L'approche cognitivo-comportementale nécessite une formation spécifique et une supervision au long cours pour les médecins de premier recours qui voudraient l'utiliser. En médecine générale, elle peut être utilisée non seulement chez les patients présentant clairement un diagnostic psychiatrique (en particulier les troubles anxieux et les troubles de l'humeur), mais encore chez ceux qui viennent chercher une aide pour une difficulté de vie nécessitant une contextualisation des plaintes physiques et psychiques et/ou une approche psychoéducative. Tout en élargissant le champ de compétences du médecin de premier recours (MPR), elle peut aussi faciliter le recours éventuel au psychiatre en améliorant la compréhension du trouble par le patient et en développant sa motivation.IntroductionLa pratique de la médecine générale évolue. Si la définition du travail du MPR (médecin de premier recours) consiste à dire qu'il doit répondre à 90% des plaintes de ses patients, force est de constater que ces plaintes ne se formulent plus de la même façon qu'il y a vingt ou trente ans. L'augmentation des troubles de santé mentale oblige le MPR à élargir sa gamme de réponses s'il ne veut pas se retrouver dans des impasses.Le MPR utilise, dans son travail, une approche du type «résolution de problème» centrée sur le patient, qui peut amener progressivement à emprunter le modèle cognitivo-comportemental.C'est de cette pratique dont il est question ici et de ses modalités de formation.L'article est rédigé par deux généralistes ayant cheminé au cours de leur pratique d'une part sur le plan personnel, et d'autre part dans le champ de l'enseignement de la relation médecin-patient, puis de la médecine psychosomatique et psychosociale. Si l'apport de la TCC a modifié une partie de leur pratique, ils restent néanmoins des médecins de premier recours.Considérations personnelles sur la pratique de la médecine généraleLa médecine générale a toujours été confrontée à un défi. Comment appréhender la personne dans son intégrité physique et psychologique sans se heurter à la scission du corps et de l'esprit ?Le MPR traite une personne dont l'histoire, le vécu, vont colorer la pathologie présentée, qu'elle soit somatique ou psychique. Les plaintes apportées par le ou la patiente nous semblent avoir beaucoup évolué, du moins en ville, vers une problématique somato-psycho-sociale dont le retentissement somatique interroge le MPR.Lui qui a été drillé durant ses études à réfléchir pour résoudre un problème physique, se trouve relativement démuni devant la complexité de ce qui lui est de plus en plus présenté. Combien de fois avons-nous fait un constat d'impuissance ne serait-ce qu'à aider si ce n'est à guérir ?Longtemps aussi, le MPR a utilisé tant bien que mal cet espace relationnel somato-psychique. Actuellement, un MPR qui cherche à s'améliorer dans cet espace peut trouver des outils adéquats qui, sans faire de lui un psychiatre, et en respectant sa spécificité, va lui permettre de redonner une dynamique et un intérêt au cortège de plaintes physiques dites fonctionnelles et aux plaintes psychiques liées aux troubles dépressifs et anxieux en particulier.Description de la TCCLe but de toute thérapie cognitive et/ou comportementale est d'aider un patient à changer certains éléments de son comportement et de sa relation à l'environnement. De manière simplifiée, le médecin généraliste peut se référer à un mode d'intervention basé sur l'ici et maintenant, faisant intervenir l'auto-observation, la hiérarchisation des plaintes et le dialogue socratique (jeux de questions et de réponses permettant de vérifier la validité des affirmations énoncées).Au cours de ses consultations, il franchira avec le patient une série d'étapes pour atteindre un objectif identifié et observable. Dans un canevas d'investigation psychologique adapté au MPR, la clarification des étapes a été décrite à l'aide des questions suivantes :1. Définition des plaintes, établissement et communication du diagnostic.2. Questionnement sur les plaintes actuelles et leurs répercussions : «Qu'est-ce qui vous pèse le plus actuellement, dans la vie de tous les jours ?».3. Etablissement des priorités : «Qu'est-ce qui vous paraît important de pouvoir faire actuellement ?».4. Détermination du but final de la démarche et des étapes éventuellement nécessaires pour l'atteindre (focalisation).5. Description d'un objectif atteignable actuellement.6. Evaluation des tâches de la semaine et planification ultérieure : «Comment cela s'est-il passé par rapport à l'objectif cette semaine ?» : a) s'il y a eu échec, «c'était trop difficile, reculons d'une case...» ; b) s'il y a eu réussite, oser être content de soi, programmer l'étape suivante.Bases théoriques et modèles en TCCUne idée simple et ancienne est à la base de la TCC. C'est notre manière d'envisager et d'appréhender notre environnement qui va conditionner notre humeur, plus que notre environnement lui-même et les choses qui le composent. Il découle de cela trois hypothèses indissociables :1. Nos difficultés psychologiques sont dues à notre style de pensée et de perception des événements que nous vivons.2. Il est possible d'apprendre à modifier ce style de pensée.Cette modification va avoir des effets bénéfiques, non seulement sur nos pensées, mais aussi sur nos comportements et nos émotions, qui en dépendent.Situation R traitement cognitif de l'information R réactions affectives et comportementalesOn appelle cognitions des pensées qui s'imposent d'elles-mêmes, automatiquement, lorsque nous sommes confrontés à une situation. C'est un discours interne, spontané.I Exemple 1 : «au moment où je fais mes bagages, je me dis : je vais sûrement oublier quelque chose».I Exemple 2 : «s'il me regarde comme cela c'est que je dois avoir mauvaise mine ou c'est qu'il ne m'apprécie pas».Les erreurs logiques les plus fréquentes :I tirer des conclusions négatives sans preuve (= inférence arbitraire) : «elle ne m'a pas rappelé, je sais que je l'ennuie».I abstraction sélective : le conducteur pressé ne voit que les feux rouges.I surgénéralisation : («c'est comme ça, je n'ai jamais eu de chance. C'est toujours la même chose
»).I maximalisation (des éléments négatifs) et minimalisation (des éléments positifs) : «les fois où j'ai aidé des gens, c'est parce que c'était facile. En revanche, j'ai eu beaucoup d'échecs
».I personnalisation : «mes enfants travaillent mal, c'est de ma faute
».I raisonnement dichotomique : « Si je ne suis pas capable d'aider tous mes patients, ce n'est pas la peine d'être thérapeute
».Dans la pratique générale, si l'on connaît ces erreurs logiques, il sera facile de les repérer dans le mode d'expression des patients et de les signifier immédiatement lors de l'entretien.Les indications à une thérapie cognitivo-comportementale ont été bien décrites dans un article précédent du Dr J. Lalive-Aubert.FormationUne trentaine de MPR et parfois d'autres spécialités, ayant suivi la formation de base de médecine psychosomatique et psychosociale de l'IRFMPP (Institut romand de formation en médecine psychosomatique et psychosociale) et de l'AMPP (Académie de médecine psychosomatique et psychosociale), ont voulu poursuivre leur formation dans l'approche cognitivo-comportementale, parce qu'elle leur paraissait une progression logique (en particulier après les étapes de détection des troubles de santé mentale) pour mieux aider les patients d'une consultation générale. L'intégration d'un espace relationnel et thérapeutique dans les consultations permet une exploration des plaintes, une quête du sens de ces plaintes et une possibilité de changement des comportements dysfonctionnels. De plus, ces médecins ont intégré la nécessité d'être supervisés.Huit journées de formation ont été mises sur pied avec l'aide de l'ASPCo (Association suisse de psychothérapie cognitivo-comportementale). Les MPR impliqués dans la préparation de ces cours et coanimateurs des journées de formation avec un psychiatre ou psychologue spécialiste en TCC avaient généralement déjà suivi une formation partielle (axée sur les troubles émotionnels et de l'humeur) en TCC depuis cinq ans en moyenne, axée essentiellement sur des supervisions régulières. Ils avaient renforcé leur plaisir à pratiquer et à réexaminer avec intérêt les plaintes parfois considérées comme répétitives.L'analyse de l'expérience de ces praticiens a permis de repérer des situations cliniques où l'apport de la TCC a ouvert avec le patient un espace plus créatif dans la résolution des problèmes posés. Cette analyse a également mis en évidence que le dialogue socratique, propre a priori à la TCC, est un des moyens de communication à but de changement utilisé par les MPR. Quand peut-on penser à une TCC au cabinet médical ?On peut d'une manière simple relever deux catégories de situations :1. Situations bloquées :I Inhibition des dépressifs chroniques, par exemple ne plus arriver à faire ses commissions.I Trouble de panique avec agoraphobie.I Régime qui ne marche pas.I Tout ce qui nécessite un changement comportemental (dépendances, fumée, alcool).2. Situations envahissantes :I Personnalités dépendantes.I Téléphones multiples.I Pensées négatives répétées.I Plainte douloureuse répétée.En médecine générale, l'approche cognitivo-comportementale peut être utilisée non seulement chez les patients présentant clairement un diagnostic psychiatrique, mais encore chez ceux qui viennent chercher une aide pour une difficulté de leur vie nécessitant une contextualisation des plaintes physiques et psychiques et/ou une approche psycho-éducative, explorant les schémas profonds (croyances, convictions, règles de vie de la personne) qui entraînent une vision dysfonctionnelle du monde tant intérieur qu'extérieur.Quelques exemples permettront de mieux comprendre le type de travail qui peut être effectué. Il est à noter que les patients qui viennent en première intention chez le MPR «offriront» comme porte d'entrée la plus fréquente une plainte somatique que le médecin devra rapprocher, si nécessaire, d'une souffrance psychique peu exprimée.Vignette 1. Patient de 55 ansMonsieur K. est envoyé par son dentiste. Il souffre de sensations d'étouffement lors de la prise d'empreinte dentaire et les soins se révèlent impossibles. Il a déjà eu des soins dentaires simples pour lesquels il n'a jamais eu de problème.A l'anamnèse, on relèvera qu'il supporte avec difficulté l'idée d'être coincé dans un lieu exigu et on apprendra que cela fait trente ans qu'il ne prend plus l'ascenseur !Le premier travail avec ce patient a été de nommer le trouble anxieux avec attaques de panique et la phobie d'ascenseur.Avec M. K., nous définissons les objectifs comme suit : 1er temps, désensibilisation de la peur de l'ascenseur ; 2e temps, travail sur les soins dentaires notamment sur la prise d'empreinte qui est la phase la plus délicate pour le patient.La thérapie va se dérouler, pour l'ascenseur, par des expositions répétées dans ceux du quartier (choisis pour leur capacité à être bruyant, à tomber en panne et autres qualités) accompagnés du thérapeute et de quelques complices pour l'encombrement du lieu. L'exposition se fera tout d'abord avec des scénarios imaginaires, puis en «live» de manière extrêmement graduelle.Le patient sera à l'aise avec les ascenseurs au bout d'une quinzaine de séances.Puis fort de ce succès et ayant repris confiance quant à ses capacités de changement, nous abordons le problème dentaire selon le même principe. Exposition imaginaire, puis exposition réelle avec des abaisse-langues introduits sur les côtés de la bouche, puis avec des moules à empreintes prêtés par un dentiste. L'évolution sera aussi favorable assez rapidement et il pourra recevoir les soins dentaires appropriés.Vignette 2. Patient de 20 ans, cuisinierAntécédents : jeune homme connu pour différents accidents, des infections des voies aériennes supérieures banales et des douleurs abdominales lors d'états de tension au travail.Plaintes (lors d'une consultation) en 1998 : il est «sur les nerfs», sa tête va exploser, il a une boule au ventre, a envie de tout plaquer, ne dort plus, ne mange plus. Il explose à la maison contre son petit frère, sa mère
Il se sent agressif et a envie d'envoyer balader sa copine
Il sent qu'il va «péter les plombs» au travail, est révolté contre ses horaires.La réaction du thérapeute (submergé par tout ça) : un peu de tranquillisants et il se calmera gentiment
!Consultation en 2000 : le patient a maintenant 22 ans, il récidive, ses plaintes sont absolument identiques, en plus il se sent «vidé à l'intérieur». Il a maigri, ne fait plus de sport, n'a plus de relations sexuelles avec sa copine qui le «harcèle». Il entre en conflit avec son patron qui, selon lui, a un caractère de cochon.Approche clinique/ContextualisationQuestionnement : a-t-il envie de changer ?Quoi ?Pense-t-il qu'il est pour quelque chose dans cela ?Est-il prêt à travailler pour apprendre à changer ses réactions ?Quelles sont ses motivations pour changer ?Ses réponses : oui, il ne veut plus faire peur aux autres, il veut apprendre à se calmer, arrêter de partir au quart de tour. Il aime son métier et risque de perdre sa place. En fait après les éclats, il regrette et se culpabilise
Attitude et procédure :Focalisation (recherche de l'objectif final) : contrôler ses réactions pour éviter un renvoi du travail.Le thérapeute lui demande :1. De s'observer et de décrire ses crises. Quand surviennent-elles ? Dans quel contexte ? A cause de quoi d'après lui ?Le patient découvre assez vite que c'est lorsqu'il se sent contrarié que les événements sont contraires à ses attentes, il rumine et c'est un disque rayé de ressentiments qui passent dans sa tête.2. D'écrire ce qu'il ressent (cela tourne beaucoup autour de sa colère contre son chef et le sentiment d'injustice).3. De repérer sa colère et de respirer avant toute chose !4. D'écrire les avantages et inconvénients de se mettre en colère.5. De faire des jeux de rôle avec le thérapeute pour qu'il se rende compte de comment il se comporte avec son patron et pour apprendre à utiliser une autre manière de penser et de s'exprimer. Parler de soi, ne pas attaquer l'autre, utiliser un vocabulaire plus élargi et reconnaître ses émotions
Résultat (après six séances)I Il n'arrive plus à se mettre en colère comme avant
même à la maison.I Son chef ne l'embête plus.I Sa relation avec son amie s'est beaucoup améliorée.I Il trouve que c'est un miracle, son patron a amélioré ses horaires, son salaire et ses vacances
I Il n'a plus mal au ventre.Vignette 3. La peur de rentrer dans un caféUne femme de 30 ans consulte, car elle ressent des troubles physiques qui la dérangent beaucoup lorsqu'elle rentre dans un café ou dans un bistrot pour y boire ou y manger. Elle a l'impression que tous les regards convergent sur elle, qu'elle est jugée par les autres clients sur sa tenue vestimentaire et sur sa manière de se tenir à table. Elle ressent des palpitations, des sueurs froides, ses jambes sont en coton. Boire devient une épreuve, car ses mains se mettent à trembler et cela augmente encore plus son sentiment d'être observée. Ainsi s'installe un véritable cercle vicieux qui tétanise notre consommatrice à sa table ou qui la précipite hors du lieu public sans qu'elle ait pu consommer. Ce comportement l'empêche aussi de faire des rencontres, car elle se sent trop «bête», et elle redoute les invitations au restaurant, déclinant souvent les offres qui peuvent lui être faites.L'anamnèse nous apprend qu'elle a subi des violences, étant enfant, par un père alcoolique qui battait presque quotidiennement la mère, le frère et les deux surs.La patiente perdra sa mère, victime d'un crime passionnel, à la fin de l'adolescence.L'objectif principal de cette femme est de recouvrer sa confiance dans sa capacité à pouvoir aller dans un restaurant, de consommer sans trembler.Nous définissons une situation type qui pourra être reproductible, soit un bistrot connu par elle, et une action dans ce lieu, boire un café.Nous travaillons tout d'abord sur les pensées qui lui viennent spontanément à l'évocation de cette situation et nous repérons, à l'aide des colonnes de Beck, la manière dont s'organise la relation «situations-émotions-pensées-actions» au cabinet médical et plus tard en «live». Nous relevons les erreurs logiques les plus fréquentes.La patiente est instruite d'une technique de relaxation qu'elle peut utiliser en cas de besoin. Petit à petit et au fur et à mesure des expositions à la situation anxiogène, la patiente va développer des pensées dites alternatives (aux pensées automatiques) qui vont lui permettre de dialoguer avec elle-même de manière positive, et d'atténuer ainsi l'impact de ses cognitions négatives habituelles (je vais trembler, je n'y arriverai pas, etc.).Après sept à huit séances, la patiente est capable de se rendre dans un café, de prendre une consommation seule ou en compagnie. Il est intéressant de remarquer que la réussite de l'objectif va permettre à cette femme de prendre beaucoup plus d'assurance dans ses comportements relationnels avec son entourage professionnel, amical. Sa vision d'elle-même va peu à peu changer et elle va se sentir plus capable et aussi plus aimable.La thérapie cognitivo-comportementale chez le généralisteSelon notre expérience, les indications les plus propices à être traitées au cabinet du généraliste sont du domaine des troubles de l'humeur, sans trouble grave de la personnalité et les troubles anxieux, de même que les dépendances. L'espace relationnel que le MPR explore suppose que celui-ci soit au fait de ses limites. Ces dernières ne sont pas fixes et vont varier au cours de sa formation continue et avec le plaisir qu'il éprouve à exercer dans ce domaine.Mais qu'est-ce qui peut séduire le MPR dans cette approche et avec quels patients va-t-il l'utiliser ?Nous pensons que deux éléments principaux jouent un rôle : 1. Le style des patients : ce sont des personnes qui ont de la peine à exprimer leurs émotions, qui répondent bien à nos interventions psychopédagogiques, qui ne désirent pas envisager un travail introspectif à long terme dans un premier temps et qui présentent une problématique de vie concrète quoique souvent présentée de manière floue ou de manière détournée par un symptôme physique. Ils sont d'accord de travailler de manière active et responsabilisée (aussi entre les consultations) pour l'amélioration de leur qualité de vie.2. Le style du MPR qui s'identifie facilement aux qualités nécessaires aux thérapeutes TCC, à savoir, la capacité à être empathique, chaleureux, authentique, capable de développer une relation de collaboration avec le patient avec lequel une alliance s'est déjà nouée. Il accepte également dans ce face-à-face d'être actif, créatif, de prendre position, (et l'humour n'est pas interdit), comme par exemple dans le jeu de rôle.Il n'est pas inutile de rappeler qu'une supervision individuelle ou en petit groupe (cinq personnes) nous paraît la condition indispensable non seulement à affûter nos connaissances et notre savoir faire, à reconnaître et corriger les difficultés relationnelles, mais aussi à garder notre curiosité et par la même, notre plaisir. Sans doute, ce plaisir est-il lié à l'acquisition de nouvelles capacités, du sentiment de maîtrise que le patient peut nous refléter lorsqu'il retrouve sa capacité à se déterminer par rapport aux événements de vie qu'il nous a présentés.Spécificités de l'approche cognitivo-comportementale par le généralisteNos patients, sans forcément présenter des troubles importants de la santé mentale, peuvent bénéficier néanmoins lors de périodes difficiles de leur vie (par exemple dans les troubles d'adaptation mineurs) d'une approche de ce type.Notre pratique des situations concrètes dans l'ici et le maintenant, nous a habitué à une présence active et de partenariat, éléments communs à la TCC. Notre formation de base de somaticien nous oblige à respecter et évaluer l'expression des plaintes physiques, parfois dans le même temps de consultation.Il est clair que nous ne pouvons accorder 45 minutes à tous les patients susceptibles d'être aidés par cette approche. Il nous a semblé possible de les voir utilement et de manière constructive même pour des consultations de 20 ou 30 minutes, dans la mesure où le focus (objectif) avait été clairement établi et où l'habitude des «devoirs à domicile» (ce qui implique une vérification au début de la consultation) était bien ancrée. Il est d'autant plus important quand le temps est court de bien communiquer. Les «skills» communicationnels tels que «résumer», «reformuler», «recontextualiser», «renforcer» sont à utiliser sans modération !Limites de la prise en charge : une des difficultés est de déterminer (comme dans d'autres modes de prise en charge) les limites de chaque médecin. L'expérience et la confrontation lors des séminaires de supervision ont permis de mieux cerner ce problème et de valoriser le travail déjà entrepris lorsque le MPR décide d'en référer au psychiatre. Cette décision de passer la main n'est dans ce cas pas le constat d'un échec, mais plutôt une reconnaissance des limites du MPR et résulte souvent d'un nouvel intérêt du patient à comprendre et à traiter son trouble, suite au travail thérapeutique initié par le MPR.Le MPR est souvent consulté par des personnes qui ne sont pas prêtes à un travail psychothérapeutique ou qui en ont peur. Le MPR peut dédramatiser ce type de prise en charge et faciliter une future démarche chez un collègue psychiatre. ConclusionL'approche cognitivo-comportementale ouvre de nouvelles perspectives pour le MPR désireux d'ouvrir l'espace relationnel et thérapeutique. Le modèle de TCC peut l'aider à visualiser les étapes nécessaires pour arriver à un objectif choisi par le patient. Il rend le travail plus attractif et permet de sortir d'impasses liées parfois au flou initial de la plainte, pour autant qu'on fasse l'effort au départ de décrypter soigneusement celle-ci avec ses composantes cognitives et émotives. Par son interactivité, la TCC s'adresse, nous semble-t-il, bien à la sensibilité du MPR qui a l'habitude de travailler dans le concret et dans l'actuel. W André C. Les thérapies cognitives. Collection Essentialis, Meschers : Bernet-Danilo éditions, 1995. Clark DM, Fairburn CG Eds. Science and practice of Cognitive Behaviour Therapy. Oxford : Oxford University Press, 1997. Dubosson M. Quelle place pour la psychothérapie cognitivo-comportementale dans un cabinet de médecine générale ?, psychologue in ASPCo-Info no 10/février 2002, 9-14. Lalive-Aubert J. La thérapie cognitivo-comportementale pratiquée par le médecin de premier recours : un point de vue de psychiatre. Med Hyg 2004 ; 62 : 728. Samuel-Lajeunesse B, Mirabel-Sarron Ch, Vera L, Mehran F, et al. Manuel de thérapie comportementale et cognitive. Paris : Dunod édition, 1998. Soumaille S. Psychiatrie du praticien : quoi de neuf ? in communication de la maison Pharmacia, 2001.