L'humanité dans une dépêche d'agence. Le 27 juin, l'Agence France-Presse rapporte l'histoire de la bourgade roumaine de Golesti, 3500 âmes. Grâce à un financement de l'Union européenne, un centre d'accueil pour une quinzaine d'enfants séropositifs y est sorti de terre en quelques mois. Les habitants se sont d'abord réjouis d'être raccordés au réseau d'eau courante à cette occasion. Mais début juillet, à quelques jours de l'ouverture, les voisins paniquent. Et si leurs enfants attrapaient la maladie ? Ou eux-mêmes ? Il faut bloquer les routes !Au milieu des campagnes, la grande peur immémoriale s'est réveillée. Elle donne aux protestataires un air de brutalité primitive. «S'ils viennent, les enfants ne doivent pas s'attendre à avoir la vie belle, menace un jeune villageois. Nous ne sommes pas venus pour nous faire duper par vos théories !» De leur côté, les édiles locaux se lamentent face à des habitants aussi «ignorants et têtus».L'agencier s'est rendu à Focsani, à l'est du pays, dans l'hôpital où les jeunes sidéens abandonnés vivent depuis leur naissance. «Dès qu'ils apprendront que le sida ne se transmet pas à travers l'air ou l'eau, ils verront les choses d'une manière différente, espère une fille de 13 ans. De toute façon, nous avons hâte de nous installer à Golesti ; je n'ai jamais eu de maison, ce serait ma première.» On s'arrêtera là, pour ne pas réduire ce fait divers à une histoire de bons et de méchants. A Golesti ou à Focsani, comme partout ailleurs, on rencontre cette même humanité confrontée à la maladie. Un peu moins bien informée tout au plus.