Qu'est-ce que tenir une chronique sinon tenter de défier le cours du temps ? Détenteur, dans les colonnes du Monde et avec quelle élégance, d'un espace de réflexion sur la gastronomie, cette «fatalité française» selon lui, notre regretté ami Jean-Pierre Quélin utilisait, à échéance plus ou moins régulière, de la formule du «semainier». Le Robert ne nous apprend guère de choses sur le sujet : «(1828). Agenda de bureau divisé selon les jours de la semaine». Pour Quélin, c'était une formule offrant la possibilité d'informer brièvement sur différents thèmes de l'actualité récente. Ducasse grand triomphateur à New York, un nouveau regard de nos contemporains sur la viande bovine, le génie de Rollinger (poissons, coquillages et épices) à Cancale, de Bardet (ses végétaux et son «vin frais») à Tours, de Loiseau à Saulieu
Semainier de la vache folle, donc, pour rester dans les pas écrits de Monsieur Quélin. A Londres, où se tient un congrès mondial de neurologie, on vient d'annoncer l'ouverture d'une clinique spécialement conçue pour traiter les malades atteints de la forme humaine de la maladie de la vache folle. La «Clinique nationale du prion», dont les locaux seront situés au sein du complexe hospitalier de St Mary's Hospital, sera dirigée par le Pr John Collinge, l'un des meilleurs experts mondiaux du type des maladies liées à des prions. Cet établissement dépendra du service de santé publique, sera le premier centre médical en Grande-Bretagne spécifiquement consacré à la vMCJ. «Les maladies liées à des prions provoquent la dégénérescence du système nerveux et les symptômes ressemblent souvent à ceux recensés dans des maladies plus répandues comme Alzheimer», a tenu à préciser le Pr Collinge. Nous souhaitons que les médecins nous envoient des patients très tôt, même quand le diagnostic reste incertain.»La clinique devrait ouvrir ses portes dans quelques mois. «Elle fournira soutien et traitement médical aux patients atteints ou soupçonnés d'être atteints d'une maladie liée au prion et apportera également soutien et conseils aux familles et personnel de soin ou médical, nous rapporte l'Agence France Presse. Une série de systèmes de diagnostic très sophistiqués seront disponibles. La variante de la maladie de Creutzfeldt-Jakob n'est pas curable à ce jour et sa durée précise d'incubation reste inconnue. Elle est estimée à entre 10 et 16 ans, certains experts jugeant même qu'elle pourrait être plus longue. La mort intervient en moyenne dans l'année suivant l'apparition des premiers symptômes. A ce jour, 101 cas de la vMCJ ont été identifiés au Royaume-Uni. Seules six personnes sont encore en vie. La dernière victime est morte le 17 juin. Il s'agissait d'une jeune femme de 28 ans, qui avait donné naissance quatre mois auparavant à un petit garçon. Selon les premiers tests, ce dernier ne serait pas atteint par la maladie.A Paris, le ministère de l'Agriculture attend un avis pouvant remettre en cause la politique d'abattage systématique des troupeaux au sein desquels un cas d'ESB a été diagnostiqué. Il vient aussi d'accorder un «sursis» à un troupeau de Wilwisheim (Bas-Rhin) dont une bête était atteinte de la maladie de la vache folle. Le ministère a accepté de «différer» l'abattage de ce troupeau jusqu'à parution de l'avis de l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments «relatif à une levée éventuelle de l'obligation d'élimination totale des animaux concernés par les cas d'ESB» a précisé la préfecture dans un communiqué. Le premier cas de vache folle du Bas-Rhin avait été détecté le 21 mai dans une exploitation située à Wilwisheim et les 87 bêtes du troupeau devaient être abattues ce jeudi 21 juin, «dans le délai réglementaire de quatre semaines suivant la déclaration d'infection.» Le préfet du Bas-Rhin, sur demande du propriétaire de l'élevage de Holstein, avait saisi le ministère de l'Agriculture pour demander un sursis. De Paris, à nouveau, Martin Hirsch, directeur général de l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments (Afssa), devrait rendre public lundi 25 juin un avis concernant une «modulation des mesures de police sanitaire.» La principale question soulevée est celle du maintien ou de la suspension de la pratique de l'abattage systématique des troupeaux de bovins dans lesquels un cas d'ESB a été diagnostiqué. Les experts français des maladies à prions du comité présidé par le Pr Dominique Dormont viennent d'examiner l'ensemble des données scientifiques qui pourraient conduire à modifier les pratiques en vigueur. Mis en place dès 1991, date de l'émergence de l'ESB en France, l'abattage systématique qui n'a jamais été mis en uvre en Grande-Bretagne était d'emblée apparu aux yeux des responsables sanitaires français comme une mesure essentielle de protection de la santé publique. En dix ans, près de trente mille bovins ont ainsi, en France, été abattus et détruits. Mais les temps ont changé avec l'élimination progressive, organisée à partir de l'été 1996, des abats pouvant être considérés comme potentiellement contaminés, l'interdiction définitive de l'usage des farines animales et la mise en uvre, depuis le début de cette année, du dépistage post mortem systématique des bovins âgés de plus de trente mois, destinés à entrer dans la chaîne alimentaire humaine. 21 juin 2001, solstice d'été et fête de la musique. Changerions-nous d'ère ?