introductionCe travail évalue globalement le degré d'adhésion à la nouvelle procédure de la visite préscolaire, qui a été introduite en 2001 dans l'ensemble du canton en vue de la rentrée scolaire de la même année.Les motifs qui ont dicté ce changement, c'est-à-dire le remplacement de la visite de début de scolarité faite à l'école par un contrôle chez le médecin traitant de l'enfant, sont multiples. On a voulu en particulier valoriser l'apport du médecin de l'enfant auprès des familles, et accroître les liens entre les intervenants scolaires et le médecin privé. L'anamnèse établie par le médecin de l'enfant est a priori meilleure que celle que l'on peut recueillir lors de la visite médicale scolaire. Il était aussi important d'inciter les familles à présenter l'enfant à l'âge de 4-5 ans à son médecin, puisque cet âge est idéal pour un bilan psycho-moteur complet selon les directives de la Société suisse de pédiatrie. Cet âge est aussi très favorable à un bilan langagier et à l'introduction éventuelle des examens spécialisés, voire en cas de besoin à une prise en charge, dès avant l'entrée à l'école. Le médecin traitant peut aussi mettre à profit le délai entre sa consultation et l'entrée à l'école pour compléter les vaccinations selon le plan suisse, et programmer les prochaines vaccinations avant les sept ans de l'enfant.Cette nouvelle procédure a été appliquée la première fois en 2001 par l'envoi en publipostage, entre mi-mars et mi-avril, de feuilles nominatives aux familles qui avaient inscrit leur enfant à l'école enfantine. Les médecins de la région lausannoise ont été simultanément renseignés de la même manière.Ainsi, en cas de compliance parfaite des uns et des autres, l'enfant devait non seulement avoir été chez son médecin traitant pour la visite préscolaire et avoir été investigué sur tous les points mentionnés, mais encore arriver en première primaire complètement vacciné. matériel et méthodesLe collectif examiné est celui qui est arrivé en cycle enfantin à l'automne 2001, et qui est en première primaire dès l'automne 2003. On a procédé à l'examen des fiches de transmission, pour la préparation de la visite préscolaire, nominativement pour chaque élève. On a ainsi pu déterminer les vaccinations à faire.Les vaccins devraient avoir été complétés avant la première primaire jusqu'à la cinquième dose pour la diphtérie, le tétanos, la coqueluche et la poliomyélite, et jusqu'à la deuxième dose pour le ROR.L'analyse consiste à relever en première primaire la couverture vaccinale chez les enfants qui ont eu la visite préscolaire et chez ceux qui ne l'ont pas eue, et à comparer ces deux groupes.L'analyse statistique a été faite par le test du Chi carré.résultatsCe sont 1220 élèves, 577 filles et 543 garçons, dont les données ont été recueillies. Parmi ces élèves, 705 avaient bénéficié de la visite préscolaire, et 411 ne l'avaient pas faite (33,7%) (quatre informations manquantes). Ce taux de non-adhésion à la visite préscolaire a diminué progressivement les années suivantes : de 33,7% en 2001, il est passé à 24,0% en 2002 et à 21,5% en 2003.statut vaccinalLa vaccination des enfants est une pratique bien établie en Suisse romande, et bien qu'elle fasse l'objet d'une certaine réserve de la part d'une minorité de personnes, la couverture vaccinale en cours et en fin de scolarité montre que les parents sont accessibles aux explications des médecins.1-4Le tableau 1 fait le bilan du statut vaccinal global à l'entrée en première primaire. S'il est globalement satisfaisant, il existe une proportion d'enfants insuffisamment vaccinés.On peut définir à cet âge comme vaccination insuffisante moins de deux doses de diphtérie, moins de deux doses de tétanos, moins de trois doses de poliomyélite et moins de deux doses de ROR. Quant au statut incomplet, il est défini comme meilleur que le statut dit «suffisant» mais ne satisfait néanmoins pas pour tous les vaccins au plan vaccinal suisse. On note à l'entrée en première primaire que : chez ceux qui avaient eu la visite préscolaire : 5,7% des élèves avaient un statut insuffisant. 60,9% avaient un statut vaccinal incomplet. Chez ceux qui n'avaient pas eu la visite préscolaire : 10,0% avaient un statut vaccinal insuffisant. 71,3% avaient un statut vaccinal incomplet.Les carences sur le plan vaccinal sont donc d'emblée plus nombreuses dans ce deuxième groupe. On a détaillé l'analyse en fonction de l'accomplissement de la visite préscolaire ou non, et de l'origine nationale, en calculant pour chacune de ces cohortes la proportion représentée par les enfants ayant 1, 2... etc. vaccinations pour chaque vaccin. On note alors que la différence entre les proportions ainsi calculées entre enfants ayant fait la visite préscolaire et ceux qui ne l'ont pas faite est faible et stable jusqu'à quatre vaccinations pour Di, Te et Pol, et une vaccination pour ROR, mais augmente fortement ensuite pour la dose suivante. Ces différences sont toutes hautement significatives du point de vue statistique (p l 0,0001) (tableau 2).Cet écart est présent quelle que soit la nationalité, les écarts allant pour les différents groupes nationaux de 2,2% à 42,5%, avec une moyenne d'écart de 17,1%.Une analyse complémentaire de correspondance de facteurs multiples, portant sur la présence ou l'absence de la cinquième dose pour Di et Pol et de la deuxième dose pour le ROR et l'origine nationale, n'a pas permis de départager l'essaim de projection des individus. Cela confirme qu'il n'y a pas de liaison entre ces caractéristiques, et que la raison de ces différences doit être recherchée ailleurs.discussionOn constate année après année que le taux de participation à la visite préscolaire s'est peu à peu amélioré, mais cette progression a ralenti. On peut redouter que la participation des parents aux frais de contrôle, éventuellement aux dépens d'une franchise encore intacte, dissuade certaines familles de s'adresser au médecin privé.Un autre élément à prendre en considération est que le temps à prendre pour l'ensemble de l'anamnèse, des contrôles et des rappels de vaccinations est trop élevé pour qu'ils soient faits en une seule fois, et qu'une seconde consultation sera nécessaire, qui augmentera encore les frais. Cela pourrait être à l'origine d'une certaine proportion des vaccinations non effectuées.On peut également craindre que les familles qui n'ont pas de médecin traitant ayant suivi l'enfant depuis son jeune âge s'adressent pour cette seule circonstance à un médecin ou à une policlinique, et que le bénéfice espéré de cette nouvelle procédure de visite préscolaire s'amenuise beaucoup.La comparaison avec une étude locale déjà ancienne (1990),1 dont les élèves avaient été choisis en ville de Lausanne dans des quartiers à revenu moyen, bas ou élevé, montre des résultats intéressants. Si l'on ne tient compte ni du ROR introduit en 1989 dans le plan de vaccination national et auquel la population n'était pas habituée, ni de la coqueluche pour lequel un nouveau type de vaccin acellulaire a fait tomber les réticences, on constate que pour la diphtérie la proportion d'enfants insuffisamment vaccinés (1,7%) a régressé en 2003 à 1%. En 1990, la transition se faisait aussi entre la quatrième et la cinquième dose, la couverture passant de 86,7% pour la quatrième dose à 26,3% pour la cinquième, donc de manière plus abrupte qu'en 2003. On a donc gagné pour la diphtérie quelque 20% d'enfants complètement vaccinés.Cependant, on note des lacunes importantes au niveau de la cinquième dose de Di et Pol, et de la deuxième dose de ROR, malgré que l'on soit à l'âge prescrit, et que l'on obtienne par la suite dans la scolarité publique des taux de couverture supérieurs, dus à l'action des services de santé scolaire. Ces lacunes montrent que les occasions de contact avec le médecin privé avant l'école ont été insuffisantes, quelles qu'en soient les raisons.conclusionIl est indubitable que la procédure de visite préscolaire doit être maximalisée afin d'obtenir qu'elle réponde au but visé. Une démarche que l'on peut entreprendre dans ce sens est de démontrer aux familles les bénéfices que les enfants tirent de cette visite préscolaire et les inciter à consulter régulièrement un médecin choisi par eux. Mais l'obstacle financier restera présent pour les familles modestes, obligées de payer l'assurance maladie, et soucieuses de s'épargner des frais.5-6 Une étude complémentaire sur les situations des familles qui n'ont pas eu recours à la visite préscolaire permettrait de mieux cerner ce phénomène. Toute tentative d'augmenter la charge financière des familles ou de diminuer encore l'apport des pouvoirs publics aura vraisemblablement comme conséquence de faire baisser le taux de couverture vaccinale.La forte corrélation entre statut vaccinal et recours au médecin est ici clairement démontrée, conformément aux données antérieures. A ce titre, il peut être considéré comme un indicateur majeur du soutien médical que ces familles ont pu recevoir. Cela pourrait nous guider dans un effort de «discrimination» positive des familles à risque, au-delà du rattrapage des prestations non reçues.Bibliographie1 Woringer V. Couverture vaccinale à l'entrée en scolarité obligatoire. RMSR 1989;109:403-6.2 * Woringer V. Couverture vaccinale en fin de scolarité obligatoire. RMSR 1990;110:471-3.3 * Woringer V. Vaccination contre l'hépatite B chez les élèves de 7e année à Lausanne. RMSR 1999; 99:647-52.4 Woringer V. Vaccination contre l'hépatite B à l'école : facteurs influençant l'acceptation et bilan de la couverture générale. Soz Präventivmed 2000;45:267-73.5 Holstein BE, Holme Hansen E, Due P. Social class variation in medicine use among adolescents. Eur J Public Health 2004;14:49-52.6 Van Lenthe FJ, Schrijvers CTM, Droomers M, Joung IMA, Louwman MJ, Mackenbach JP. Investigating explanations of socio-economic inequalities in health. Eur J Public Health 2004;14:63-70.* à lire** à lire absolument