Peu de slogans plus éculés que celui-là ! Et pourtant, à l’heure où notre profession avance en ordre dispersé et a de plus en plus de peine à se faire entendre des élus et des décideurs politiques (là où les assureurs maladie présentent un front complètement monolithique), ne serait-il pas opportun de se demander pourquoi ce cliché ne fait plus guère recette ? Est-ce parce qu’il est inexact, et que l’addition des forces ne fonctionne qu’en physique ? Ou simplement parce que les exemples d’union se font rares dans une société marquée par l’individualisme et le matérialisme ?
Ce numéro de la Revue est le second numéro commun aux services de médecine interne hospitalière et aux policliniques médicales universitaires des deux cantons universitaires romands. Nous avons fait le bilan de la première livraison de cette démarche commune, et, si nous n’avons malheureusement pas de retour qui nous permette de dire si le lecteur en a été ou non enrichi, ce bilan a été pour les signataires de cet éditorial extrêmement positif. La coordination d’un numéro commun – que la Revue en soit remerciée – nous a obligé à nous rencontrer et nous a permis d’échanger. Ce n’est pas que nous n’en avions pas envie ! Mais la pression permanente de l’agir est également une des caractéristiques moins plaisantes de notre société et de nos institutions, et le temps de la rencontre et de la réflexion est en train de devenir un luxe. Ce numéro commun a donc été une contrainte librement choisie et assumée avec plaisir.
Cet échange, que nous comptons prolonger, se traduit dans ce numéro par une réflexion commune sur l’avenir de la Société suisse de médecine interne et de la Société suisse de médecine générale.1 L’existence de deux sociétés et de deux titres de spécialistes se justifie-t-elle encore aujour d’hui ? Devons-nous défendre nos particularités, ou mettre en évidence nos valeurs communes ? L’union nous rendrait-elle plus forte pour la formation et la recherche, et pour attirer davantage d’étudiants et de médecins internes vers ce métier dont nous partageons la passion, tout en le pratiquant dans des environnements différents ? Pouvons-nous relever le double défi de délivrer un seul titre de spécialiste pour mettre l’accent sur ce qui nous réunit, tout en définissant des filières de formation individualisées en fonction du futur environnement de pratique des médecins que nous formons? Nous en laisserons juge le lecteur, et, si nous n’avons pas la prétention d’épuiser le débat, nous souhaitons bien le susciter. Nous ne prétendons pas ici refléter la position de nos sociétés de spécialités respectives. Mais nous nous engageons, fortement, en faveur d’une évolution dont nous sommes convaincus qu’elle est souhaitable, et qui ne fera du reste qu’entériner, en Suisse romande, un état de fait qui existe déjà. Alors oui, travaillons à la création d’une société unique. Mais exigeons que ce projet soit marqué du sceau de l’ambition, et non d’un frileux plus petit dénominateur qui n’enthousiasmera personne !