La téléconsultation est soumise aux mêmes règles que celles de la consultation en présentiel. Le médecin souhaitant l’intégrer à son activité doit cependant être sensibilisé à un certain nombre d’exigences liées à cette pratique comme la nécessité d’adapter son environnement de travail, satisfaire aux règles de sécurité, s’assurer de la continuité de l’information médicale ou encore connaître les bonnes pratiques et les possibilités de facturation. Dans cet article, nous tentons de répondre aux questions fréquentes des professionnels de la santé qui souhaitent réaliser des consultations à distance dans de bonnes conditions.
La situation sanitaire de ces derniers mois a favorisé le développement rapide de la télémédecine et plus particulièrement de la vidéoconsultation. Si cette nouvelle pratique répond aux mêmes exigences que l’exercice en présentiel, le médecin doit cependant parer à plusieurs aspects spécifiques liés à la vidéoconsultation, que ce soient des aspects technologiques ou liés à la distance physique avec le patient. Nous tentons de définir un cadre pour la pratique de la médecine à distance afin d’aider les médecins à aborder les téléconsultations sereinement tout en garantissant à leurs patients une prise en charge de qualité.
Le nombre de solutions à disposition des professionnels a augmenté avec la pandémie. Pour ce qui est de la vidéoconsultation, le professionnel de la santé pourra utiliser des solutions qui ne sont pas spécifiques à la télémédecine1 ou des solutions ayant exclusivement un usage médical, à l’image de docteur@home développé par les HUG. Le médecin souhaitant initier une activité de téléconsultation doit se renseigner sur les différentes possibilités mises à sa disposition. L’existence d’une messagerie instantanée (LiveChat), la possibilité d’envoyer une pièce jointe comme une ordonnance, d’inviter une tierce personne à la consultation, l’intégration au dossier médical informatisé ou encore d’un outil de facturation sont autant de possibilités qui pourront influencer le choix.
Il n’existe actuellement pas de références de bonnes pratiques en télémédecine en Suisse. Cependant, l’Association américaine de télémédecine (ATA), le Comité permanent des médecins européens (CPME) ainsi que la Haute Autorité de santé (HAS) en France ont élaboré des lignes directrices sur la pratique de la télémédecine qui peuvent servir de bases à la pratique de la téléconsultation.2-6 Comme la médecine à distance est une pratique nouvelle de médecine, il est vivement recommandé que les professionnels de la santé qui souhaitent soigner des patients à distance suivent une formation spécifique pour acquérir les connaissances et les compétences nécessaires à une médecine à distance de qualité.
Le médecin doit s’installer dans un environnement lui permettant de travailler sereinement, sans être distrait ni dérangé. L’espace dédié doit lui permettre de garantir la confidentialité des données qui seront échangées, mais aussi la qualité et la sécurité de la téléconsultation. Il doit également s’assurer de pouvoir être convenablement vu et entendu du patient en adaptant son environnement matériel et en vérifiant la fonctionnalité et la qualité des outils informatiques utilisés (son, vidéo, éclairage, connexion internet, etc.). Afin de pouvoir prendre en charge correctement son patient, le médecin doit également avoir à sa disposition les informations concernant son dossier médical. Il doit pouvoir s’y référer facilement durant la consultation.
Le médecin doit, préalablement à la téléconsultation, s’être renseigné sur les ressources médicales à proximité du patient. Il doit ainsi être en capacité, si un examen clinique ou une intervention s’avère nécessaire, d’orienter son patient vers un centre médical ou un service d’urgences dans un délai adapté.
Lorsqu’un médecin accepte de conseiller ou de répondre à des questions médicales à distance entre absents (e-mail, SMS ou autres messages électroniques non instantanés), il doit en définir les modalités avec son patient au préalable et décider comment se comporter en cas d’absence de réponse.7 Configurer un message d’absence automatique, indiquer qu’aucune prise en charge du patient ne se fait en cas d’absence de réponse du médecin ou le rediriger ailleurs éviteront d’engager sa responsabilité s’il ne fait rien. Cela implique la constitution d’un contrat de mandat ainsi que le respect par le médecin de son obligation de diligence pour les questions soumises. Il est donc recommandé au médecin d’indiquer quand et à quelles conditions ce dernier refuse la prise en charge du cas pour ne pas devoir agir selon son obligation de diligence vis-à-vis du patient.
Selon l’ATA, il n’est pas recommandé d’avoir recours à la télémédecine en cas de barrière linguistique, le médecin pratiquant la télémédecine ayant la responsabilité de s’adapter si le patient a des difficultés de compréhension ou nécessite la présence d’un interprète. Il est néanmoins possible aujourd’hui avec les nouvelles solutions technologiques d’inviter un interprète lors d’une téléconsultation par téléphone ou par vidéo avec un patient allophone ou un proche pour la traduction, comme ce sera le cas très prochainement avec l’application HUG@home développée aux HUG.
Préalablement à la téléconsultation, le médecin doit informer le patient par oral ou par écrit sur le déroulement de la téléconsultation et ses particularités par rapport aux consultations en face-à-face. Plus la téléconsultation aura un impact sur la manière de conseiller ou examiner le patient, plus l’information devra être complète.
L’information doit comprendre la présence d’alternatives possibles, la possibilité d’être accompagné, la confidentialité des échanges, le traitement informatique des données à caractère personnel, la protection et la sécurité des données de santé, le coût de la consultation et le reste à charge. Elle doit être simple, claire et complète afin que le patient puisse librement consentir ou non au recours à la télémédecine. Elle peut s’accompagner d’une notice d’information remise au patient. Le recueil du consentement libre et éclairé du patient ou, le cas échéant, de son représentant légal reste nécessaire pour tout acte médical, incluant l’acte à distance via les technologies de l’information et de la communication.
Lorsque le médecin se connecte à un système informatique auquel il a des droits d’accès, il doit s’authentifier. Quels que soient les dispositifs choisis, il est recommandé d’avoir recours à au moins deux modes d’authentification afin de s’assurer de la sécurité d’accès (mot de passe, code SMS, carte à puce…). L’authentification à double facteur est l’un des principes de base de la sécurité informatique.
En cas de téléconsultation, en particulier lorsque le patient n’est pas visible (téléphone, téléconférence par Internet sans image vidéo, e-mail, messages en différé, etc.), le médecin doit employer des moyens raisonnables pour s’assurer de l’identité de son patient. Cela lui permettra de pouvoir récupérer les données du dossier médical, d’y joindre un compte-rendu de la consultation, mais aussi de pouvoir recontacter son patient si la téléconsultation est interrompue et d’éviter les fraudes, notamment lors de la délivrance de prescription par voie électronique ou sans contact visuel.
Les patients s’attendent en général à échanger avec un médecin. Pourtant, dans le cas des centres d’appels, notamment organisés par des assurances, les patients sont principalement mis en relation avec des infirmiers ou des assistants médicaux. Il convient que les patients soient explicitement avertis si l’interlocuteur n’est pas un médecin, à des fins de transparence et de confiance. À noter que pour être rigoureux, la téléconsultation se définit comme un avis médical dispensé à distance par un médecin, alors que l’on parle de téléconseil pour un acte de télémédecine dispensé par tout autre professionnel de la santé.
Tout acte médical ne peut pas être effectué à distance, même avec des moyens et technologies récents. La téléconsultation limitant l’examen clinique, il incombe au médecin d’adapter sa pratique afin d’assurer à tout prix la sécurité du patient. Il doit être attentif à l’anamnèse, aux signes cliniques et au contexte global. Après avoir évalué les risques, il lui appartient de proposer au patient la conduite à tenir : il peut l’adresser à une structure de soins dans un délai adapté à la situation, proposer une prise en charge à distance, incluant ou non la prescription d’examens complémentaires et de traitements. L’évaluation du degré d’urgence est un point central de la téléconsultation, élément que le patient n’est pas à même d’apprécier lui-même. Les principales barrières à la prise en charge en téléconsultation sont résumées dans le tableau 1.
À la fin de la téléconsultation, le médecin transmet les éventuelles prescriptions médicales et/ou rapport de consultation au patient dans un délai convenu avec ce dernier. Un compte-rendu de ses observations, inscrit dans le dossier médical informatisé et dans le dossier électronique du patient (DEP) s’il existe, permet d’assurer la continuité de l’information médicale. Celui-ci devrait mentionner au minimum la date et l’heure de la consultation, les actes et prescriptions médicamenteuses effectués, l’identité des professionnels de santé participant à la consultation ainsi que, le cas échéant, les incidents techniques survenus au cours de l’acte.3
En dehors de la phase aiguë de la pandémie, le système de tarification Tarmed prévoit uniquement des positions pour la facturation de la consultation téléphonique.9 Depuis janvier 2018, l’Office fédéral de la santé publique (OFSP) précise que « si la consultation par courriel répond aux critères d’adéquation, d’économicité et d’efficience, elle peut en principe être facturée avec les positions de la consultation téléphonique ». En dehors du téléphone et du courriel, rien n’est prévu. En effet, la vidéoconsultation n’est toujours pas valorisée comme une pratique médicale à part entière, ce qui constitue un frein à son déploiement. Une tarification adaptée devrait favoriser le recours à cette pratique par les professionnels de la santé.
La pandémie liée au Covid-19 a accéléré le développement de la téléconsultation et plus particulièrement de la vidéoconsultation, déjà sollicitée par les patients. Les professionnels de la santé qui soignent des patients à distance devraient suivre une formation pour acquérir les connaissances nécessaires à la pratique d’une médecine à distance de qualité. Sous ces conditions, les principales limites de la téléconsultation sont moins nombreuses que l’on pourrait imaginer : nécessité d’un examen physique ou un geste technique, difficultés de communication (maîtrise insuffisante de la langue ou troubles cognitifs) ou encore équipement de téléconsultation insuffisant. La connaissance des particularités de cet exercice, le choix d’une solution appropriée, l’adaptation de la pratique clinique et le respect des recommandations professionnelles permettront aux médecins d’être à l’aise avec les nouvelles technologies de communication et d’offrir à leurs patients des téléconsultations de qualité.
Les auteurs n’ont déclaré aucun conflit d’intérêts en relation avec cet article.
• Le choix d’une solution appropriée et l’adaptation de l’environnement sont des prérequis nécessaires à la mise en place d’une activité de téléconsultation
• S’assurer de l’identité du patient, adapter sa pratique aux outils utilisés et maintenir la continuité de l’information médicale sont un gage de sécurité et d’une prise en charge de qualité
• À l’exception des positions prévues pour les consultations téléphoniques, le système de tarification Tarmed ne valorise pas le recours à la vidéoconsultation
La téléconsultation est soumise aux mêmes règles que celles de la consultation en présentiel. Le médecin souhaitant l’intégrer à son activité doit cependant être sensibilisé à un certain nombre d’exigences liées à cette pratique comme la nécessité d’adapter son environnement de travail, satisfaire aux règles de sécurité, s’assurer de la continuité de l’information médicale ou encore connaître les bonnes pratiques et les possibilités de facturation. Dans cet article, nous tentons de répondre aux questions fréquentes des professionnels de la santé qui souhaitent réaliser des consultations à distance dans de bonnes conditions.
Recevez une fois par semaine, le résumé des actualités Covid-19 par email.
Je m’inscrisRetrouvez les conférences du colloque du 2 Juillet 2020 organisé par Unisanté dans la rubrique Colloques/Unisantéil.
Accéder aux conférences