L'apport conjoint de vitamine D et de calcium réduit le risque de fractures chez les personnes âgées. Mais qu'en est-il d'un complément de vitamine D seule ? Pour répondre à cette question, des chercheurs de l'école de médecine clinique de l'Université de Cambridge ont réalisé un essai en double aveugle contre placebo (BMJ 2003 ; 326 : 469-72) aussi étonnant par ses résultats que par sa méthode.Les auteurs ont recruté par voie de courrier 2686 personnes de 65 à 85 ans (2037 hommes, 649 femmes), vivant dans la population générale, ne recevant pas de vitamine D et ne présentant pas de contre-indication à sa prise. Après randomisation, ils leur ont envoyé par la poste, tous les quatre mois pendant cinq ans, un cachet de vitamine D (100 000 UI) ou un placebo à prendre sur le champ, ainsi qu'un questionnaire sur leur état de santé.Il ne s'agissait que d'un essai pilote, en vue d'une étude beaucoup plus importante auprès de 20 000 sujets. En raison de la petitesse de l'échantillon, les chercheurs ne s'attendaient pas à détecter un effet significatif de la vitamine D. Les résultats leur ont réservé une surprise : le risque de première fracture s'est avéré significativement moins élevé dans le groupe recevant de la vitamine D que dans le groupe placebo.Chez les sujets sous vitamine D, ce risque était réduit de 22% pendant les cinq ans de l'étude. Pour les premières fractures des principaux sites ostéoporotiques (hanche, poignet, avant-bras et vertèbres), la réduction atteignait même 33%. Les autres problèmes de santé, tout comme la mortalité générale, n'ont pas été influencés de façon significative.Conclusion : un apport oral de 100 000 UI de vitamine D tous les quatre mois diminue efficacement le risque de fractures dans la population de plus de 65 ans. Et comme ce traitement est réputé particulièrement sûr, il pourrait même être envisagé en prévention primaire. Il en coûterait environ deux francs par année et par personne.Détail piquant : l'essai à grande échelle que les chercheurs préparaient ne sera jamais conduit, faute de financement. Autrement dit, si les conclusions de l'essai pilote n'avaient pas été aussi claires, une petite économie aurait coûté la vie à une intervention sanitaire dont le rapport coût-bénéfice s'annonce imbattable.