La puissante science «médico-biologique» de notre époque peut-elle définitivement répondre à toutes les questions que l'on peut lui soumettre ? Vaste et belle question qui ne manquera pas de nourrir de multiples interrogations dans les années et les décennies à venir. On en observe, ces jours-ci en France, une déclinaison fort utile car médiatique autant que pédagogique. A ce titre, il importe d'en exposer fidèlement les éléments essentiels.Cette affaire a commencé il y a près de trois ans avec la rencontre organisée au Vatican entre le pape et le Pr Luc Montagnier ; une rencontre longtemps restée strictement confidentielle avant que quelques indiscrétions italiennes permettent de lever le voile. Souvenons-nous ; à l'époque, la presse et l'opinion s'interrogeaient sur les véritables raisons permettant de comprendre la spectaculaire amélioration de l'état de santé de Jean Paul II, et tout particulièrement de ses capacités d'élocution lors de ses voyages effectués durant l'été 2002 au Canada et en Pologne.Nous avions, pour la modeste part qui nous revient, traité de ces questions dans les colonnes du Monde. «C'est un Français, l'agnostique Luc Montagnier, célèbre codécouvreur du virus du sida, qui détient la seule explication rationnelle de ce qui pourrait sembler un miracle moderne» osions-nous alors écrire avant de citer le Pr Montagnier. «Nous avions, avec Robert Gallo (l'autre découvreur, américain), sollicité une audience privée programmée pour la mi-juin afin d'évoquer avec Jean Paul II le fléau que constitue le sida dans le tiers-monde, et tout particulièrement en Afrique, nous confiait-il alors. Nous souhaitions obtenir une évolution de la ligne officielle du Vatican quant à l'usage préventif du préservatif. Mon collègue américain devant subir une intervention chirurgicale au genou, j'étais, ce jour-là, le seul présent.»Sachant, comme la terre entière, que Jean Paul II souffrait d'une forme d'ores et déjà évoluée de la maladie de Parkinson, le spécialiste français avait jugé utile et nécessaire de profiter de cette rencontre pour proposer au pape un traitement original. Le célèbre virologiste était en effet alors déjà persuadé que le «stress oxydant» était de nature à jouer un rôle pathogène susceptible de favoriser de nombreuses maladies chroniques, à composantes infectieuses ou non. Parmi ces maladies, les affections neurodégénératives comme celles de Parkinson ou d'Alzheimer ainsi que certains cancers.«Je ne suis pas dans ce domaine un solitaire. Mes convictions sont partagées par nombre de biologistes, ajoutait Luc Montagnier. Normalement, l'organisme humain est capable de synthétiser un nombre suffisant de molécules antioxydantes, mais, avec le temps, sa situation se dégrade, son système immunitaire aussi, un cercle vicieux s'installe, et une maladie survient.» Titulaire d'un diplôme de docteur en médecine, le codécouvreur du virus du sida ne cachait pas alors avoir prescrit au pape un extrait fermenté durant plusieurs mois de papayes sélectionnées en Asie pour leurs vertus «immunostimulantes et antioxydantes». Jean Paul II était alors âgé de 82 ans. Le Vatican fit savoir que le pape avait suivi les recommandations du Pr Montagnier et la corrélation fut vite faite avec l'amélioration transitoire observée au Canada et en Pologne.Vinrent ensuite, comme on pouvait aisément le prévoir, les incitations publicitaires à la consommation des préparations de papayes fermentées. Incitations aux messages réducteurs vantant des vertus préventives et thérapeutiques que ne pouvait justifier le seul cas papal. L'affaire fit un certain bruit en France où la puissance publique et les autorités sanitaires ne plaisantent plus guère avec tout ce qui touche à la sécurité des aliments et à l'efficacité des médicaments. C'est ce qui explique la publication il y a quelques jours de l'étonnant avis de l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments (Afssa) «relatif aux justificatifs concernant la composition d'un complément alimentaire à base d'extrait de papayes fermentées et les différentes allégations de santé mettant en avant l'action anti-âge».L'Afssa avait été saisie de cette question en juin 2004 par la puissante Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (ministère de l'économie et des finances) qui manifestait de la sorte tout l'intérêt qu'elle portait à la papaye fermentée (Fermented papaya preparation ou FPP). Il faut ici préciser, avec l'aide de l'Afssa que la FPP est obtenue par fermentation alcoolique de longue durée (8 à 10 mois) de la pulpe de papaye (Carica papaya L.) non OGM après addition de dextrose et de Saccharomyces rouxii ATCC 14679. Le produit brut obtenu subit ensuite une dessiccation complète. Au total, le produit final consiste en une poudre blanche de granulométrie contrôlée et définie, dépourvue de papaïne. Il contient, pour 100 grammes, 97,7 grammes de glucides (majoritairement des oligosides), 0,3 gramme de protéines, 3 vitamines (B6, B9 et niacine) et 6 minéraux (calcium, magnésium, potassium, fer, cuivre, zinc).Le fabricant de la FPP indique d'autre part que des principes actifs complexes concourant aux propriétés de ce produit sont en cours d'étude pour une détermination de leur nature exacte et de leurs fonctions. Il ajoute que si la pulpe de papaye présente, à l'état naturel, des propriétés antioxydantes, le processus de fermentation permet d'obtenir des propriétés immuno-stimulatrices et de potentialiser ses actions antioxydantes.La FPP aurait ainsi une action antioxydante (lutte contre les effets des radicaux libres à l'origine de nombreuses pathologies : cancers, maladies cardiovasculaires, diabètes, dégénérescence cérébrale, sida), une action dermatologique et anti-âge (prévention du vieillissement accéléré de la peau) et une action sur les défenses naturelles de l'organisme.Nous verrons la semaine prochaine quelle lecture la science officielle peut faire de ce produit ; ou plus précisément des vertus que certains lui confèrent.(A suivre)