Les enfants qui descendent des survivants des explosions nucléaires d'août 1945 doivent faire l'objet d'une nouvelle étude visant à comprendre les effets à long terme de ces explosions. La recherche, qui a débuté en janvier, doit servir à détecter le début de maladies, tels les maladies cardiaques et le diabète, qui ont une faible probabilité de se manifester avant l'âge adulte (Nature 2001 ; 409 : 5).
La Radiation Effects Research Foundation (RERF), une organisation à but non lucratif que les Etats-Unis et le Japon financent conjointement, réalisera ce travail. La RERF possède des laboratoires à Hiroshima et à Nagasaki, les deux villes cibles des bombes atomiques larguées en août 1945.
A ce jour, la RERF n'a pas détecté d'effets génétiques à long terme au sein de la population dite F1, c'est-à-dire les quelque 80 000 enfants qui sont nés des survivants des attaques américaines entre 1946 et 1984. Mais ce résultat surprend certains scientifiques puisque les émissions radioactives sont connues pour exercer des effets puissants sur les animaux de laboratoire.
L'absence de détection pourrait venir des limites techniques des études elles-mêmes, avance Seymour Abrahamson, un généticien spécialiste de la mouche drosophile, de l'Université du Wisconsin Madison, qui est récemment devenu directeur de recherche de la RERF. «Nous en savons beaucoup plus aujourd'hui sur les maladies génétiques», dit-il.
La seule étude clinique systématique ayant eu lieu sur la population F1 a été effectuée entre 1948 et 1953. Ces études sont pour la plupart des observations que des médecins et des sages-femmes ont rapporté, notamment concernant les mort-nés et des anormalités apparentes chez les enfants âgés de moins d'un an.
Abrahamson indique que l'effet des radiations se révèlera peut-être avec des maladies génétiques à démarrage tardif et à déterminants multifactoriels, qui ne sont pas visibles chez l'enfant. «Nous devons fermer le cercle», commente-t-il, prédisant que cette étude devrait durer entre quatre et six années.
Du côté des sujets, certains s'opposent à cette étude car ils ont peur que le fait de trouver chez eux un effet génétique conduise à les discriminer. D'autres espèrent au contraire que la détection d'un lien entre radiation et mauvaise santé justifie des compensations gouvernementales. Cette année, la Cour japonaise a justement accordé des compensations que des plaignants réclamaient, estimant que leurs maladies résultent des bombardements d'août 1945. «Cette étude a des chances d'influencer de telles décisions de justice à l'avenir», indique Abrahamson.