Que restera-t-il, demain, du dernier mouvement de grève observé ces dernières semaines par la quasi-totalité des internes en médecine ? Quelques améliorations dans l'organisation de leur travail dans les structures hospitalières qui les emploient et dans lesquelles ils se forment ? La prise de conscience par les pouvoirs publics que cette génération de futurs médecins ne supportent plus les contraintes qu'acceptaient (bon gré mal gré) ceux qui les ont précédés ? Ou, plus simplement, la mise en lumière d'un statut qui n'a que trop duré, d'une ambiguïté devenue inacceptable : faut-il qualifier ces internes de «médecins» ou d'«étudiants». C'est dire l'intérêt de la proposition formulée par les cinq présidents des syndicats représentant les internes de médecine générale, de spécialités et de pharmacie. S'ils veulent «avoir le temps de vivre et de se reposer après le travail, pour leur santé et celle des malades», ils réclament aussi «la reconnaissance officielle de leur statut de médecin hospitalier titulaire».«A 18 ans, le jeune étudiant en médecine entre à la faculté, la tête bercée dans un rêve idéal. A 24 ans, il conclut les six années universitaires réglementaires d'études médicales théoriques et pratiques. Ce système, intelligent dans son principe, est peu respectueux du devoir accompli, puisqu'il ne permet pas l'obtention du titre de docteur en médecine mais celui d'un certificat» soulignent Florent Perrin Dureau (président de l'intersyndicale nationale des internes de spécialités), Olivier Gattolliat (président du syndicat national des jeunes médecins généralistes), Olivier Garnier (président de la fédération nationale syndicale interpharmacie), Nicolas Dubuis (président de l'intersyndicale nationale autonome des résidents) et Emmanuel Lansac (interne des hôpitaux d'Ile-de-France). Ne pas leur reconnaître le titre de docteur en médecine implique que les internes demeurent «confinés dans un rapport hiérarchique de soumission, ce que nos collègues anglo-saxons qui n'ont pas que des défauts appellent en droit civique le harcèlement moral'».«L'exception française dont nous avons bien tort d'être fiers, consiste à obliger les jeunes diplômés sans diplôme à exercer la médecine dans l'illégalité», ajoutent-ils. «Le jeune interne examine des patients seul, pose des diagnostics et prend des décisions thérapeutiques seul, en assurant en partie le service de garde d'urgence et l'activité quotidienne de tous les hôpitaux publics. En praticien hospitalier responsable, il assume en général ses fonctions avec un grand professionnalisme dans la limite de ses connaissances, mais dans une solitude parfois inquiétante. Il faut définir le statut des externes et des internes en concluant les études médicales théoriques par la soutenance d'une thèse de doctorat en médecine qui leur confère la légitimité de leur premier poste de praticiens hospitaliers responsables de leurs actes». Un tel système permettrait, au nouveau praticien hospitalier interne de prendre ses fonctions en accord avec la législation française sur l'exercice de la médecine, en prenant une responsabilité directe et non déléguée.Corollaire : l'obtention, «pour chacun et sans discrimination d'un poste de praticien hospitalier titulaire», d'«un badge avec le nom et le titre de docteur en médecine comme dans toutes entreprises bien gérées», d'«un placard fermant à clé pour nos effets personnels, si possible dans le service et pas à la cave» [...] d'un «bureau dans le service même collectif, il faut être raisonnable avec une chaise, une table et un ordinateur connecté à Internet posé dessus» et, pour finir, d'«une rémunération en accord avec le niveau de responsabilités et les compétences».Qui entendra ce qui paraît, convenons-en, être une bien raisonnable supplique ?