Les problèmes médicaux concernant la conduite automobile deviennent de plus en plus compliqués et fréquents. Chaque médecin peut être interpellé potentiellement en tant que médecin-conseil au sujet d'un de ses patients dans la plupart des cantons suisses. Le présent article essaie de faire une revue des différents aspects auxquels on peut être confronté lors de la rédaction des certificats, en particulier les problèmes d'acuité visuelle, d'alcoolisme, de toxicomanie, d'atteintes neuropsychologiques et de traitements médicamenteux.
Face à la demande de renouvellement du permis de conduire de la part de leurs patients, les médecins se trouvent souvent devant différentes questions. En effet, en Suisse, dans la majorité des cantons, les médecins ont alors un rôle d'expert qu'ils sont d'ailleurs libres d'accepter ou non. Ils se trouvent alors amenés à peser d'une part les intérêts de leurs patients et d'autre part les exigences de la sécurité routière. Le souci majeur est évidemment d'éviter les conséquences graves en terme de sécurité automobile en particulier en sachant qu'en 2001 il y a eu 544 morts et 6194 blessés graves en Suisse. Les causent principales des accidents restent toujours les abus de substances (alcool, drogues, médicaments) et la vitesse. Rappelons que l'objectif de l'Union européenne est de diminuer de moitié le nombre des morts en 2010.
Il est essentiel de comprendre la différence entre ces deux notions.
Le terme de capacité de conduite désigne la faculté physique et psychique momentanée de l'individu de conduire avec sûreté un véhicule.1,2 Typiquement, lorsqu'un médecin de premier recours intervient au poste de police pour effectuer une prise de sang lors d'une de ses gardes, l'usager a été interpellé parce que la police a estimé qu'il y avait une suspicion d'incapacité de conduite. La prise de sang dans cette situation-là va chercher à déterminer précisément si l'usager a plus de 0,8 d'alcool dans le sang.
L'inaptitude à conduire est une notion plus générale qui implique que la personne, sur une longue durée, ne possède plus les caractéristiques physiques et psychiques pour conduire un véhicule. L'inaptitude ne dépend donc en aucun cas de la capacité momentanée à conduire. Par exemple, un usager sous l'influence de l'alcool avec plus de 0,8 n'est plus capable de conduire, par contre cela ne signifie pas qu'il est inapte à la conduite automobile. Pour dire qu'il est inapte à la conduite automobile, il devrait être déclaré dépendant de l'alcool.
Du point de vue légal, lors d'un contrôle médical périodique, le médecin se trouve donc confronté à la notion d'évaluation de l'aptitude à conduire.
Les dispositions légales appliquées dans toute la Suisse se trouvent dans la Loi sur la circulation routière (LCR) et dans l'Ordonnance réglant l'admission des personnes et des véhicules de la circulation routière (OAC). En particulier il faut connaître l'article 7, 3e alinéa de l'OAC : «sont soumis au contrôle médical subséquent d'un médecin conseil :
a) Les titulaires de permis de conduire des catégories C, D ou D1 ainsi que les moniteurs de conduite, tous les cinq ans jusqu'à leur cinquantième année et tous les trois ans à partir de cet âge.
b) Les titulaires de permis ayant plus de 70 ans, tous les deux ans.
c) Les conducteurs qui ont été gravement blessés lors d'un accident ou qui relèvent d'une grave maladie.
L'autorité cantonale peut confier ces contrôles médicaux subséquents au médecin traitant (...)».
Devant le formulaire apporté par l'usager lui-même, qui l'a reçu directement du Service des automobiles, le médecin doit surtout bien faire la distinction entre les trois groupes d'exigences médicales différents :
I Le premier groupe concerne les chauffeurs d'autocars.
I Le deuxième groupe concerne les chauffeurs de camions et de taxis, les moniteurs de conduite et les inspecteurs de services automobiles.
I Le troisième groupe concerne les autres titulaires de permis de conduire. A noter que ce troisième groupe comprend également les véhicules agricoles dont la vitesse maximale n'excède pas 30 km/h et les véhicules automobiles dont la vitesse maximale n'excède pas 45 km/h. Il est donc important de considérer que ces véhicules sont soumis aux mêmes critères d'admission qu'un conducteur de voiture de tourisme.
L'examen d'aptitude doit répondre à la question suivante : «le conducteur expertisé est-il apte du point de vue de son état de santé physique et mentale, à conduire dans le trafic un véhicule correspondant à la catégorie de permis sans s'exposer ou exposer autrui à un risque augmenté d'accident ; satisfait-il en particulier aux exigences médicales minimales requises ?» L'annexe I de l'OAC détaille les exigences médicales minimales pour chaque groupe de permis. Le médecin les a à disposition lorsqu'il voit l'usager puisqu'elle se trouve avec le formulaire à remplir. Ces exigences ne sont en aucun cas exhaustives (par exemple aucun commentaire n'est fait sur les problèmes de dialyse).
Lorsque le médecin remplit le formulaire officiel destiné au Service des automobiles, il se trouve devant quatre possibilités :
1. L'aptitude est confirmée sans autre restriction.
2. Il coche la case apte à la conduite automobile mais en spécifiant des restrictions, par exemple réduction du délai du prochain contrôle médical pour le Service des automobiles à une année ou autre restriction.
3. L'aptitude est sérieusement remise en question et le médecin traitant ne veut pas se prononcer en raison de ses relations thérapeutiques et donc à ce moment-là peut proposer de demander l'avis du médecin-conseil du Service des automobiles qui prendra alors les mesures nécessaires (par exemple en demandant une expertise complémentaire).
4. L'inaptitude pure et simple étant donné que les exigences médicales requises ne sont plus remplies.
Le médecin a toujours la possibilité de faire part de ses doutes au Service des automobiles qui appréciera les mesures à prendre, en particulier le recours à une expertise d'une unité spécialisée ou d'autres mesures.
Parmi les conditions particulières, relevons parmi les plus fréquentes l'obligation de porter des lunettes ou des verres de contact, les maladies pouvant nécessiter des contrôles réguliers et un traitement correct telles que le diabète par exemple, les maladies qui peuvent se modifier rapidement telles que les maladies psychiatriques et les maladies neurologiques, en particulier si la personne ne se soumet pas à des contrôles ou à des traitement médicaux réguliers.
1. L'anamnèse et l'examen clinique restent les mêmes que pour une personne qui viendrait consulter pour un contrôle de bonne santé. Le tableau 1 met en évidence les risques d'accident en relation avec différentes maladies.3 Un risque relatif de 1 indique qu'il n'y a pas plus de risque avec ou sans cette pathologie. Les examens complémentaires sont déterminés en fonction du bilan effectué par le médecin. En cas de doute l'ECG ou les dosages tels que g-GT ou CDT en relation avec une suspicion de dépendance à l'alcool ou encore le dosage de substances dans l'urine peuvent être nécessaires.
2. L'acuité visuelle est très importante puisque les limites minimales varient en fonction des groupes de permis. L'idéal est de tester l'acuité visuelle à six mètres pour éliminer les phénomènes d'accommodation. Par ailleurs, certaines études ont clairement indiqué qu'une diminution du champ visuel présentait un risque important d'accident.3 Cette évaluation peut se faire avec l'examen digital dans le cadre du status neurologique en fermant l'il non testé. Evidemment en cas de doute, un examen complémentaire chez un ophtalmologue est nécessaire. Signalons que l'évaluation de la stéréoscopie est nécessaire pour les premier et deuxième groupes et le test idéal est le stéréotest de Lang (tableau avec des figures visibles en trois dimensions).1 La vision double contre-indique évidemment la conduite automobile.
3. L'ouïe est surtout testée pour les premier et deuxième groupes. On peut se contenter de chuchoter les chiffres à une distance réduite. La surdité totale ou subtotale peut justifier un macaron signalant l'infirmité sur le véhicule.
4. Problèmes psychiatriques : l'Ordonnance demande l'absence de maladie mentale ou de psychopathie pour le groupe I et le groupe II. En ce qui concerne le groupe III l'exigence est de ne pas avoir de maladie mentale importante, ni de psychopathie. Cette définition est floue et l'appréciation du médecin est évidemment très importante. Si l'on peut considérer qu'une pathologie mentale décompensée est un motif d'inaptitude à la conduite, en revanche un patient présentant une pathologie mentale bien traitée et sous contrôle avec une bonne compliance est tout à fait apte à la conduite automobile du groupe III.
5. Appareil locomoteur : cette évaluation est surtout nécessaire dans le but d'évaluer si une adaptation du véhicule est nécessaire (vitesse au volant, voiture automatique, etc.). Relevons que ces adaptations sont aux frais de l'usager et qu'un véhicule modifié doit être certifié par un expert du Service automobile. Relevons que les chauffeurs d'autocars (groupe I) doivent avoir un fonctionnement intégral de leurs membres de même que pour le groupe II. En particulier, il faut évaluer les problèmes de colonne vertébrale, nuque et dos car l'usager doit être capable de voir la circulation latérale.
6. Problèmes cardiovasculaires : dans le premier groupe (autocars) il ne doit pas y avoir de troubles cardiovasculaires alors que dans le deuxième groupe ils ne doivent pas être graves.
Une «Task Force» européenne a émis des recommandations sur le thème de la conduite automobile et des maladies cardiaques.4 Pour le groupe III, les critères suivants sont appliqués : une personne doit être encouragée à ne pas conduire si elle souffre ou a souffert des conditions suivantes :
a) Angine de poitrine : symptômes au repos. La conduite peut à nouveau être recommandée lorsque les symptômes sont contrôlés.
b) Infarctus du myocarde : la personne peut à nouveau conduire lorsque la récupération clinique a eu lieu, habituellement quatre semaines après l'infarctus.
c) Insuffisance cardiaque : symptômes au repos ou lors de la conduite. La conduite automobile est autorisée lorsque les symptômes sont sous contrôle.
d) En ce qui concerne la syncope, la personne ne peut pas conduire jusqu'à ce que la cause ait été identifiée et les symptômes contrôlés.
e) Les arythmies présentent une contre-indication lorsque le trouble du rythme cardiaque présente une importante probabilité de causer des symptômes qui vont conduire à une perte de connaissance.
f) Lors de l'implantation d'un pacemaker, une semaine de délai avant l'autorisation du permis sera requise.
La cardiomyopathie hypertrophique n'a pas de contre-indication, de même qu'une chirurgie valvulaire. Pas de remarque particulière au sujet de l'hypertension, de l'anévrisme de l'aorte avec le syndrome de Marfan et de la pathologie artérielle périphérique. A noter que pour les permis professionnels, les conditions sont beaucoup plus strictes et dans ces cas il faut se référer aux recommandations européennes selon la référence citée.4
7. Personne âgées : l'évaluation succincte de certaines fonctions cognitives peut être effectuée par un Mini Mental Status test ainsi que par un test de la «montre». Le test de la «montre» consiste simplement à faire dessiner une montre avec toutes les heures ainsi qu'indiquer en guise de test, une heure particulière, par exemple 10 h 10, pour voir si la personne est capable de mettre les aiguilles correctement. Une perturbation à la réalisation de ce test, dans notre expérience, fait naître de sérieux doutes sur l'aptitude à la conduite automobile et un examen neuropsychologique approfondi est nécessaire dans cette situation.
8. Epilepsie : d'après les recommandations formulées par la Société suisse de neurologie et l'Association suisse d'électroencéphalographie et de neurophysiologie clinique, le médecin traitant doit dans ce cas obligatoirement requérir l'avis d'un neurologue FMH.5 Le permis ne sera alors délivré qu'aux conditions particulières suivantes, qui doivent être d'ailleurs rappelées dans le formulaire adressé au Service des automobiles :
I Annoncer tout changement de son état de santé à son neurologue traitant.
I Prendre scrupuleusement la médication prescrite.
I Observer un rythme régulier et une durée suffisante de sommeil.
I Observer une stricte restriction de la consommation d'alcool ou s'abstenir selon les consignes du médecin spécialiste.
I Périodicité de l'examen neurologique en principe d'une année.
Des conditions particulières sont également définies pour les catégories professionnelles et sont détaillées dans la référence précédente.5
9. Alcool et toxicomanie.
Alcool : en l'absence d'infraction à la Loi sur la circulation routière, la présence d'une dépendance à l'alcool doit entraîner un retrait préventif en raison d'une inaptitude à la conduite automobile jusqu'à un nouvel examen après une période suffisante d'abstinence. L'article 14, 2e alinéa, point c précise que «le permis d'élève conducteur et le permis de conduire ne peuvent être délivrés aux candidats qui s'adonnent à la boisson ou à d'autres formes de toxicomanie pouvant diminuer leur aptitude à conduire».
Selon la jurisprudence, «s'adonne à la boisson celui qui consomme régulièrement des quantités d'alcool en excès au point que son aptitude à conduire en est réduite et qui est incapable de surmonter ce penchant par sa propre volonté». D'après le Groupe d'experts Sécurité routière du 26 avril 2000, il est indiqué que l'évaluation doit se faire sur les critères de dépendance de la CIM-10 (Classification internationale des troubles mentaux et des troubles du comportement selon l'OMS). Par ailleurs selon une récente jurisprudence du Tribunal fédéral en matière de toxicomanies, «la dépendance à la drogue ou à l'alcool doit être telle que l'intéressé est plus exposé que toute autre personne au danger de se mettre au volant dans un état durable ou permanent qui ne garantit plus une conduite sûre» (ATF 124 II 559 C.2b).
Cette évaluation nécessite un complément biologique sous forme de tests hépatiques ainsi que de la CDT. Le tableau synoptique en annexe mentionne les sensibilités et les spécificités du diagnostic ainsi que les temps de normalisation de différents tests (tableau 2).6 Un taux de CDT augmenté signifie qu'il y a une consommation quotidienne d'au moins 50 à 60 g d'alcool pur sur un intervalle de dix à vingt jours consécutifs au moins. Des taux positifs peuvent être observés lors de cirrhose biliaire du foie, d'hépatite C chronique ou encore de grossesse et dans les cas extrêmement rares du syndrome héréditaire récessif appelé syndrome de glycoprotéine déficiente en hydrate de carbone.
A noter que le médecin doit savoir à titre indicatif qu'une personne peut être référée directement par le Service des automobiles à un examen d'aptitude auprès d'une unité spécialisée ou d'un médecin-conseil dans les cas suivants :
I Les conducteurs qui au cours des cinq dernières années précédant le cas de conduite en ébriété, ont été interpellés avec un taux d'alcoolémie s'élevant à 2,5 ou plus.
I Les personnes qui ont déjà conduit en état d'ébriété au cours des cinq dernières années et qui présentent un taux d'alcoolémie d'au moins 1,6.
I Les personnes qui ont conduit deux fois en état d'ébriété au cours des dix années précédant le cas similaire considéré.
I Un médecin ou la police annonce l'existence d'un problème d'alcool. A noter à ce sujet que la législation précise dans l'article 14, 4e alinéa de la LCR que «tout médecin peut signaler à l'autorité de surveillance des médecins ainsi qu'à l'autorité compétente pour délivrer et retirer le permis de conduire les personnes qui ne sont pas capables de conduire avec sûreté un véhicule automobile en raison de maladie ou d'infirmité physique ou mentale ou pour cause de toxicomanie». Le médecin n'en a donc pas l'obligation, toutefois le législateur fait visiblement appel à son sens des responsabilités.
En ce qui concerne la consommation de drogues chez des personnes candidates au permis de conduire, une abstinence d'au moins six mois est exigée. Pour les personnes qui possèdent un permis de conduire, les critères sont ceux de dépendance comme décrits précédemment pour l'alcool. Il est à noter que dans l'intérêt de la circulation du trafic, la jurisprudence assimile la consommation régulière de drogues à la toxicomanie dans la mesure où, par sa fréquence et l'importance des quantités consommées, elle est de nature à diminuer l'aptitude à conduire. Un défaut d'aptitude à conduire peut également être admis lorsque la personne considérée n'est plus capable de dissocier de façon suffisante sa consommation et la conduite automobile ou s'il y a un risque important qu'elle conduise un véhicule automobile sous l'effet aigu de cette drogue (ATF 124 II 559 c. 3d, JDT 1999 I 844).
Lorsqu'une dépendance ou une inaptitude est détectée, cela peut conduire selon les dispositions légales, à une période d'abstinence d'un an au moins. D'après le manuel du Groupe d'experts Sécurité routière, la suppression de la déficience quant à l'aptitude à conduire en ce qui concerne la dépendance à l'égard de stupéfiants est soumise aux conditions suivantes :
1. «S'abstenir (sous contrôle) de consommer des stupéfiants (à l'exception de la méthadone prescrite dans un cadre officiel structuré et contrôlé ; en cas de consommation occasionnelle de cannabis, la restitution du permis de conduire n'est exclue que s'il existe des motifs particuliers) et des produits pharmaceutiques psycho-actifs engendrant la dépendance, par exemple les benzodiazépines, pendant au moins six mois.
2. Consulter régulièrement un centre de conseils ou de thérapie (psychologue, psychiatre, médecin de famille, etc.) à un rythme d'au moins une fois par mois.
3. Se soumettre deux fois par mois à un examen d'urine (une fois par mois s'il s'agit uniquement du cannabis)».
Finalement lorsque l'autorisation de conduire est restituée, les contrôles réguliers sont souvent poursuivis pendant au moins deux ou trois ans et c'est seulement après cette période de stabilisation avérée que tout contrôle peut être interrompu. En cas de traitement à la méthadone, le suivi médical doit être poursuivi.
A noter que les prélèvements d'urine à des fins médico-légales devraient être effectués sous contrôle. Il faut également se méfier des déviations vers une autre forme de toxicomanie en particulier l'alcool et les benzodiazépines.
10. Accidents vasculaires cérébraux. Les facteurs limitant la conduite automobiles peuvent être à la fois des dysfonctions motrices (évaluées en fonction d'une éventuelle adaptation du véhicule), des problèmes visuels tels qu'une hémianopsie qui contre-indiquerait la conduite, ou encore une négligence visuelle (défaut de perception d'une partie du champ visuel alors que l'examen des champs visuels séparés il par il semble normal).
11. Déficiences caractérielles. Signalons par intérêt pour les médecins que le Service des automobiles peut demander une expertise dans les situations suivantes :
I Lorsque l'usager est interpellé après avoir provoqué volontairement une mise en danger grave.
I L'enregistrement par la police en l'espace de deux ans environ, de trois accidents ou un même nombre des violations des règles de la circulation ayant entraîné une mesure administrative.
I Des actes punissables qui dénotent un manque d'égard (en échappant à la police, il s'engage dans un sens interdit par exemple).
I Une agressivité et une perte de la maîtrise de soi (comportement hostile envers des tiers, etc.).
Le manuel du Groupe d'experts Sécurité routière signale que pour conduire un véhicule, les usagers doivent posséder une série de qualités de caractère qui doivent satisfaire à des critères minimaux : conscience des risques, tendance à éviter des risques élevés, faible impulsivité, faible agressivité, maturité en matière de gestion des conflits, résistance au stress, sens des responsabilités sociales, capacités d'adaptation à la société, souplesse de jugement, équilibre psychique. Lors de suspicion de déficience caractérielle, l'expertise est effectuée par un psychologue titulaire d'un diplôme universitaire ou encore par un médecin FMH spécialisé en psychiatrie.
12. Consommation de benzodiazépines. La prise de benzodiazépines est susceptible de poser des problèmes avec la conduite et une dépendance est souvent très vite mise en évidence, après 2-3 semaines déjà. Toutefois, Michiels7 indique «qu'une prescription médicalement adéquate de benzodiazépines selon une posologie adaptée, après une période d'adaptation et la constatation de la disparition des effets secondaires, sans abus, sans prolongation injustifiée du traitement et sans consommation immodérée d'alcool, est compatible avec la conduite». Evidemment il en est tout autre d'une consommation clandestine non contrôlée. Par ailleurs le problème se pose également entre benzodiazépines et méthadone puisque les personnes ont tendance à mélanger cannabis, méthadone, alcool et benzodiazépines. Le médecin sera donc particulièrement attentif à ces multiples consommations. Il faut signaler que chaque médecin doit absolument avertir son patient, qu'il soit âgé ou non, lors d'une prescription de benzodiazépine ou d'antidépresseur à effet sédatif, des risques qu'il encourt durant les premières semaines de traitement en ce qui concerne la conduite automobile. Ces risques devraient certainement être indiqués dans le dossier en raison des conséquences médico-légales qui pourraient apparaître si un patient était victime d'un accident et n'avait pas reçu d'avertissement au sujet de son traitement médicamenteux.
En conclusion, la personne qui procède à une évaluation d'aptitude à conduire assume une grande responsabilité puisqu'elle doit juger à la fois les intérêts de l'individu et ceux de la société. Le médecin qui se trouve dans une relation thérapeutique doit, au moment de remplir le certificat, devenir un expert aussi neutre et objectif que possible, ce qui n'est pas sans poser des problèmes. A ce sujet, le médecin a toujours la possibilité de ne pas remplir le certificat et de demander au médecin-conseil du Service des automobiles de se prononcer. Par ailleurs, le médecin traitant, à travers la confiance qu'il a pu développer, peut parfois convaincre mieux que personne son patient de renoncer de son propre chef, même provisoirement, à conduire un véhicule. En outre, il faut aussi voir que l'intérêt du patient peut être justement d'éviter un accident grave pour lui-même et pour autrui. Finalement relevons l'importance du rôle du médecin en ce qui concerne les prescriptions médicamenteuses particulièrement chez les personnes âgées en les rendant attentives aux risques que cela peut comporter pour la conduite automobile.