Selon leurs gènes respectifs, la femme est la gardienne du nid, l'homme est un chasseur.
Selon cette logique, le Conseil fédéral aurait dû décider de mettre Madame Calmy-Rey à l'Intérieur et Monsieur Couchepin à l'Extérieur. En faisant le contraire, il a fait preuve de modernité
«Acta est fabula». (La pièce est jouée, en trois actes)
La grande scène du premier a vu l'élection soigneusement préparée et bien programmée de Micheline Calmy-Rey, notre Cruella genevoise, en tant que conseillère fédérale.
Cruella : c'est vrai que l'on pourrait considérer que le surnom, malgré tout amical, donné à notre nouvelle conseillère fédérale genevoise par ses anciens collègues du Grand Conseil lui va à ravir, en particulier lorsque sa tenue se réfère à Stendhal et lorsqu'elle sourit. J'aurais préféré, quant à moi, Calmoduline : c'est plus joli et plus harmonieux, ça rappelle son nom de famille, et c'est le nom d'une protéine qui joue un rôle dans la contraction musculaire. Or, du muscle, Cruella-Calmoduline n'en manque pas. On aurait pu s'attendre à ce qu'elle reprenne le Département fédéral de l'Intérieur et qu'elle y fasse jouer sa musculature afin de mettre un peu d'ordre dans cette grande maison et de faire en sorte que l'on cesse de triturer et de maltraiter cette pauvre LAMal par des «révisionnettes» successives sans effet ou à effets contradictoires. Certes, Calmoduline aurait certainement pris tout le volet des assurances sociales y compris celui de l'AVS, confronté lui aussi au vieillissement de la population avec l'ardeur et le bellicisme qu'on lui connaît, ce qui nous aurait vraisemblablement changé de la placidité et de la recherche du compromis affichées par sa prédécesseur(e).
Au deuxième acte, le rideau est tombé sur l'élection attendue elle aussi et sans aucun suspens de Pascal Couchepin au pinacle de la fonction politique de ce pays, à savoir Président de la Confédération.
J'ai sous les yeux depuis quelques jours une récente caricature de Burki parue dans les 24 Heures et montrant Pascal Couchepin en «imperator» romain accueilli triomphalement dans sa bonne ville d'Octodure, le nez vindicatif comme à l'habitude, la moue satisfaite, l'il perçant et rêveur, la tête couronnée de lauriers. Certes, Pascal Couchepin a en commun avec César d'autres qualités que celle du commandement, en particulier celle liée à la langue : pour lui, comme pour César, le français, c'est du latin On se prépare donc une année fertile en rebondissements et en création de néologismes couchepinesques qui feront le bonheur des humoristes de Suisse romande. En particulier celui de la bande d'Yvan Frésard dans «La Soupe est pleine» du dimanche matin. On trépigne d'ores et déjà d'impatience et on se réjouit de commencer l'année en fanfare.
Troisième acte : à la suite du conclave de notre Conseil fédéral, sans témoin et en grand secret, la répartition des départements a eu lieu et c'est l'empereur Pascal qui a reçu, comme il le souhaitait et comme son livre le laissait à penser, le Département fédéral de l'Intérieur dans lequel il entend, lui aussi, mettre de l'ordre. Le nom de Couchepin, mal prononcé ou dit trop rapidement, peut faire penser à «coup de poing» et c'est avec une certaine anxiété que l'on attend ce champion de l'autoritarisme mais aussi de la décision rapide, dans un département aussi sensible. On a beaucoup glosé sur ses défauts, jusqu'à le caricaturer parfois sommairement, mais il faut retenir qu'en matière de prise de décision, sa majesté ne fait pas dans le détail.
Il faudra de toute façon lui laisser sa chance puisque, à tout prendre, le choix entre Couchepin et Calmy-Rey n'aurait pas été forcément cornélien mais aurait signifié un passage de Charybde en Scylla. En revanche, si Joseph Deiss avait pointé son nez et son menton qu'il a plus fort dans le domaine de la santé, on aurait pu penser alors que l'ensemble des partenaires dudit domaine aurait commencé à «calmir».
C'est donc Couchepin, et il va falloir s'habituer à voir débouler dans l'arène de la santé, le taureau d'Octodure. L'homme a pourtant un certain sens politique. Il a surtout du nez ou plutôt un NEZ, qui en tout état de cause ferait les délices d'un certain nombre de médecins ORL
Quelques journalistes l'ont déjà souligné, le paquebot de la santé peut courir un certain temps sur son erre avant d'infléchir sa course. Il faudra donc donner «du temps au temps» et faire en sorte que le pilotin qu'on nous a désigné devienne, mois après mois, un pilotin aguerri et expérimenté.
C'est ainsi qu'après quelques années ou plutôt quelques mois vu l'impulsivité du magistrat en question que l'on saura si les médecins, vont devoir se faire administrer de la coucoumelle, du calomel ou alors se retrouver sur un couchis harmonieux propice à la pose du pavage d'une LAMal nouvelle et solidement ancrée.
En cette fin d'année, période de paix, de bonnes résolutions et d'échange de vux, nous adressons les nôtres tant à notre Genevoise de conseillère fédérale qu'à notre nouveau ministre de tutelle.
Bonne chance et bons vux à tous deux !