Nous poursuivons ici l'analyse du rapport rédigé sur le thème de la DHEA, cette Jouvence de notre temps, qui vient d'être rendu public par l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé ou Afssaps (voir Médecine et Hygiène du 15 août 2001). L'une des questions abordées par les auteurs est celle de la qualité pharmaceutique de cette substance présentée au choix comme un complément alimentaire ou un médicament. «Au plan pharmaceutique, les données transmises par les fournisseurs identifiés à ce jour restent insuffisantes notamment au regard des produits de dégradation ainsi que des impuretés potentielles, peut-on lire dans le rapport. En effet, les informations fournies ne permettent pas d'exclure, selon la voie de synthèse, la formation de composés à haut potentiel toxique (amides, chloramine, chloroamides). La détection de ces impuretés nécessite la mise au point de méthodes d'identification spécifiques.» Selon les auteurs, l'élaboration d'une monographie serait nécessaire et ce, afin «de fixer les spécifications requises, en fonction de la voie de synthèse, permettant d'assurer une qualité conforme aux standards habituellement requis, particulièrement dans un contexte d'utilisation au long cours.»Sur des prélèvements en provenance des fournisseurs répertoriés et analysés par la Direction des laboratoires et des contrôles de l'Afssaps, l'origine est végétale dans tous les cas, mais, en l'absence de détails sur le mode d'extraction et la voie de synthèse, il n'est pas possible d'exclure la présence d'impuretés ou substances apparentées. Les méthodes analytiques utilisées par les fabricants ne permettent d'ailleurs pas aujourd'hui de s'assurer de leur absence. Le rapport précise que deux grands types de méthode sont utilisés : immunologie ou chromatographie en phase gazeuse avec détection en spectrométrie de masse (GC/MS). La GC/MS est théoriquement la méthode de choix. Cependant, en pratique, les méthodes immunologiques sont utilisées en grande majorité, parce que plus faciles à mettre en uvre (il existe des procédures et automates dédiés). «Le problème des méthodes immunologiques est celui de leur spécificité, sachant que la DHEA-S se trouve à des concentrations plasmatiques jusqu'à 1000 fois supérieures à celles de la DHEA. Dans ces conditions, il faudrait s'assurer que les concentrations de DHEA ne sont pas mesurées par excès, ce qui n'est pas fait dans la plupart des études, soulignent les auteurs du rapport de l'Afssaps. En tout état de cause, la détermination des paramètres pharmacocinétiques demande une méthode spécifique et l'interprétation des données disponibles doit tenir compte de la méthode de dosage.»Le dosage de la DHEA, s'il devait être envisagé, devrait, selon les auteurs, prendre en considération les recommandations suivantes : dosage de la DHEA-S et non de la DHEA, compte tenu des concentrations sanguines mesurées (taux élevés de la DHEA-S) et des fluctuations rapides de la DHEA dans la journée et d'un jour à l'autre ; dosage à partir du plasma ou du sérum, mais pas à partir de l'urine ou de la salive, compte tenu de la validité des méthodes actuelles ; les valeurs de concentrations circulantes rapportées sont extrêmement variables dans la population et doivent être interprétées, en fonction de la méthode et des caractéristiques du patient.Au chapitre de la biodisponibilité, il faut savoir que la DHEA est très peu soluble dans l'eau, et il semble que l'absorption après administration orale dépend de la taille des particules. Elle est sulfoconjuguée en DHEA-S par effet de premier passage, dans la paroi intestinale et dans le foie. Les concentrations plasmatiques de DHEA et DHEA-S, à l'état basal chez l'homme, dépendent du sexe et de l'âge. «A l'âge adulte, les concentrations circulantes de DHEA présentent un rythme nycthéméral avec un maximum le matin. Chez le sujet âgé, les concentrations représentent 20% ou 30% de celles observées à 20-30 ans, avec disparition du rythme nycthéméral. Les rapports des concentrations plasmatiques de DHEA et de DHEA-S sont dans un ordre de magnitude de 500 à 1000». Chez le rat, on note des concentrations négligeables en DHEA et DHEA-S et l'administration de DHEA provoque dans cette espèce l'augmentation du poids de la prostate et de l'utérus, démontrant ainsi une absorption orale, un passage systémique et la conversion en androgènes et strogènes. Chez le chien, les concentrations de DHEA et DHEA-S sont beaucoup plus faibles que chez l'homme. En fait, ce sont les primates non humains qui se rapprocheraient le plus de nous.Après administration orale de DHEA chez l'homme, les concentrations plasmatiques de DHEA et DHEA-S augmentent, de même que celles de testostérone et d'estradiol. Les doses administrées dans les différents essais publiés vont de 50 mg à 2250 mg par jour. Or, l'augmentation des concentrations n'est pas proportionnelle à la dose, elles augmentent moins vite que la dose. On peut préciser que chez l'homme et la femme âgés, une dose de 50 mg par jour permet d'atteindre en moyenne des concentrations de DHEA circulantes identiques à celles observées chez les sujets jeunes, sans accumulation notable et avec un rythme nycthéméral si l'administration a lieu le matin. Ajoutons que la DHEA est liée à 90% à l'albumine, et pour 3 à 8% à la Sex Hormone Binding Protein (SHBG). La DHEA-S est, quant à elle, plus fortement liée (97 à 99%) à l'albumine. Le métabolisme de cette substance est le même, que son origine soit endogène ou exogène. Il conduit à la testostérone et à l'estradiol. L'augmentation de l'estradiol est négligeable chez la femme non ménopausée et modérée dans les autres circonstances. L'augmentation des androgènes est la plus importante chez la femme âgée.