Les nouveaux anticoagulants oraux sont aussi efficaces et sûrs que les antagonistes de la vitamine K (AVK) pour la prévention d’événements thromboemboliques après la cardioversion d’une fibrillation auriculaire (FA) non valvulaire. L’étude randomisée contrôlée X-VeRt1 a comparé l’efficacité et la sécurité du rivaroxaban à celles des AVK chez 1504 patients avec FA paroxystique de plus de 48 heures ou de durée indéterminée, sans sténose mitrale significative, prothèse valvulaire, thrombus de l’oreillette ou AVC dans les trois mois précédents, qui nécessitaient une anticoagulation en vue d’une cardioversion élective. Les participants furent ensuite cardioversés précocement (1-5 jours) ou plus tardivement (3-8 semaines).
Sur le plan de l’efficacité, l’issue composite d’AVC, AIT, embolie systémique, infarctus ou décès d’origine cardiovasculaire fut globalement rare dans les deux groupes (0,51 % dans le groupe rivaroxaban et 1,02 % dans celui AVK, risk ratio : 0,50 ; IC 95 % : 0,15-1,73) et légèrement plus fréquente en cas de cardioversion précoce. Les hémorragies furent également très rares et non significativement plus fréquentes dans le groupe AVK (0,8 % versus 0,6 %, RR : 0,76 ; IC 95 % : 0,21-2,67). Les patients recevant du rivaroxaban ont pu être cardioversés plus précocément que ceux sous AVK.
Des études avec une puissance supérieure sont encore nécessaires pour valider définitivement cette nouvelle indication du rivaroxaban. Néanmoins, ces données confirment le profil de sécurité et d’efficacité de ces nouvelles molécules anticoagulantes et leur intérêt comme alternative aux AVK dans la prise en charge de la FA, offrant notamment la possibilité d’une cardioversion plus précoce.
Le traitement de la dépendance à l’alcool reste un défi pour les professionnels de la santé. Elle touche 250 000 personnes en Suisse, source de 1600 décès annuels et représente la seconde cause de mortalité évitable.2 En plus des approches globales (psychosociales et motivationnelles) visant au traitement de la dépendance, il existe de rares médicaments à l’indication reconnue (acamprosate, naltrexone, nalméfène et disulfiram) dont l’efficacité est limitée. Un grand espoir concerne le baclofène, myorelaxant GABA-B agoniste, qui a fait l’objet de plusieurs case-reports évoquant une disparition du craving lors d’usage de hautes doses.3 Les études randomisées contrôlées n’ont évalué que de faibles doses (30 et 80 mg/jour) et ont montré des résultats divergents.
Cette étude4 randomisée baclofène vs placebo durant douze semaines, chez 56 patients alcoolo-dépendants (surtout masculins, âge moyen 45 ans, 90 % formation postscolarité obligatoire, environ 200 g d’alcool/jour) sevrés et visant l’abstinence, est la première à tester des doses élevées (cible 270 mg/jour). Les critères d’exclusion principaux étaient l’âge (> 65 ans), des comorbidités psychiatriques et d’autres traitements psychotropes. Les participants ont augmenté leur dosage progressivement, puis fait douze semaines de plateau, quatre semaines de diminution et quatre semaines de suivi sans traitement. Les résultats montrent un taux d’abstinence de 67,7 % dans le groupe baclofène vs 23,8 % dans le groupe placebo (p = 0,014). La dose moyenne de baclofène prise dans le groupe actif était de 180 mg/jour durant la phase plateau. Etonnamment, quasiment aucun effet indésirable n’était plus fréquent dans le groupe baclofène, alors qu’en clinique des troubles de la concentration et de la mémoire, du sommeil, voire du comportement provoquent souvent l’arrêt du traitement.
Ces données sont encourageantes, mais demandent néanmoins à être confirmées par des études de plus grande taille et aux critères d’inclusion plus larges.
Les pneumonies acquises en communauté (PAC) sont une cause majeure d’hospitalisations et de décès. L’étude prospective EPIC,5 menée par les CDC (Centers for disease control and prevention) a inclus 2012 adultes hospitalisés pour une PAC. La démarche d’identification des germes pathogènes incluait des hémocultures, l’examen par culture et PCR des expectorations, aspirations trachéales, lavage bronchiolo-alvéolaire ou liquide pleural selon disponibilité, la PCR du frottis nasopharyngé pour les principaux virus, la recherche des antigènes urinaires du pneumocoque et de la légionelle dans les urines et des sérologies virales répétées à distance de l’épisode aigu.
En dépit de ce bilan extensif, un germe pathogène n’a été identifié que chez 38 % des individus. Une cause virale était présente dans 23 % des cas, bactérienne dans 11 %, mixte dans 3 %, fongique ou mycobactérienne dans 1 %. Les germes les plus fréquemment identifiés étaient le rhinovirus (9 %), l’influenza (6 %), le pneumocoque (5 %), le méta-pneumovirus humain (4 %) et le virus respiratoire syncitial (3 %).
Plusieurs limitations sont à relever, notamment la disparité de la démarche diagnostique entre les participants et le fait que les cultures ont parfois été prélevées après l’administration de la première dose d’antibiotique. Cette étude confirme néanmoins que les examens complémentaires habituels pratiqués en milieu hospitalier ne sont pas optimaux en matière d’étiologie microbiologique et suggère que les PAC sévères pourraient être trop souvent traitées par antibiotiques à tort compte tenu d’une étiologie virale qui semble prédominante.
Les cliniciens rencontrent souvent des difficultés à poser un diagnostic précis aux urgences en cas de symptômes mal systématisés. Cette étude6 prospective a évalué la proportion de diagnostics manqués aux urgences ou après hospitalisation à l’Hôpital universitaire de Bâle, chez des adultes avec plaintes telles que « se sentir mal », « faiblesse », « fatigue », « baisse de l’état général ». L’objectif était de comparer le diagnostic primaire (sortie de l’hôpital) avec un gold standard défini 30 jours plus tard, basé sur toutes les informations médicales disponibles, y compris celles émanant du médecin traitant. Les 572 dossiers étudiés concernaient des cas non traumatiques de faible degré d’urgence chez des seniors (âge médian 81 ans, 61 % de femmes).
Le diagnostic primaire était globalement correct chez 46 % des patients aux urgences et augmentait modestement à 51 % après hospitalisation. A noter que les diagnostics étaient plus souvent incorrects chez les femmes (62 %) que chez les hommes (46 %) (p = 0,004). Parmi les diagnostics finaux fréquents, seuls 47, 53 et 68 % des infections urinaires, troubles électrolytiques et pneumonies étaient initialement identifiés.
Les auteurs expliquent cette proportion élevée de diagnostics manqués par la multiplicité et la complexité des problèmes de santé des personnes âgées fragiles, les difficultés de prise d’anamnèse dans cette population, les biais d’ancrages initiaux, la tendance d’attribuer les plaintes à des causes psychosomatiques chez les femmes et la surcharge du service d’urgences.
Cette étude illustre la marge d’amélioration potentielle de la prise en charge initiale de plaintes non spécifiques chez les personnes âgées. Particulièrement préoccupant est le manque d’effet correcteur de l’hospitalisation sur les diagnostics incorrects posés aux urgences. Il reste à déterminer l’impact sanitaire et économique de cet état de fait et surtout d’interventions visant à améliorer la qualité des diagnostics initiaux.
Il a été démontré que la privation de sommeil avait une influence négative sur le système immunitaire in vitro et des données récentes évoquent un possible effet in vivo.7 Pour explorer cela, les auteurs de cette recherche8 ont analysé la susceptibilité de participants sains à développer une infection des voies respiratoires cinq jours après une exposition au rhinovirus 39 en fonction du nombre d’heures de sommeil mesurées par actigraphie durant la semaine précédent l’exposition virale. Les critères définissant l’infection virale comprenaient l’apparition d’anticorps et des symptômes cliniques (quantité de mucus nasal ou temps de clairance mucociliaire nasale augmenté). Après ajustement pour les facteurs confondants (dont la saison), les participants ayant dormi moins de cinq heures par nuit (Odds ratio : 4,5 ; IC 95 % : 1,08-18,69) ou entre cinq et six heures (OR : 4,24 ; IC 95 % : 1,08-16,71) présentaient un risque nettement plus élevé de développer une infection que ceux qui avaient dormi au moins sept heures. Une raison de plus de recommander une bonne hygiène du sommeil à nos patients.
Le lien entre tabagisme et maladies cardiovasculaires n’est plus à démontrer. Une méta-analyse,9 comprenant 25 cohortes prospectives totalisant 503 905 adultes de 60 ans et plus, a été réalisée dans le but de déterminer le poids du tabagisme sur l’espérance de vie et l’impact du sevrage sur la mortalité cardiovasculaire, l’incidence des événements coronariens aigus et des AVC. Spécifiquement, les auteurs ont tenté de déterminer le nombre d’années de vie perdues par mortalité cardiovasculaire chez les fumeurs et ex-fumeurs par rapport à une population non fumeuse. Au total, 37 952 décès ont été enregistrés durant un suivi de huit à treize ans. Les fumeurs actifs avaient un risque de décès significativement plus élevé que les non-fumeurs (hazard ratio : 2,07 ; IC 95 % : 1,82-2,36) et que les fumeurs sevrés (HR : 1,37 ; IC 95 % : 1,25-1,49). Le nombre d’années de vie perdues était de 5,5 (IC 95 % : 4,25-6,75) pour les fumeurs actifs et de 2,2 (IC 95 % : 1,38-2,39) pour les anciens fumeurs comparés aux non-fumeurs. L’excès de mortalité CV chez les fumeurs augmente avec la consommation de cigarettes (dose-réponse) et diminue avec la durée depuis l’arrêt du tabac chez les anciens fumeurs. On retrouve des résultats similaires pour les événements coronariens aigus et les AVC.
Même à un âge avancé, le sevrage peut réduire l’excès de risque d’événement et de mortalité cardiovasculaires engendré par le tabac. Etant donné le vieillissement de la population et l’incidence croissante d’événements et de mortalité cardiovasculaires liés à l’âge, ces données apportent de solides arguments pour la mise en place de stratégie de sevrage du tabac ciblant ce groupe.
En Suisse, on dénombre 17 000 cas de zona annuels dont 2400 compliqués de névralgies postzostériennes.10 Le vaccin vivant atténué actuel voit son efficacité diminuer avec l’âge des patients et est contre-indiqué en cas d’immunosuppression. Un nouveau vaccin recombinant a montré une meilleure immunogénicité en phases précliniques. Cette étude de phase 311 en a testé l’efficacité chez des adultes de plus de 50 ans au cours d’un essai randomisé et contrôlé vs placebo mené dans dix-huit pays. Les personnes préalablement vaccinées ou ayant eu un zona par le passé ont été exclues. Tous les participants ont reçu deux injections intramusculaires à deux mois d’écart. Bien que le fabricant était le promoteur de l’essai, les analyses ont été effectuées par un comité indépendant.
L’objectif primaire était de mesurer l’efficacité contre la survenue d’un premier épisode de zona avec un suivi médian de 3,2 ans. Il y a eu 7698 vaccinés et 7713 recevant le placebo. Parmi les vaccinés, six ont fait un zona comparés à 210 dans le groupe placebo. Pour la cohorte complète, l’efficacité était de 96,2 % (IC 95 % : 92,7-98,3 ; p < 0,001), avec une variation selon les tranches d’âge par décennie non significative. On a identifié 17 % de réactions de grade 3 (limitant les activités de la vie quotidienne) dans le groupe vacciné et 3,2 % dans le groupe placebo. En termes d’événements indésirables graves, il n’y a pas de différence significative entre les deux groupes.
Ces résultats sont probants dans la population des personnes à risque de survenue d’un premier épisode. Avant de recommander le vaccin, il conviendra d’établir le rapport coût/utilité pour la population générale et celles plus à risque étant donné la proportion non négligeable d’effets indésirables.
Les compétences en santé (health literacy) font l’objet d’une attention croissante dans les soins et en santé publique en tant que facteurs associés et possiblement explicatifs de certaines différences de santé. Leur définition prend en considération le contexte, notamment celui lié au système de santé, dans lequel elles sont déployées dans les champs de la prévention, la promotion de la santé et du soin tout au long de l’existence de l’individu. L’Europe manquant de données populationnelles comparatives, un consortium de huit pays, sans la Suisse, a développé un outil de mesure (HLS-EU-Q) appliqué à un échantillon aléatoire de mille personnes par pays.12
Les scores moyens et leurs déviations standards varient substantiellement entre et au sein des pays, attestant d’inégalités inter et intrapopulationnelles, et démontrant globalement des compétences moyennes à faibles, distribuées selon un gradient socio-économique, éducationnel et lié à l’âge avancé.
Ces résultats apportent une pierre supplémentaire à l’édifice conceptuel des déterminants de santé. Les médecins de premier recours peuvent contribuer à améliorer la situation et réduire les inégalités en intégrant cette dimension à l’évaluation globale du patient et en renforçant leurs compétences. Des techniques de communication telles que le teach back sont utiles en ce sens. La recherche doit permettre d’affiner des outils adaptés à la pratique et de mieux établir les bénéfices précis sur la santé et l’impact économique à long terme d’une approche combinant l’amélioration des compétences individuelles, particulièrement au sein des groupes vulnérables, à l’adaptation des systèmes de santé. A la Suisse de jouer maintenant.
▪ Les nouveaux anticoagulants oraux semblent une alternative sûre et efficace aux antivitamines K lorsqu’initiés avant la cardioversion d’une fibrillation auriculaire non valvulaire
▪ Le baclofène pourrait améliorer le maintien de l’abstinence chez l’alcoolo-dépendant avec une tolérance acceptable
▪ Le bilan bactériologique des pneumonies communautaires hospitalisées montre une proportion importante de causes virales
▪ Il existe une proportion élevée de diagnostics manqués dans la prise en charge de patients âgés se présentant aux urgences pour des plaintes non spécifiques
▪ Le manque de sommeil augmente le risque d’infection virale respiratoire
▪ En termes de gain d’années de vie, il y a un intérêt à promouvoir l’arrêt du tabac même à un âge avancé
▪ Un vaccin recombinant contre le zona, chez les personnes de 50 à 70 ans, pourrait être disponible dans un futur proche et offrir une meilleure protection que le vaccin vivant atténué
▪ Les médecins de premier recours peuvent contribuer à réduire les inégalités de santé en intégrant le concept de health literacy à l’évaluation globale du patient et en renforçant leurs compétences