Le pronostic de l'adénocarcinome gastrique reste sombre avec une survie à cinq ans variant de 0% pour une tumeur disséminée au moment du diagnostic à 50% pour une tumeur superficielle localisée au niveau de l'estomac distal. Le cancer de l'estomac est représenté principalement par l'adénocarcinome. Aucun programme de dépistage n'a démontré une diminution de la mortalité liée au cancer gastrique. La chirurgie est le traitement de choix du cancer gastrique. En l'absence d'infiltration ganglionnaire extensive et de métastase à distance, une chirurgie radicale devrait être tentée. Une radiothérapie et une chimiothérapie adjuvante (postopératoire) devraient être effectuées après résection complète d'un cancer de l'estomac ou de la jonction sogastrique. Dans des tumeurs de petite taille, sans infiltration de la couche sous-muqueuse, la mucosectomie est une alternative à la chirurgie.
Le cancer de l'estomac est encore aujourd'hui l'un des cancers gastro-intestinaux les plus fréquents dans le monde avec des différences considérables de prévalence selon les pays. Ce cancer est beaucoup plus fréquent au Japon, en Europe centrale, en Scandinavie, en Chine, et dans les pays d'Amérique centrale et du Sud. Il touche environ 1100 personnes chaque année en Suisse (16 sur 100 000), plus souvent les hommes que les femmes. Les symptômes étant en général aspécifiques, la découverte du cancer gastrique est en général très tardive. Dans 30% des cas, le diagnostic est posé chez des personnes âgées de 50 à 70 ans, dans 60% des cas chez des personnes plus âgées.
L'adénocarcinome est le type histologique principal, comprenant 90% des tumeurs gastriques. Les 10% restants comprennent les lymphomes, les sarcomes et d'autres tumeurs très rares. L'adénocarcinome gastrique peut être divisé histologiquement en adénocarcinome de type intestinal et adénocarcinome de type diffus.
Il n'y a pas d'évidence clinique démontrant une diminution de la mortalité liée au cancer gastrique lors de dépistage.
Au Japon, on relève une diminution significative des décès sur cancer de l'estomac. Cette diminution a été attribuée au vaste programme de dépistage du cancer gastrique initié à partir des années 1960. Il n'existe toutefois aucune donnée provenant d'études randomisées.
Aux Etats-Unis ou en Europe de l'Ouest, aucune étude n'a montré de diminution de la mortalité lors de dépistage du cancer de l'estomac. Certaines populations à haut risque pourraient cependant bénéficier d'un dépistage, tels les patients âgés présentant une anémie de Biermer ou une gastrite atrophique, les patients avec une gastrectomie partielle, les patients avec une polypose familiale, et les immigrants d'une région à risque élevé de cancer gastrique.
Les études épidémiologiques et la recherche animale suggèrent une relation entre l'infection à Helicobacter pylori et le cancer de l'estomac. Cette relation a été confirmée dans une étude prospective japonaise effectuée chez 1526 sujets suivis endoscopiquement pour une dyspepsie, des ulcères, ou des polypes gastriques.1 Lors de l'inclusion dans l'étude, 82% des patients étaient infectés par H. pylori.
Après un suivi moyen de 7,8 ans, aucun des 280 patients H. pylori négatif n'a présenté de cancer de l'estomac, alors que 36 des 1246 (2,9%) patients H. pylori positif ont développé un cancer de l'estomac. Parmi les patients infectés, ceux qui avaient une atrophie gastrique, une gastrite prédominant au niveau du corps et une métaplasie intestinale étaient le plus à risque. Aucun cancer n'a été détecté chez les sujets présentant un ulcère duodénal. Aucun des 253 patients ayant eu un traitement d'éradication de la bactérie n'a présenté de cancer gastrique.
L'évaluation du stade (TNM) du cancer gastrique va dicter la prise en charge de la tumeur (tableaux 1 et 2).
Un staging préopératoire précis du cancer gastrique est essentiel pour sélectionner les patients susceptibles de bénéficier d'une résection chirurgicale à visée curative.
La sensibilité de l'écho-endoscopie est supérieure à celle du CT-scan dans le staging local du cancer gastrique.2,3 Grâce à des sondes de fréquences très élevées, les tumeurs de petite taille (T1) peuvent être analysées, permettant de déterminer quels patients seraient susceptibles de bénéficier d'une résection endoscopique (mucosectomie). Une évaluation complète par écho-endoscopie est parfois impossible en raison d'une sténose tumorale non franchissable. Pour les tumeurs de stade T3-T4, la sensibilité des deux méthodes est identique. La sensibilité de l'écho-endoscopie est également supérieure à celle du CT-scan pour analyser une atteinte ganglionnaire.2 Le CT-scan est la méthode de choix pour rechercher des métastases à distance. Elle permet également de retrouver de petites quantités d'ascite, alertant le chirurgien quant à une possible infiltration péritonéale.
Une atteinte péritonéale peut parfois être difficile à évaluer avec les méthodes d'imagerie conventionnelles. Une laparoscopie exploratrice devrait être considérée en cas de doute quant à une invasion péritonéale au CT-scan ou à l'écho-endoscopie, par exemple en cas d'ascite.
Le pronostic des patients ayant un adénocarcinome de l'estomac dépend de l'extension tumorale au-delà de la paroi gastrique et de l'atteinte ganglionnaire.4 Dans des cancers localisés, environ 50% des patients peuvent être guéris. Malheureusement, les cancers débutants ne représentent que 10 à 20% des cas au moment du diagnostic. La majorité des patients se présentent avec une maladie déjà avancée avec des métastases loco-régionales ou à distance. La survie des patients à cinq ans varie de 0% en cas de tumeur disséminée à 50% en cas de tumeur localisée au niveau de l'estomac distal. En cas de tumeur localisée au niveau de l'estomac proximal, la survie à cinq ans est seulement de 10 à 15%.
Les différents traitements du cancer gastrique en fonction du stade de la tumeur sont résumés dans le tableau 3.
Dans des tumeurs de petite taille, sans infiltration de la couche sous muqueuse (Tis, N0, M0), la mucosectomie est une alternative à la chirurgie. Seules trois récidives tumorales (2,8%) ont été observées chez 106 patients traités par voie endoscopique pour une tumeur débutante.5 Aucune tumeur mesurant moins de 15 mm de diamètre n'a récidivé après la mucosectomie.
La chirurgie est le traitement de choix du cancer gastrique. En l'absence d'infiltration ganglionnaire extensive et de métastase à distance, une chirurgie radicale devrait être tentée.
Si la tumeur n'est pas située au niveau de la jonction so-gastrique ou qu'elle n'infiltre pas tout l'estomac, une gastrectomie subtotale est recommandée. En comparaison avec la gastrectomie totale, la survie est identique avec une morbidité moindre. En cas d'atteinte de la jonction sogastrique, une gastrectomie subtotale proximale ou une gastrectomie totale (incluant une longueur suffisante d'sophage) peuvent être effectuées avec une visée curative. Les ganglions périgastriques de la grande et de la petite courbure devraient, au minimum, être réséqués. En cas d'infiltration diffuse de la paroi gastrique, une gastrectomie totale est recommandée.
Une radiothérapie et une chimiothérapie adjuvante (postopératoire) devraient être effectuées après résection complète d'un cancer de l'estomac ou de la jonction sogastrique.
Une étude randomisée, effectuée chez 556 patients ayant subi une résection d'un cancer de l'estomac ou de la jonction sogastrique (stades IB à IV M0), a montré une augmentation de la survie et de la période sans récidive tumorale chez les patients ayant reçu une radiothérapie et une chimiothérapie postopératoires (adjuvante) par rapport aux patients ayant bénéficié de la chirurgie seule.6 Dans chacun des deux groupes, 85% des patients présentaient des métastases ganglionnaires. Avec un suivi médian de cinq ans, la survie médiane était de 27 mois dans le groupe chirurgie seule alors qu'elle était de 36 mois dans le groupe radio-chimiothérapie adjuvante. La survie à trois ans était de 50% dans le groupe radio-chimiothérapie et de 41% dans le groupe chirurgie seule. Toutefois, seuls 36 patients présentaient un cancer de stade IB (18 dans chaque bras). Etant donné que le pronostic des patients ayant subi une résection à visée curative d'un cancer de stade IB est bon, l'utilité d'un traitement de radio-chimiothérapie adjuvante dans ce groupe n'est pas encore établie.
La survie de patients présentant une récidive tumorale ou une atteinte extensive est très mauvaise. Ces patients devraient si possible être inclus dans des protocoles cliniques.7,8 La mise en place d'une endoprothèse ou la destruction de la tumeur par électrocoagulation ou au laser (Nd : YAG) peut être bénéfique en cas d'obstruction de la lumière gastrique par la tumeur. Un traitement palliatif par radiothérapie peut également aider à contrôler un saignement, des douleurs ou une obstruction digestive. Un traitement chirurgical palliatif devrait être réservé aux patients présentant un saignement continu ou une obstruction digestive non abordable par voie endoscopique.