Moins de quatre mois après l’émergence, en Chine, du SARS-CoV-2 on peinerait à recenser, à travers le monde, tous les programmes de recherche scientifique visant à mieux comprendre et à lutter contre la pandémie de Covid-19. Plusieurs, déjà, émergent et les informations qui sont données les concernant permettent de prendre date dans une perspective vaccinale.
Depuis son siège de New Brunswick (New Jersey), la multinationale pharmaceutique Johnson & Johnson annonçait il y a quelques jours1 qu’elle venait de sélectionner un « candidat vaccin Covid-19 » à partir d’études sur lesquelles elle travaille depuis janvier 2020. Elle annonçait aussi une « augmentation rapide de la capacité de production dans le but de fournir au niveau mondial plus d’un milliard de doses de vaccins ». Johnson & Johnson prévoit de commencer les études cliniques chez l’homme au plus tard en septembre 2020. Elle prévoit aussi que les premiers lots d’un vaccin COVID-19 « pourraient être disponibles pour une autorisation d’utilisation d’urgence au début de 2021 ».
La multinationale américaine dit avoir commencé ses travaux en janvier 2020, dès que la séquence du nouveau coronavirus est devenue disponible, pour rechercher des candidats vaccins potentiels. Les équipes de recherche de Janssen, en collaboration avec le Beth Israel Deaconess Medical Center, qui fait partie de la Harvard Medical School, ont identifié et testé plusieurs candidats vaccins. Puis, grâce à des collaborations établies avec des scientifiques de plusieurs institutions universitaires, les vaccins identifiés ont ensuite été testés pour sélectionner ceux qui étaient les plus prometteurs pour produire une réponse immunitaire lors des essais précliniques.
Sur la base de ces travaux, un « candidat vaccin Covid-19 de premier plan » a pu être identifié. Grâce à un calendrier accéléré, la firme vise le lancement d’une étude clinique de phase 1 en septembre 2020, avec des données cliniques sur la sécurité et l’efficacité qui devraient être disponibles d’ici la fin de l’année. « Cela pourrait permettre la disponibilité du vaccin pour une utilisation d’urgence au début de l’année 2021, précise-t-elle. À titre de comparaison, le processus classique de développement d’un vaccin implique un certain nombre d’étapes de recherche différentes, s’étendant sur cinq à sept ans, avant même qu’un candidat ne soit considéré pour approbation. »
Les premiers lots d’un vaccin COVID-19 pourraient être disponibles pour une autorisation d’utilisation d’urgence au début de 2021
Son programme s’appuie sur les technologies éprouvées AdVac® et PER.C6® de Janssen qui permettent de développer rapidement de nouveaux candidats vaccins et de produire à grande échelle. La même technologie avait été utilisée pour développer et fabriquer le vaccin Ebola et construire nos candidats vaccins Zika, RSV et VIH qui sont en phase 2 ou 3 de développement clinique.
Johnson & Johnson parle encore d’un « partenariat historique » avec BARDA (Biomedical Advanced Research and Development Authority), qui relève de l’Office chargé des préparatifs et réponses aux situations d’urgence en santé publique du ministère américain de la Santé. Les deux ont conjointement engagé plus d’un milliard de dollars d’investissement pour cofinancer la recherche, le développement et les essais cliniques de ce vaccin ; avec un financement supplémentaire « qui permettra d’étendre leurs travaux communs en cours pour identifier des traitements antiviraux potentiels contre le SARS-CoV-2 ».
La multinationale annonce qu’elle développe également la capacité de production mondiale, notamment par la mise en place de nouvelles capacités de fabrication de vaccins aux États-Unis et par l’extension des capacités dans d’autres pays. « Nous apprécions grandement la confiance et le soutien du gouvernement américain pour nos efforts », a déclaré le Dr Paul Stoffels, directeur scientifique de Johnson & Johnson. La firme prend soin de préciser que depuis plus de vingt ans, elle a « investi des milliards de dollars dans les antiviraux et les vaccins ».
Pour sa part Sanofi Pasteur, l’entité mondiale Vaccins de Sanofi, annonçait fin février qu’elle mettait à profit ses recherches antérieures sur le syndrome respiratoire aigu sévère (SRAS) pour tenter d’accélérer le développement d’un vaccin contre le Covid-19 – également en coopérant avec la BARDA américaine.
« Dans le cadre d’études non cliniques menées sur des animaux, le vaccin-candidat contre le SRAS avait montré qu’il était immunogène et conférait une protection partielle, expliquait alors Sanofi Pasteur. Ce travail expérimental mené par Protein Sciences, dont Sanofi a fait l’acquisition en 2017, donne une longueur d’avance à Sanofi dans la mise au point rapide d’un vaccin contre le Covid-19. De surcroît, l’existence d’un vaccin homologué fondé sur cette technologie permettra à l’entreprise de mener des recherches et de produire du matériel dans des délais relativement courts en vue de tests cliniques. La plateforme de Sanofi est également capable de produire le vaccin-candidat en grandes quantités. »
Plus récemment, Sanofi a fait savoir qu’il allait coopérer avec la biotech américaine Translate Bio. Les deux entreprises étudieront conjointement plusieurs candidats en vue de l’entrée en phase clinique d’un vaccin contre le SARS-CoV-2. Des recherches sont également conduites au sein de l’Institut Pasteur de Paris qui vient de faire le point sur l’ensemble de ses projets.2 Une « Task Force » réunissant un petit groupe multidisciplinaire de scientifiques et les responsables des services concernés a été constituée, coordonnée par le Pr Christophe d’Enfert, directeur scientifique, et le Pr Bruno Hoen, directeur de la recherche médicale de l’Institut Pasteur.
Parmi les différents thèmes retenus, la recherche vaccinale figure en bonne place. « Fort de son expertise historique en vaccinologie, l’Institut Pasteur mène actuellement trois projets pour proposer des candidats vaccins contre le Covid-19 » explique-t-on à Paris. Le premier projet, qui a reçu un financement de la part de CEPI (Coalition for Epidemic Preparedness Innovations) repose sur l’utilisation du vaccin de la rougeole comme vecteur d’un nouveau candidat vaccin contre le SARS-CoV-2.
On sait qu’en utilisant le vaccin contre la rougeole comme vecteur, des vaccins recombinants ont pu être conçus pour exprimer des antigènes d’autres agents pathogènes (fragments du virus du sida, de la dengue, du Nil occidental, de la fièvre jaune, de la fièvre de Lassa, ou d’autres maladies émergentes). Leur potentiel vaccinal chez l’homme a pu être démontré dans le cas du Chikungunya (essai de phase III en cours). « Cette stratégie très prometteuse est donc appliquée au SARS-CoV-2 avec la possibilité d’aboutir à une application chez l’homme à l’automne 2021 » souligne l’Institut Pasteur.
Le deuxième projet vise à développer un candidat-vaccin contre le SARS-CoV-2, basé sur des vecteurs vaccinaux lentiviraux. L’intérêt des vecteurs lentiviraux vaccinaux réside dans leur grand potentiel d’induction de réponses immunitaires adaptatives durables. Les chercheurs ont déjà établi la remarquable efficacité protectrice de ces vecteurs chez la souris dans plusieurs situations (contre des infections à papillomavirus ou à certains flavivirus par exemple) et un vecteur à base de lentivirus a également été étudié avec succès dans un essai de phase 1 sur un vaccin contre le VIH, qui a établi son innocuité chez l’homme.
Le troisième projet, enfin, consiste à évaluer l’immunogénicité et l’efficacité de candidats vaccins à base d’ADN. « La vaccination par ADN est une technique de protection contre les maladies par injection d’ADN codant pour un antigène d’intérêt, rappelle-t-on à Pasteur. L’ADN injecté entraîne une réponse immunologique protectrice, par exemple par la production d’anticorps contre l’antigène. » Aucune date n’est ici avancée.
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