1. Corticoïdes topiques et b2-agonistes en association (salmétérol/fluticasone, au même titre que formotérol/budésonide), agissent en synergie et contrôlent largement plus efficacement l'asthme que la même dose de stéroïde topique seule, soit en administration concurrente ou combinée. La place des combinaisons b2-agonistes de longue durée d'action/stéroïdes topiques dans les recommandations internationales du traitement de l'asthme est encore non précisée. Dans la mesure où cette association permet une épargne de stéroïde grâce à l'effet synergique du b2-agoniste, elle est conforme aux recommandations actuelles, et peut être recommandée pour les asthmes modérés à sévères. Son application dans l'asthme bénin reste à définir.2. Les antihistaminiques de 2e génération se sont révélés très efficaces dans le traitement des symptômes allergiques localisés au niveau des voies respiratoires supérieures et de la peau ; cependant, leur efficacité n'a pu être prouvée dans le traitement de l'inflammation chronique liée à la dysrégulation du système immunitaire chez l'allergique. La desloratadine vient d'être introduite sur le marché. Ce nouvel antihistaminique sélectif, avec une grande affinité pour les récepteurs H1 et bien toléré, semble agir également sur les phénomènes inflammatoires de la réaction allergique, en particulier sur la congestion nasale et l'asthme léger. Néanmoins, cette substance n'a pas encore été comparée aux autres antihistaminiques récents. Il faudra donc attendre les résultats d'études ultérieures pour confirmer sa supériorité.
F. Spertini, A. Sauty
On peut s'étonner de ne voir apparaître que très récemment des combinaisons médicamenteuses fixes, destinées au traitement de l'asthme. L'association salmétérol/fluticasone (Seretide®) est apparue sur le marché en 1999 ; elle sera suivie deux ans plus tard par le lancement de l'association formotérol/budésonide (Symbicort®). Dans le domaine de l'hypertension artérielle, l'expérience des associations est déjà longue. Une méta-analyse récente révélait qu'une combinaison de produits contrôlait la pression artérielle dans 80% des cas, alors que seuls 30 à 60% des patients parvenaient à contrôler leur pression sanguine à l'aide de médicaments individuels. La compliance est améliorée en particulier si le médicament n'est pris qu'une fois par jour, et finalement dans la plupart des associations, le rapport coût-bénéfice est favorable.
La physiopathologie de l'asthme est basée sur deux phénomènes essentiels : d'une part, l'inflammation de la muqueuse bronchique, d'autre part, la bronchoconstriction. La répétition des stimuli allergéniques et la chronicité des processus inflammatoires aboutissent à la sécrétion quasi continue de facteurs pro-inflammatoires tels que les cytokines de type TH2 (IL-4, IL-5, IL-9, IL-13) de même que de type TH1 (IL-1ß et TNF-*, GMCSF), de prostaglandines et de leucotriènes parmi les plus fréquents. L'épithélium participe à l'inflammation par la sécrétion d'IL-8 et de diverses autres chémokines (éotaxines...). Avec l'activation des éosinophiles, on voit progressivement s'installer une accumulation de la matrice extracellulaire conduisant au remodelage bronchique (asthma remodelling) avec épaississement de la membrane basale, altération de l'épithélium et prolifération des cellules myofibroblastiques.1 Individuellement, les ß2-agonistes se sont révélés les meilleurs candidats à relever la bronchoconstriction aiguë, et les stéroïdes topiques à prévenir l'inflammation à long terme.2
A première vue, il peut paraître surprenant de voir ces deux classes de médicaments associées, alors qu'il y a peu une certaine diabolisation des ß2-agonistes prévalait.3,4 Les recommandations internationales sur l'asthme continuent d'ailleurs à proposer une administration à la demande dès que possible des ß2-agonistes, tout en poursuivant les stéroïdes topiques inhalés.2 Après les premiers papiers alarmistes néo-zélandais,5 l'analyse de divers facteurs confondants permettait de montrer qu'effectivement l'utilisation du fénotérol et de l'isoprotérénol conduisait à une dégradation du contrôle de l'asthme. En revanche, l'administration à long terme de ß2-agonistes de courte durée d'action comme l'albutérol ou la terbutaline, de même que ceux à longue durée d'action comme le salmétérol ou le formotérol n'était pas associée à une détérioration du contrôle de l'asthme ni à une augmentation de la fréquence des accès.6,7 Ceux-ci peuvent néanmoins dans certaines circonstances masquer le besoin de stéroïdes topiques inhalés,8 d'où la recommandation dans l'asthme modéré de ne pas les utiliser isolément. Si l'usage continu des ß2-agonistes désensibilise leurs propres récepteurs,9,10 la diminution de l'expression des récepteurs ß2 varie selon la cellule. Elle est plus marquée sur le mastocyte par exemple que sur la cellule musculaire lisse, d'où une relative bonne conservation de l'effet bronchodilatateur à long terme sous ß2-agonistes.11,12 En revanche, cette désensibilisation est favorable lorsqu'elle conduit à une diminution d'effets secondaires tels que tachycardie ou tremor.
Plusieurs travaux récents démontrent l'effet synergique de l'association des ß2-agonistes et des stéroïdes topiques inhalés sur l'asthme, et établissent les bases mécanistiques de cette synergie. A. Eickelberg et coll. notamment démontrent que des fibroblastes traités par la fluticasone voient comme attendu s'opérer une translocation nucléaire des récepteurs aux glucocorticoïdes.13 Un effet semblable est observé après traitement par le salmétérol qui potentialise ainsi d'autant l'effet anti-inflammatoire de la fluticasone. Le même comportement est observé sur les cellules musculaires lisses vasculaires. D'autre part, Mak et coll. démontrent in vitro que la diminution d'expression des récepteurs ß2 sur la cellule musculaire lisse induite par l'agoniste ß2 lui-même peut être contrecarrée par l'administration de stéroïdes (dexaméthasone), une action dépendante du facteur de transcription CREB, et dont on peut penser qu'elle est à l'origine d'une prévention d'une tolérance aux ß2-agonistes.14,15 La combinaison de déxaméthasone ou de fluticasone au salbutamol ou au salmétérol inhibe de façon synergique la production par les cellules musculaires lisses des voies respiratoires d'IL-8 médiée par le TNF-*.16 Nightingale et coll. suggèrent un effet stabilisateur du formotérol sur les mastocytes, en démontrant chez des asthmatiques légers la capacité du formotérol à diminuer l'hyperréactivité bronchique déclenchée par l'AMP cyclique.17 Ces divers travaux contribuent donc à illustrer la coopération cellulaire et moléculaire entre glucocorticoïdes et ß2-agonistes qui participent aussi tous deux à la maîtrise de l'inflammation par effet de synergie (fig. 1).
Sur la base des effets complémentaires décrits plus haut, le ß2-agoniste de longue durée d'action salmétérol et le stéroïde topique proprianate de fluticasone ont été combinés en une association unique inhalée sous forme de poudre sèche (inhalateur Diskus). Dans un premier temps, l'association salmétérol/fluticasone a été comparée avec l'administration soit de salmétérol seul, soit de fluticasone seule, dans diverses études en double aveugle chez des patients asthmatiques traités auparavant par stéroïdes topiques inhalés.18-21 Dans toutes les études, la dose de 50 µg de salmétérol 2 x/j était combinée à la fluticasone aux doses de 100, 250 et 500 µg 2 x/j. Comme attendu, l'association salmétérol/fluticasone était de manière significative plus efficace que le placebo, le salmétérol ou la fluticasone seuls. L'association salmétérol/fluticasone améliorait le score de symptômes diurnes, le peak flow matinal et le FEV1 dans toutes les études et était au moins aussi efficace à cet égard que l'administration concurrente de salmétérol et de fluticasone par deux inhalateurs séparés. Plusieurs études comparaient également la combinaison salmétérol/ fluticasone avec l'administration de budésonide 800 µg seul inhalé.22,23 La combinaison était plus efficace que le budésonide seul en termes de peak flow expiratoire matinal, avec une différence entre les deux traitements de respectivement 11 et 25 litres22,23 par minute après 12 et 24 semaines de traitement. Le FEV1 et les scores de symptômes s'amélioraient de même avec les deux traitements. Dans une autre étude,24 la combinaison (2 x/j chez 428 patients avec asthme modéré à sévère pendant 12 semaines) salmétérol/fluticasone 50/250 µg était aussi efficace que budésonide 800 µg et formotérol 12 µg administrés séparément en termes d'amélioration du peak flow expiratoire matinal et de score de symptômes. Le pourcentage de jours libres de symptômes augmentait dans la même proportion avec les deux traitements ; cependant, l'association salmétérol/fluticasone était significativement (P > 0,035) plus efficace que l'association concurrente budésonide/formotérol dans le contrôle des symptômes d'asthme nocturne et des exacerbations bénignes sur la période de trois mois, mais la signification clinique de cette observation préliminaire n'était pas établie. La combinaison d'un ß2-agoniste de longue durée d'action et d'un stéroïde topique a soulevé la question d'un effet potentiel masquant des ß2-agonistes sur l'inflammation bronchique et l'aggravation de l'asthme. Une récente méta-analyse montrait que les taux d'exacerbation de l'asthme ne sont pas plus élevés avec l'addition de salmétérol à des doses modérées de stéroïdes topiques inhalés qu'avec des stéroïdes topiques inhalés seuls.25 Cette méta-analyse (9 études) comparant des doses croissantes de stéroïdes inhalés à la combinaison salmétérol/stéroïdes topiques à petites doses dans l'asthme démontre que chez les patients (3685) de plus de 12 ans, le nombre total des exacerbations de l'asthme était réduit de manière significative par l'addition du salmétérol aux stéroïdes topiques en comparaison du double de la dose de stéroïdes topiques inhalés pris isolément.
Pour ce qui est de la tolérance, il n'y a pas d'évidence d'excès d'effets secondaires liés à l'administration concurrente des deux drogues en comparaison de l'administration séparée de chacune d'entre elles, notamment pas d'effets délétères sur l'axe hypophyso-cortico-surrénalien. Les études de tolérance démontrent que les effets secondaires les plus fréquemment associés à l'administration combinée de salmétérol et de fluticasone sont les céphalées (2 à 5%), l'irritation de la gorge (1 à 4%), la raucité de la voix (2 à 4%) et la candidose (orale 1 à 4%).18-21,26
Trois études se sont attachées à évaluer le rapport coût/qualité de la combinaison salmétérol/fluticasone (50/100, 50/250 ou 50/500 µg 2 x/j) par rapport au dosage correspondant de fluticasone seule.27-29 En termes de coût du traitement de l'asthme, la combinaison salmétérol/fluticasone était légèrement supérieure au traitement fluticasone seule, ceci étant principalement dû au coût plus élevé de l'association. Toutefois, dans les trois études, la combinaison salmétérol/fluticasone revenait à un coût (coût/efficacité) final par semaine traitée avec succès inférieur à celui du traitement par la fluticasone seule.
Enfin, la qualité de vie des patients traités par l'association salmétérol/fluticasone a été évaluée dans trois études.30,31 Celle-ci était améliorée par rapport à celle obtenue sous placebo ou salmétérol seul, mais pas par rapport à la fluticasone seule. De même, l'association salmétérol/fluticasone améliorait globalement la qualité de vie des patients, et ceci de manière plus marquée que chez ceux traités par le budésonide seul. La différence était à la limite de la signification toutefois, et n'était pas jugée cliniquement significative.
Reprenant l'approche de la combinaison salmétérol/fluticasone, l'étude FACET (European Formoterol and Corticosteroids Establishing Therapy) démontre que l'association du budésonide 200 µg 2 x/j et du formotérol (par deux Turbuhaler® séparés) agissait en synergie et aboutissait à un contrôle de l'asthme équivalent, quant au risque d'exacerbations sévères, à l'administration de 800 µg de budésonide 2 x/j.32 Si cette étude ne s'étendait que sur trois mois, une étude à plus long terme sur une année démontre que le taux d'exacerbation reste le même avec la plus petite dose de budésonide (200 µg) couplée au ß2-agoniste et comparée à la plus haute dose de stéroïdes inhalés (800 µg).33 Une fois de plus, cette étude souligne que l'association de stéroïdes topiques à un ß2-agoniste de longue durée d'action ne masque pas une inflammation bronchique sous-jacente (fig. 2). Dans l'étude FACET,32 la qualité de vie était également évaluée. Les scores totaux ou individuels d'activité, d'émotion et d'environnement s'améliorent de manière significative durant la période de run-in (1600 µg de budésonide par jour). Ces scores s'améliorent encore avec l'association formotérol 12 µg et budésonide 400 µg 2 x/j, mais restent comparables dans les autres groupes.34
Les deux associations décrites plus haut allant dans le même sens, ceci suggère fortement un effet de classe, et non une propriété particulière de produits. On peut ainsi penser que l'association de ß2-agonistes de longue durée d'action à de faibles doses de stéroïdes inhalés est une approche raisonnable de l'asthme modéré à persistant. L'étude FACET est maintenant confirmée par quelques autres études qui toutes démontrent, comme pour la combinaison salmétérol/fluticasone, que la combinaison formotérol/budésonide diminue le risque d'exacerbations et améliore le peak flow matinal et nocturne, les scores de symptômes et la qualité de vie lorsque cette association est comparée à la dose équivalente de stéroïdes topiques ou le double de cette dose.35
Il existe encore peu de comparaison entre les deux associations salmétérol/fluticasone et formotérol/budésonide ; hormis l'étude citée plus haut,24 les deux associations sont comparées dans une étude randomisée, croisée, en double aveugle et contrôlée chez 30 patients.36 L'entrée en action d'une ou deux inhalations de la combinaison budésonide/formotérol (160/4,5 µg) était plus rapide qu'une inhalation de salmétérol/fluticasone (50/250 µg), améliorant significativement le FEV1 jusqu'à trois heures après l'inhalation.
Chez l'enfant, l'association budésonide/formotérol 160 µg/9 µg 2 x/j est comparée à l'administration de 160 µg 2 x/j de budésonide seul (286 enfants de 4 à 17 ans dont l'asthme était inadéquatement contrôlé sous une dose moyenne de 550 µg de stéroïdes topiques par jour).37 Le PEF matinal comparé à la ligne de base est amélioré de manière significative dans le groupe recevant la combinaison par rapport au groupe budésonide seul (P En termes de tolérance, les effets secondaires les plus fréquemment rapportés pour l'association budésonide/formotérol dans les études en double aveugle à la fois chez l'adulte et chez l'enfant avec asthme persistant étaient des infections respiratoires (16%), des pharyngites (6%), une toux (5%), une aggravation de l'asthme (4%) des infections virales (4%) et une rhinite (4%).35,37 Dans l'étude FACET, la proportion de patients rapportant des effets secondaires était semblable dans les quatre groupes, et incluait céphalées, tremor, tachycardie et candidose orale.32ConclusionCes divers travaux démontrent que, comme pour l'association salmétérol/fluticasone, l'association formotérol/budésonide, soit en administration concurrente, soit combinée, contrôle plus efficacement l'asthme que la même dose de stéroïde topique seule, voire jusqu'à 4 fois cette dose. La place des combinaisons ß2-agonistes de longue durée d'action/stéroïdes topiques dans les recommandations internationales du traitement de l'asthme est encore non précisée. Dans la mesure où cette association permet une épargne de stéroïde grâce à l'effet synergique du ß2-agoniste, elle est conforme aux recommandations actuelles, et peut être recommandée pour les asthmes modérés à sévères. Son application dans l'asthme bénin reste à définir.2. La desloratadine, un nouvel antihistaminique: plus puissant ?A. Leimgruber Ces dix dernières années, les mécanismes responsables des symptômes allergiques ont été mieux élucidés, ce qui a modifié notre compréhension de la réaction allergique : après avoir longtemps pensé que les symptômes allergiques étaient le reflet d'une réponse tissulaire locale à un allergène donné, on a réalisé l'existence d'un processus inflammatoire systémique, une vraie «dysrégulation du système immunitaire» avec prolifération et infiltration tissulaire par des cellules et des médiateurs de l'inflammation. Ainsi, il est nécessaire, dans l'approche thérapeutique des maladies allergiques, de prendre en compte ces différents aspects de la réaction allergique.1Jusqu'ici, le traitement pharmacologique de la rhinoconjonctivite et de l'urticaire a visé avant tout le blocage de l'histamine, médiateur très important de la phase précoce de l'allergie, par des antihistaminiques. Un progrès très significatif a été réalisé depuis l'arrivée sur le marché d'antihistaminiques de deuxième génération, pratiquement dénués d'effets sédatifs et anticholinergiques.2 Néanmoins, l'idéal serait un traitement systémique qui permettrait d'agir rapidement et pour 24 h sur toutes sortes de symptômes allergiques précoces et tardifs. Dans ce contexte, il nous a paru intéressant de présenter la desloratadine (Aerius®), un nouvel antihistaminique, métabolite de la loratadine, pourtant très proche chimiquement de cette substance bien connue, et de le comparer aux autres anti-H1 de dernière génération. Clairement plus puissant, il semble agir également sur la phase inflammatoire de la réaction allergique, ce qui est inhabituel pour un antihistaminique.Affinité aux récepteurs H1 de l'histamineLa desloratadine (descarboethoxyloratadine) est obtenue par hydrolyse de la loratadine.3 Il est étonnant de réaliser que la suppression d'une petite chaîne de cette molécule lui confère une affinité aux récepteurs H1 à ce point plus grande que celle de la loratadine, peut-être en raison de différences stéréochimiques entre ces deux substances ; Wieland a en effet montré que l'affinité des antihistaminiques aux récepteurs H1 dépend de leur capacité d'interagir avec la lysine, point d'ancrage spécifique pour les anti-H1 de deuxième génération.4 Ainsi, la mutation d'un seul radical de l'antihistaminique suffit à modifier son affinité au récepteur. Chez l'être humain, l'affinité des antihistaminiques pour le récepteur H1 peut être déterminée in vitro par un test de compétition à la pyrilamine tritiée.5 En utilisant cette méthode, Henz a montré que l'affinité de la desloratadine pour les récepteurs H1 dépasse celle de tous les autres antihistaminiques (tableau 1), avec une affinité 150 à 200 fois plus grande que celle de la loratadine et la fexofénadine en particulier (fig. 1).
Activité sur les autres récepteursDe multiples études ont montré la grande sélectivité de la desloratadine pour le récepteur à l'histamine. Cette substance n'a en effet aucune affinité pour les récepteurs à la dopamine, la monoamine oxydase, l'acétylcholinestérase et la bradykinine.6Action anti-inflammatoireDes études in vitro montrent qu'en plus de ses propriétés antihistaminiques, la desloratadine diminue les fonctions pro-inflammatoires des cellules effectrices et de leurs médiateurs. Ainsi, incubée avec des éosinophiles de patients souffrant de rhinite allergique ou d'asthme, la desloratadine provoque une diminution du chimiotactisme des éosinophiles, de leur adhésion aux cellules endothéliales et de la production de radicaux libres de l'oxygène.7 De même, plusieurs études dans lesquelles la desloratadine est mise en présence de cellules épithéliales nasales, de basophiles ou de mastocytes humains, révèlent une diminution de la libération de médiateurs pro-inflammatoires tels que chémokines (RANTES), cytokines (IL-4, IL-6, IL-8, IL-13), eicosanoïdes (PGD2), histamine, ainsi que l'expression de l'ICAM-1.8-11 Dans la plupart de ces études, la desloratadine a été utilisée à des doses thérapeutiques, voire suprathérapeutiques. Il sera donc intéressant de voir si dans des études cliniques, l'action anti-inflammatoire de la desloratadine sera aussi marquée ou au contraire plus faible.Etudes cliniquesConnaissant l'efficacité de tous les antihistaminiques dans la rhinite saisonnière, celle de la desloratadine ne nous a pas étonnés. Ainsi, chez 311 patients, ce médicament comparé à un placebo a permis, après la première dose déjà, une diminution du score des symptômes de 30% environ. Les symptômes comprenaient au niveau nasal : rhinorrhée, éternuements, prurit, congestion, et les symptômes à distance : conjonctivite, larmoiement, prurit oculaire, des oreilles et du palais. Cette diminution des symptômes était tout à fait significative aussi bien pour le score nasal (p 12 Par contre, l'effet de la desloratadine sur la congestion nasale est particulièrement intéressant, car inhabituel pour un antihistaminique. Nayak et Nathan ont en effet montré, dans deux études contrôlées dont les résultats sont basés uniquement sur des scores cliniques, que cet effet est significatif (p 13,14Pour ce qui concerne l'asthme, Schenkel et Ratner observent dans deux études multicentriques en double aveugle, une amélioration des symptômes d'asthme (toux, wheezing, dyspnée) et une diminution de l'utilisation des bronchodilatateurs chez 607 patients souffrant d'un asthme léger et traités durant quatre semaines, soit avec de la desloratadine, soit avec un placebo.12,15L'efficacité de la desloratadine dans l'urticaire chronique a également pu être démontrée. Chez 190 patients souffrant d'urticaire idiopathique depuis plus de six semaines, Ring a montré que la desloratadine à dose habituelle (5 mg/ j) permet une diminution du prurit, du nombre et de la taille des papules urticariennes et améliore la qualité du sommeil. Ces effets sont observés rapidement, avec une seule prise journalière, et l'effet de la desloratadine couvre bien l'intervalle de 24 heures qui sépare les prises de ce médicament.16Il est important de savoir que pour l'instant on ne bénéficie pas encore de comparaison entre la desloratadine et d'autres antihistaminiques récents. De même, pour l'asthme, aucune étude ne compare la desloratadine et les antileucotriènes.PharmacocinétiqueChez les individus sains, la desloratadine est métabolisée en 3OH desloratadine par glucuronidation. Elle est éliminée essentiellement dans les urines (40,6%) et les fèces (46,5%). Sa demi-vie est comprise entre 21 et 24 heures, confirmant la possibilité d'une prise journalière unique. Si l'on respecte la dose prévue (5 mg/j), ce médicament ne semble pas poser de problème chez les patients présentant une insuffisance hépatique et elle ne modifie pas la clairance à la créatinine.5 L'administration de desloratadine a été étudiée chez des sujets de race noire et blanche, aussi bien des hommes que des femmes, et la dose journalière prévue (5 mg) est la même pour tous.Interactions médicamenteuses et alimentairesContrairement à certains antihistaminiques qui avaient dû être retirés du marché, la desloratadine n'inhibe pas le cytochrome P450, ainsi cet antihistaminique peut être administré de façon concomitante avec le kétoconazole, l'érythromycine, la fluoxétine et la cimétidine.17,18L'absorption de la desloratadine n'est pas modifiée par la prise d'aliments ou de boissons.19 Ainsi, ce médicament peut être administré aussi bien durant un repas qu'à jeun. Enfin, la desloratadine ne potentialise pas l'effet de l'alcool.20Du point de vue cardiaque, la desloratadine a été étudiée chez des humains sains et à dose élevée (45 mg/j pendant 10 jours), et aucune modification significative de l'électrocardiogramme n'a été observée, en particulier aucune prolongation du QT.21Effets centrauxChez l'animal (cochon d'Inde), la desloratadine ne passe pas la barrière cérébrale après injection intrapéritonéale.6 Chez l'humain, différents examens permettant de tester la maintenance de l'état d'éveil, le profil psychomoteur et le temps de réaction, se sont tous révélés équivalents chez les sujets prenant soit de la desloratadine à haute dose (7,5 mg), soit un placebo.22 Par contre, la diphenhydramine provoquait une diminution de la vigilance chez tous les sujets testés (P 23ConclusionLa desloratadine est un nouvel antihistaminique sélectif, avec une grande affinité pour les récepteurs H1 et est très bien toléré. Son action est rapide et couvre bien les 24 heures. Son activité in vitro, en particulier sur l'éosinophile et plusieurs médiateurs pro-inflammatoires explique probablement l'effet observé dans les études cliniques sur la congestion nasale et l'asthme. D'autres études permettront certainement de clarifier sa place dans le traitement des symptômes en relation avec la phase inflammatoire de l'allergie. Les résultats intéressants obtenus avec la desloratadine encourageront certainement la recherche d'autres substances analogues, ce qui permettra de savoir si les effets sur la phase inflammatoire de l'allergie sont uniques à la desloratadine ou s'ils peuvent être attribués à d'autres antihistaminiques couramment utilisés.