La stimulation cérébrale profonde (SCP) nécessite l’implantation chirurgicale d’un système comprenant électrodes cérébrales et boîtier(s) de stimulation. Les noyaux cérébraux visés par la méthodologie stéréotaxique d’implantation doivent être visualisés au mieux par une imagerie à haute résolution. La procédure chirurgicale d’implantation des électrodes se fait si possible en anesthésie locale pour faire des mesures électro-physiologiques et tester en peropératoire l’effet de la stimulation, afin d’optimiser la position de l’électrode définitive. Dans un deuxième temps, le ou les générateur(s) d’impulsions sont implantés en anesthésie générale. La SCP pour les mouvements anormaux a une très bonne efficacité et un risque de complications graves faible quoique non nul. Les complications liées au matériel sont les plus fréquentes.
Introduction
La procédure chirurgicale d’implantation d’un système de stimulation cérébrale profonde (SCP) comporte deux temps opératoires.1,2 Le premier consiste en l’implantation d’électrodes dans le cerveau et le second en l’implantation du ou des boîtiers de stimulation. La stimulation est en principe bilatérale pour la maladie de Parkinson et les dystonies. Elle est aussi le plus souvent bilatérale dans le tremblement essentiel.
L’implantation des électrodes se fait classiquement à l’aide d’un cadre et d’un arc de stéréotaxie qui offrent une précision optimale (figure 1). Ce dispositif permet de viser un point de l’espace, d’y amener les instruments nécessaires à la procédure et, finalement, l’électrode définitive.
Si possible, selon le type et la sévérité des symptômes moteurs ainsi que l’angoisse et la collaboration à attendre du patient, l’implantation des électrodes se fait en anesthésie locale afin de pouvoir tester l’effet clinique de la stimulation et ainsi optimiser la position de l’électrode. Le patient peut néanmoins être sédaté pendant les phases opératoires où sa collaboration n’est pas nécessaire.
Une imagerie IRM 3D spécifique est nécessaire pour visualiser au mieux les noyaux où devront être implantées les électrodes. La technique de choix est une IRM à haut champ (3T) avec des séquences à haute résolution et 3D qui permettent la localisation de la cible et des structures vasculaires. Les séquences doivent avoir une résolution spatiale et un contraste optimaux, mais aussi être les plus rapides possibles en raison des mouvements involontaires des patients qui risquent d’altérer la qualité des images, afin d’éviter un examen IRM sous anesthésie générale qui peut aussi se justifier. Pour le ciblage du noyau sous-thalamique (NST) à stimuler classiquement dans la maladie de Parkinson, on pratique en général une IRM 3D T2 mettant en évidence ce noyau ainsi qu’une IRM 3D T1 avec injection de contraste pour visualiser les vaisseaux à éviter.
La procédure stéréotaxique commence le matin tôt, au lit du malade si possible assis, par la mise en place sur la tête du patient du cadre de stéréotaxie. Après une anesthésie locale des points de fixation, le cadre est vissé sur la table externe du crâne. Le patient est ensuite conduit avec ce cadre au CT ou à l’IRM où une acquisition est faite avec le cadre. A l’heure actuelle, la plupart des équipes tendent à pratiquer un CT stéréotaxique 3D qui est logistiquement plus facile à intégrer que l’IRM dans toutes les étapes de la procédure et qui est rapide. Sur ce CT, on va superposer l’IRM anatomique faite préalablement et sur laquelle on voit la plupart des structures cibles où il faut implanter les électrodes.
Une fois l’imagerie stéréotaxique acquise, on en vient à l’étape du ciblage. Le ciblage est dit «direct» quand on voit le noyau à l’imagerie et qu’on peut le cibler directement. Le ciblage est dit «indirect» quand la cible n’est pas visible et qu’on déduit sa position à partir de structures, qui elles sont visibles à l’imagerie (en particulier les commissures cérébrales).
Les cibles les plus employées pour la SCP dans les mouvements anormaux sont le NST (cible la plus courante dans la maladie de Parkinson) et le noyau ventral intermédiaire du thalamus (cible dans le tremblement essentiel). Le NST est bien visualisable sur une IRM fortement pondérée en T2 et on peut le cibler directement (figure 2). Le noyau ventral intermédiaire n’est par contre à l’heure actuelle pas visualisable par l’imagerie. En plus de la cible, les choix de la trajectoire et du point d’entrée sont des considérations importantes lors de la planification, en particulier pour éviter les vaisseaux visibles à l’IRM. Le point d’entrée pour une SCP est en général placé proche de la suture coronaire et les trajectoires passent par les lobes frontaux. Une fois que cibles et points d’entrées ont été placés dans un logiciel de planification stéréotaxique, ce dernier calcule les coordonnées et les angles stéréotaxiques qui seront utilisés pendant l’intervention.
Le patient est ensuite installé sur la table d’opération, préférablement en décubitus dorsal, le plus plat possible, ce qui correspond à la position que le patient avait lors de l’acquisition IRM. Cela minimise aussi l’entrée d’air dans le crâne pendant l’opération et le déplacement cérébral au sein de la boîte crânienne qui s’ensuit avec, comme conséquence, une perte de la précision initiale. L’appareil d’imagerie qui sera utilisé pour vérifier la position de l’électrode définitive est installé, puis le scalp est désinfecté et les champs opératoires appliqués.
L’intervention proprement dite commence en général dans l’hémisphère opposé aux symptômes moteurs les plus marqués car on constate que la précision de la procédure est souvent un peu meilleure au début (déplacement cérébral au cours de la procédure) et que la collaboration du patient l’est aussi. L’incision est en général arciforme et pédiculée vers l’arrière. Un trou de trépan est réalisé puis un système d’ancrage de l’électrode est fixé au crâne. L’arc stéréotaxique est ensuite orienté le long de la trajectoire. Sur cet arc, les divers instruments nécessaires seront successivement montés et descendus jusqu’à la cible.
Les noyaux ciblés pour la SCP sont relativement petits (par exemple le NST, en forme d’amande, mesure 4 x 4 x 6 mm). Malgré les progrès de l’imagerie, il est encore utile d’effectuer des enregistrements et stimulations en salle d’opération afin d’optimiser la position de stimulation.3 Ces enregistrements permettent aussi une certaine correction, car il existe toujours une incertitude de 1 mm sur la précision de la trajectoire vers la cible qui résulte de la résolution des IRM, de l’imprécision du cadre stéréotaxique et de la nature des électrodes. De plus, comme déjà évoqué précédemment, un déplacement du cerveau dans la boîte crânienne peut survenir lors de l’opération et augmenter encore l’imprécision par rapport à la cible initiale souhaitée.
Ainsi, la technique standard comporte encore, à l’heure actuelle, des mesures électrophysiologiques qui investiguent la région ciblée, en général depuis 10 mm avant la cible choisie. Une ou plusieurs microélectrodes, permettant des enregistrements de l’activité cellulaire in situ, sont disposées parallèlement à la trajectoire centrale et sont descendues progressivement afin de confirmer le passage dans le noyau d’intérêt grâce au fait que chacune d’elles a un pattern d’activité neuronale assez spécifique. La trajectoire, sur laquelle l’activité cellulaire est la plus intense et typique du noyau d’intérêt et dont la longueur du passage à travers celui-ci est la plus grande, est alors choisie. C’est sur cette trajectoire qu’on va faire des tests de stimulation pour confirmer l’efficacité de la stimulation et rechercher d’éventuels effets secondaires de celle-ci.
Pour tester la réponse clinique à la stimulation pendant l’opération, on utilise surtout la stimulation à haute fréquence (130 Hz), qui est celle qui sera habituellement utilisée lorsque le boîtier de stimulation sera implanté. L’intensité des impulsions est progressivement augmentée de 0 à 5 mA environ pour tester d’une part, l’efficacité (par exemple dans la maladie de Parkinson, diminution de la rigidité et arrêt du tremblement) et d’autre part, les effets secondaires induits par la stimulation. En effet, avec l’augmentation de l’intensité de la stimulation et donc du volume tissulaire alentour stimulé, des effets secondaires apparaissent généralement. Ces derniers sont consécutifs à la stimulation des structures cérébrales adjacentes au noyau visé, notamment le faisceau cortico-spinal, ce qui provoque des contractions motrices. Des effets végétatifs et des perturbations de l’oculomotricité peuvent également apparaître. La recherche de ces effets secondaires permet, le cas échéant, de déplacer la position de stimulation afin d’optimiser l’emplacement de l’électrode définitive. En effet, la présence d’effets secondaires pourrait empêcher d’atteindre une amplitude de stimulation nécessaire au contrôle des symptômes moteurs.
En principe, l’électrode définitive sera implantée sur la trajectoire et à la profondeur où la fenêtre thérapeutique entre effets bénéfiques et secondaires de la stimulation est la plus grande. Habituellement, on centre les contacts de l’électrode définitive sur cette position. Cette électrode définitive a un diamètre d’environ 1,3 mm et 4 ou 8 contacts de stimulation mesurant chacun 1,5 mm et séparés de 0,5 mm.
Une des difficultés de la SCP est le contrôle peropératoire du positionnement des électrodes définitives. Pour le faire, la méthode la plus classiquement utilisée est la fluoroscopie 2D (ou C-arm) qui permet de localiser en 2D le positionnement des électrodes. Bien que la fluoroscopie soit aisément disponible dans un bloc opératoire, son utilisation pour cette indication n’est pas évidente car, sans une installation précise et bien centrée sur le cadre de stéréotaxie du patient, il est parfois difficile de détecter une trajectoire aberrante. De plus, les images 2D obtenues ne permettent pas de réaliser une fusion d’images avec le planning préopératoire. Pour cette raison, l’utilisation d’un dispositif de radiographie 3D est appréciable. Le O-arm, par exemple, est en quelque sorte un scanner opératoire, qui permet d’acquérir des images 3D pouvant être fusionnées aux trajectoires préopératoires 4 (figure 3). Dans le même ordre d’idées, certains groupes vérifient le positionnement des électrodes, durant l’intervention, par une IRM opératoire.
D’une manière générale, quelle que soit la méthode d’imagerie 2D ou 3D utilisée, la localisation de la pointe de l’électrode de stimulation de test placée à l’endroit optimal retenu est repérée en peropératoire et l’électrode définitive est amenée sous contrôle radiologique au même endroit. En cas de divergence, une correction peut être effectuée. L’électrode est ensuite arrimée au crâne et son extrémité enroulée sous le scalp qui est refermé (figure 4).
En fin d’intervention, dans la plupart des centres qui n’ont pas accès à un dispositif d’imagerie opératoire 3D, un CT de contrôle final postopératoire est pratiqué afin de vérifier la position des électrodes et de déceler d’éventuelles complications du geste chirurgical. Les coupes du CT 3D sont fusionnées avec les coupes IRM réalisées en préopératoire afin de localiser les contacts des électrodes au sein des noyaux.
Le même jour, ou quelques jours après selon les habitudes des centres et la durée de la première opération, le patient est réopéré, cette fois en anesthésie générale, pour l’implantation du ou des boîtiers de stimulation. Nous avons le choix entre des boîtiers de stimulation non rechargeables et rechargeables. Les boîtiers non rechargeables sont un peu plus volumineux. Le choix du boîtier se fait essentiellement avec le patient en fonction de son souhait ou non d’avoir la recharge à intégrer dans ses habitudes de vie (environ 1 à 2 heures par semaine) et en fonction du volume du boîtier. Lors de cette implantation, le scalp est réouvert en regard de l’extrémité du câble de l’électrode, un câble d’extension est tunnelisé du crâne vers la région sous-clavière ou vers la région abdominale où le boîtier de stimulation est implanté dans ou sous la graisse en fonction de l’épaisseur de celle-ci.
Après l’implantation des électrodes cérébrales, le patient reste 1 à 2 heures en salle de réveil en fonction de la sédation qu’il aura reçue pendant l’opération, puis retourne dans l’unité normale. Une certaine apathie postopératoire survient parfois (trajectoires passant par les lobes frontaux). Après l’implantation des boîtiers de stimulation, on peut pratiquer une radiographie du matériel implanté comme référence pour le suivi (figure 5).
Les complications de la SCP sont essentiellement liées au matériel et consistent en infections et érosions cutanées (3-5 %). En cas d’infection, on doit malheureusement, dans certains cas, se résoudre à l’explantation du matériel pour pouvoir en venir à bout, notamment si le germe est un staphylocoque doré. La complication la plus redoutée de la SCP est l’hématome intracrânien sur le trajet de l’électrode, complication de faible probabilité et de sévérité variable mais dont l’incidence n’est pas nulle (environ 1 % de risque d’hématome avec séquelles neurologiques graves, coma ou décès).
> La stimulation cérébrale profonde a une très bonne efficacité dans des cas bien sélectionnés de mouvements anormaux
> La procédure d’implantation en anesthésie locale vise à placer de manière optimale les électrodes de stimulation dans le cerveau, de telle sorte que la stimulation ne produise pas d’effets secondaires qui empêcheraient celle-ci d’être augmentée au niveau requis pour être efficace
> Les complications graves de la stimulation cérébrale profonde sont rares
Deep brain stimulation (DBS) requires the surgical implantation of a system including brain electrodes and impulsion generator(s). The nuclei targeted by the stereotaxic implantation methodology have to be visualized at best by high resolution imaging. The surgical procedure for implanting the electrodes is performed if possible under local anaesthesia to make electro-physiological measurements and to test intra-operatively the effect of the stimulation, in order to optimize the position of the definitive electrode. In a second step, the impulsion generator(s) are implanted under general anaesthesia. DBS for movement disorders has a very good efficacy and a low albeit non-zero risk of serious complications. Complications related to the material are the most common.