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ISO 690 | Beer, S., Ruiz, J., Alexandre, K., Pécoud, S., Diabète gestationnel : le suivi s’arrête-t-il après l’accouchement ?, Rev Med Suisse, 2006/068 (Vol.2), p. 1468–1472. DOI: 10.53738/REVMED.2006.2.68.1468 URL: https://www.revmed.ch/revue-medicale-suisse/2006/revue-medicale-suisse-68/diabete-gestationnel-le-suivi-s-arrete-t-il-apres-l-accouchement |
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MLA | Beer, S., et al. Diabète gestationnel : le suivi s’arrête-t-il après l’accouchement ?, Rev Med Suisse, Vol. 2, no. 068, 2006, pp. 1468–1472. |
APA | Beer, S., Ruiz, J., Alexandre, K., Pécoud, S. (2006), Diabète gestationnel : le suivi s’arrête-t-il après l’accouchement ?, Rev Med Suisse, 2, no. 068, 1468–1472. https://doi.org/10.53738/REVMED.2006.2.68.1468 |
NLM | Beer, S., et al.Diabète gestationnel : le suivi s’arrête-t-il après l’accouchement ?. Rev Med Suisse. 2006; 2 (068): 1468–1472. |
DOI | https://doi.org/10.53738/REVMED.2006.2.68.1468 |
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Women with gestational diabetes have a high risk for dysglycemia andmetabolic syndrome. The post-partum screening evaluation allows to establish the «metabolic profile». The components of the SM must be recognized and treated. The life-style modifications are the priority. A follow-up by the general practitioner, assisted by a dietitian when it is indicated must be set up and the objectives regularly evaluated. The difficulty perceiving the long-term benefits and the changes of priority when the child is born represent specific barriers for the preventive interventions and must be identified. Specific preventive strategies to this population at high risk must be created and evaluated.
Les femmes présentant un diabète gestationnel ont un risque augmenté de dysglycémie et de syndromemétabolique (S-MET). L’examen post-partumpermet d’établir le «profilmétabolique». Les composants du S-MET doivent être reconnus et une prise en charge initiée. Les mesures hygiéno-diététiques sont prioritaires. Un suivi par le médecin de premier recours, assisté d’un(e) diététicien(ne) lorsque cela s’avère indiqué doit êtremis en place avec des objectifs discutés et évalués régulièrement. La difficulté à percevoir les bénéfices à long terme et les changements de priorité une fois que l’enfant est né représentent des barrières spécifiques à l’application des interventions preventives et doivent être identifiés. Des stratégies préventives spécifiques à cette population à risque doivent être élaborées et évaluées.
Le diabète gestationnel (DG) est l’anomalie métabolique de la grossesse la plus commune et concerne 2 à 12% des grossesses en fonction de l’ethnie, des prédispositions génétiques et de facteurs environnementaux. Il est défini comme un trouble du métabolisme glucidique diagnostiqué pour la première fois au cours de la grossesse. Ce trouble du métabolisme est, entre autre, le reflet d’une insulino-résistance révélée par des conditionsmétaboliques spécifiques, la grossesse, qui constitue un équivalent d’épreuve de stress de tolérance au glucose et de certaines composantes du syndrome métabolique (S-MET). Il identifie donc un groupe de femmes à risque de développer ultérieurement un diabète de type 2 (diab2) et un S-MET, ce dernier étant en fait l’association d’une résistance à l’insuline avec d’autres facteurs de risque cardiovasculaires (tableau 1).
Une abondante littérature existe sur le dépistage, lesméthodes diagnostiques et la prise en charge du DG. Il existe suffisamment de preuves sur la morbidité maternelle, foetale et néonatale augmentée en cas de DG (prééclampsie, macrosomie foetale et dystocie des épaules…). Il y a donc un consensus sur l’intérêt d’une prise en charge énergique et précoce de ce désordre métabolique. A long terme, le risque de développer un diabète et un S-MET est augmenté pour les femmes ayant présenté un DG,mais également pour les descendants issus d’une grossesse diabétique.
Les recommandations pour le post-partum sont de dépister, au moins six semaines après l’accouchement, une dysglycémie (un diab2 ou un prédiabète) par une hyperglycémie provoquée par voie orale (HGPO). Malheureusement, encore trop de femmes échappent à ce dépistage, soit parce qu’on aura omis de l’organiser, soit parce qu’elles n’ont pas correctement perçu la signification à long terme de ce trouble métabolique une fois la grossesse terminée, et ne sont donc pas motivées à pratiquer cet examen.
A l’aide d’une vignette clinique, nous allonsmontrer quel est le «risquemétabolique» associé au DG, et quelles sont les recommandations de prise en charge que l’on peut élaborer en tenant compte des obstacles que l’on rencontre fréquemment.
Mme M. N. est une patiente de 30 ans, d’origine algérienne, P1G0, chez laquelle un DG a été diagnostiqué à la 29e semaine de grossesse.On identifie comme facteurs de risque préalables à la grossesse une anamnèse familiale positive, une surcharge pondérale (BMI 26 kg/m2), un tour de taille à 95 cm et l’âge. Dès la 32e semaine de grossesse, un traitement par insuline est nécessaire en plus des recommandations diététiques. En fin de grossesse, la prise pondérale s’élève à 14,3 kg. La pression artérielle (PA) est de 125/65 mmHg. Elle accouche par voie basse à 38 4/7 semaines d’un garçon de 3200 g, en bonne santé.
Examen 8 semaines post-partum: poids 78,5 kg (-5,8 kg, BMI 29,2 kg/m2), tour de taille à 100 cm, PA 130/78 mmHg. HGPO (75 g de glucose) ; glycémie à jeun: 5,4 mmol/l (N <5,6), glycémie à 120 minutes : 6,8 mmol/l (N <7,8). Cholestérol total : 5,1 mmol/l, HDL 1,3 mmol/l, LDL 2,9 mmol/l, triglycérides (TG) 1,9 mmol/l.
Cette femme présente une surcharge pondérale de type central. L’HGPOmontre l’absence de dysglycémie résiduelle. Selon les recommandations actuelles, elle est informée du résultat de ses examens, du risque de développer un diab2 ultérieurement, nécessitant dès lors un contrôle annuel de la glycémie et/ou un dépistage précoce d’un nouveau DG en cas de nouvelle grossesse. Elle est avertie de l’importance de perdre du poids et de pratiquer une activité physique régulière dans le but de prévenir l’apparition future d’une dysglycémie. Aucun suivi diététique n’est proposé, la patiente n’entrant pas dans une catégorie reconnuepar l’assurancemaladie pour un remboursement d’une telle prestation (absence de dysglycémie ou d’obésité).
En fait, Mme M. N. présente selon les critères de l’International Diabetes Federation, et ceci malgré l’absence de dysglycémie, deux paramètres sur trois permettant de retenir formellement le diagnostic de syndrome métabolique (tableau 1). Elle doit désormais être identifiée comme patiente à haut risque de développer non seulement un diab2 mais également un S-MET avec le corollaire de morbidité cardiovasculaire associée. Elle constitue donc un sujet idéal pour la prévention. Le médecin de premier recours devient dans ce cas l’interlocuteur principal en charge du suivi et de la mise en place des mesures préventives.
Depuis quelques années, l’intérêt se porte sur le profil métabolique des femmes ayant présenté un DG. En effet, l’augmentation marquée de la morbidité et de la mortalité associée au S-METmotive l’identification demarqueurs permettant de dépister précocement des groupes à risque pour lesquels des stratégies préventives efficaces devraient être initiées.1
Il est reconnu que le DG peut être assimilé à un état de prédiabète avec un risque de développer un diab2 de 30 à 50% pour le reste de la vie.2 Ce risque représente en fait le reflet d’une insulino-résistance qui est également lemécanisme associé à un S-MET. Plusieurs études de suivi longitudinal montrent que ces femmes présentent un risque accru de S-MET. Verma et coll. ont étudié la prévalence de S-MET d’un collectif de 106 femmes américaines avec un passé de DG comparé à un groupe contrôle sur une durée de onze ans. Cette prévalence s’élève à 27,2% contre 8,2 % ce qui équivaut à un risque à onze ans de 37% pour les femmes avec antécédent de DG contre 10% pour les témoins. La présence d’un surpoids précédant la grossesse est un prédicteur important d’évolution vers un S-MET.3 Plus récemment, une étude danoise portant sur 481 cas et plus de 1000 contrôles montre que le risque de développer un S-MET post-DG sur un suivi de près de dix ans était de 40%, et ce indépendamment de la définition du S-MET, soit trois fois supérieur au risque des contrôles, et qu’en présence d’un surpoids préalable à la grossesse ce risque était sept fois supérieur. Il est important de relever de cette étude que les femmes n’ayant pas de dysglycémie résiduelle (22,4%) présentent tout demême un risque de S-MET deux fois supérieur aux contrôles.4 Une étude portant sur 159 patientes d’ethnies diverses, suivies à Lausanne pour DG, montre que présenter des composants du S-MET (obésité, HTA, dyslipidémie) préalablement à la grossesse est un facteur de risque indépendant pour un trouble de la tolérance au glucose dans le post-partum.5 Ceci démontre bien l’importance de tenir compte des facteurs de risque déjà présents avant la grossesse dans l’appréciation du risque.
Parallèlement à ces études épidémiologiques, on note une altération de marqueurs biologiques inflammatoires et d’atteintes vasculaires6 ainsi qu’une dysfonction endothéliale, ceci en dehors de la grossesse et en l’absence de troubles résiduels de la glycémie.7,8 Ceci révèle chez ces femmes une atteinte vasculaire précoce existant longtemps avant l’apparition de signes cliniques mesurables.
Outre l’HGPOpost-partum, à organiser six à douze semaines après l’accouchement au plus tôt, les recommandations actuelles sont d’effectuer annuellement chez les femmes avec antécédent de DG, une glycémie veineuse à jeun et un profil lipidique afin de diagnostiquer précocement un trouble du métabolisme glucidique et des lipides. Il est également recommandé de dépister tôt un diabète lors d’une prochaine grossesse (12e semaine d’aménorrhée).
Or, il paraît clair que les femmes ayant présenté un DG constituent un groupe à haut risque de développer un S-MET, que ce risque est accru en présence de paramètres présents avant la grossesse, faciles à identifier (figure 1). Il est donc nécessaire d’être plus actifs dans une prise en charge préventive qui puisse porter ses fruits sur le long terme. Tout d’abord, il est important d’établir dans le postpartum un «profil métabolique» complet (HGPO et bilan lipidique hors de la période d’allaitement, PA, BMI, tour de taille). Ensuite, un suivi doit être activementmis en place avec comme objectif une intervention centrée sur les paramètres modifiables du S-MET (BMI, tour de taille, PA, TG élevés, HDL bas, dysglycémie).
La prise en charge proposée dans notre service est basée sur l’application des principes de promotion de santé à long terme, par analogie aux études sur l’efficacité de ces mesures chez des sujets intolérants au glucose.2,9-11
Chez les femmes ayant une dysglycémie post-partum, certains traitements médicamenteux ont prouvé leur efficacité dans lapréventionde l’apparitiondudiab2.9-12Cependant, ils présententdes limites, notamment leur coût, l’efficacité à long terme ou encore l’adhérence au traitement. De plus, ils ne sauraient être prescrits sans dispenser en parallèle une éducation sur les changements de mode de vie (lutte contre la sédentarité, contre l’excès de poids), et ce d’autant que l’impact d’une telle éducation se répercutera sur l’ensemble de la famille et sur la descendance qui présente également un risque accru de S-MET et d’obésité. Ainsi, l’amélioration des paramètres métaboliques et le retour vers le poids d’avant grossesse, même en cas de surpoids, sont des objectifs prioritaires. Lesmesures hygiéno-diététiques porteront principalement sur l’alimentation et l’activité physique avec une finalité de changement sur le long terme et doivent être promues par le médecin de premier recours qui en assurera le suivi (tableau 2). Un partenariat entre médecin et patiente avec définition claire d’objectifs personnalisés (et réalisables!) à atteindre est recommandé. Les messages doivent être répétés régulièrement car les changements de mode de vie sont difficiles àmaintenir sur le long terme.
Les barrières à l’application de ces mesures doivent être identifiées. Pour la plupart des femmes, le diagnostic de DG est vécu comme un choc. Elles sont confrontées à une gros-sesse à risque et à la menace de développer un diab2 ultérieurement. Elles doivent parfois faire le deuil du déroulement normal de leur grossesse et peuvent ressentir une grande culpabilité, renforcée par des antécédents de surpoids. La plupart du temps, pendant la grossesse, ce diagnostic agit comme un moteur et permet de faciliter les changements de comportement. L’apprentissage de la gestion du diabète leur permet d’acquérir une expertise et des connaissances qui les motivent à opter pour un style de vie sain.13 Cependant, après la naissance de l’enfant, cette motivation ne perdure pas. D’autres priorités apparaissent et le risque ultérieur de diab2 et de S-MET, pour peu qu’il ait été expliqué, ne constitue pas unemotivation suffisante. D’autre part, l’absence de bénéfices perçus à court terme rend difficile le maintien des efforts préalablement fournis. Le désir de perdre du poids peut représenter un moteur pour l’adoption des mesures hygiéno-diététiques, raison pour laquelle un soutien de la part d’un(e) diététicien(ne) peut se révéler utile, bien qu’à l’heure actuelle, un tel suivi ne soit pas remboursé par les prestations LAMAL en l’absence de dysglycémie ou d’obésité. Ces femmes ne sont donc pas soutenues financièrement dans leur démarche. Enfin, ces femmes en bonne santé n’ont parfois pas de médecin de premier recours ou ces derniers ne les identifient pas comme faisant partie d’un groupe à risque.
Depuis 2004, les patientes adressées pour DG dans le Service d’endocrinologie et diabétologie du CHUV, bénéficient d’un suivi systématique par l’infirmière spécialisée. Cette prise en charge s’articule sur le contrôle des paramètres métaboliques et sur l’identification des besoins spécifiques en tenant compte des croyances, des ressources et des difficultés. De plus, ces femmes sont sensibilisées à la prévention d’un futur S-MET et leur profil métabolique est évalué huit à douze semaines post-partum. Les résultats des examens sanguins et biométriques sont expliqués et des options de suivi proposées (médecin de premier recours, diététicienne, Service d’endocrinologie et diabétologie en cas de diabète persistant). Ainsi, plus de 70% des femmes sont actuellement revues alors que préalablement seules 47% revenaient après l’accouchement.5
LeDGpeut être considéré comme une épreuve de stress métabolique qui permet d’identifier un groupe à haut risque, selon les études de suivi dont nous disposons, d’évolution vers un S-MET et potentiellement d’atteinte cardiovasculaires future. Il est indispensable que les soignants (obstétriciens, médecins de premier recours, spécialistes) identifient ce risque en établissant dans le post-partum un «profil métabolique» complet en tenant compte des paramètres déjà présents avant la grossesse qui sont indicateurs du risque à long terme.
Une intervention préventive active par enseignement des mesures hygiéno-diététiques en priorité, voire traitementmédicamenteux dans certains cas doit être instaurée. La difficulté à percevoir les bénéfices à long terme et les changements de priorités une fois la grossesse terminée explique que l’application des mesures proposées ne perdure pas en l’absence de suivi régulier. De ce fait, des stratégies de suivi propres à cette population doivent être réfléchies. Une approche éducationnelle en groupe réunissant des femmes avec antécédent de DG pourrait se révéler stimulante par le biais de l’interaction et du support entre pairs. A notre connaissance, un tel programme n’a pas encore été évalué pour ce type de population.
> Les femmes avec des antécédents de diabète gestationnel présentent un risque augmenté non seulement de diabète de type 2,mais également de syndrome métabolique
> Actuellement, elles ne sont pas identifiées comme une population à risque augmenté et elles échappent à des interventions préventives et au suivi à long terme
> Le médecin de premier recours doit identifier ces patientes comme faisant partie d’un groupe à risque métabolique augmenté, même si l’hyperglycémie provoquée ne montre pas de dysglycémie dans le post-partum immédiat (6 à 12 semaines)
> A l’heure actuelle, les stratégies préventives sont basées avant tout sur l’application de mesures hygiéno-diététiques
> Les barrières à l’application de ces mesures hygiéno-diététiques sont multiples, spécifiques à ce groupe de patientes et doivent être identifiées
> Des stratégies spécifiques de prise en charge (groupes de motivation?) doivent être réfléchies et leur impact évalué sur le long terme
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