La prise en charge de la transposition des gros vaisseaux a beaucoup changé au cours des dernières décennies. De nouvelles techniques de diagnostic sont utilisées et les interventions chirurgicales se sont améliorées. Ceci a amené à une augmentation des survivants à long terme qui nécessitent un suivi spécialisé. Les complications à long terme chez ces patients nécessitent des approches spécifiques, par pharmacothérapie, cathétérisme cardiaque interventionnel ou chirurgie. Ces séquelles complexes impliquent que les patients avec transposition des gros vaisseaux ne sont jamais complètement guéris et auront probablement une espérance de vie limitée.
Dans les cinq dernières décennies, l'avenir des patients avec transposition des gros vaisseaux a beaucoup changé. L'introduction de la manœuvre de Rashkind ou atrioseptostomie au ballonnet a permis la survie de ces patients jusqu'à leur correction chirurgicale qui leur assure une qualité de vie quasi normale. Depuis lors, néanmoins, les techniques chirurgicales ont beaucoup évolué et ont un impact important sur le suivi à long terme de ces patients.1
Le facteur le plus constant est l'anatomie intracardiaque de la transposition simple des gros vaisseaux. Il y a un situs solitus des oreillettes, une concordance atrioventriculaire mais une discordance ventriculo-artérielle, ce qui veut dire que l'aorte prend son origine du ventricule droit et l'artère pulmonaire du ventricule gauche (figure 1A). Les artères coronaires prennent leur origine de l'aorte. L'incidence de cette malformation est de 20 à 30 pour 10 000 nouveaux-nés et forme le 5% des malformations cardiaques congénitales.1
La confirmation du diagnostic a changé avec le temps, évoluant du cathétérisme cardiaque à l'échocardiographie.2 Actuellement, une majorité de ces cas peut être détectée à l'échocardiographie fœtale.3 Les techniques chirurgicales ont également changé, du switch atrial (opération de Mustard ou opération de Senning) au switch artériel modifié selon Lecompte (figure 1B). Chaque introduction d'une nouvelle technique chirurgicale a modifié le type de complications à long terme chez ces patients.
Les complications à long terme de ce type d'opération incluent les obstructions du tunnel atrial, plus fréquentes dans l'opération de Mustard. Selon le placement du patch intra-auriculaire, le tunnel systémique ou pulmonaire peut être obstrué.1,4 Ceci engendre une pression veineuse systémique élevée avec une dilatation du système cave qui peut provoquer une augmentation pathologique du périmètre crânien et de la pression intracrânienne, ou mener à la formation de varices œsophagiennes et à la survenue d'une insuffisance hépatique. Le traitement actuel consiste en une dilatation au ballon de l'obstruction par cathétérisme interventionnel et il est rare de devoir recourir à une réopération pour ce problème.5
Si l'obstruction se situe au niveau du retour veineux pulmonaire, le patient développera une stase pulmonaire. Dans ces cas-là, une angioplastie par cathétérisme interventionnel ou une opération avec élargissement de l'abouchement des veines pulmonaires sont les seules possibilités à envisager.5
Une autre complication fréquente de ce type de chirurgie est la dysfonction du nœud sinusal. Celle-ci apparaît généralement à moyen terme et engendre une morbidité très importante. Elle est due à une fibrose entendue des oreillettes suite à la chirurgie intra-atriale. L'implantation d'un pacemaker semble être la seule forme de traitement dans cette situation. D'autres troubles du rythme comme des arythmies supraventriculaires, surtout des flutters et fibrillations auriculaires, sont également fréquemment retrouvés après ce type de chirurgie. Ces troubles du rythme nécessitent un traitement médicamenteux et le plus souvent une étude électrophysiologique avec thermo-ablation si possible.
La complication à long terme la plus sérieuse dans l'évolution de ces patients est la dysfonction ventriculaire droite, le ventricule droit restant dans ce type de correction le ventricule systémique.6 Cette complication survient le plus souvent dans la deuxième et la troisième décade de vie. Les traitements médicamenteux sont souvent décevants et il faut avoir recours à la transplantation cardiaque ou au réentraînement du ventricule gauche afin de transformer le switch atrial en switch artériel.7
Le switch artériel comporte la division de l'aorte et de l'artère pulmonaire au-dessus de la valve, repositionnement des deux gros vaisseaux dans leur position anatomique normale et le détachement des artères coronaires de l'ancienne aorte pour les transplanter sur la néo-aorte (figure 1B). La mortalité périopératoire initiale de cette technique était élevée, plus importante que pour l'opération de Senning. Malgré ces débuts difficiles, cette technique s'est imposée au vu de l'amélioration supposée à long terme (figure 2).8 Les complications périopératoires sont le plus souvent en relation avec la réimplantation des artères coronaires (figure 3).9 Il peut alors y avoir une ischémie myocardique aiguë et une dysfonction ventriculaire.
Les séquelles à moyen terme sont les sténoses des artères pulmonaires périphériques, dues à la position des artères pulmonaires par rapport à l'aorte.10,11 Le traitement consiste à placer des stents dans ces vaisseaux par cathétérisme interventionnel.5 Une minorité des patients présentera une dilatation progressive de la racine aortique avec une insuffisance aortique secondaire nécessitant un remplacement valvulaire associé à une opération de Bentall si nécessaire.12
Une des problématiques à long terme reste celle des séquelles liées à la réimplantation des artères coronaires qui peut mener à une ischémie chronique provoquant des arythmies ventriculaires. Un suivi régulier comprenant ECG, Holter, échocardiographie et ergométrie est indispensable et si nécessaire une coronarographie est indiquée afin de pouvoir identifier la survenue de ce type de problématique.
Les patients après une correction d'une transposition des gros vaisseaux, aussi bien par Mustard/Senning ou par switch artériel, restent un groupe qui a besoin d'un suivi à long terme. Une grande partie d'entre eux pouvant nécessiter un traitement médicamenteux, une intervention par cathétérisme cardiaque et selon les cas une intervention chirurgicale, voire même une transplantation cardiaque.