En franchissant le cap du milliard d'habitants en août 1999, l'Inde exerce une forte pression sur son service de santé national, ce qui pourrait expliquer le grand nombre de femmes et d'enfants actuellement en très mauvaise santé (Lancet 2000 ; 356 : 1830). La deuxième étude d'ampleur nationale sur la santé des familles indiennes, qui a été publiée le 16 novembre 2000, a permis de constater que plus d'un tiers des femmes sont sous-alimentées et 47% des jeunes enfants ont un poids trop faible.
Financée par l'Agence américaine pour le développement international et l'Unicef, cette étude a porté sur 90 000 femmes et enfants en 1998 et 1999. Elle constitue la seconde étude gouvernementale d'une telle envergure sur la santé et l'alimentation des femmes et des enfants en Inde la seconde ayant été effectuée en 1992-93.
Environ la moitié des femmes interrogées n'ont pas la possibilité de participer à la prise de décision en ce qui concerne leur santé, indique l'étude. «Près de quatre femmes mariées sur dix rapportent au moins un problème en médecine de la procréation qui pourrait être symptomatique d'une infection plus sérieuse des organes reproducteurs», annonce le rapport. Bien que la malnutrition soit un sérieux problème au niveau national, l'obésité émerge chez les femmes qui vivent dans les villes. Ainsi, environ 30% des femmes qui vivent dans les régions du Punjab et de New Delhi sont obèses.
Environ 52% des femmes mariées âgées de 15-49 ans et 74% des jeunes enfants sont anémiques. L'anémie est la maladie la plus fréquente dans l'Etat de l'Assam où 70% des femmes sont anémiques. Parmi les enfants, l'anémie est commune dans les Etats de l'Haryana, du Rajasthan, du Bihar et du Punjab, où au moins 80% des enfants sont anémiques. Ces résultats sont très préoccupants parce que «chez les jeunes enfants, l'anémie peut nuire aux performances cognitives, aux développements moteur et du comportement, aux résultats scolaires et rendre susceptible aux maladies infectieuses».
Bien que l'Inde connaisse l'un des plus forts taux de VIH dans le monde, la conscience du risque que représente ce virus et le sida chez les femmes reste très faible, tout spécialement dans les régions rurales. L'étude révèle que seule une proportion de 40% des femmes en âge de procréer a entendu parler du sida. Toutefois, une éducation élémentaire permet aux femmes de prendre conscience du sida. L'étude révèle que seules 18% des femmes illettrées ont entendu parler du sida alors que 92% des femmes qui ont reçu une éducation complète à l'école savent de quoi il s'agit.
L'étude, qui a également passé en revue l'attitude des femmes vis-à-vis de la vie domestique, révèle que 56% des femmes estiment qu'il est justifié que les femmes soient battues. Celles qui sont en faveur d'un tel traitement suggèrent qu'une femme mérite d'être battue lorsqu'elle néglige la maison ou les enfants, manque de respect à l'égard des règles de la vie de famille, est infidèle ou fait mal la cuisine. Le rapport note également qu'«au moins une femme sur cinq a été battue ou physiquement maltraitée depuis l'âge de 15 ans, le plus habituellement par le mari».
J. Mirenowicz