Le secrétaire d'Etat britannique à la santé, Alan Milburn, a annoncé, lors d'une allocution adressée au «Royal College of Physicians», le 28 février, prendre pour cible des inégalités en matière de santé. Il souhaite diminuer le taux de mortalité infantile et réduire le nombre de décès précoces d'adultes dans les régions les plus pauvres du Royaume-Uni (Lancet 2001 ; 357 : 782).L'espérance de vie a augmenté au Royaume-Uni au cours du siècle passé mais, selon Milburn, cette amélioration cache l'écart grandissant entre les perspectives de santé des personnes les plus pauvres et celles des plus riches. Les enfants de moins d'un an constituent la première cible du gouvernement, qui veut réduire de 10% l'écart entre la mortalité infantile entre les populations de travailleurs manuels et le reste de la population. «Nous prévoyons que le taux de mortalité infantile descende pour la première fois sous les cinq morts pour mille naissances d'enfants nés vivants d'ici 2006», a indiqué Milburn.Milburn a expliqué que cet engagement serait atteint par de «larges actions» déjà en place et des programmes de soins spécifiques tels que : aider les femmes enceintes à ne pas fumer ; étendre l'assistance post-natale aux mères ; augmenter l'investissement en soins intensifs pour les nouveau-nés ; former et engager plus d'infirmiers, de sages-femmes et de personnes qui rendent visite aux malades.Ces mesures feront partie d'un programme-cadre national qui donnera de nouveaux standards pour les services aux enfants, a indiqué Milburn. La deuxième cible, à savoir la réduction du nombre de décès précoces d'adultes dans les régions les plus pauvres du Royaume-Uni, sera visée par des actions plus focalisées sur les maladies coronaires, le tabagisme, l'alimentation par des actions faisant en sorte que 80 000 enfants puissent manger un morceau de fruit chaque jour, ainsi que de nouveaux programmes de diagnostics.Milburn reprend le flambeau là où son prédécesseur, Frank Dobson, s'était arrêté. Lorsque le gouvernement travailliste est arrivé au pouvoir en 1997, Dobson a demandé à Donald Acheson, précédemment Chief Medical Officer, d'évaluer les tendances majeures des inégalités en matière de santé au Royaume-Uni, et de proposer des recommandations pour réduire les écarts de santé entre les plus riches et les plus pauvres.Adam Oliver, spécialiste des questions de santé à la London School of Economics, n'est pas sûr que les interventions de Milburn atteindront les effets désirés. «Les éléments de politique publique dont on dispose pour conduire à une réduction des inégalités en matière de santé sont ténus. Malgré tout, certaines choses sont intuitivement désirables, qu'elles soient ou non efficaces pour réduire les inégalités en matière de santé ; sortir les enfants de la pauvreté est l'une d'entre elles», commente Oliver.Alison Macfarlane, de l'unité nationale d'épidémiologie périnatale de l'Institut des sciences de la santé, à Oxford, au Royaume-Uni, est d'accord avec Oliver, mais prévient que «la cible (du taux de mortalité infantile) occulte complètement le groupe qui connaît la plus forte mortalité : les bébés mis au monde par des mères seules». Elle accueille toutefois très bien cette stratégie mais indique que «l'impact sur la mortalité infantile ne sera pas clair car elle diminuera probablement de toute façon. Les inégalités chez les bébés au cours du premier mois de la vie rétrécissent depuis le début des années 80, ce qui conduit à s'interroger sur l'intérêt de les inclure dans la cible», a-t-elle ajouté.Il reste donc à savoir si ces cibles seront atteintes ou non. Oliver note que «le délai entre l'introduction d'une politique publique visant à réduire des inégalités en matière de santé et les premières preuves de ses effets est un sujet âprement débattu. La plupart des gens pensent que ce délai est considérable et dépasse largement les échéances politiques. Des mesures d'approximations devront donc obligatoirement être utilisées.»