«Un petit verre, c'est bon pour la santé.» Vraiment ? Des chercheurs de l'Institut suisse de prévention de l'alcoolisme et autres toxicomanies (ISPA) et de l'Institut de recherche sur les addictions à Zurich ont tenté de vérifier la portée et l'exactitude de cette affirmation, qui est controversée jusque dans les cercles de spécialistes. Leur méta-analyse de 59 études sur la mortalité due à l'alcool (Contemporary Drug Problems, 2001 ; 28 : 337-61) montre que l'affirmation n'est vraie qu'à partir de 45 ans, que l'alcool ne contribue à prévenir que certaines maladies cardiaques et non toutes, enfin que le «petit verre» optimal est bel et bien petit : environ 10 grammes d'alcool par jour pour les femmes (soit 1 dl de vin, 3 dl de bière ou 3 cl de spiritueux), un peu moins du double pour les hommes.Ainsi, si l'affirmation initiale semble valide dans certains cas, elle cesse de l'être si la consommation dépasse les quantités indiquées ou si le buveur est jeune. Chez les hommes de moins de 45 ans les données manquent pour les femmes , la consommation d'alcool, même minime, n'apporte aucun bénéfice en termes d'espérance de vie. Les chercheurs proposent de partir du principe que la mortalité croît de façon régulière avec la consommation dans cette tranche d'âge, notamment en raison d'une augmentation du risque d'accidents, de suicides ou de violences.Le directeur de l'ISPA, Richard Müller, voit dans ces résultats une démonstration des difficultés de la prévention : «On peut tout à fait inciter la population à boire modérément afin de réduire le nombre de décès liés à un problème cardiaque, mais si les jeunes prenaient ce conseil au mot, il est prouvé que leur taux de mortalité générale augmenterait. C'est pourquoi les messages véhiculés dans le cadre de la prévention doivent s'adresser à des groupes cibles distincts.»