L'Observatoire suisse de la santé (Obsan),1 institution créée fin 2001 par la Confédération et les cantons, est sur le point de faire sa véritable entrée dans le débat sur la santé. Il va publier d'ici quelques semaines une étude qui a peu de chances de passer inaperçue. Son thème : «Efficience et qualité des cabinets médicaux». Rien de moins.Un texte du rapport annuel 2003 de l'Obsan, récemment publié, précise ainsi les objectifs de ce travail : «Il s'agit d'élaborer un rapport sur les méthodes, les modèles et les données permettant d'évaluer l'efficacité économique et la qualité des prestations des médecins indépendants. Les travaux se concentrent sur l'élaboration de modèles actuellement en fonction ou en développement en Suisse.»Intrigant. Première interrogation : est-il question des méthodes d'évaluation du système ambulatoire dans son ensemble, ou des médecins indépendants individuels ? «Notre objectif était bien d'étudier les différents modèles d'évaluation des praticiens individuels, répond Paul Camenzind, chef de projet à l'Obsan. L'étude passe en revue les méthodes proposées actuellement. Certaines sont uniquement des propositions méthodologiques, qui n'ont jamais pu être expérimentées faute de données réelles. D'autres sont déjà expérimentées, à l'image de la méthode d'évaluation de santésuisse que les auteurs ont pu intégrer à leur évaluation.»Les deux chercheurs mandatés par l'Obsan pour cette analyse, Claudia Eisenring, de l'Institut de l'économie dans le domaine de la santé à Winterthur, et Kurt Hess, conseiller pour les questions du système de santé, ont-ils pu travailler à l'abri de toute pression sur une question aussi sensible ? Question légitime, sachant qu'ils se proposaient d'évaluer un modèle propre à santésuisse. Et plus généralement, sachant que l'Obsan bénéficie d'un accès au pool de données de santésuisse.«Nous tenons beaucoup à notre impartialité, répond Paul Camenzind. Nos statuts, notre financement et notre intégration administrative à l'Office fédéral de la statistique contribuent à nous protéger des pressions. Il est vrai que nous dépendons de santésuisse pour l'accès au pool de données, mais cette collaboration s'est révélée très ouverte jusqu'ici.» Le chef de projet laisse d'ailleurs entendre que les résultats de l'étude ne plaident pas pour l'utilisation inconsidérée de n'importe quelle méthode d'évaluation.«Il était clair dès le début que nous n'allions pas découvrir une méthode idéale et fiable d'évaluer le travail des cabinets, précise-t-il. Nous confirmons qu'une évaluation simultanée de l'efficacité financière et de la qualité des soins dispensés par un cabinet est possible, mais uniquement dans le cadre d'un système de soins intégré. Si on ne considère que le cabinet, sans tenir compte des autres maillons de la chaîne des soins, on ne peut pas évaluer la qualité et l'efficacité financière.» L'étude plaide ainsi avant tout pour une meilleure intégration des différents pans du système de santé en Suisse, et ceci avant d'imposer une sorte de course à l'«efficience» à tel ou tel maillon de la chaîne des soins.L'Observatoire s'intéresse également à d'autres questions sensibles. Il a entrepris une «enquête de faisabilité» de la «planification du domaine ambulatoire au niveau cantonal», c'est-à-dire de la clause du besoin. Avec de telles questions, simples, brûlantes, l'Obsan pourrait bien jouer un rôle salutaire dans le débat sur la santé. A condition de résister aux pressions de tous bords. A condition de s'imposer par une rigueur au-dessus de tout soupçon. Avec un budget de 1,6 million pour 2004, le défi n'est pas facile à relever.1 Site internet de l'Obsan : www.obsan.ch