Aucune acquisition nouvelle n'est venue modifier la prise en charge de la pancréatite aiguë ou chronique dans l'année écoulée. Nous citons ci-après les études originales ou les revues publiées ces douze derniers mois.
Une revue récente fait le point global sur la pancréatite aiguë nécrosante.1
Nous avons recommandé, lors des dernières acquisitions thérapeutiques, le recours à une antibiothérapie prophylactique lors de pancréatite aiguë nécrosante. Ce dernier sujet a fait l'objet d'une récente méta-analyse portant sur huit études randomisées dont il ressort que l'administration prophylactique d'antibiotiques permet en ef-fet de réduire la mortalité lors de pancréatite sévère.2 Dans une étude italienne comparant l'efficacité de l'imipénem et de la perfloxacine dans la prévention des infections en cas de pancréatite sévère, l'imipénem s'est révélé supérieur à la perfloxacine en termes de réduction du nombre d'infections mais n'a pas affecté le taux de mortalité.3
Comme l'année dernière, nous retenons l'indication à effectuer une cholangiographie rétrograde lors de pancréatite aiguë biliaire avec ictère obstructif ou signes de cholangite et lors de pancréatite biliaire sévère. Une étude italienne prospective a comparé l'effet de la cholangiographie rétrograde et du traitement conservateur chez 42 patients souffrant de pancréatite biliaire aiguë modérée à sévère.4 Il en ressort que la cholangiographie précoce (dans les 24 heures après l'admission) a conduit à l'aggravation de la pancréatite chez un seul patient (5%) alors que sept cas (33%) se sont aggravés dans le groupe traité conservativement. Dans les formes non sévères, l'attitude à adopter reste controversée. Hotz et Reber recommandent de considérer une intervention endoscopique si la pancréatite biliaire ne s'améliore pas dans les 24 à 36 heures après l'instauration du traitement conservateur.5
Une nouvelle étude bien conduite confirme l'absence d'effet bénéfique de l'octréotide dans le traitement de la pancréatite aiguë sévère. En effet, Uhl et ses collaborateurs démontrent dans une étude randomisée en double aveugle que l'octréotide n'apporte aucun bénéfice dans la stratégie thérapeutique de la pancréatite aiguë modérée à sévère.6Toutefois, la randomisation pouvait se faire jusqu'à 96 heures après le début des douleurs. Or, le pic de production des cytokines survient dans les 48 heures. Il est donc théoriquement possible que seule une administration précoce du médicament est efficace. Seule une étude prévoyant l'administration du médicament dans les 24 heures de l'admission permettrait de clore définitivement le chapitre de l'octréotide dans la pancréatite aiguë.
L'année dernière, nous mentionnions que la nutrition entérale était préférable à la nutrition parentérale car elle diminue le risque de complications septiques et améliore le score de gravité. La faisabilité en pratique quotidienne d'une alimentation entérale a fait l'objet d'une étude prospective chez 21 patients souffrant de pancréatite aiguë.7L'étude de Nakad montre en effet que la pose d'une sonde à double lumière s'est effectuée sans complications et sans effet secondaire majeur. On notera toutefois qu'il n'y a actuellement aucune donnée qui montre que ce type de soutien nutritionnel raccourcisse la durée de l'hospitalisation ou diminue la mortalité.
Le traitement de la pancréatite aiguë est conservateur (garder le patient à jeun, hydratation intraveineuse, administration d'une analgésie parentérale). Lors de pancréatite nécrosante prouvée par un angio-CT-scan hélicoïdal, une antibiothérapie prophylactique est indiquée. Si l'évolution est défavorable, une surinfection de la nécrose doit être recherchée par une ponction sous CT-scan avec cultures pour aérobes, anaérobes et champignons. Une surinfection nécessite un débridement chirurgical. Lors de pancréatite aiguë d'origine biliaire compliquée ou sévère, une cholangiographie rétrograde doit être effectuée dans les 24 à 48 h. Lors de pancréatite sévère, un apport calorique est indiqué et doit se faire par voie entérale (sonde jéjunale).
Le traitement des douleurs repose sur l'abstinence d'alcool et la prescription d'analgésiques.8 La prise en charge devrait être multidisciplinaire avec l'aide d'un spécialiste de la douleur et un consultant de psychologie médicale.
La prescription d'enzymes pancréatiques dans les douleurs liées à la pancréatite chronique est généralement inefficace.8 Toutefois, dans les for-mes idiopathiques ou précoces, un essai de prescription de tablettes non gastroprotégées peut être évalué. Par contre, la somatostatine ou son analogue, l'octréotide, n'ont pas de place dans le traitement des douleurs liées à la pancréatite chronique.9
Aucune nouvelle étude n'est venue modifier l'approche chirurgicale de la pancréatite chronique. Nous vous référons à une revue récente du sujet.10
Aucune nouvelle étude n'a paru sur ce sujet dans l'année écoulée. Lors de douleurs rebelles et en cas de sténose du canal de Wirsung ou de calcul intracanalaire, cette possibilité peut être envisagée. Deux revues et un éditorial font le point sur le sujet.11,12,13
Un bloc du plexus cliaque est beaucoup moins efficace pour contrôler les douleurs de la pancréatite chronique que les douleurs liées à un adénocarcinome du pancréas.8 Une étude prospective randomisée démontre que si l'on opte pour un bloc du plexus cliaque, les résultats sont meilleurs si la procédure est effectuée sous échoendoscopie que par tomodensitométrie axiale computérisée.14 Ces dernières années, plusieurs études non contrôlées ont obtenu de bons résultats avec la splanchnicectomie par thoracoscopie.15 Une nouvelle étude non contrôlée rapporte l'efficacité de ce traitement.16Des études prospectives randomisées sont souhaitables pour évaluer pleinement cette technique.
Le drainage endoscopique est devenu le traitement de choix des faux kystes lorsqu'ils sont accessibles à un tel traitement. Une étude prospective réunissant tous les patients adressés à un centre tertiaire pendant deux ans rapporte que le traitement était considéré comme possible chez un peu plus de la moitié du collectif (34 sur 66 patients).17Le taux de réussite initiale était de 71%, le taux de récidive de 7% et le taux de succès à long terme (suivi médian de 46 mois) de 62%.
Le traitement de la pancréatite chronique comprend l'abstinence d'alcool, la substitution d'enzymes pancréatiques lors de stéatorrhée et l'analgésie. Lors de douleurs rebelles à ce traitement conservateur, une pancréatographie rétrograde devrait être effectuée. Selon les résultats de cette dernière, un traitement chirurgical ou endoscopique doit être discuté. Lors de douleurs réfractaires, il peut également être utile de consulter un centre spécialisé dans la prise en charge des douleurs chroniques. Le traitement des faux kystes du pancréas est endoscopique lorsqu'ils sont accessibles à un tel traitement. Lors de pancréatite chronique idiopathique, une recherche des mutations du gène CFTR et du gène du trypsinogène cationique doit être discutée.