Nous achevons ici l'exposé du rapport rédigé à la suite de la conférence de consensus organisée sur ce thème en France par l'Agence nationale d'accréditation et d'évaluation en santé (Anaes) sur la nouvelle donne thérapeutique de l'infection par le virus de l'hépatite C (VHC) (Médecine et Hygiène des 10, 17 et 24 avril). Après avoir situé les données épidémiologiques, les personnes devant être traitées et les meilleures stratégies thérapeutiques, les experts ont abordé la question de la surveillance des malades traités du triple point de vue de l'efficacité du traitement, de sa tolérance et de la qualité de vie des malades. «Outre la consultation spécialisée régulière, un accompagnement de proximité, idéalement assuré par le médecin généraliste, est essentiel compte tenu des particularités de l'infection chronique par le VHC et de son traitement, peut-on lire dans le rapport de l'Anaes. Une consultation au moins mensuelle avec le médecin généraliste est indispensable, son rôle ne se réduisant pas à une simple surveillance biologique.»I Evaluation de l'efficacité du traitement. Il faut savoir qu'en l'absence de symptômes cliniques, la surveillance de l'efficacité repose sur les critères biochimiques, virologiques et histologiques. Chez le malade ayant initialement des transaminases élevées, leur normalisation ou leur diminution est un critère d'efficacité en cours de traitement et après son arrêt. Ce dosage doit être effectué tous les mois en cours de traitement, et tous les deux mois au cours des six mois qui suivent son arrêt. Quel que soit le génotype de l'agent pathogène, la réponse virologique (disparition de l'ARN viral) doit être évaluée à la fin du traitement et six mois après son arrêt par une technique qualitative sensible (PCR ou technique équivalente). «En cas de disparition cela correspond, dans la très grande majorité des cas, à une guérison définitive, soulignent les experts. Une recherche qualitative de l'ARN viral peut être proposée 12 à 24 mois après la fin du traitement, pour dépister les exceptionnelles rechutes tardives.»Pour ce qui est du suivi histologique, une ponction biopsie hépatique n'est utile, en cas d'échec virologique, que si l'évaluation histologique est susceptible de modifier la prise en charge. Dans l'avenir, des tests non invasifs d'évaluation de la fibrose pourraient être utilisés pour le suivi des malades. Ces tests devront toutefois être validés avant d'être proposés en pratique.I Evaluation de la tolérance au traitement. Les experts rappellent que les effets indésirables des traitements antiviraux sont ici dose-dépendants et souvent réversibles. Ils peuvent conduire à une réduction de dose ou à un arrêt prématuré du médicament en cause. Pour ce qui est des interférons, certains effets indésirables, quoique compatibles avec la poursuite du traitement, sont fréquents et altèrent la qualité de vie : syndrome pseudo-grippal (fièvre, frissons, céphalées, courbatures, etc.), fatigue, anorexie, perte de poids, diarrhées, rashs cutanés, alopécie, inflammation au point d'injection. Précisons que le syndrome pseudo-grippal peut être prévenu par une prise de paracétamol contemporaine de l'injection (sans dépasser 3 g par jour) ou, en cas d'inefficacité, de dextropropoxyphène ou d'ibuprofène (en l'absence de cirrhose pour ce dernier). «Les effets secondaires psychiatriques sont parmi les plus graves. Ils peuvent aller d'une irritabilité ou d'une instabilité de l'humeur à un syndrome dépressif sévère (un tiers des patients), peut-on lire dans le rapport de l'Anaes. La poursuite du traitement associée à la prescription d'antidépresseur doit être discutée au cas par cas après avis spécialisé, en fonction des symptômes psychiatriques, de la sévérité de l'atteinte hépatique et des facteurs prédictifs de réponse au traitement antiviral.»Les complications thyroïdiennes à type d'hyper ou d'hypothyroïdie sont fréquentes, nécessitant un dosage de la TSH tous les trois mois en règle générale, et une fois par mois en cas d'anomalies préexistantes. Les effets indésirables hématologiques, neutropénie et thrombopénie, peuvent survenir très rapidement après le début du traitement. Ils sont plus marqués avec l'IFN pégylé qu'avec l'IFN standard. La stabilisation du nombre des plaquettes est souvent rapide, mais la neutropénie peut s'accentuer tout au long du traitement. La survenue de complications hématologiques est plus fréquente chez les patients ayant une neutropénie ou une thrombopénie préexistante, notamment en cas de cirrhose. Ces effets indésirables nécessitent une surveillance de l'hémogramme, deux fois le premier mois, puis une fois par mois pendant toute la durée du traitement. Des études complémentaires sont nécessaires afin d'évaluer l'intérêt des facteurs de croissance hématopoïétiques pour pallier ces effets indésirables.Pour ce qui est de la ribavirine, la principale complication est la survenue d'une anémie hémolytique qui justifie une surveillance régulière de l'hémogramme, à la même fréquence que pour les IFN. La ribavirine est également responsable de nausées, de sécheresse cutanée, de prurit, de toux et d'hyperuricémie. Elle est formellement contre-indiquée chez la femme enceinte en raison de son pouvoir tératogène. Une contraception des deux partenaires est dès lors recommandée pendant le traitement et la contraception doit être poursuivie pendant quatre mois après arrêt de la ribavirine en cas de traitement chez une femme et sept mois chez un homme.I Prise en compte de la qualité de vie des personnes traitées. «Il est indispensable d'informer le malade et son entourage du retentissement du traitement de l'infection par le VHC sur la qualité de vie : vie personnelle, familiale, sociale, professionnelle, expliquent les experts de l'Anaes. Des conseils d'hygiène de vie seront donnés régulièrement (hydratation suffisante, activité physique, conseils diététiques, etc.). Une surveillance des symptômes psychiatriques (notamment les idées suicidaires) et de la fatigue est recommandée par une écoute attentive de tous les intervenants.»Les experts notent d'autre part que les troubles de l'humeur ou de la libido peuvent faire l'objet de consultations impliquant les proches. Les réseaux de soins et les associations de malades doivent selon eux jouer un rôle important dans le soutien des patients traités. Des actions de formation sont encouragées pour la mise en place et le renforcement de tels réseaux impliquant des intervenants de différentes origines (médecins généralistes, hépato-gastro-entérologues, infirmier(e)s, psychologues, travailleurs sociaux, etc.). L'éducation à l'auto-injection est un facteur important pour l'autonomie des patients. Cependant, certains d'entre eux peuvent préférer avoir recours à un(e) infirmier(e) pour l'administration de leur traitement. Enfin, l'intégration de la mesure de la qualité de vie dans tous les essais thérapeutiques sur l'infection par le VHC est recommandée.