Les douleurs du dos dues à une fracture pathologique et/ou à une faiblesse du corps vertébral (tumeur ou ostéoporose) sont l'indication la plus fréquente à la réalisation d'une vertébroplastie. 683 niveaux vertébraux chez 335 patients ont été traités durant les sept dernières années dans notre unité : 119 patients pour ostéoporose, 155 pour métastase, 33 pour myélome, 19 pour hémangiome et 4 pour fracture traumatique. Nous rapportons nos résultats avec un arrêt ou une diminution de la douleur estimés supérieur à 90%. Très peu de complications ou de contre-indications ont été observées dans notre expérience. Le pouvoir exothermique de l'implant durant sa polymérisation a permis de plus, d'observer un rôle antitumoral bénéfique pour le traitement des lésions secondaires. Cette dernière observation clinique doit être prouvée par de futures études.
La radiologie diagnostique est une aide pour les cliniciens, leur permettant d'orienter le patient vers un traitement adéquat. Elle s'est développée pour devenir également interventionnelle et proposer aux patients de nouveaux types de traitement : les traitements minimalement invasifs guidés par l'imagerie. Ceux-ci prennent une place prépondérante dans le traitement des douleurs du dos. Ils incluent les infiltrations périradiculaires et articulaires, les traitements de radiofréquence auxquels on peut assimiler la cryothérapie sous IRM et les traitements de stabilisation tels que la vertébroplastie.
Les principes de la vertébroplastie sont simples et consistent à renforcer un corps vertébral devenu fragile par injection percutanée de polyméthylmétacrylate (PMMA).1 Cette substance se déploie sous contrôle scopique dans le corps vertébral apportant une stabilité à la vertèbre presque immédiate (30 min) permettant au patient une remise en charge rapide (en pratique de 6 à 24 heures) avec un arrêt ou une diminution des douleurs dans les 24 à 48 heures dans la majorité des cas.
Inventée dans les années 90, avec le traitement d'un hémangiome vertébral de la deuxième vertèbre cervicale,2 la vertébroplastie a vu ses indications rapidement étendues au traitement des fractures vertébrales ostéoporotiques ainsi qu'à celui des métastases vertébrales et atteintes myélomateuses.3-8 A l'heure actuelle, ce traitement par une équipe entraînée n'a que peu de complications7,8 et est proposé dans notre structure de manière habituelle devant son efficacité et pour le confort qu'elle apporte au patient. Introduite dans notre établissement en 1995, cette procédure a vu son intérêt s'accroître et celle-ci représente actuellement 16% des cas d'activité interventionnelle radiologique (200 procédures par année).
L'indication de référence est le syndrome vertébral, c'est-à-dire la douleur due à la fragilité et/ou à la fracture d'un corps vertébral.4,8 Celle-ci se décèle cliniquement par la percussion douloureuse des apophyses épineuses du niveau pathologique. Un scanner préthérapeutique permet de définir le type de lésion ainsi que le ou les niveaux à traiter.
Une IRM en séquences adaptée (inversion récupération, saturation de graisse avant et après injection de gadolinium) est souvent nécessaire pour définir le nombre de niveaux à traiter. Une scintigraphie osseuse peut également être importante. Ces deux examens deviennent primordiaux en cas de discordance radio-clinique pour orienter les niveaux à traiter. Les trois principales indications sont les fractures d'ostéoporose, les métastases vertébrales et les hémangiomes.
Elles se traduisent classiquement par une douleur dorso-lombaire aiguë après une chute ou un traumatisme mineur. Les clichés radiologiques standards retrouvent une diminution de hauteur d'une vertèbre, classiquement avec le mur commun vertébral postérieur respecté. Ces fractures sont volontiers cunéiformes antérieures et majorent l'attitude cyphotique surtout quand elles sont multifocales. Celles-ci intéressent le plus fréquemment les vertèbres jouxtant la charnière dorso-lombaire ou situées au sommet de la cyphose dorsale. Les autres vertèbres sont néanmoins intéressées régulièrement. La vertèbre L5 n'est que rarement sujette à une fracture d'ostéoporose, et lorsque celle-ci est découverte, une autre pathologie doit être systématiquement éliminée (fracture pathologique).
Un scanner rachidien centré sur cette vertèbre est réalisé lorsque la fracture est mal ou non visible ou lorsqu'il existe sur les radios standards un recul du mur postérieur, afin de le quantifier plus précisément.
Le traitement classique est l'immobilisation par décubitus strict puis corset pour une durée de trois mois. La vertébroplastie constitue une alternative permettant de réduire les coûts d'hospitalisation et de prise en charge thérapeutique. En effet, ce traitement peut se réaliser sous anesthésie locale et en ambulatoire. Le recul du mur postérieur s'il existe ne constitue pas une contre-indication en l'absence de trouble neurologique.
Classiquement, nous réalisons ce geste une semaine après le traumatisme. Ce délai permet de diminuer le caractère inflammatoire et le risque de fuite durant l'implantation de PMMA. Les fractures dites «en galette» ne constituent pas pour notre équipe un facteur de risque ou une contre-indication. Lorsque plusieurs fractures existent, une IRM est nécessaire afin d'évaluer l'dème osseux et d'orienter le traitement précisément sur une vertèbre. En pratique, devant la rapidité de ce geste (15 minutes par niveau), nous avons tendance à traiter, si cela est possible, tous les niveaux tassés. En effet, une fois traitée la vertèbre acquiert une solidité axiale plus importante qu'une vertèbre normale d'un sujet de 25 ans.9 Les autres vertèbres au contact restent donc ostéoporotiques et des fractures secondaires sont possibles à leur niveau. C'est pourquoi nous traitons aussi une vertèbre normale entre deux vertèbres tassées. Le maximum de niveaux que nous avons traités chez un sujet ostéoporotique est de 8.
De manière fréquente, les patients nous sont également adressés après échec d'un traitement médical bien conduit (de trois à douze mois). La vertèbre peut alors être une vertèbre nécrotique ce qui ne complique pas le geste, mais semble diminuer un peu son efficacité4,8 (de 93% à 85% d'antalgie, selon la littérature).
De nouvelles indications apparaissent, comme la stabilisation d'une hypercyphose, pour les troubles respiratoires qu'elle entraîne, mais cette indication n'a été retenue que chez quelques-uns de nos patients, et n'est pas décrite dans la littérature.
De même, l'intérêt d'une «kyphoplastie» peut être discuté.10 Celle-ci est systématiquement proposée dans certaines équipes. Elle consiste en l'introduction de deux ballons de dilatation dans le corps vertébral afin d'espérer un redressement de celui-ci et la création d'une cavité osseuse centro-vertébrale qui est secondairement injectée. Malheureusement, le gain de hauteur vertébrale est modeste, estimé à 3 mm en postprocédure, et ce seulement dans les cas de fractures très récentes (en hypersignal T2 sur l'IRM). Si la fracture est ancienne, le gain de hauteur est nul ou inférieur à 1 mm. De plus, la réalisation d'une dilatation vertébrale par un ballon non compliant (qui ne cesse de s'expandre) en pratique crée de nouvelles fractures qui favorisent les fuites secondaires estimées alors à 10%. Enfin, l'aiguille d'introduction utilisée est de très gros calibre, favorisant les hématomes au point d'entrée et les douleurs en postprocédure. Nous n'utilisons actuellement que très rarement cette technique compte tenu de tous ces aléas ainsi que du coût du matériel.
L'hémangiome vertébral est une tumeur bénigne fréquente qui est vasculaire et graisseuse. Sa découverte est fréquemment fortuite (hémangiome graisseux classique). Toutefois, certaines de ces lésions sont symptomatiques et très algiques. Enfin, certains angiomes peuvent se manifester par une complication comme une fracture vertébrale ou un trouble neurologique par compression épidurale. Le diagnostic se pose sur le syndrome vertébral au niveau intéressé associé à un classique aspect de travées vasculaires du corps vertébral sur les clichés radiologiques.
L'angiome est le plus souvent uniquement graisseux et constitue alors un incidentalome de découverte fortuite sur une radio, un scanner ou une IRM. Il est alors non algique et ne constitue en aucun cas une indication à une vertébroplastie. Le diagnostic est porté sur le scanner ou des radiographies devant un classique aspect de travées vasculaires intra-osseuses. En IRM, l'hémangiome est visualisé en hypersignal T1 et T2 et ne prend pas le contraste en séquences injectées.
Si la composante graisseuse diminue et la composante vasculaire augmente, l'hémangiome peut devenir symptomatique et donc une indication à un traitement par stabilisation percutanée s'impose. Les signes radiologiques standards et scanographiques sont alors les mêmes, mais celui-ci prend le gadolinium de manière plus ou moins intense en fonction de sa composante vasculaire, et devient hyperfixant en scintigraphie. L'indication à une vertébroplastie doit être posée devant un angiome symptomatique qui présente des caractères actifs radiologiques, c'est-à-dire une prise de contraste en IRM.
Enfin, ces angiomes peuvent être agressifs et présenter un caractère sténosant sur le canal rachidien ou compressif. Ceci est visualisé en cas de composante épidurale et ou en cas d'angiome vertébral s'étendant vers les éléments de l'arche vertébrale postérieure (pédicules, massifs articulaires, lames, épineuses). Ces hémangiomes sont alors définis comme agressifs et prennent le contraste lors du bilan. Ils peuvent nécessiter un traitement combiné de vertébroplastie percutanée et de décompression postérieure chirurgicale.
Le traitement classique des angiomes consistait en une radiothérapie antalgique en cas de symptomatologie plus ou moins associée à une embolisation intra-artérielle et/ou à une chirurgie sélective en cas de compression neurologique. Des chirurgies lourdes avec cages vertébrales pouvaient également être proposées. Aujourd'hui, le traitement de référence dans la littérature est devenu la vertébroplastie. En cas d'hémangiome très actif ou agressif, nous utilisons volontiers une sclérothérapie par injection d'alcool avant implantation de PMMA afin de diminuer les risques potentiels de fuite de PMMA, et ce pour mieux remplir la vertèbre afin de diminuer les récidives (1 cas sur 19 dans notre expérience).
Indication princeps de la vertébroplastie en Europe, les métastases constituent 70% des indications dans notre structure. Jusqu'à présent, le traitement de ces métastases osseuses reposait principalement sur l'administration d'une radiothérapie localisée antalgique et dans certains cas de métastase unique, une résection vertébrale avec remplacement par cage.
Aujourd'hui, la vertébroplastie est d'une grande aide pour nos patients leur permettant une remise en charge rapide. De plus, le polyméthylmétacrylate (PMMA) lors de la polymérisation développe une réaction exothermique (de 80 à 110°C)11 que nous supposons stabilisatrice sur l'évolution de la métastase implantée.12 Les décisions de traitement par vertébroplastie sont prises par un colloque multidisciplinaire où toutes les options thérapeutiques sont évoquées.
Le bilan prévertébroplastie nécessite, en plus des radios conventionnelles, un scanner centré sur la lésion en coupes serrées qui permet de définir le caractère blastique, lytique ou mixte de la lésion ainsi que son extension. Une lyse du mur postérieur, un envahissement des parties molles ou des pédicules ne constituent pas une contre-indication en soi mais nécessitent plus d'expérience de l'opérateur.
En présence de signes neurologiques, la vertébroplastie peut être associée à une laminectomie de décompression. Le caractère blastique de la lésion n'est pas une contre-indication, mais nécessite la réalisation du geste sous anesthésie générale.
La douleur et le syndrome vertébral sont bien sûr l'indication principale de la vertébroplastie, néanmoins des patients non symptomatiques peuvent être traités, et ce pour trois raisons : 1) du fait de l'effet tumoricide exothermique évoqué, 2) en raison du peu de complications objectivées par une équipe entraînée et 3) enfin compte tenu de la réalisation concomitante d'une biopsie.
A noter d'autre part que l'ensemble des vertèbres, y compris en région cervicale et sacrée sont accessibles à la vertébroplastie.13,14,15 De même, les lésions étagées ne sont plus une limite au traitement et certains patients peuvent être traités sur plusieurs niveaux.
Le myélome multiple est une pathologie qui fragilise les corps vertébraux de manière souvent pluri-étagée, la vertébroplastie y est d'une grande utilité. Celle-ci est souvent utilisée sur de nombreux niveaux pour plus d'efficacité. On rapproche de cette indication les autres pathologies osseuses sanguines comme les lymphomes ou les LLC.
La vertébroplastie doit être considérée comme une embolisation radiologique et être pratiquée par une équipe entraînée avec du matériel scopique de qualité optimale. Elle est réalisée dans des conditions d'asepsie chirurgicale. Une antibiothérapie prophylactique est réalisée avant la procédure.
Cette procédure peut être faite sous anesthésie locale ou générale. Le choix est décidé avec le patient. Nous préférons utiliser l'anesthésie locale lorsque le patient supporte le décubitus ventral pendant la totalité de la procédure (approximativement 15 min par niveau). Celle-ci est plus volontiers proposée lorsqu'il s'agit d'un traitement d'ostéoporose et qu'il y a moins de deux niveaux à traiter. Nous privilégions l'anesthésie générale dans les métastases blastiques, lorsque le patient est très algique, lorsqu'il ne supporte pas le décubitus ventral, ainsi que d'un point de vue technique dans les localisations plus difficiles comme le rachis cervical ou dorsal haut ou encore sacré.
Le patient en procubitus strict, une aiguille de 10 à 15 Gages (3,2 à 1,8 mm) est mise en place dans le corps vertébral sous contrôle scopique.
Plusieurs voies d'abord existent. La voie standard est la voie transpédiculaire bilatérale.4,8 Une deuxième voie postérolatérale transpédiculaire décrite récemment16 a l'avantage de n'utiliser qu'une seule aiguille par niveau, l'obliquité du trajet de ponction permettant de joindre le milieu du corps vertébral.
La voie d'abord latéro-vertébrale est importante à connaître dans les cas où la voie d'accès pédiculaire est inutilisable (matériel d'ostéosynthèse transpédiculaire). Néanmoins, la voie pédiculaire, si elle est possible, est toujours préférée compte tenu du trajet de l'aiguille intra-osseux plus long que dans le dernier cas, diminuant les risques de fuite de PMMA le long de son trajet.
L'aiguille est donc avancée jusqu'au tiers antérieur du corps vertébral, puis le biseau de celle-ci est orienté vers l'intérieur du corps vertébral. Un phlébogramme (injection de quelques centimètres cube de produit de contraste par l'aiguille) est alors réalisé permettant de définir le type de remplissage de la vertèbre, la cinétique vertébrale de remplissage et les fuites potentiellement dangereuses. On le réalise de profil chez un patient en apnée. Ce phlébogramme est surtout intéressant dans le traitement des métastases et hémangiome, permettant d'adapter la vitesse et la viscosité d'injection de l'implant définitif (PMMA). Dans les fractures d'ostéoporose, celui-ci est moins important, la distribution de ciment étant le plus souvent identique. Deux types de distribution dans le corps vertébral existent, en réseau le plus fréquemment et en motte dans les vertèbres nécrotiques.
Cette phlébographie intra-osseuse peut devenir dans ces cas une étape facultative.17 Nous préférons néanmoins dans notre centre l'utiliser de manière systématique avant l'injection définitive.
Le polyméthylmétacrylate que nous injectons (Howmedica simplex P) est dilué de manière spécifique et supplémenté en contraste (baryum).8 Notre dilution permet d'injecter le PMMA pendant huit à dix minutes en fonction du matériel d'injection utilisé. A une minute, le mélange est très fluide et devient de plus en plus visqueux au cours de ces dix minutes pour devenir non injectable.
Le baryum est rajouté afin d'augmenter la visibilité du ciment sous scopie. Celui-ci est rajouté à la poudre de polymère et permet une opacification hétérogène du ciment à injecter, qui est visualisé en scopie sous forme de particules de tailles différentes. Le mouvement de ces particules lors de l'injection définit la vitesse d'implantation et la direction de l'implant, et ce, même si le ciment est injecté dans une vertèbre dense ou dans une vertèbre où le contraste du phlébogramme initial est resté en place. Les zones dangereuses systématiques à surveiller lors de l'injection sont la veine centro-basale en arrière connectée directement avec le plexus épidural antérieur et les veines foraminales, ainsi que les veines paralombaires connectées avec la veine cave ou la veine azygos. En pratique, l'injection de PMMA ne doit pas dépasser en avant le mur vertébral commun antérieur et en arrière le mur commun vertébral postérieur. La philosophie de remplissage est différente dans les ostéoporoses et les métastases. Dans les ostéoporoses, la stabilisation seule de la vertèbre est recherchée avec une implantation du ciment du plafond au plancher de la vertèbre le plus souvent dans sa partie antérieure. Dans les métastases, un moulage complet de la lésion est recherché pour obtenir un effet exothermique antitumoral.
Les contre-indications à la réalisation de ce geste sont peu nombreuses et incluent les troubles de la crase sanguine et les états infectieux concomitants généraux ou loco-régionaux.
Les complications potentielles sont d'abord celles dues à la procédure, avec des cas rapportés de mauvais placement de l'aiguille. En pratique, cette complication ne doit pas arriver dans une équipe entraînée.
Des fractures de pédicules sont également décrites, c'est pourquoi il faut savoir adapter l'aiguille d'introduction et la voie d'abord à la taille des pédicules.
Une infection du site d'implantation est également décrite dans la littérature.
Mais les principales complications surviennent lors de l'implantation du PMMA. La plus fréquente des complications est le remplissage accidentel d'une veine foraminale. Même si la fuite est de petite taille dans le canal puis dans la veine foraminale, elle peut entraîner une radiculalgie. En effet, l'espace foraminal est de petite taille et le ciment joue plus facilement à ce niveau un rôle compressif ou exothermique. Devant cette deuxième hypothèse, notre équipe a mis au point un système de traitement que nous avons appelé le Cooling system. Lorsqu'une telle fuite est visualisée (4 fois dans notre série), une aiguille d'infiltration est immédiatement mise en place dans l'espace foraminal incriminé et une perfusion de sérum physiologique froid est débutée durant toute la période de la réaction exothermique du PMMA. Ce système réfrigérant semble efficace puisque nous avons pu contrôler quatre fuites de ce type. Toutefois, une plus large expérience est nécessaire.
Une fuite de ciment dans le canal rachidien est bien sûr la complication redoutée pouvant entraîner de graves complications neurologiques. Elle est exceptionnelle dans des équipes entraînées et ne doit pas arriver dans les lésions d'ostéoporose. Une fuite de ciment en avant peut entraîner une embolie pulmonaire et un décès sur table. Enfin, un choc anaphylactique au ciment, bien connu en chirurgie orthopédique, est possible mais non décrit dans cette application. Un article décrit néanmoins une complication plus fréquente, l'hypotension artérielle durant l'injection de PMMA.18
Le risque d'embolie graisseuse souvent évoqué n'est pas décrit dans la littérature et n'est probablement pas une complication de la vertébroplastie. En effet, lors de son injection percutanée, le ciment se déploie dans les structures vasculaires et nécrotiques osseuses. Il ne déplace pas, comme dans la mise en place d'une prothèse de hanche, la graisse centro-diaphysaire.
La complication minime la plus fréquente reste la douleur en postprocédure et retrouvée au point de ponction. Elle est due à l'hématome musculaire. Si elle persiste plus de quelques jours, c'est qu'il existe un hématome sous-périosté au point de ponction, plus algique. Le patient décrit alors sa douleur comme ayant changé et celle-ci disparaît en une dizaine de jours. C'est pourquoi, il est important durant la procédure de choisir un trajet de ponction osseuse et de ne plus en changer pour limiter le traumatisme périosté.
Nous avons réalisé dans notre centre 683 procédures chez 335 patients. Les pathologies traitées ont été des lésions métastatiques (155), des myélomes (33), des lymphomes osseux (4), des hémangiomes (19), ainsi que 119 patients avec des fractures d'ostéoporose et cinq tassements vertébraux traumatiques.
Sur 155 patients souffrant de lésions secondaires, 147 ont été améliorés au niveau traité avec nette diminution des douleurs. Le score AVS (Analogic Visual Scale) a diminué de plus de quatre points en moyenne sur l'ensemble des patients dans la semaine suivant la procédure.
Un patient a eu des douleurs en augmentation en postprocédure, mais il s'agissait malheureusement d'une mauvaise indication à la vertébroplastie. En effet, ses douleurs étaient liées à un envahissement de contiguité du plexus solaire.
Sur 37 patients traités pour pathologie vertébrale myélomateuse ou lymphomateuse (un patient perdu de vue), 35 ont vu s'amender leur douleur en postprocédure. Un patient n'a pas vu de changement de ses douleurs. Les antalgiques ont pu être stoppés ou interrompus dans ces 35 cas. Leur mobilité s'est vue améliorée et les patients ont quantifié leur état de plus stable.
Sur 119 patients traités pour fracture d'ostéoporose, deux ont été perdus de vue, 113 ont eu un arrêt complet des douleurs, 110 ont stoppé leur traitement antalgique en une semaine, 113 ont vu leur mobilité récupérée et ont été remis en charge entre 4 heures et 24 heures après la procédure. Quatre n'ont pas eu d'effet en postprocédure dont deux ont développé des radiculalgies immédiatement en postprocédure. Ces radiculalgies étaient dans les deux cas dues à une fuite de PMMA dans la veine foraminale. Ces deux patients ont été traités par infiltration foraminale de corticoïdes sous contrôle scopique en trois sessions. Un a vu ses douleurs disparaître. Un fond douloureux est resté pour le second. Nous n'avons plus observé de radiculalgie depuis l'emploi systématique du Cooling system en cas de fuite foraminale observée durant l'intervention (deux patients). Deux patients ont développé une fracture secondaire deux semaines après la réalisation de la première vertébroplastie à un niveau adjacent. Ceux-ci ont été immédiatement retraités avec disparition de la symptomatologie.
Sur 19 patients traités pour hémangiome, un a été perdu de vue. Quinze ont présenté un arrêt des douleurs dans la semaine suivant la procédure et trois une diminution des douleurs partielles. Dans les dix-huit cas, les patients ont récupéré une mobilité normale et ceux-ci ont pu arrêter le traitement antalgique. Un patient, une année après, a présenté une résurgence des douleurs avec parésie au niveau des deux jambes. Le contrôle IRM a révélé une épidurite en rapport avec une augmentation de taille de la tumeur bénigne. Un second traitement a été réalisé, et le patient a été prévenu de la possibilité en cas d'aggravation des troubles neurologiques de laminectomie dans le même temps. En postprocédure, le patient a présenté une paraplégie, et une laminectomie a immédiatement été réalisée. Le patient a récupéré de sa symptomatologie neurologique et a été de nouveau libre de toute douleur un mois après.
Sur cinq cas de fracture traumatique traités, le résultat a été une disparition des douleurs à 24 heures pour quatre cas et à dix jours pour un cas, ce dernier ayant présenté un hématome sous-périosté au point de ponction. Dans les cinq cas, les patients ont pu se remettre en charge six heures après la procédure sans port de corset (fig. 5).
Dans les cas de métastases traitées, nous avons observé deux cas de migration embolique de ciment durant la procédure, avec embolie pulmonaire confirmée au CT-scan de contrôle. Ces deux embolies non contrôlées durant l'injection étaient de petite taille et se sont révélées totalement asymptomatiques. Un seul patient a présenté une tachycardie transitoire au moment de l'événement. Ces deux migrations emboliques ont été observées pour deux pathologies particulièrement vascularisées : un myélome et un cancer du rein. Nous préconisons de redoubler d'attention dans ces deux types de pathologie.
Sur tous les cas de métastases vertébrales traités, nous n'avons observé qu'un seul cas de récidive locale. Celle-ci a eu lieu trois mois après l'intervention où le patient toujours non algique a présenté des signes de paraplégie. Celui-ci a été opéré (corporéectomie) et l'anatomopathologie a conclu à une tumeur glomique intra-osseuse.19 Ce cas avait été traité pour un hémangiome, et la récidive vertébrale et intracanalaire vient probablement du fait de la faible quantité de ciment implanté durant la vertébroplastie.
Un cas de récidive a également été noté au niveau du bassin et celui-ci a été traité par une deuxième séance de vertébroplastie. En effet, très peu de PMMA avaient été implantés lors de la première session.
De même sur les 52 procédures réalisées au niveau du bassin, nous avons noté une complication à type de myosite sur le trajet de ponction. Ceci n'a jamais été observé ou décrit au niveau vertébral.
Enfin, nous rapportons une complication quinze jours après réalisation d'une vertébroplastie, chez un patient souffrant d'une métastase des corps vertébraux de D6 et de D7, incluant l'arche postérieure de D6 avec envahissement épidural. Il a été traité par laminectomie étendue de D6 à D10, associée à une vertébroplastie D6 et D7. Celui-ci a été libre de douleurs pendant deux semaines puis a été hospitalisé dans un tableau de paraplégie. Il a présenté une fracture sous-jacente de D8 avec section médullaire en D7-D8. Il nous semble important dans des cas de ce type de réaliser une vertébroplastie en regard de tous les niveaux laminectomisés ainsi que des niveaux sus et sous-jacents. Dans ce cas, une stabilisation D5 à D11 aurait dû être réalisée. On aurait pu également réaliser une laminectomie moins étendue avec une stabilisation de l'arche postérieure de D6 (pédicule, articulaire postérieure droite).
La vertébroplastie est une technique percutanée simple entraînant un bénéfice rapide pour les patients souffrant de fracture d'ostéoporose, d'hémangiome ou de métastase vertébrale. Elle entraîne un bénéfice très fréquent sur les douleurs (environ 95% dans notre expérience) dans toutes ces pathologies confondues, et peut être réalisée dans les cas simples en ambulatoire. De plus, elle permet souvent une récupération spectaculaire de la fonction et de la mobilité redonnant au patient une nouvelle autonomie.
Ses complications sont très faibles, largement inférieures à 0,5% dans notre équipe. Ce traitement nous semble primordial : il permet de réduire les coûts d'hospitalisation, et de redonner à nos patients de manière rapide une autonomie afin de diminuer les complications de décubitus.