, les ennuis dépassant les bénéfices. 102 103
Saturation de la transferrine
L’hémochromatose est une maladie autosomique récessive. Dans les pays européens (ouest et nord), la prévalence de l’atteinte homozygote est estimée entre 1/200 et 0,3/1000. 104 105
Environ 20-30% de ces patients souffriront de surcharge en fer. Un dosage de la saturation en transferrine après 30 ans pourrait être utile en fonction de la prévalence de cette affection. Une valeur de > 50% (femmes) ou > 60% (hommes) suggère fortement le diagnostic (sensibilité 92% spécificité 93%) 106
Un patient atteint de la maladie devrait être testé génétiquement. S’il a des enfants, et qu’il est homozygote pour C282Y, il faut tester l’épouse. Si elle est hétérozygote, il faut tester les enfants (80-100% des patients ont une mutation C282Y – cystéine changée en tyrosine). 107
Electrocardiogramme de repos
C’est un examen d’une utilité discutable. On pourrait le justifier si le patient n’en a jamais passé auparavant et s’il présente plus de 2 facteurs de risque cardiovasculaire. L’ECG serait utile pour évaluer le risque cardiovasculaire, selon l’étude de Framingham qui inclut l’hypertrophie ventriculaire gauche électrocardiographique dans les facteurs permettant de mesurer ce risque. D’autre part, on disposerait d’un comparatif en cas de problèmes par la suite.
Le test d’effort est inutile dans un contexte de check-up chez un patient asymptomatique. Sa principale utilité est de rassurer un patient anxieux, par exemple à la suite de la mort subite d’un proche. Un test d’effort tous les 5 ans pourrait se justifier chez un conducteur de collectivité (avion, bus). La valeur prédictive négative d’accidents coronariens est relativement bonne si le test d’effort est négatif cliniquement et électrocardiographiquement et si le test d’effort est maximal (fréquence maximale pour l’âge atteinte). Voir « 108 Docteur, j’ai des douleurs dans la poitrine ».
Radiographie du thorax chez fumeurs
Lorsque votre patient est asymptomatique (pas d’hémoptysie, pas de toux inhabituelle, pas de baisse de l’état général, pas de douleurs (métastases)), l’absence d’utilité de cet examen dans la prévention du cancer bronchique a été démontrée par plusieurs grandes études, et la plupart des associations médicales (American Thoracic Society) déconseillent de le pratiquer. Il est néanmoins probablement utile, même si cela n’est pas démontré, d’avoir une radiographie du thorax de base chez un tabagique chronique.
Des recherches sont en cours pour évaluer l’intérêt d’une scanographie thoracique annuelle (CT hélicoïdal, sans contraste, à « faible » irradiation) chez les fumeurs. Les problèmes de cette approche sont liés au fait que jusqu’à 70% des CT montrent des nodules non calcifiés, que plus de 95% de ces nodules sont bénins, que la mortalité pour une résection d’un nodule est de l’ordre de 3%, que la technologie est chère et irradiante et qu’on ne sait pas encore si la mortalité est diminuée par ce dépistage. Les études sur la radiographie du thorax ont montré que ce n’est pas parce qu’on démontre davantage de tumeurs localisées par une méthode de dépistage qu’on diminue la mortalité. 109 110
Fonctions pulmonaires
A tester si le patient consomme plus de 10 UPA (10 UPA = 1 paquet par jour pendant 10 ans ou 2 paquets par jour pendant 5 ans). Un fumeur sur quatre environ détruit ses poumons. En général, après 10 UPA, il est possible d’identifier les patients qui seront atteints. On sait que les fumeurs perdent chaque année en moyenne 100 à 130 ml de VEMS (volume expiratoire maximum seconde). Pour les non-fumeurs, la chute naturelle du VEMS est de 20 à 30 ml par année. La mise en évidence d’une atteinte fonctionnelle asymptomatique pourrait permettre de mieux motiver les patients à arrêter de fumer. 111
Minéralométrie
Avant de demander une minéralométrie, évaluer si le ou la patient(e) est cliniquement à risque (voir la détermination des facteurs de risque).
Mammographie
Voir ci-dessus « Probabilité de cancer du sein ».
Coloscopie
Le cancer colorectal (CCR) est une des rares tumeurs qui peut être prévenue par un dépistage. En Suisse, environ 4000 nouveaux cas de CCR sont diagnostiqués chaque année et près de 1600 patients décèdent de cette affection. 90% des patients diagnostiqués ont plus de 50 ans. La majorité des CCR se développe à partir de polypes sur une durée d’environ 10 ans. 112
Dans plus de 2/3 des cas, il s’agit d’adénomes souvent multiples (30 à 50%) dont la prévalence augmente avec l’âge (50% à 70 ans ). Dans la majorité des cas, les adénomes ont un diamètre de moins d’1 cm. Dans 36% des cas, il s’agit d’adénomes plans, ce qui rend leur dépistage difficile, même à la coloscopie. 113 114
Le dépistage par coloscopie doit s’adresser aux patients à risque en fonction : 115
– soit de l’anamnèse familiale ou des antécédents personnels
– soit simplement en raison de l’âge du patient 116
Détermination des facteurs de risque du cancer colorectal (CCR)
Avant de décider comment et quand pratiquer un dépistage, vous devez essayer de déterminer par l’anamnèse à quel groupe de risque appartient votre patient.
Nous proposons de poser les questions suivantes dès l’âge de 30 ans, puis tous les 5 ans en cas de risque élevé car le CCR peut apparaître déjà à cet âge :
– Avez-vous déjà été traité pour un CCR ou des polypes ?
– Souffrez-vous d’une maladie inflammatoire du côlon (MICI) ou d’une affection qui a nécessité une irradiation du pelvis ?
– Connaissez-vous un proche parent qui a présenté un CCR ou des polypes du côlon? S’agit-il d’un parent de premier ou second degré et à quel âge a-t-il eu ses problèmes digestifs ?
– Connaissez-vous un proche parent jeune qui a investigué pour une maladie héréditaire avec un CCR et une notion d’autres cancers inhabituels ?
Remarque
– Parents du 1er degré : père/mère, frère(s)/sœur(s), fil(s)/fille(s)
– Parents du 2e degré : grands-parents, oncle(s), tante(s), neveu(x), nièce(s)
– On définit un cancer inhabituel par les caractéristiques suivantes :
- un cancer qui survient chez un patient anormalement jeune
- l’apparition de tumeurs multiples dans le même organe, ou bilatérales dans des organes pairs
- l’apparition de plusieurs tumeurs primaires de type histologique différent
- une histoire familiale de cancers du même type chez un ou plusieurs parent du premier degré
- plus d’un cancer dans la famille
Si vous avez répondu « oui » à une de ces questions, votre patient présente un risque élevé de CCR ou de polypes ( voir « Cancer colorectal »).
Si vous avez répondu « non » à toutes ces questions, votre patient présente un risque moyen de développer un CCR ou des polypes. Ce groupe comprend la majorité des patients de plus de 50 ans asymptomatiques et sans facteurs de risque.
La décision de proposer un dépistage chez un patient de plus de 70 ans se base sur les comorbidités, l’espérance de vie (plus de 5 ans) et le risque personnel de CCR.
Sur le plan d’une perspective sociétale, toutes les méthodes de dépistage du CCR sont efficaces au niveau du rapport coût/bénéfice, mais nous proposons comme examen de dépistage de choix la coloscopie tous les 10 ans dès l’âge de 50 ans.
La coloscopie pratiquée comme examen de dépistage n’a pas fait l’objet d’études contrôlées randomisées, mais un faisceau d’arguments laisse penser qu’elle représente actuellement l’examen de dépistage de choix dans les pays industrialisés car :
- Les résultats d’études cas contrôles effectués à partir de la sigmoïdoscopie (rigide) avec polypectomie ont démontré une réduction de 66 % de la mortalité due au CCR de la zone examinée. 117
- La coloscopie avec polypectomie pratiquée chez des patients à fort risque d’adénomes a permis une réduction de l’incidence du CCR de 70 à 90%. 118
- La coloscopie de dépistage permet de mettre en évidence une prévalence d’adénomes deux fois plus importante que celle détectée par la sigmoïdoscopie. Dans plus de 50%, la coloscopie démontre des lésions qui ne seraient pas démontrées par la sigmoïdoscopie. 119 120
- Environ 40% des CCR se développent en amont de l’angle splénique, soit dans une zone inaccessible à la sigmoïdoscopie. De plus, 2/3 des patients avec CCR sont également porteurs de polypes situés dans une zone sus-jacente à l’angle splénique. 121
- Bien que 60% des cancers apparaissent au niveau du côlon gauche, plusieurs études ont démontré le déplacement au cours de ces 30 dernières années du cancer colique dans des zones plus proximales, particulièrement chez les femmes et pour le CCR cæcal. 122 123
La coloscopie pratiquée tous les 10 ans offre également d’autres avantages :
- une protection durable par rapport aux autres moyens de dépistage chez la majorité des patients, d’où augmentation de l’acceptabilité
- une méthode diagnostique et thérapeutique en une seule séance, d’où réduction des coûts indirects
- un examen généralement bien supporté comportant un minimum de risque majeur et un minimum de douleur, grâce une sédation adéquate ( 124midazolam ou propofol) qui augmente l’acceptabilité du geste. 125
Entre 50 et 54 ans, il faut faire une coloscopie chez 35 patients pour sauver une vie. Si le collectif est en bonne santé, ce chiffre (NNS – number needed to screen) se maintient jusqu’à 80 ans. En cas de polymorbidité, le NNS est moins intéressant (130 entre 50 et 54 ans). Ce n’est donc pas l’âge qui limite le bien fondé du dépistage mais l’état de santé du patient.
L’intervalle entre 2 coloscopies n’a pas fait l’objet d’études spécifiques, mais est un élément important dans le calcul du rapport coût/bénéfice du dépistage. L’incidence du CCR à 5 ans après une coloscopie normale est de 0% et celle d’adénome avec dysplasie avancée < 1% si la coloscopie a été effectuée dans de bonnes conditions. Dans une étude cas contrôles, la sigmoïdoscopie semble offrir une sécurité de 10 ans. 126 Par analogie, la coloscopie tous les 10 ans pourrait donc offrir une garantie suffisante 127 avec un rapport coût/ efficacité parfaitement superposable à d’autres techniques de dépistage (p. ex. cancer du sein ou du col). 128 129
Compte tenu de l’augmentation de la prévalence des CCR asymptomatiques et des adénomes avec dysplasie entre 50 à 60 ans, la réalisation d’une coloscopie unique à 60 ans pourrait également représenter une méthode de prévention raisonnable. 130
Normalement, si les polypes étaient les seuls responsables des CCR, on devrait observer la disparition complète du CCR chez les patients coloscopés chez qui soit on n’a pas trouvé de polypes, soit on a enlevé tous les polypes. Cette situation ne correspond pas à la réalité car :
- Il existe de rares cancers qui se développent très rapidement et sont l’exception.
- Un certain nombre de polypes échappent à la vigilance de l’endoscopeur (mauvaise préparation du côlon, localisation malaisée du polype, examen fait trop rapidement. La motivation du patient est importante (!) et le pouvoir de persuasion de l’endoscopeur également. 131
- Une mauvaise sédation peut rendre l’examen impossible chez un patient sensible.
Examens de dépistage alternatifs
La sigmoïdoscopie
Tous les 5 ans avec recherche de sang annuel dans les selles.
Ce type de dépistage est actuellement recommandé, surtout dans les régions où la coloscopie est difficile d’accès ou n’est pas remboursée comme examen de dépistage. La sigmoïdoscopie avec polypectomie réduit la mortalité du CCR. 132 Cependant ce type de surveillance malgré son coût primaire plus bas présente des inconvénients importants : 133
- une sigmoïdoscopie par rapport à une coloscopie manque pratiquement 65% des lésions significatives 134
- la préparation par lavement, souvent insuffisante, empêche la progression de l’endoscope et la détection des polypes 135
- la sigmoïdoscopie est souvent douloureuse et amène le patient à renoncer à la coloscopie par crainte de l’examen
Comme pour la coloscopie, l’intervalle idéal entre deux sigmoïdoscopies reste incertain. Un examen tous les 10 ans pourrait représenter également un intervalle acceptable. Une coloscopie doit impérativement suivre une sigmoïdoscopie en cas d’adénome de plus d’1 cm ou d’adénomes papillaire découvert à l’examen. 136 137
Dans les régions où l’accès à l’endoscopie est plus difficile, on pourrait également recommander une sigmoïdoscopie avec recherche de sang dans les selles à 50 ans, suivie d’une coloscopie (unique ?) à 60 ans. 138
La recherche de sang dans les selles par le Gaïac
Le Gaïac est la seule méthode de dépistage ayant fait l’objet d’études contrôlées randomisées. La recherche de sang dans les selles, suivie impérativement en cas de positivité – 1 test sur 3 – d’une coloscopie (le lavement baryté est un examen moins sensible) permet une diminution de la mortalité du CCR de 33%, soit d’un un tiers environ pendant 13 ans d’observation (NNS 339 pour prévenir un décès par CCR), 139 si le test est réhydraté et pratiqué annuellement. 140
Cette diminution passe de 15 à 18% si le test est pratiqué tous les 2 ans et non réhydraté. Il faut répéter annuellement le test pendant 10 ans pour discerner une réduction significative d’environ 20% de la mortalité attribuée au CCR. 141
La recherche de sang dans les selles représente toutefois une technique avec de nombreuses limites ; certains auteurs se proposent de l’abandonner. La sensibilité du test pratiqué à une seule reprise dans la détection du CCR 142 est de 30%, et de 92% en cas de répétition du test hydraté (spécificité respective de 90 et 98%). 143 Le diagnostic des adénomes, précurseurs des cancers, est médiocre. 144 145
Puisque 2% seulement des tests positifs signale un CCR, la majorité des patients avec un test positif sont inquiets inutilement. Les tests au Gaïac ont été abandonnés au profit des tests immunologiques, plus sensibles et plus spécifiques, mais qui n’ont jamais été validés dans une grande étude prospective randomisée.
Compte tenu de son manque de sensibilité dans la détection essentiellement des polypes, le lavement baryté en double contraste ne représente pas à notre avis une technique de dépistage adéquate. 146
La coloscopie virtuelle
Les techniques de colographie par scanographie (coloCT) et de résonance magnétique nucléaire évoluent rapidement. La sensibilité de ces techniques pour le dépistage des polypes de petite taille (< 1 cm) est incertaine.
147
Le coloCT a une sensibilité de 85% et une spécificité de 97% pour les polypes > 10 mm, une sensibilité de 70% et une spécificité de 93% pour ceux de 6 à 9 mm, et une sensibilité de 48% et une spécificité de 92 % pour ceux < 6 mm. Pour l’heure, cette méthode ne peut pas encore être recommandée comme dépistage car : 148
- elle présente un rapport coût efficacité qui reste incertain par rapport à la coloscopie 149
- l’attitude à l’égard des polypes < 1 cm n’est pas définie (coloscopie versus nouvel examen après une année ?)
- le rôle des polypes plans manqués (ad 36%) sur l’incidence du CCR n’est pas défini
- l’impact sur la survie de la découverte de lésions extra-digestives est incertain
- le risque lié à l’irradiation du patient n’est pas nul
- l’intervalle recommandé entre 2 examens n’est pas évalué
- le risque de l’examen (perforation), son acceptabilité (douleur à l’insufflation) et son coût doivent être évalués.
L’acceptabilité de la coloscopie virtuelle sera peut-être meilleure que celle de la coloscopie lorsque cette technique ne nécessitera plus de préparation par une purge, qui représente incontestablement l’étape la plus rébarbative de la coloscopie. 150
En cas de risque élevé de cancer colique d'après l’anamnèse personnelle ou familiale
- Le patient est connu pour un CCR ou des polypes
- Le patient est porteur d’une maladie inflammatoire du côlon (MICI) de type Crohn ou RCUH (recto-colite ulcéro-hémoragique) ou d’une affection qui a nécessité une irradiation du pelvis
- Le patient a un proche parent qui a présenté un CCR ou des polypes du côlon
- Il existe une notion dans la famille ou chez le patient de polypes multiples
- Le patient est porteur d’une mutation MYH (MAP – MYH-associated polypose)
Le patient est connu pour un CCR ou des polypes
Chez un patient connu pour un CCR, le risque de nouveau CCR (métachrone) est deux fois plus important, soit environ 3% en 5 ans. Le bénéfice sur la survie du suivi par la coloscopie est significatif. 151 Pour les polypes, la cadence des contrôles est guidée en fonction de la taille (< ou > 1 cm), du nombre (> 2) et du type histologique (composante papillaire dans 5 à 15% des cas de mauvais pronostic. Voir « 152tableau 11 ».
Le risque de caractéristiques histologiques avancées d’un polype (présence d’une dysplasie de haut grade ou > 25% de composant papillaire) augmente en fonction de sa taille (7 à 12% entre 5 à 10 mm ; 20% si > 1 cm). 153
Le patient est porteur d’une maladie inflammatoire du côlon (MICI) de type Crohn ou RCUH (recto-colite ulcéro-hémoragique) ou d’une affection qui a nécessité une irradiation du pelvis
Dans les MICI, le risque de CCR est important si la maladie est étendue (pancolite), évolue depuis plus 8 à 10 ans, et s’accompagne d’une cholangite sclérosante Voir « 154 tableau 10 ».
En cas de carcinome prostatique ou vésical irradié, le risque de développer un cancer rectal est plus élevé dans les 5 ans. Le risque lié à une d’irradiation du pelvis pour une autre raison (p. ex. maladie de Hodgkin dans l’adolescence) n’est pas connu mais possible. La présence d’une anastomose urétérocolique augmente l’incidence du CCR à proximité. 155 156
Le patient a un proche parent qui a présenté un CCR ou des polypes du côlon
Le risque de développer un CCR est doublé si un parent du premier degré est atteint de CCR, et 6 fois plus important en cas de nombreux parents de moins de 50 ans avec CCR. La cadence des coloscopies est guidée par le degré de parenté avec le patient porteur de CCR, et par l’âge au cours duquel il l’a développé. Une agrégation familiale peut être due au hasard, à une exposition familiale commune (habitudes alimentaires), à une prédisposition génétique ou à des à des interactions entre le hasard, l’environnement et les facteurs génétiques. 157
Le risque de CCR est donc lié à des antécédents particuliers soit chez votre patient, soit dans sa famille. Ces antécédents peuvent être un CCR ou un autre cancer d’un type particulier. On identifie de cette manière 2 types de situation à risque :
1. Le patient ne présente pas de cancer, mais on trouve des cancers particuliers chez plusieurs parents :
Trois parents atteints de l’un des cancers suivants : cancer colorectal, cancer de l’endomètre, cancer de l’intestin grêle, cancer des voies urinaires excrétrices.
- un des patients est apparenté au premier degré avec les autres
- deux générations successives sont atteintes
- un des cas est diagnostiqué < 50 ans
- une polypose familiale est exclue
- les diagnostics sont confirmés par un examen histopathologique
2. Votre patient présente un CCR inhabituel, avec ou sans présence de cancer(s) chez un membre de la famille :
- Un patient avec cancer colorectal < 50 ans
- Un patient avec cancer colorectal < 60 ans avec histologie suggestive (MSI)
- Un patient avec cancer colorectal + un des cancers apparentés
- Un patient avec cancer colorectal + parent avec cancer apparenté < 50 ans
- Un patient avec cancer colorectal + deux parents avec cancer apparenté
Cancers apparentés : côlon, rectum, intestin grêle, voies urinaires excrétrices (uretère, bassinet, estomac, ovaires, pancréas, voies biliaires, SNC (glioblastome dans le syndrome de Turcot ; adénomes ou carcinomes des glandes sébacées et kératoacanthomes (syndrome de Muir-Torre).
MSI : instabilité des microsatellites à l’histologie.
Si votre patient rentre dans une des deux situations ci-dessus, on considère qu’il s’agit d’un syndrome du cancer colorectal familial sans polypose (HNPCC – hereditary non polyposis colorectal carcinoma). La transmission se fait de manière autosomale dominante.
Les CCR sur HNPCC représentent 2 à 5% des cas de CCR. Les individus symptomatiques développent des CCR avec un risque cumulatif de 52% pour les femmes et de 69% chez les hommes (âge moyen du diagnostic de 48 ans).
Le CCR est souvent multiple et localisé dans le côlon droit. Les principales manifestations extra-coliques du syndrome HNPCC consistent en des cancers de l’endomètre (risque cumulatif de 40-60%), de l’estomac (10-15%), de l’ovaire (12%), des voies urinaires excrétrices (4%), des voies biliaires (2%) et de l’intestin grêle (< 5%). Le dépistage génétique est également disponible dans cette affection. L’identification d’un syndrome HNPCC dans une famille permet de concentrer les efforts de surveillance et de prévention sur les individus identifiés comme porteurs de la prédisposition. 158
La surveillance par coloscopie est efficace et permet de diminuer l’incidence de cancer du côlon et sa mortalité. Sur 252 sujets (groupe intervention 133 versus 119 contrôles) suivis pendant 15 ans, on a constaté l’apparition de 8 cancers dans le groupe « intervention » versus 19 (NNT 10), 0 versus 9 morts par cancer du côlon (NNT 13). 159
Il existe une notion dans la famille ou chez le patient de polypes multiples
Votre patient ou le proche parent présente à la coloscopie de très nombreux polypes. Il s’agit probablement d’une polypose familiale adénomateuse (FAP – familial adenomatous polyposis). La mutation (autosomale dominante) est présente à une fréquence de 1/20 000 individus et représente 1% des cancers du colon.
Le diagnostic se pose par la présence de 100 à 1000 polypes à la coloscopie. Le risque de développer un CCR de type FAP est de 100% avant 50 ans, avec un âge diagnostic moyen de 39 ans. Le dépistage de la polypose familiale adénomateuse (FAP) se fait par l’identification du gène responsable, localisé sur le bras long du chromosome 5 (mutation tronculaire dans la portion médiane du gène APC adenomatous polyposis coli). La présence de la mutation du gène APC est identifiée chez 80 à 90% des patients de famille à risque. 160
Dans la FAP, il existe également des maladies associées (carcinome de l’ampoule duodénale, papillaire de la thyroïde, carcinome gastrique et des médulloblastomes) qui justifient une surveillance. Dans les cas où le risque familial est très important et que le test est négatif, il faut pratiquer le suivi endoscopique habituel.
La polypose familiale adénomateuse atténuée (AFAP – attenuated familial adenomatous polyposis) est caractérisés par la présence de moins de 100 polypes avec une prédominance pour le côlon droit. L’apparition des polypes est souvent tardive (44 ans) avec un âge moyen d’apparition du CRC à 56 ans. Le risque de développer un CCR est de 70% à 65 ans. Il s’agit d’une mutation d’une des extrémités 3’ ou 5’ du gène APC du chromosome 5.
Le patient est porteur d’une mutation MYH (MAP – MYH-associated polypose)
Il s’agit d’une mutation autosomale récessive intéressant le gène MYH responsable des réparations du génome. Une mutation bi-allélique est rencontrée dans 15 à 30% des formes classiques de polypose sans mutation du gène APC.
Le patient présente généralement de 10 à 100 (ad 750) polypes, intéressant surtout le côlon gauche. l’âge d’apparition moyen est de 50 ans. Le risque de CCR sans polypose est fréquent mais pas évalué de manière précise. Les affections associées sont essentiellement les polypes gastriques, les carcinomes duodénaux, et les cancers du sein.
Surveillance après polypectomie ou CCR 165
En fonction des évidences discutées ci-dessus, nous proposons que les patients avec risque augmenté de CCR doivent bénéficier d’une surveillance ou d’un dépistage du CCR et des polypes selon les directives reportées dans les tableaux 10 et 11. Chaque surveillance doit être individualisée en fonction des autres affections du patient et de la probabilité de prolonger l’existence par le suivi endoscopique. 163-165
tableau 10: surveillance en cas d'antécédent personnel de polype ou de ccr
Chaque surveillance doit être individualisée en fonction des autres affections du patient et de la probabilité de prolonger l’existence par le suivi endoscopique (tableau 11).
Remarque
– la mesure du CEA tous les 6 mois pendant 3 ans est le seul examen proposé en routine
– controversé : scanner tous les ans pendant 3 ans chez les sujets à hauts risques (≥ stade II)
Si vous n’avez pas demandé d’examens, vous pouvez continuer avec la marche à suivre détaillée dans « Deuxième consultation ». Si vous avez demandé des examens, vous devez fixer un rendez-vous pour en parler avec votre patient.