La chirurgie laparoscopique poursuit son développement en urologie. Désormais dans le domaine de l'onco-urologie, les premières données sont disponibles et montrent qu'à court et moyen terme, les interventions laparoscopiques faites sur des organes de l'appareil urinaire atteint de carcinome ne remettent pas en cause la «sécurité oncologique».La palette des traitements de la dysfonction érectile s'étoffe de nouvelles molécules qui sans différer quant à leur efficacité diffèrent toutefois un peu par l'incidence de leurs effets secondaires et surtout par leur durée d'action.
Il se confirme qu'en 2002, la laparoscopie prend de plus en plus de place en chirurgie urologique, y compris en chirurgie uro-oncologique. Les avantages de cette technique chirurgicale mini-invasive sont évidents en terme de morbidité péri-opératoire, de pertes sanguines, de douleurs postopératoires, de durées d'hospitalisation et de convalescence. La sécurité oncologique reste bien entendu la priorité absolue. L'équipe du Dr Clayman, pionnier de la néphrectomie par voie laparoscopique, a publié des résultats à long terme pour ce qui concerne la néphrectomie radicale pour adénocarcinome du rein. A cinq ans, les taux de survie sans récidive sont respectivement de 92% et de 91% pour la néphrectomie radicale par laparoscopie et par voie ouverte conventionnelle.1 Ces chiffres sont d'autant plus intéressants qu'ils regroupent l'expérience depuis leurs débuts de trois groupes aux Etats-Unis, comprenant donc également leurs tout premiers cas. On peut donc conclure que, premièrement la néphrectomie par laparoscopie est sûre du point de vue oncologique, et deuxièmement que la courbe d'apprentissage inhérente à chaque nouvelle technique n'a pas de retentissement sur les résultats oncologiques si le chirurgien qui effectue ces interventions, qui restent toutefois difficiles, a suivi la formation nécessaire. Une tumeur limitée au rein de stade T1 (jusqu'à 7 cm) et la plupart des tumeurs de stade T2 (limitées au rein, mais plus grandes que 7 cm) constituent donc d'excellentes indications à des techniques laparoscopiques, qu'elles soient trans-péritonéales ou rétro-péritonéales, à la préférence du chirurgien.
Certaines tumeurs rénales permettent d'envisager une néphrectomie partielle. Ces interventions peuvent également parfaitement être réalisées par une voie d'abord mini-invasive.2 De nombreux travaux ont également été publiés sur le traitement laparoscopique des tumeurs urothéliales de la voie urinaire supérieure. Dans ces situations rares où, en plus du rein, l'uretère dans sa totalité doit être enlevé, la laparoscopie se fait progressivement sa place, bien qu'actuellement la chirurgie ouverte reste le traitement de choix.3
Le traitement chirurgical de la maladie de la jonction pyélo-urétérale, à savoir résection partielle du bassinet et anastomose entre le bassinet restant et l'uretère, qui avait tendance ces dernières années a être remplacé par des techniques endoscopiques moins invasives mais également nettement moins efficaces, revient en force grâce à la laparoscopie. Ses résultats entre des mains entraînées sont excellents, comparables aux meilleures séries de chirurgie ouverte, puisque plus de 90% des patients sont guéris de leur obstruction.4 De plus, cette technique permet si nécessaire d'explorer les cavités excrétrices et d'éliminer dans le même temps opératoire les éventuels calculs qui compliquent souvent cette affection, comme on le fait en chirurgie ouverte.5
Même le traitement de la lithiase rénale ou urétérale est remis en question par la laparoscopie. Dans ces situations toutefois, les traitements mini-invasifs que sont la lithotripsie par ondes de choc extracorporelle, l'urétéroscopie, et la néphrolithotomie percutanée restent les traitements de première intention selon la taille et l'emplacement du ou des calculs. La laparoscopie ne remplacera pas ces méthodes efficaces, mais viendra certainement élargir la palette des options thérapeutiques dans certaines situations particulières.6
La prostatectomie radicale par voie laparoscopique prend également de plus en plus d'importance. Elle est pratiquée de routine comme traitement chirurgical de première intention des tumeurs localisées de la prostate dans de nombreux centres. L'équipe de l'Institut mutualiste Montsouris à Paris, qui a standardisé cette technique et l'a introduite de routine depuis 1998, a à ce jour effectué plus de 1000 interventions. Actuellement, avec le recul à disposition, les résultats oncologiques sont parfaitement identiques aux meilleures séries de chirurgie ouverte conventionnelle.7 Leurs résultats fonctionnels sont encourageants puisque 82,3% des patients sont parfaitement continents un an après l'intervention, et dans un collectif sélectionné, 66% ont des érections permettant des rapports sexuels spontanés avec pénétration. Cette technique effectuée par une voie d'abord trans-péritonéale reste pour l'instant le traitement de référence en chirurgie laparoscopique, le taux de complications liées à l'abord trans-péritonéal restant très faible.8 Certaines équipes développent des techniques laparoscopiques purement extra-péritonéales.9 Le recul à disposition et les papiers publiés jusqu'à présent sont insuffisants pour juger si oncologiquement et fonctionnellement, cette technique égale voire surpasse la voie d'abord trans-péritonéale.
Quant à la cysto-prostatectomie radicale pour tumeur invasive de la vessie, l'intérêt et la sécurité oncologique de la laparoscopie restent à démontrer. Elle est techniquement parfaitement réalisable, et lorsque la situation oncologique le permet, la vessie iléale de remplacement peut également être effectuée soit totalement laparoscopiquement,10 soit partiellement par une mini-laparotomie qui permet de sortir la pièce opératoire et en plus d'avoir la plus grande sécurité possible pour la confection de l'anastomose intestinale.11
En terme de coûts, deux études semblent montrer un avantage de la laparoscopie par rapport à la chirurgie ouverte, en tout cas pour ce qui concerne la néphrectomie.12,13 Les facteurs clés des coûts sont la durée du temps opératoire, l'instrumentation spécifique à la laparoscopie, et la durée du séjour hospitalier.12 Il existe clairement une période d'apprentissage rendant ces interventions plus onéreuses au début. Avec l'augmentation de l'expérience du chirurgien, le temps opératoire et la durée des séjours hospitaliers diminuent, permettant ainsi de restreindre les coûts de l'ordre de 12% pour une intervention comme la néphrectomie.13 Ces études ne tiennent pas compte des économies réalisées grâce à la diminution de l'incapacité de travail qui sont difficilement chiffrables.
Alors, la chirurgie ouverte a-t-elle encore un avenir en urologie ? Bien entendu certaines situations demanderont probablement toujours une large exposition du champ opératoire et l'utilisation des mains qui fait parfois tant défaut en chirurgie laparoscopique. L'augmentation des performances des chirurgiens et les progrès de l'équipement endoscopique font de la laparoscopie la technique du futur. Il n'y a virtuellement pas de limite au développement de cette technique, à l'exception peut-être de la nécessité d'un long training, qui représente pour les chirurgiens un investissement considérable. Dans le futur, le laparoscopeur sera encore aidé par des outils comme la robotique voire la modélisation en trois dimensions.
Dans le domaine du traitement de la dysfonction érectile, en 2002 le sildénafil (Viagra®) qui jusque-là jouissait d'une position dominante sur le marché helvétique dans le domaine des traitements de la dysfonction érectile, actifs par voie orale, a vu arriver l'apomorphine (Uprima®). Agissant au niveau cérébral, en prise sublinguale, dans les vingt minutes qui suivent sa prise et durant deux heures, elle a une efficacité de l'ordre de 50%. Ses effets secondaires sont connus : nausées, 6,8% ; céphalées, 6,7% et vertiges, 4,4%. L'incidence des nausées diminue voire disparaît après la huitième prise. 2,3% des utilisateurs de l'apomorphine renoncent au traitement en raison des effets secondaires.14 Les patients souffrant de troubles érectiles psychogènes ou psychogènes associés à une atteinte organique modérée sont ceux qui sont susceptibles d'en bénéficier.
Deux autres concurrents sérieux pour le sildénafil vont arriver sur le marché helvétique ces prochains mois : le vardanafil et le tadalafil. La concurrence risque d'être rude car pour l'industrie pharmaceutique ce «marché» de l'impuissance génère un chiffre d'affaires considérable (1,5 milliard de dollars pour le Viagra® en 2001 !). On estime actuellement qu'à travers le monde plus de 100 millions d'hommes souffrent à divers degrés de troubles de l'érection et que seuls 20% sont traités !
Le tableau 1 rapporte les caractéristiques de ces trois inhibiteurs de la 5-phosphodiestérase, actifs au niveau des muscles lisses intracaverneux, en prise per os.15-20
L'efficacité de ces trois molécules semble a première vue être comparable. L'incidence des effets secondaires est également assez voisine. Par quoi diffèrent-ils finalement ? La première différence est l'influence de la nourriture et de l'alcool sur leur efficacité. Alors que l'absorption du sildénafil est retardée et diminuée par un repas riche en graisse ou par l'alcool, celle du vardanafil et du tadalafil ne l'est que très peu, voire pas du tout. La seconde est leur durée d'action. La longue durée d'action du tadalafil (24 à 36 heures) semble à première vue être un avantage par rapport à celle du vardanafil et du tadalafil (environ 4 heures). En effet, l'expérience clinique montre qu'à moins d'avoir une vie sexuelle réglée comme du papier de musique, la planification d'une soirée n'est pas toujours facile : entre le moment où l'on ingère le médicament et celui où il est efficace, il arrive que la partenaire s'endorme et que quelques heures plus tard lorsqu'elle se réveille, l'effet chez son compagnon est passé. Il est utile de rappeler que la durée moyenne d'un rapport sexuel est de 30 minutes.21 Le tadalafil, qui agit sur une période de 24 heures voire même jusqu'à 36 heures, offre une fenêtre «d'opportunité» plus grande, restaurant ainsi, partiellement du moins, le caractère spontané de l'activité sexuelle. Si cela peut représenter un avantage pour certains patients, chez d'autres cela risque de poser certains problèmes. Rappelons qu'en cas d'accident cardiaque chez un consommateur de sildénafil, toute administration de dérivés nitrés est à proscrire durant les 24 heures qui suivent la prise de sildénafil. Avec une demi-vie de 17 à 21 heures pour le tadalafil, cette interdiction couvre sur une période beaucoup plus longue : deux à trois jours.
La prescription d'inhibiteurs de la 5-phosphodiestérase ne saurait se passer de conseils. Il faut répéter au patient que la consommation d'alcool devrait être évitée et que le sildénafil devrait être pris à jeun ou après un repas léger, pauvre en graisse, créant ainsi les conditions optimales pour une meilleure absorption. Il faut insister sur le fait que sans stimulation adéquate, les inhibiteurs de la 5-phosphodiestérase restent inefficaces, ce qui n'est pas le cas des injections intracaverneuses où l'érection survient dans les dix minutes en l'absence même de toute stimulation. Le sildénafil est disponible sous trois dosages : 25, 50 et 100 mg. Les taux de réponses varient en fonction du dosage : plus de 60% à 25 mg, plus de 75% à 50 mg et 80% à 100 mg. En cas d'inefficacité, il faut augmenter la dose jusqu'à 100 mg et également répéter les tentatives avant de conclure à l'inefficacité.
La dysfonction érectile est encore l'objet de nombreuses fausses croyances : la plus grave est celle selon laquelle elle serait dans la plupart des cas d'origine psychologique. Plus dramatique encore, en 2002, est le fait que beaucoup de gens persistent à croire, que les hommes qui prennent du sildénafil ne le font que pour améliorer leur performance et pourraient parfaitement s'en passer.
Depuis des années, des études scientifiques sérieuses montrent que dans la plupart des cas, la dysfonction érectile a une origine organique, à laquelle s'ajoute secondairement des troubles psychologiques (angoisse de performance).22,23
Au récent congrès de l'American Urological Association, il a été rapporté que la dysfonction érectile est une des manifestations de la dysfonction endothéliale de l'athérosclérose. Ainsi, jusqu'à trois patients sur quatre admis dans une unité de soins intensifs pour infarctus ou crise angoreuse, âgés de plus de 60 ans, présentaient en moyenne 53,4 mois auparavant, des troubles de l'érection. L'expérimentation animale avait déjà montré que chez le lapin souffrant d'hypercholestérolémie, l'endothélium intracaverneux présentait des altérations importantes. Cet endothélium joue un rôle clé dans la physiologie de l'érection. Cela établit un lien physiopathologique entre les anomalies cardiovasculaires et les insuffisances érectiles. La dysfonction érectile, n'en déplaise encore à certains esprits qui ont tendance à la banaliser, serait ainsi un signal d'alerte précoce d'une pathologie cardiovasculaire.
Nous avons déjà rappelé les répercussions psychologiques que cette maladie entraînait chez l'homme, la femme et au sein du couple. Dans son numéro de septembre 2002, traitant des liens entre l'homme et son pénis, la revue française Psychologie rappelait que certains hommes se suicident en raison d'une dysfonction érectile ce que ne font jamais des femmes atteintes de frigidité.
De nos jours, malgré des moyens thérapeutiques efficaces, nombre de patients qui souffrent de troubles érectiles et qui souhaiteraient être traités, ne le sont pas. Le propos ici n'est pas de paraphraser la célèbre phrase du Dr Knock : «dans tout bien portant il y a un impuissant qui s'ignore». Il nous semble qu'en ce troisième millénaire, tout patient impuissant qui demande de l'aide devrait recevoir cette aide de la part du corps médical.