Nous poursuivons ici l'analyse récemment faite par l'Agence nationale française d'accréditation et d'évaluation en santé (Anaes) sur le thème du traitement des anévrismes intracrâniens rompus et de l'alternative occlusion par voie endovasculaire versus exclusion par microchirurgie (Médecine et Hygiène no 2339 du 21 mars 2001). Les experts de l'Anaes observent que l'exclusion par microchirurgie des anévrismes rompus est une technique ancienne ayant atteint un certain degré de stabilité quant à son évolution technologique et qu'en dépit du faible recul dont on dispose pour évaluer l'occlusion endovasculaire leur évaluation avait montré la faisabilité de cette technique et sa bonne tolérance. Pour autant, ils reconnaissent ne pas avoir atteint leur objectif qui visait à établir une comparaison économique de ces deux approches thérapeutiques. «Devant le manque d'études cliniques de qualité méthodologique correcte et l'insuffisance de littérature économique se basant sur des hypothèses cliniques valides, une évaluation économique en termes d'études coût-avantage n'a pas pu être menée, expliquent-ils. Cependant, des informations sur les coûts engagés par les deux stratégies ont pu être dégagées, d'une part, au travers des articles disponibles, et d'autre part, par l'intermédiaire de la construction d'un parcours type de prise en charge d'un patient présentant un anévrisme rompu.»Les principales conclusions de l'analyse de la littérature mettent en évidence l'influence de la durée de séjour en unité de soins intensifs sur le coût des stratégies, celle-ci étant liée à l'âge, à l'état clinique du patient et au moment auquel est effectuée l'intervention par rapport à la survenue de l'hémorragie. D'autres facteurs sont également évoqués, comme la place faite à l'angiographie dans la prise en charge des patients, c'est-à-dire si celle-ci est faite en systématique ou non après l'intervention, ainsi que l'équipement utilisé pour cette intervention.«Si la différence de prix entre les clips et les microspires (valant respectivement 3000 FF et 25 000 FF) est importante, ce critère ne peut à lui seul être discriminant, l'ensemble des coûts doit être pris en compte. Dans cette perspective, le parcours type validé par le groupe de travail a permis de lister les étapes par lesquelles passe le patient de son admission jusqu'à son suivi, écrivent les experts. Au-delà de l'intervention elle-même, il est apparu que la différence entre les deux stratégies de prise en charge s'établissait au niveau du suivi des complications : le type d'examens réalisés, leur fréquence et la durée du suivi divergent (nombre de consultations et type d'examens d'imagerie médicale). Par ailleurs, selon les équipes, certaines pratiques diffèrent : utilisation de la nimodipine, des anticonvulsivants, du Doppler transcrânien, ou d'une artériographie de contrôle de la qualité de l'occlusion. Le suivi est donc un élément qui devrait apparaître de façon précise dans les études dans la mesure où cela pourrait influencer de façon décisive les coûts des stratégies.»En fait selon les experts, il conviendrait de ne pas voir dans l'occlusion endovasculaire et la microchirurgie des méthodes concurrentes mais bel et bien complémentaires. Les propositions du groupe de travail sont les suivantes : le choix du traitement d'un anévrisme rompu doit reposer sur un bilan morphologique de qualité (artériographie), mais aussi sur l'âge du patient, son état clinique préopératoire, l'existence éventuelle de complications secondaires à l'hémorragie. Le choix du meilleur traitement pour le patient doit être fait au terme d'une discussion multidisciplinaire faisant intervenir neurochirurgiens, neuroradiologues interventionnels et anesthésistes-réanimateurs. «Cela ne doit en aucun cas retarder la prise en charge des patients et la mise en route du traitement, qui reste une urgence thérapeutique, observent-ils. L'occlusion ou l'exclusion d'un anévrisme rompu doit être la plus complète possible. C'est pourquoi un contrôle de la qualité de l'occlusion ou de l'exclusion est nécessaire en postopératoire immédiat, et une surveillance du résidu doit être discutée. Un bilan neuropsychologique doit être systématiquement réalisé pour les patients traités pour une rupture d'anévrisme au niveau de l'artère péricalleuse ou de l'artère communicante antérieure (pour les autres localisations, la nécessité d'un tel bilan est à discuter au cas par cas). Il conviendrait de développer des consultations pluridisciplinaires faisant intervenir : orthophoniste, ergothérapeute, orthoptiste, médecin rééducateur pour le suivi à long terme de ce type de patients.» (A suivre)