La thérapie génique restait sur un demi-échec. Celui de l'équipe parisienne qui, après avoir annoncé le traitement de dix enfants atteints d'une immunodéficience congénitale grave au printemps 2000, avait rapporté en 2002 deux cas de leucémies dues au traitement. Ce revers n'a pas eu raison de la recherche dans ce domaine. Des chercheurs britanniques viennent en effet de présenter les résultats positifs de quatre thérapies géniques de la même maladie (The Lancet 2004 : 364 ; 2181-7).Bobby Gaspar et ses collègues de l'University College de Londres n'ont pas changé grand-chose à la stratégie utilisée par l'équipe de Marina Cavazzana-Calvo et Alain Fischer de l'Hôpital Necker à Paris. Pour réduire le risque de leucémie secondaire, ils ont surtout tiré parti de la maigre expérience accumulée.Le recul est modeste. Mais aucun des quatre patients n'a présenté de signes de prolifération cellulaire. La thérapie a été efficace pour les quatre enfants. Tous peuvent vivre aujourd'hui dans un environnement social et familial normal. Trois d'entre eux ont recouvré une immunité normale ou satisfaisante. Le dernier, plus âgé, récupère plus lentement.Les pionniers parisiens Marina Cavazzana-Calvo et Alain Fischer, qui commentent le travail de leurs collègues (The Lancet 2004 ; 364 : 2155-56), dressent un premier bilan des essais rapportés dans le monde. Sur dix-huit enfants souffrant de SCID traités par thérapie génique ex vivo (10 à Paris, 4 à Londres, ainsi que 2 cas d'une autre forme de la maladie à Milan) dix-sept ont recouvré tout ou partie de leur immunité. Malgré les risques lymphoprolifératifs, le rapport risques-bénéfices pencherait déjà en faveur de la thérapie génique lorsqu'aucun donneur de moelle compatible n'est disponible (c'était une condition de recrutement de l'équipe britannique).Des démonstrations isolées, on passe ainsi aux premières observations statistiques. Les probabilités commencent à éclairer le choix des parents et à guider les chercheurs vers les procédures plus sûres. Le traitement serait moins risqué après trois mois, mais moins efficace au-delà de neuf. La récupération immunitaire serait dose-dépendante... La thérapie génique, projet rationnel par excellence, entre dans une phase paradoxalement très empirique.La maladie et son traitementLe déficit immunitaire combiné sévère (acronyme anglais SCID) est un défaut de maturation lymphocytaire d'origine génétique. Les thérapies menées à Paris et Londres portent sur les formes liées à l'X (SCID-X1). Une équipe de Milan traite une forme due à une déficience en adénosine désaminase (ADA).La thérapie : ponction de moelle osseuse ; culture et transfection ex vivo avec un vecteur viral portant la version fonctionnelle du gène muté ; greffe des cellules traitées. Le gène fonctionnel confère aux cellules un avantage compétitif majeur chez les patients SCID. Elles prennent peu à peu l'avantage.Effets secondaires : les deux cas de prolifération lymphocytaire s'expliquent par des mutations lors de l'insertion du nouveau gène (mutagenèse insertionnelle). L'équipe britannique rapporte des phénomènes inflammatoires transitoires au moment de la récupération immunitaire.