«Ecrits sur la médecine» de Georges Canguilhem. Seuil, coll. «Champ freudien», 2002, 128 p. ISBN : 2-02-055170-5Rigueur, limpidité, érudition, profondeur de la pensée et sens de la formule nietzschéenne : c'est à une admirable critique de la doxa médicale qu'invite Georges Canguilhem (1904-1995) à travers les cinq textes réunis dans ce livre, qui étaient devenus difficilement accessibles, voire introuvables. Qu'il traite des maladies, des relations maladie-malade, du concept de santé ou de pédagogie de la guérison, Canguilhem convoque avec brio l'histoire et la philosophie pour dégager, plus que d'hypothétiques réponses, un questionnement fécond et salutaire, c'est-à-dire dérangeant. Magnifique essai sur la santé, où Canguilhem, dans le sillage de Descartes, rappelle que «la santé, vérité du corps, ne relève pas d'une explication par théorèmes» ou encore, citant Antonin Artaud, qu'«on ne peut accepter la vie qu'à la condition d'être grand, de se sentir à l'origine des phénomènes, tout au moins d'un certain nombre d'entre eux. Sans puissance d'expansion, sans une certaine domination sur les choses, la vie est indéfendable.» Ce livre majeur, que tout médecin devrait lire, nous rappelle que la santé, tout comme les voies et les effets de la médecine scientifique, relève aussi de la philosophie. Il est affolant de penser que nul n'est tenu, aujourd'hui, pour exercer la médecine, d'avoir la moindre connaissance de philosophie.