Dans le domaine de la prévention des chutes et fractures, l'éventail des mesures d'efficacité démontrée s'est encore élargi (exercice à domicile, protecteurs de hanche), tandis que le bénéfice de la thérapie hormonale substitutive dans cette indication est mis en doute pour les patientes âgées. En prévention cardiovasculaire, une analyse secondaire de l'étude LIPID a démontré des bénéfices absolus supérieurs chez les participants âgés (65 à 75 ans) par rapport aux plus jeunes (31 à 64 ans) pour pratiquement tous les événements cardiovasculaires. Sur un plan moins pragmatique, nous signalons un article décrivant un cadre conceptuel appliqué à la prise de décision dans le dépistage oncologique chez les patients âgés, mais qui pourrait bien se révéler utile dans d'autres types de décisions thérapeutiques les concernant. L'actualité psychogériatrique a été marquée par l'extension des indications aux traitements par inhibiteurs de la cholinestérase lors d'atteinte plus sévère dans la maladie d'Alzheimer, dans d'autres types de démences et dans le traitement des troubles du comportement liés aux démences.
La prévention des chutes et des fractures est basée sur une approche multifactorielle, visant à intervenir sur tous les facteurs potentiellement modifiables (fig. 1). Lorsqu'une chute survient malgré tout, les facteurs principaux qui vont déterminer la survenue d'une fracture sont la résistance de l'os et la capacité des tissus mous à absorber l'énergie libérée par la chute. Trois études abordant la prévention des chutes et des fractures à ces différents niveaux nous ont paru intéressantes à mentionner.
L'exercice physique est l'une des mesures préventives pour laquelle il existe le plus d'évidence d'efficacité. Cependant, l'applicabilité de programmes d'exercices en dehors d'un contexte de recherche est souvent discutable. A ce titre, une étude randomisée contrôlée néo-zélandaise paraît particulièrement intéressante.1 Elle a testé l'efficacité d'un programme simple d'exercice, effectué à domicile, avec une supervision minimale par une infirmière de soins à domicile, dont la seule formation spécifique préalable était une initiation d'une semaine au programme. Le collectif était constitué de 240 personnes âgées d'environ 80 ans (75-95 ans), vivant dans la communauté, et relativement fragiles (près de 40% ayant chuté dans l'année précédente, un quart dépendant dans les activités de la vie quotidienne de base). Le programme comprenait des exercices simples de renforcement musculaire (par exemple se lever plusieurs fois d'une chaise, tendre la jambe en étant assis) et d'équilibre (par exemple, enjamber un objet), d'une durée totale de 30 minutes par séance, à répéter trois fois par semaine. Les participants étaient aussi encouragés à sortir marcher deux fois par semaine.
Après trois visites initiales (semaines 1, 2 et 4), les participants étaient revus à domicile à deux et six mois, et encouragés par téléphone les mois sans visite. Environ 90% des participants ont terminé l'étude, et si 43% seulement avaient suivi à la lettre le programme (3 x/semaine et marche 2 x/semaine), 72% s'étaient exercés au moins deux fois par semaine. A un an, le programme avait réduit de 46% (95%, IC : 0,32 à 0,90) l'incidence des chutes (comparé au groupe contrôle), et aucune hospitalisation due à une chute n'a été enregistrée dans le groupe interventionnel contre cinq dans le groupe de contrôle. Le coût du programme n'était que de 155 dollars néo-zélandais (soit environ SFr 110.) par chute prévenue. Dans une deuxième étude, la même intervention a été testée cette fois à plus large échelle, avec plusieurs infirmières, chez les patients de cinquante-six praticiens. Les effets obtenus étaient similaires (réduction des chutes de 30%), démontrant la faisabilité d'implanter un tel programme dans des conditions très proches d'une pratique quotidienne.2
Des programmes d'exercice et d'entraînement de l'équilibre spécifiques pour les personnes âgées existent dans la communauté (par exemple : Gym des aînés, programme de Pro Senectute : «Equilibre où en êtes-vous ?»), mais ne sont pas forcément accessibles aux personnes âgées peu mobiles. Ces résultats démontrent les bénéfices, pour une population âgée et fragile, d'un programme simple, à domicile, comportant des exercices de faible intensité, et de la marche.
Toute recommandation faite par le médecin traitant pour augmenter l'activité physique de patients similaires a de bonnes chances d'être bénéfique dans la prévention des chutes.
Lorsque les interventions visant à réduire le risque de chute échouent, la résistance osseuse devient un facteur critique dans la survenue d'une fracture. La substitution vitamino-calcique reste l'intervention de première ligne pour améliorer la résistance osseuse, à laquelle sont venues s'ajouter d'autres possibilités thérapeutiques (diphosphonates, SERM, calcitonine, etc.). Une méta-analyse évaluant l'efficacité de la substitution hormonale dans la prévention des fractures non vertébrales met en question l'efficacité d'une substitution démarrée après 60 ans.3 Alors que, globalement, une réduction de 27% du risque de fractures non vertébrales était observée, cet effet disparaissait dans l'analyse restreinte aux femmes dont la substitution avait démarré après 60 ans (risque relatif 0,88 ; 95%, IC : 0,71-1,08, p = 0,22). Bien que des études aient récemment démontré l'effet bénéfique de petites doses d'strogènes sur le métabolisme osseux, la traduction clinique sur l'incidence des fractures pour les patientes âgées n'est pas encore démontrée.
Compte tenu de ces résultats, et en l'absence de données plus précises concernant certains sous-groupes (par exemple femmes âgées avec densité osseuse basse), la substitution hormonale ne semble pas un traitement de premier choix dans la prévention des fractures non vertébrales chez les patientes âgées.
Les protecteurs de hanche semblent avoir par contre acquis leur place dans l'arsenal préventif. Plusieurs études avaient déjà démontré des bénéfices chez des patients institutionnalisés.4 Une étude finlandaise effectuée chez 1801 personnes (78% de femmes), âgées en moyenne de 82 ans, est venue confirmer ces bénéfices, y compris pour les personnes vivant à domicile (40% du collectif).5 Les sujets éligibles devaient être âgés d'au moins 70 ans, et présenter au moins un des facteurs de risque suivants : chute ou fracture antérieure, troubles de la marche ou de l'équilibre, utilisation d'un moyen auxiliaire (canne, déambulateur), troubles cognitifs, visuels, ou nutritionnels, consommation d'au moins un médicament prédisposant aux chutes. Dans le groupe initialement alloué au port de protecteur, 30% ont renoncé à participer à l'étude (contre 9% seulement dans le groupe contrôle). Durant l'étude, les protecteurs étaient portés en moyenne pendant 48% des jours, et seule une irritation locale a été rapportée par quinze participants. Au cours de l'étude treize personnes dans le groupe avec protecteurs se sont fracturé la hanche, comparées à soixante-sept dans le groupe contrôle, correspondant à une réduction de 54% du risque de fracture fémorale proximale. Sur ces treize fractures, seules quatre sont survenues alors que la personne portait effectivement ses protecteurs. Finalement, le risque de fracture du bassin était légèrement plus bas dans le groupe avec protecteurs, mais la différence n'était pas significative.
Sur la base de ces résultats, on peut estimer qu'il suffit que quarante et une personnes portent des protecteurs pour prévenir une fracture de hanche. Ce chiffre est pratiquement identique à celui extrapolé à partir des données antérieures concernant les patients d'institution de long séjour.4 Selon les modèles, le prix des protecteurs varie entre environ SFr. 120. et SFr. 220.. L'objectif devient maintenant d'améliorer la compliance à long terme avec le port des protecteurs chez les personnes à risque.
Ces résultats indiquent que les personnes âgées à risque de chute, y compris celles vivant dans la communauté, peuvent bénéficier de protecteurs de hanche. Basée sur les coûts estimés des fractures de hanche en Suisse (entre SFr. 35 000. et 50 000.), l'économie potentielle peut être estimée à un gain de SFr. 700. à 1000. pour chaque protecteur porté !
Une campagne nationale vient d'être lancée en Suisse par le bureau de prévention des accidents (www.bfu.ch).
Plusieurs études ont révélé un biais de prescription limitant l'utilisation des statines chez les personnes âgées, y compris dans les tranches d'âge relativement jeunes (65-75 ans), et dans des indications de prévention secondaire après infarctus du myocarde.6 Une analyse secondaire de l'étude LIPID (prévention cardiovasculaire secondaire chez les patients avec antécédents d'infarctus du myocarde ou angor instable et cholestérol total entre 4,0 et 7,0 mmol/l) a comparé les bénéfices d'un traitement de pravastatine (40 mg/j) chez les patients de 31 à 64 ans versus ceux de 65 à 75 ans.7 En raison d'un risque absolu augmenté chez les patients plus âgés, l'effet similaire du traitement par statine dans les deux classes d'âge résultait en un bénéfice absolu significativement plus important chez les patients plus âgés (tableau 1). Le nombre de patients à traiter pour éviter un événement négatif était inférieur pour pratiquement tous les événements. Dans les deux groupes, le nombre de patients ayant eu un accident vasculaire cérébral (AVC) était trop petit pour démontrer un effet statistiquement significatif du traitement. Cependant, le nombre de patients à traiter pour éviter un AVC était deux fois moins important dans le groupe âgé (79 versus 170 dans le groupe 31-64 ans). S'il était confirmé, ce bénéfice serait très intéressant compte tenu des conséquences catastrophiques des AVC en terme de capacité fonctionnelle, et donc de qualité de vie pour ces patients.
Il reste à démontrer si ces résultats encourageants sont extrapolables à des patients de plus de 75 ans. D'ici là, une approche individualisée, tenant compte des comorbidités, des capacités fonctionnelles, et cognitives reste de mise pour ces patients.
Ces résultats démontrent que la prévention cardiovasculaire secondaire par statines apporte des bénéfices tout aussi importants si ce n'est supérieurs chez les «jeunes» vieux. Le bénéfice suggéré par les résultats de cette étude dans la prévention des accidents vasculaires cérébraux, générateurs de limitation fonctionnelle et de handicap paraît particulièrement relevant dans cette classe d'âge dont l'espérance de vie est encore importante.
Dans nombre de décisions thérapeutiques complexes concernant les patients âgés, le médecin doit compter sur sa seule expérience ou doit extrapoler des données concernant des patients souvent beaucoup plus jeunes. Il est souvent impossible de savoir à quel moment, pour un patient donné, il devient inapproprié de prescrire tel traitement ou tel examen. Il en résulte de grandes variations de pratique, comme décrit précédemment à propos du traitement de l'hypercholestérolémie après infarctus du myocarde. Un article concernant le dépistage oncologique décrit un cadre conceptuel d'aide à la décision particulièrement intéressant et qui pourrait bien à l'avenir trouver des applications dans d'autres types de décisions thérapeutiques concernant les personnes âgées.8
La démarche comporte trois étapes incorporant successivement l'estimation du risque de décéder d'un cancer détectable par dépistage, l'estimation du bénéfice apporté par le dépistage, et, finalement, l'estimation des effets néfastes potentiels du dépistage. Les exemples pris concernent les principaux cancers pour lesquels des données solides sont disponibles concernant les bénéfices potentiels du dépistage (sein, col utérin, et côlon chez la femme, côlon chez l'homme).
Dans la première étape, le risque de décéder d'un cancer est estimé en multipliant l'espérance de vie à l'âge donné (fournie par les tables de survie) par la mortalité annuelle pour un cancer donné. L'estimation de l'espérance de vie est encore affinée selon l'état de santé du patient, estimé soit dans la moyenne, soit meilleur ou au contraire moins bon que ses congénères du même âge, en basant cette estimation grossière sur les comorbidités présentes et l'état fonctionnel.
La deuxième étape permet d'estimer le bénéfice du dépistage. Les tests de dépistage ne permettent pas de prévenir 100% des décès dus aux cancers dépistés, parce qu'ils manquent des lésions précoces, identifient des cancers trop avancés ou trop agressifs pour répondre aux traitements, ou encore mettent en évidence des lésions qui ne seraient de toute façon pas devenues symptomatiques. Le bénéfice d'un examen de dépistage peut être exprimé en terme de nombre de personnes à screener pour prévenir un décès dû au cancer. Les exemples de la mammographie et de la recherche de sang occulte dans les selles sont détaillés dans le tableau 2. Ce calcul permet de réaliser, par exemple, que le nombre de femmes à screener par mammographie durant le reste de leur vie pour prévenir un décès par cancer du sein est pratiquement identique pour des femmes de 70 ans en excellente santé et des femmes de 50 ans (142 versus 133). A titre de comparaison, on estime qu'il faut faire une mammographie à 2500 femmes de 40 ans pendant dix ans pour prévenir un seul décès avant l'âge de 80 ans.9
La dernière étape, sans nul doute la plus importante, consiste alors à incorporer dans la décision l'avis du patient concernant les effets néfastes directs (complications) et indirects (anxiété) potentiels du dépistage et des examens ultérieurs sur lesquels il débouche.
Ce cadre conceptuel est intéressant parce qu'il permet de structurer le processus décisionnel, et enrichit la réflexion thérapeutique au-delà de la simple considération du critère «âge». Son application future à d'autres types de décisions thérapeutiques, plus relevantes en pratique quotidienne, pourrait se révéler particulièrement intéressante.
Dans la maladie d'Alzheimer, les perspectives de traitements qui ne seraient plus seulement symptomatiques mais directement actifs sur le processus physiopathologique sont maintenant bien réelles. L'étude en cours évaluant l'efficacité clinique d'une immunothérapie anti-amyloïde en est une illustration. Cette stratégie repose sur l'injection sous-cutanée de fragments de sous-unités A-bêta 42 de la protéine amyloïde, associées à un ligand dans le but de stimuler la production d'anticorps anti-A-bêta protéine, fragment de b amyloïde dont l'agrégation est à l'origine de la constitution des plaques séniles. La mise en uvre des premiers essais cliniques aux Etats-Unis et en Europe a été largement médiatisée dans le courant de l'année 2001. Dans l'attente des résultats de cette approche novatrice, on peut relever deux autres grandes orientations des travaux récents sur le traitement de la maladie d'Alzheimer et autres démences. La première se caractérise par la poursuite du développement des inhibiteurs de l'acétylcholinestérase et l'élargissement possible de leurs indications, la seconde, par une meilleure description et une meilleure compréhension des symptômes non cognitifs de la maladie, symptômes affectifs et comportementaux pour le traitement desquels les résultats de premières études contrôlées sont maintenant disponibles.
A la fin de l'année 2000, trois différents inhibiteurs de l'acétylcholinestérase (ChIs) avaient été commercialisés en Suisse : la tacrine (Cognex®), la rivastigmine (Exelon®) et le donépézil (Aricept®). La tacrine a été largement délaissée du fait de ses effets secondaires en particulier hépatiques (et sa commercialisation d'ailleurs abandonnée) au profit des deux autres spécialités. L'année 2001 a vu l'introduction sur le marché suisse d'un nouvel inhibiteur de l'acétylcholinestérase : la galantamine (Reminyl®). Alcaloïde à l'état naturel dans la Galanthus woronowii (perce-neige caucasienne), la galantamine a un double effet d'inhibition réversible de l'acétylcholinestérase et de ligand allostérique potentialisateur des récepteurs cholinergiques nicotiniques dont ils augmentent la sensibilité. Son efficacité dans le traitement de la maladie d'Alzheimer a été documentée par une étude en double-aveugle contre placebo d'une durée de six mois, étude prolongée en ouvert sur six mois supplémentaires.10 A douze mois, les patients du groupe traitement (posologie de 24 et 32 mg) maintenaient des performances moyennes comparables à celles de la ligne de base sur le plan cognitif (ADAS cog), fonctionnel (Disability Assessment for Dementia), de l'évaluation clinique subjective (CIBIC +), alors que les scores pour ces mêmes variables des patients sous placebo puis sous traitement dès la fin du sixième mois, étaient significativement plus altérés à six et douze mois. Un maintien des scores de la ligne de base à l'échelle NPI (symptômes comportementaux) était également mis en évidence dans un autre essai contrôlé (cinq mois) aux doses de 16 et 24 mg par jour, alors que les scores des patients sous placebo ou traités à la dose de 8 mg par jour étaient significativement abaissés.11
Le maintien d'un bénéfice du traitement à un an (en particulier sur le plan de l'impression clinique globale et sur le plan fonctionnel) a également été documenté tant pour la rivastigmine12 que pour le donépézil.13 Des travaux récents sont par ailleurs venus contester le dogme d'une prescription limitée aux seuls stades précoces de la maladie, telle que d'ailleurs imposée en Suisse par la «limitatio» du remboursement par les caisses-maladie (LS/ OFAS /15.4.1999).14 Une étude contrôlée, en double-aveugle contre placebo, a ainsi récemment montré une bonne efficacité du donépézil dans le traitement de la maladie d'Alzheimer à un stade d'évolution moyenne à sévère.15 L'étude comparait l'évolution clinique sur vingt-quatre semaines d'un groupe de 144 patients dont le score moyen au MMSE (Mini-Mental State Examination) était de 11,7 ± 0,4 (min 5, max 17), traité par 5 à 10 mg de donépézil (dose maximale atteinte pour plus de 80% des patients de ce groupe), et d'un groupe de 146 patients traités par placebo dont le MMSE moyen était de 11,9 ± 0,3. La supériorité du traitement par rapport au placebo était documentée par une différence significative à l'évaluation des performances cognitives (MMSE et Severe Impairment Battery SIB), de l'impression clinique globale (CIBIC+), de l'état fonctionnel (Disability Assessement for Dementia), des symptômes affectifs et comportementaux (Neuro-Psychiatric Inventory). Notons encore que dans le groupe traité les sous-scores de l'échelle NPI aux items évaluant dépression/dysphorie, anxiété, apathie, étaient significativement améliorés.
De nouvelles indications des inhibiteurs de l'acétylcholinestérase ont été testées. Si les résultats se sont révélés plutôt décevants dans la paralysie supra-nucléaire progressive (PSP),16 les résultats sont nettement plus probants dans les démences à corps de Lewy. Plusieurs «case reports» et études ouvertes l'avaient suggéré, une étude contrôlée en double-aveugle contre placebo confirme l'efficacité clinique de la rivastigmine dans cette indication.17 L'étude évaluait l'évolution clinique d'un collectif de 120 sujets remplissant les critères cliniques d'un diagnostic probable de démence à corps de Lewy. Comparativement aux 61 patients sous placebo, les 59 patients traités par rivastigmine 6 à 12 mg par jour ont montré une amélioration significative en particulier sur le plan comportemental, avec une diminution des symptômes d'apathie, hallucinations, idées délirantes, et anxiété. Les symptômes psychotiques (idées délirantes et hallucinations) disparaissaient complètement chez 50% des patients traités pour réapparaître rapidement après l'arrêt du traitement. L'amélioration des fonctions cognitives n'était pas significative au score total du MMSE mais l'était pour des tests neuro-psychologiques plus spécifiques des fonctions d'attention et de mémoire. La prise de rivastigmine n'avait en outre aucun effet significatif sur la symptomatologie extra-pyramidale (Unified Parkinson's Disease Rating Scale, UPDRS).
La galantamine (Reminyl®), inhibiteur de l'acétylcholinestérase, a été commercialisée en Suisse dans le courant de l'année 2001. Elle constitue une nouvelle alternative dans le traitement symptomatique des démences de type Alzheimer. Sa posologie est de 8 mg en deux prises par jour pendant un mois, puis de 16 mg en deux prises par jour, posologie pouvant progressivement être augmentée à 24 mg. Elle partage avec la rivastigmine (Exelon®) et le donépézil (Aricept®), la capacité d'améliorer les performances cognitives, fonctionnelles, l'état clinique global dans les démences de type Alzheimer. Il apparaît en outre de plus en plus évident que les inhibiteurs de l'acétylcholinestérase peuvent induire un effet cliniquement significatif dans des stades avancés de la maladie, et trouver des indications dans d'autres types de démences dégénératives, la démence à corps de Lewy en particulier.
De nombreux symptômes comportementaux (agressivité, agitation, déambulation, cris, etc.) et psychologiques (dépression, hallucinations, anxiété, etc.) émaillent le cours évolutif des pathologies démentielles, ou parfois, peuvent précéder le diagnostic de démence. Le terme de symptômes comportementaux et psychologiques des démences SCPD (Behavioral and Psychological Symptoms of Dementia, BPSD) a été proposé pour décrire l'ensemble des manifestations non cognitives des démences. Initialement peu étudiés, les symptômes comportementaux et psychologiques des démences (SCPD) connaissent depuis peu de temps un regain d'intérêt tout à fait justifié. En effet, plus que les symptômes cognitifs, ces manifestations non cognitives sont pour grande partie responsables de l'épuisement des soignants et des proches, se révèlent des déterminants importants de l'entrée en institution, de la charge en soins et des coûts. Comme évoqué précédemment, il apparaît de plus en plus évident que les inhibiteurs de l'acétylcholinestérase ont un effet significatif sur les composantes non cognitives de la maladie, cet effet est particulièrement important pour les patients bons répondeurs sur le plan cognitif et fonctionnel.18 La question est donc ouvertement posée de les classer parmi les substances psychotropes.19
Deux neuroleptiques atypiques ont fait la preuve de leur meilleure efficacité que le placebo dans le traitement des symptômes comportementaux et psychologiques des démences. Une première série de travaux avait mis en évidence que la rispéridone (Risperdal®) aux doses de 0,5 à 2 mg par jour améliore significativement les scores totaux des échelles d'évaluations des symptômes comportementaux et psychologiques des démences (BEHAVE-AD, NPI),20 avec un effet particulièrement important sur les sous-scores aux items évaluant les symptômes agitation, agressivité.21 L'olanzapine (Zyprexa®) a également fait preuve d'une bonne efficacité dans ces indications. L'étude de Jamie Street et coll. publiée en octobre 200022 évaluant en double-aveugle contre placebo l'efficacité à huit semaines de ce neuroleptique atypique apporte en outre une indication très intéressante : la différence significative aux scores des symptômes non cognitifs était obtenue pour des doses de 5 et 10 mg par jour, cette différence n'était plus significative par rapport au placebo, pour des doses de 15 mg par jour. Une étude rétrospective ouverte comparant l'évolution des symptômes non cognitifs de patients porteurs d'un diagnostic de démence et hospitalisés en milieu psychogériatrique en fonction du type de traitement neuroleptique utilisé (289 patients sous halopéridol, 209 sous olanzapine, 500 sous ripéridone), plaide pour une efficacité supérieure de l'olanzapine par rapport aux deux autres spécialités, en particulier sur les dimensions agressivité, hallucinations, idées délirantes. Le caractère ouvert, rétrospectif de cette étude, ainsi que l'hétérogénéité de la population étudiée (65,4% des patients avec démence de type Alzheimer, 15,8% avec démence vasculaire, etc.) limite néanmoins sensiblement l'interprétation de ces résultats.23
L'efficacité des inhibiteurs de l'acétylcholinestérase sur les troubles affectifs et comportementaux des démences de type Alzheimer est maintenant bien documentée. Les symptômes de type agressivité, agitation, idées délirantes, hallucinations, sont par ailleurs traités efficacement et avec une bonne tolérance par les neuroleptiques atypiques (rispéridone, olanzapine). Dans cette indication, les posologies utilisées sont inférieures à celles généralement recommandées dans d'autres pathologies.