Cet article résume les acquisitions récentes dans le domaine de l'allergologie. La prévalence des allergies et de l'asthme est en augmentation et les raisons de cette progression restent controversées. L'interaction entre le patrimoine génétique et les facteurs de l'environnement semble à l'origine du développement des maladies allergiques. Des nouvelles découvertes scientifiques et des approches thérapeutiques ont vu le jour pendant cette dernière année. Nous avons sélectionné celles qui nous ont semblé importantes.
Jamais plus que maintenant l'allergologie n'aura fait parler autant d'elle. C'est un sujet d'actualité qui est régulièrement traité dans les médias pour grand public. En effet, la prévalence de l'asthme et de l'allergie est en augmentation. Selon les estimations de la World Allergy Organisation, plus de 40% de la population mondiale serait atopique. L'interaction entre la prédisposition génétique et les facteurs de l'environnement influence le développement des maladies allergiques telles que la rhinite allergique, la dermatite atopique et l'asthme. Une fois que la maladie allergique est établie, peu de traitements sont efficaces pour modifier l'histoire naturelle de la maladie. Bien que la prévention reste un outil majeur pour l'allergologue, de nouvelles approches thérapeutiques ont vu le jour récemment ou sont en cours d'exploration. Le but de cet article est de vous faire part des contributions récentes qui nous ont semblé pertinentes dans l'approche génétique et environnementale, ainsi que clinique et thérapeutique. Il s'agit d'un survol et non d'une approche exhaustive.
Depuis quelques années, un nombre croissant de données dans le domaine de la génétique sont disponibles pour l'asthme et d'autres maladies allergiques. Une réponse lymphocytaire de type TH2 conduit à l'expression des IgE et l'atopie ; ces réponses semblent, selon des travaux récents, être sous contrôle héréditaire. Les études se sont focalisées sur l'IL-4 et l'IL-13 (chromosome 5) et leurs récepteurs polymorphiques (chromosome 16 et chromosome X). Ces cytokines interagissent avec les cellules épithéliales, les fibroblastes, les cellules T et B. D'autres gènes candidats comme le HLA et le TNF alpha (chromosome 6), les chémokines et leurs récepteurs FceR1 (chromosome 11) ont été identifiés. Dans le cas de la dermatite atopique, une maladie inflammatoire chronique de la peau touchant 10-20% de la population, une association avec le chromosome 13q12-14 et 5q31-33 a été mise en évidence récemment.1Ces nouvelles données encore théoriques pour le moment en allergologie, nous conduirons dans le futur, vers une médecine prédictive. Ces approches livreront tous leurs bénéfices quand des stratégies de traitement impliquant les gènes et leurs voies métaboliques seront développées.
Les influences de l'environnement restent cruciales dans l'expression des maladies allergiques, comme illustré par la grande variation dans la prévalence des allergies entre populations avec un héritage génétique similaire (Allemagne de l'Ouest-Allemagne de l'Est).
Les influences de l'environnement pourraient être divisées en deux catégories :
I protectrices : diète, exposition microbienne, familles nombreuses, facteurs socio-économiques et infections ;
I favorisantes : tabagisme, isolation des maisons, exposition aux allergènes, milieu professionnel, familles peu nombreuses.
Le facteur temps est également significatif pour l'exposition aux facteurs de l'environnement (vie in utero, petite enfance, adulte).2
Comme mentionné précédemment, grandir dans un milieu rural confère une protection contre le développement de l'atopie.3,4 Ces constatations soulignent l'importance d'une exposition à la poussière et aux animaux de la ferme. Il a également été rapporté que les endotoxines, une partie intrinsèque de la membrane des bactéries Gram-négatives sont abondantes dans cet environnement. Ces endotoxines bactériennes sont également connues pour induire l'interféron gamma et la production d'IL-12, diminuant potentiellement la sensibilisation aux allergènes.
Deux études,3,4 l'une pratiquée chez 61 enfants de 9 à 24 mois aux Etats-Unis et une autre auprès de familles suisses et du sud de l'Allemagne, montrent une association statistiquement significative entre exposition aux endotoxines et protection contre le développement d'une sensibilisation allergénique et d'une atopie dans l'enfance. Il s'agirait d'une stimulation de l'immunité de type 1.
Le type d'infections semble influencer la survenue des allergies. Comme mentionné dans l'étude de Matricardi et coll.5 l'allergie respiratoire et l'atopie sont moins fréquentes dans une population fortement exposée aux micro-organismes oro-fécaux et alimentaires (T. gondii, hépatite A, H. pylori).5 L'exposition aux micro-organismes alimentaires et oro-fécaux semble, comparativement aux virus respiratoires, avoir un meilleur effet protecteur pour la survenue d'un asthme. L'hygiène et le mode de vie occidental ainsi qu'une diète semi-stérile pourraient faciliter l'atopie en influençant à la fois la composition des bactéries commensales et pathogènes qui stimulent les tissus lymphoïdes digestifs contribuant à une «épidémie» d'asthme et de rhinite allergique. Les infections comme mentionné ont un rôle protecteur pour le développement des allergies. L'utilisation excessive d'antibiotiques pourrait également jouer un rôle dans le développement des allergies.
Une étude de Droste et coll. auprès d'enfants de 7 à 8 ans a montré que l'utilisation d'antibiotiques est associée avec un risque augmenté de développer de l'asthme et des désordres allergiques chez des enfants qui sont prédisposés à une réponse immune de type atopique.6Ces résultats sont en accord avec les connaissances récentes en matière de maturation du systèmes immunitaire.
L'asthme est une maladie inflammatoire chronique des voies respiratoires, caractérisée par une obstruction réversible des voies aériennes et une augmentation de la réactivité bronchique. Les «guidelines» pour le contrôle de cette affection recommandent l'utilisation de b2-agonistes, de corticostéroïdes inhalés et de nédocromil chez l'enfant.
L'utilisation de b2-agonistes de courte durée d'action avait été soumise à controverse il y a quelques années. En effet, des travaux avaient suggéré que l'utilisation de ces médicaments pouvait conduire à un moins bon contrôle de l'asthme et à des décès (Nouvelle-Zélande entre 1977-1989 et Royaume-Uni). L'étude TRUST (The Regular Use of Salbutamol Trial), pratiquée afin d'éclaircir ce doute, randomisée et en double aveugle, n'a pas montré d'évidence pour une exacerbation de l'asthme, après l'utilisation régulière de salbutamol inhalé à la dose de 400 mg quatre fois par jour pendant une année.7
Bien que cette étude montre une sécurité des b2-agonistes de courte durée d'action, ces médicaments restent à utiliser comme traitement ponctuel. L'utilisation de b2-agonistes de longue durée d'action en association avec les corticostéroïdes inhalés a prouvé une efficacité dans les symptômes de l'asthme, une amélioration de la fonction pulmonaire et une diminution du risque de crises. Les b2-agonistes de courte durée d'action sont donc à préférer comme traitement de secours de l'asthme, plus que comme un traitement régulier. Lors d'un traitement au plus long cours comprenant des bronchodilatateurs topiques, les b2-agonistes de longue durée d'action sont à favoriser par rapport à ceux de courte durée d'action.8,9
Les thérapies anti-inflammatoires comme les corticostéroïdes ou le nédocromil sont recommandées pour le traitement de l'asthme chez l'enfant, bien que l'information reste limitée sur leurs effets à long terme. Chez les enfants avec asthme léger à modéré, ni le budésonide (200 mg), ni le nédocromil (8 mg) ne semblent meilleurs que le placebo en ce qui concerne les fonctions pulmonaires. Cependant le budésonide diminue la réactivité bronchique et conduit à un meilleur contrôle de l'asthme que le placebo ou le nédocromil. Les effets secondaires du budésonide se limitent à une petite diminution transitoire de la croissance.10 D'autres données de la littérature sont rassurantes sur l'utilisation des corticostéroïdes inhalés chez l'enfant. Dans ce sens, une étude prospective conduite par Agertoff et coll. montre que les enfants avec asthme traités au long cours (moyenne de 9,2 années) par budésonide atteignent une taille adulte normale, bien que la croissance ait été significativement réduite pendant la première année de traitement.11
Une des tâches les plus délicates pour les médecins qui suivent les patients asthmatiques est de trier l'information afin d'offrir au patient le traitement le plus approprié. Au cours des deux dernières décennies, les médecins ont manifesté un intérêt croissant pour les articles de revues systématiques comme outils d'aide à la décision. Nous avons extrait quelques points importants d'un travail de recherche sur des revues récentes et des méta-analyses au sujet du traitement de l'asthme. Nous vous livrons ci-dessous quelques attitudes de consensus des auteurs des revues étudiées.
I L'utilisation de corticostéroïdes oraux ou i.v. précocement dans le traitement des exacerbations de l'asthme entraînerait une diminution des hospitalisations chez les adultes et les enfants.
I L'administration orale ou i.v. de stéroïdes semble avoir des effets équivalents sur les fonctions pulmonaires durant les exacerbations.
I Un traitement court de corticoïdes par voie générale après une exacerbation aiguë de l'asthme diminue le nombre de rechutes et l'utilisation de b2-agonistes, sans augmentation apparente des effets secondaires.
I L'ipratropium bromide semble augmenter le FEV1, mais n'induit pas d'amélioration clinique subjective.
I Une prophylaxie avec une dose unique de nédocromil de sodium (1-8 mg) inhibe la sévérité et la durée de la bronchoconstriction induite par l'exercice.11
I L'administration de bronchodilatateurs par inhalateur ou par nébulisateur est équivalente dans le traitement de l'asthme aigu.
La rhinite allergique touche environ 15-20%, parfois jusqu'à 40% de la population dans les pays occidentalisés. Ces implications sont majeures à la fois sur la qualité de vie et sur les aspects socio-économiques. Les anti-histaminiques sont le traitement de choix pour la rhinite épisodique, tandis qu'ils ont un rôle adjuvant quand ils sont couplés aux corticostéroïdes topiques, traitement à préférer dans la rhinite chronique. Bien que l'histamine ait toujours été considérée comme un médiateur important dans les réactions allergiques, des tests de provocation nasale ont montré, chez les patients allergiques, le relâchement d'autres médiateurs et en particulier les cystéinils leucotriènes. Ce relâchement a été corrélé avec des symptômes de rhinite. Le montelukast, un antagoniste des récepteurs des leucotriènes, a été administré seul ou en association avec la loratadine chez des patients avec rhinite saisonnière. L'administration concomitante de montelukast (10 ou 20 mg/j) et de loratadine (10 mg) s'est montrée un traitement efficace pour la rhinite (amélioration des symptômes de congestion, rhinorrhée, prurit et éternuement) et pour les symptômes oculaires associés et meilleure que les deux molécules séparément et que le placebo, avec un profil de sécurité comparable au placebo.12 Cette combinaison pourrait représenter une alternative intéressante dans certains cas de rhinite ne répondant que partiellement aux autres traitements.
Durant les dix dernières années, l'utilisation des corticostéroïdes nasaux s'est beaucoup répandue dans le traitement de la rhinite allergique. Il est bien connu que les stéroïdes oraux et inhalés13 sont associés à un risque augmenté de cataracte, mais le risque lié aux corticostéroïdes intranasaux est mal connu. Dans une étude rétrospective (Royaume-Uni) l'incidence de la cataracte chez les utilisateurs de corticostéroïdes topiques nasaux est équivalente à celle des non-utilisateurs. L'utilisation de corticostéroïdes intranasaux ne semble donc pas associée à une augmentation du risque de cataracte dans cette étude, mais d'autres travaux nous paraissent importants pour confirmer ces données.14
L'immunoglobuline E (IgE) a été identifiée comme étant un anticorps participant aux réactions allergiques de type I, et la réduction de son taux a été envisagée comme une option thérapeutique en clinique. Le rhuMab-25 est un anticorps monoclonal anti-IgE. Il est obtenu en assemblant sur une chaîne IgG1k humaine les régions d'un anticorps IgE anti-humain de souris. L'anticorps humanisé contient environ 5% de protéine, rendant minime un risque d'immunisation. Par sa liaison à la région constante de l'IgE libre, le rhuMAb-E-25 empêche l'interaction avec les récepteurs de haute affinité (FceRI) et probablement d'autres récepteurs de moindre affinité (FceRII ou CD3), diminuant ainsi la libération de médiateurs.
Deux études parues récemment nous ont semblé intéressantes pour l'application clinique de l'anti-IgE, l'une pour la rhinite et l'autre pour l'asthme.
Le but de la première étude était de déterminer si des doses sous-cutanées de rhuMAb pouvaient contrôler les symptômes, diminuer l'utilisation de médication de secours (anti-histaminiques) et améliorer la qualité de vie de patients avec rhinite saisonnière au pollen de bouleau, étiologie la plus fréquente de rhinite allergique dans le nord de l'Europe.15 Il s'agit d'une étude randomisée en double aveugle, contrôlée par placebo. Les résultats montrent une diminution des symptômes nasaux, de la prise quotidienne d'anti-histaminiques (28% dans le groupe traité versus 49% dans le groupe placebo), du nombre de jours sans médication de secours et une augmentation de la qualité de vie. Parmi les patients inclus dans l'étude, 21% ont estimé que le traitement leur apportait un contrôle complet des symptômes contre 2% pour le placebo. Ce traitement a été bien toléré et aucun anticorps anti-IgE n'a été détecté. Le rhuMAb représente une nouvelle alternative dans le traitement de la rhinite saisonnière. D'autres études comparatives devraient encore être conduites avec les corticostéroïdes topiques intranasaux. L'effet combiné avec d'autres options thérapeutiques mériterait d'être investigué. Le rapport coût-bénéfice en particulier avec les corticostéroïdes nasaux reste encore à déterminer.
Des études initiales d'évaluation de concept chez des patients atteints d'asthme bronchique allergique léger ont montré que le rhuMAb-E-25 empêche aussi bien la phase initiale que tardive des crises d'asthme induites par les allergènes. La deuxième étude que nous avons sélectionnée est une étude de phase ll-b16 chez des patients avec asthme modéré à grave. Elle a montré des effets significatifs en faveur du rhuMab bien que partiels et modestes. On notait une amélioration des symptômes de l'asthme, une diminution du recours à des médicaments d'urgence (bronchodilatateurs) et de la prise de corticostéroïdes oraux et enfin une élévation de la qualité de vie, mais seulement certaines de ces différences étaient statistiquement significatives. Dans cette étude le rhuMAb a été administré à des doses intraveineuses assez faibles et aucun patient n'a développé d'auto-anticorps anti-rhuMAb. Des études de phase III dans l'asthme bronchique modéré à sévère ont montré une efficacité sur l'incidence et la fréquence des exacerbations de l'asthme par rapport au placebo, mais un effet faible, bien que significatif sur la fonction pulmonaire. Par ailleurs, l'administration du rhuMAb par voie aérosolisée n'a montré aucune preuve d'efficacité.17L'utilisation de ce traitement devrait être réservée à des cas répondant mal aux traitements classiques.
Rappelons que l'inflammation dans l'asthme est associée à une infiltration persistante de lymphocytes de type CD4 avec un profil de cytokines de type Th2, et un rôle pathologique de ces cytokines dans l'asthme a été postulé. Le suplatast tosilate est un inhibiteur sélectif des cytokines de type Th2, qui supprime la synthèse de l'IL-4 et de l'IL-5 in vitro, ainsi que l'augmentation des éosinophiles péritonéaux induits par les allergènes chez la souris.
Chez l'homme, les résultats semblent prometteurs. Dans une étude contrôlée, un traitement de six semaines avec le suplatast tosilate diminuait l'hyperréactivité bronchique et l'inflammation éosinophilique des voies respiratoires dans l'asthme léger. Une étude multicentrique, en double aveugle, randomisée pratiquée auprès de patients avec un asthme modéré à sévère prenant de fortes doses de béclométhasone inhalée (>= à 1500 mmg/j), montre une amélioration des fonctions pulmonaires et un meilleur contrôle des symptômes. Le suplatast tosilate, admnistré per os (3 x 100 mg), a permis de diminuer les doses de corticostéroïdes inhalés sans effets secondaires significatifs.
Etant donné les caractères restrictifs d'inclusion pour cette étude, seulement une petite partie de la population asthmatique a pu être étudiée. Bien que ces résultats soient prometteurs, la généralisation des effets de ce médicament reste cependant encore limitée et d'autres études sont nécessaires pour optimaliser l'adaptation posologique et étudier l'effet thérapeutique pour d'autres catégories d'asthmatiques.18
Malgré les avances de la pharmacothérapie pour les allergies aux pollens, il reste un groupe de patients dont les symptômes sont mal contrôlés par les traitements classiques et pour lesquels une immunothérapie est couramment recommandée. L'immunothérapie pour les pollens est un traitement efficace pour l'allergie saisonnière médiée par les IgE. La question se pose cependant quant à l'efficacité à long terme de l'immunothérapie après l'arrêt.
Dans une étude randomisée, en double aveugle, contrôlée par placebo, effectuée par Durham et coll., cet aspect est évalué chez des patients allergiques aux pollens de graminées et dont le traitement s'était avéré efficace pendant trois ou quatre ans. Les scores de symptômes saisonniers et l'utilisation d'une médication anti-allergique de secours étaient restés bas après l'arrêt de l'immunothérapie. Il n'y avait pas de différences significatives entre les patients ayant poursuivi l'immunothérapie pendant trois autres années consécutives (six ans au total) et ceux qui l'avaient interrompue après trois ans. Les symptômes étaient restés globalement inférieurs à ceux des patients n'ayant pas reçu d'immunothérapie.
Les résultats montraient un bénéfice clinique et l'évidence d'une diminution de la réactivité pendant au moins trois ans après l'arrêt de l'immunothérapie. Il y avait cependant une différence entre la sensibilité cutanée et conjonctivale chez le groupe ayant discontinué le traitement, mais sans traduction clinique.19
Il faut par ailleurs relever que selon une méta-analyse sur le traitement de l'asthme, l'immunothérapie spécifique diminuerait les symptômes et le besoin de médicaments, mais n'aurait pas d'effet sur les fonctions pulmonaires.20
Après les bénéfices de l'immunothérapie et ses effets à plus long terme, penchons-nous sur un effet secondaire particulier : les granulomes, post-injections d'immunothérapie.
Les solutions de désensibilisation contenant de l'aluminium sont largement utilisées en raison du fait que l'aluminium en tant qu'adjuvant semble prolonger la période d'activité de l'antigène, augmentant ainsi la réponse immunologique. Avec ce type de vaccin des nodules sous-cutanés transitoires sont observés chez 20-30% des patients au site d'injection après la disparition de la réaction locale aiguë. Les nodules sous-cutanés palpables se résolvent habituellement après quelques semaines. Par ailleurs 0,5-6% des patients désensibilisés développent des nodules sous-cutanés, qui sont habituellement douloureux et persistent pendant plusieurs années. Les effets toxiques de l'aluminium peuvent être cruciaux dans le développement de granulomes locaux en cas d'injection trop superficielle, c'est-à-dire intradermique. Ces nodules intradermiques peuvent se développer même si la voie sous-cutanée est bien tolérée. Les injections erronées par voie intradermique de solution contenant de l'aluminium devraient être absolument évitées lors de l'immunothérapie.21
L'Anisakis simplex (A. simplex) est un nématode appartenant à la superfamille des Ascaridoidea. Les vers adultes parasitent des mammifères marins et d'autres poissons de mer. Les sujets humains peuvent être infectés en mangeant des poissons et des fruits de mer mal cuits. Ils peuvent souffrir de deux types de «maladies».
I L'anisakiose gastrique se présente par une douleur épigastrique sévère, des vomissements et des diarrhées et traduit une infestation aiguë par le parasite.
I Dans l'anisakiose gastro-allergique, ce sont les symptômes d'hypersensibilité qui prédominent (urticaire, angidème, choc anaphylactique).
Ces dernières années, le potentiel allergénique de A. simplex a été reconnu et dans l'anisakiose gastro-allergique, la réponse de type IgE a été documentée par des tests cutanés et des IgE spécifiques qui ont été interprétés comme une hypersensenbilité de type I. Il ne faut pas oublier d'y songer chez des patients consommant du poisson cru. Le diagnostic correct est non seulement important pour la gestion de la réaction aiguë, mais pour la prévention d'épisodes allergiques potentiellement graves.22
La cuisson du poisson ou la congélation à 20°C inactive l'allergène de l'A. simplex. En effet l'ingestion de larves lyophilisées n'a pas permis d'induire des symptômes d'hypersensibilité chez des patients allergiques après ingestion de poisson.23Seule l'ingestion de larves vivantes semble capable d'induire des manifestations allergiques.
L'allergie aux corticostéroïdes est actuellement bien connue. L'hypersensibilité immédiate liée aux IgE est rarissime, mais l'hypersensibilité retardée, responsable d'eczémas de contact, a été établie dans plusieurs études. Une réaction allergique survenant durant l'administration d'un corticoïde peut être due à un excipient et non pas au corticoïde lui-même. Une réaction de type immédiat a été rapportée pour la carboxyméthylcellulose (CMC), utilisée dans les préparations injectables pour en augmenter la viscosité et retarder la libération du principe actif.
Il est donc important de connaître l'importance et de tester tous les composants d'une préparation pharmaceutique. Parmi les corticostéroïdes contenant de CMC on relève le Diprophos® et le Kénacort®.24
L'angidème récurrent est un symptôme clinique qui peut être présent dans plusieurs entités cliniques. Lorsqu'il touche les voies aériennes il peut représenter un danger vital. L'asphyxie par dème laryngé est bien connue dans l'angidème héréditaire en relation avec un déficit en C1-inhibiteur (C1-INH) ou induit par des inhibiteurs de l'enzyme de conversion de l'angiotensine. Dans ce type d'angidème, les traitements classiques restent peu efficaces.
En 1985 une grande famille, dont cinq femmes présentant des angidèmes récurrents, des douleurs abdominales et des obstructions des voies aériennes supérieures est identifiée en Allemagne. Toutes ces patientes, contrairement aux sujets atteints de déficit héréditaire en C1-INH, avaient un taux et une fonction du C1-INH, ainsi qu'un taux de C4 dans les limites de la norme. Cet angidème héréditaire avec C1-INH normal (taux et fonction) représente une maladie génétique unique ne survenant qu'auprès de femmes. Les caractéristiques génétiques de cette entité suggèrent un mode de transmission dominant lié à l'X. La génération de peptides vasoactifs pourrait être affectée directement ou indirectement par un produit du gène lié à l'X. Les auteurs proposent pour cette affection le terme d'angidème de type III.25
L'anaphylaxie reste un problème difficile à gérer. Les réactions sont souvent inattendues et peuvent progresser rapidement vers un problème respiratoire ou un arrêt cardiaque. La plupart des experts sont d'accord pour affirmer que l'adrénaline est le traitement de première intention des réactions anaphylactiques, mais il y des discussions quant à la dose et la voie d'administration. Les guidelines sont basés sur la théorie et les anecdotes. Contrairement aux autres domaines de la médecine, il n'y a jamais eu d'études contrôlées afin de déterminer la meilleure façon de faire, en raison du danger vital relié à l'anaphylaxie. Une étude rétrospective s'est penchée sur les circonstances amenant à des anaphylaxies fatales depuis 1992 au Royaume-Uni. Approximativement la moitié des vingt réactions fatales recensées par année étaient iatrogènes et un quart en relation avec des aliments ou des venins d'insectes.
Toutes les réactions fatales d'étiologie alimentaire ont causé des difficultés respiratoires avec 86% d'arrêts cardiaques ; le choc était plus fréquent dans les réactions iatrogènes et pour les réactions aux venins. Le temps médian avant l'arrêt cardiaque ou respiratoire était de 30 minutes pour les aliments, de 15 minutes pour les venins et de 5 minutes pour les cas iatrogènes.26
Dans l'étude de Pumphrey,26 l'adrénaline a été utilisée dans le traitement seulement dans 62% des cas, mais avant l'arrêt cardio-respiratoire dans 14% des cas.
La reconnaissance du diagnostic d'anaphylaxie, l'utilisation précoce de l'adrénaline et des bêta 2-agonistes sont des mesures cruciales pour le traitement du choc anaphylactique. Nous recommandons également d'être attentif au surdosage d'adrénaline qui a été à l'origine de trois décès dans cette étude et qui doit être évité. Une trousse d'urgence comprenant de l'adrénaline doit être prescrite à tout patient à risque. Un entraînement et une explication adéquate doivent être dispensés au patient.26La dose d'adrénaline initiale par voie intramusculaire injectée habituellement, varie entre 0,3 et 0,5 ml d'épinéphrine aqueuse à 1 : 1000 chez l'adulte. Chez l'enfant le dosage est basé sur le poids corporel, c'est-à-dire 0,01 ml par kg d'une solution d'adrénaline aqueuse à 1 : 1000.
Parfois le manque de réponse à l'épinéphrine peut être en relation avec un produit périmé qui perd de son efficacité. Une étude récente a été effectuée à propos de l'Epipen® adulte et junior, des auto-injecteurs d'adrénaline souvent recommandés ou prescrits aux patients pour le traitement pré-hospitalier de l'anaphylaxie, et dont la date de péremption est dépassée. Les auteurs ont montré que la biodisponibilité de l'adrénaline venant des Epipen® avec une date de péremption dépassée était significativement diminuée. Après dix mois d'échéance certains Epipen® ne contenaient que 70% de la dose indiquée sur l'emballage. Les auteurs recommandent l'utilisation d'Epipen® avec une date valable. Si cependant le seul Epipen® disponible à domicile est périmé, bien que moins efficace, il peut être utilisé tant qu'il n'y a pas de décoloration ou de formation de précipités.27
L'asthme et les allergies sont des pathologies qui touchent des millions de personnes à travers le monde. Leur nombre est en augmentation et de nouvelles allergies sont rapportées régulièrement. L'asthme et les allergies ont des origines multifactorielles et leur pathogenèse reste complexe, suscitant un intérêt croissant à la fois dans le monde médical et dans le public. Les progrès scientifiques nous ouvrent de nouvelles voies thérapeutiques : des médicaments prometteurs ont vu le jour récemment et le décodage du génome humain nous ouvrira probablement de nouveaux espoirs dans un futur proche.
Cependant, le défi quotidien de l'allergologue reste l'identification des facteurs qui permettent de prévenir la survenue des symptômes. Un diagnostic précoce basé sur des connaissances cliniques actualisées et un traitement bien conduit peuvent dans la plupart des cas influencer favorablement l'histoire naturelle de la maladie allergique.