La fondation genevoise IRP (Institut international de recherche en paraplégie) a attribué pour la première fois son prix Ulrich Schellenberger le 18 septembre dernier. Cette distinction, dotée d'un montant annuel de 100 000 francs, est décernée cette année à un chercheur britannique, James W. Fawcett, professeur à l'Université de Cambridge (Grande-Bretagne) où il dirige le Center for Brain Repair. Le scientifique est récompensé pour ses travaux récents sur la régénération nerveuse dans la moelle épinière.Selon Jean-Jacques Dreifuss, président du jury et professeur émérite à l'Université de Genève, James Fawcett répond aux exigences que la fondation a fixées pour l'attribution du prix, soit avoir publié dans l'année «les résultats les plus prometteurs dans la perspective du traitement de patients dont la moelle épinière est lésée», et se trouver «à l'apogée ou dans une phase ascendante» de sa carrière.La fondation IRP a été créée en 1995 à Genève par Ulrich Schellenberger, un ancien chef d'entreprise paraplégique qui se consacrait de façon bénévole à la cause des paralysés médullaires et par le professeur genevois Alain Rossier. Leur objectif : encourager la recherche dans le domaine de la régénération nerveuse, une voie ouverte à la fin des années 1980 par la découverte, dans le système nerveux central, de substances inhibant la régénération nerveuse.La fondation finance depuis lors différents groupes dans le monde. Ses attributions 2003 s'élèvent à 650 000 francs. Le prix inauguré cette année perpétura le souvenir d'Ulrich Schellenberger, décédé au printemps 2001. Il encouragera la recherche dans un domaine très médiatique, mais relativement peu doté en crédits de recherche en raison du nombre relativement faible de patients touchés.Favoriser la repousse neuraleLes travaux de James Fawcett correspondent particulièrement aux objectifs de la fondation. Grâce à un modèle de cicatrice gliale in vitro qu'il a développé, le chercheur a identifié des molécules qui jouent un rôle important dans l'inhibition de la repousse nerveuse, les protéoglycans de sulfate de chondroïtine, produits par le tissu cicatriciel après la lésion. «Ces molécules forment probablement une barrière contre les infections bactériennes, a expliqué le chercheur de passage à Genève. Or, certaines bactéries ont développé une arme, l'enzyme chondroïtinase, capable de digérer ces protéoglycans.» L'équipe de Fawcett a utilisé cet enzyme pour favoriser la repousse neurale après lésion médullaire chez le rat. Avec des résultats très encourageants, puisque les animaux ont pu récupérer «quelques-unes de leurs fonctions neurologiques». Mais d'éventuels essais chez l'homme, a précisé le chercheur, ne débuteront pas avant trois ans.Le laboratoire Fawcett a découvert un autre rôle aux protéoglycans de sulfate de chondroïtine. Ces molécules sont également responsables de la perte de plasticité du cerveau. Les neurones de l'adulte, contrairement à ceux de l'enfant, en sont recouverts. Les protéoglycans forment une sorte de «couche inhibitrice» qui empêche les cellules de créer de nouvelles connexions. James Fawcett explore l'utilisation de chondroïtinase comme moyen de restaurer temporairement la plasticité du système nerveux. Une procédure qui pourrait constituer un traitement contre des maladies neurologiques.