L'infliximab est un anticorps monoclonal chimérique ayant une affinité et une spécificité élevées pour le facteur a de nécrose tumorale (TNF-a). Le TNF-a joue un rôle capital dans l'apparition et le maintien des maladies inflammatoires chroniques auto-immunes. Plus de 600 000 patients ont été traités par l'infliximab mondialement, permettant de définir de plus en plus clairement le profil d'efficacité et de sécurité de ce médicament. L'objectif de cette publication est de mettre à disposition une recommandation sur l'utilisation pratique de l'infliximab pour le traitement de la maladie de Crohn.
En cas de maladie de Crohn luminale et fistulisante, l'infliximab est efficace tant en traitement à court terme qu'en traitement d'entretien chez les patients réfractaires aux traitements classiques. Ce traitement devrait, si possible, être poursuivi toutes les huit semaines dans le cadre d'un traitement à long terme.1,2
Des réactions liées à la perfusion sont possibles avec l'infliximab ; toutefois la plupart de ces réactions sont d'intensité légère. Des réactions aiguës se traduisent par une fièvre, des nausées, une dyspnée, des céphalées et des frissons. Le traitement de ces réactions aiguës nécessite le ralentissement de la perfusion et parfois le recours à des antihistaminiques, au paracétamol et aux corticoïdes. Des réactions retardées se manifestent par des myalgies, des arthralgies, une fièvre, un exanthème et une urticaire et sont en général, elles aussi, rapidement réversibles.3 Diverses mesures permettent de réduire le risque de réactions liées à la perfusion : intervalle régulier entre les administrations d'infliximab, traitement associé par immunosuppresseurs ainsi que prémédication par des corticoïdes.4,5
L'infliximab exerce un effet immunosuppresseur et peut favoriser le développement d'infections bactériennes ou autres. Une infection active, cliniquement importante (y compris abcès), représente une contre-indication absolue à l'administration d'infliximab. Une attention particulière doit être portée à la tendance, rare, à la réactivation d'une tuberculose, raison pour laquelle tous les patients doivent faire l'objet d'un dépistage de tuberculose active ou latente avant le début d'un traitement par infliximab. Jusqu'à présent, il n'a pas été possible de démontrer une incidence plus élevée de tumeurs malignes par rapport à une population correspondante de patients.6
Le TNF-a joue un rôle capital dans l'apparition et le maintien des maladies inflammatoires chroniques auto-immunes désignées par IMID (Immune Mediated Inflammatory Diseases). Dans les années 1990, le TNF-a a pu être identifié comme étant une cytokine jouant également un rôle important dans la maladie de Crohn. L'infliximab est un anticorps IgG1 monoclonal chimérique constitué de 75% de séquences humaines et de 25% de séquences murines. L'infliximab se fixe avec une affinité et une spécificité élevées au TNF-a circulant, membranaire et lié à ses récepteurs, neutralise l'activité biologique du TNF-a et inhibe la fixation du TNF-a à ses récepteurs. L'action principale réside sans doute essentiellement dans la capacité à induire une apoptose des cellules T activées sous l'effet de la fixation de l'infliximab à la surface cellulaire.
En Suisse, l'infliximab est autorisé pour les indications suivantes : maladie de Crohn (MC), polyarthrite rhumatoïde (PR), polyarthrite rhumatoïde précoce (PR précoce), maladie de Bechterew/spondylarthrite ankylosante (SA) ainsi qu'arthrite psoriasique (APs). D'autres indications telles que le psoriasis (Psor) et la colite ulcéreuse (CU) font actuellement l'objet d'une procédure d'enregistrement.
En cas de MC, l'infliximab peut être administré chez les deux groupes de patients suivants :
* Patients présentant une maladie luminale d'activité pathologique sévère.
L'infliximab est indiqué pour le traitement des patients atteints d'une MC luminale sévère, qui n'ont pas répondu à un traitement classique, complet et adéquat, par corticoïdes et immunosuppresseurs. L'infliximab entraîne une réduction des symptômes de la maladie ainsi qu'un maintien de la rémission clinique.
* Patients présentant une MC fistulisante sévère.
L'infliximab est indiqué pour le traitement des patients atteints d'une MC avec fistulisation sévère, qui n'ont pas répondu à un traitement classique complet et adéquat (incluant antibiotiques, drainage et immunosuppresseurs).
Le traitement de la MC par infliximab doit être réalisé par un médecin ayant une expérience dans le domaine du diagnostic et du traitement des maladies intestinales inflammatoires. L'administration d'infliximab ne doit se faire que dans un environnement habitué à pratiquer des perfusions (en particulier d'infliximab) et à prendre en charge les réactions éventuelles.
De manière générale et si l'on respecte les indications et les mesures de précaution énumérées ci-dessous, le traitement de la MC par infliximab permet d'obtenir une efficacité satisfaisante à très satisfaisante et de longue durée (il existe des données d'étude sur 54 semaines). Cette efficacité s'accompagne d'une tolérance relativement bonne et d'une action d'installation rapide. Dans le cas particulier où un traitement immunosuppresseur ne se révèle pas efficace, l'infliximab représente souvent la seule alternative thérapeutique.1,2
La posologie de l'infliximab dans le traitement de la MC est de 5 mg/kg de poids corporel, administrés par perfusion intraveineuse sur une période de deux heures. Les patients doivent être placés sous surveillance pendant et jusqu'à une heure après la perfusion afin de déceler la survenue de tout effet indésirable éventuel. Il est néanmoins recommandé de prolonger la durée d'observation à deux heures après l'administration des trois premières perfusions car les réactions d'hypersensibilité éventuelles apparaissent plutôt au début du traitement par infliximab.
Avant et pendant le traitement par infliximab, il est recommandé d'administrer des immunosuppresseurs afin de prévenir la formation d'anticorps anti-infliximab et de réduire l'incidence des réactions à la perfusion qui y sont liées.4 On suppose par ailleurs qu'il est ainsi possible de réduire une éventuelle perte d'action de l'infliximab.7
Chez les patients qui n'ont pas encore été traités par immunosuppresseurs, un tel traitement doit être instauré si possible trois mois avant le début du traitement par infliximab. Les substances appropriées sont l'azathioprine (AZA : 2-2,5 mg/kg) ou la 6-mercaptopurine (6-MP : 1-1,5 mg/ kg). En cas d'intolérance à l'AZA ou à la 6-MP, il est possible d'envisager un passage au méthotrexate (MTX : 10 mg- 25 mg par semaine par voie i.m. ou s.c.).
Juste avant la perfusion, il est recommandé d'administrer une prémédication basée sur 200 mg d'hydrocortisone (ou 40 mg de prednisone). Cette prémédication se justifie en particulier lorsque des immunosuppresseurs ne peuvent pas être administrés par exemple pour des raisons d'intolérance.5 La prémédication d'hydrocortisone représente une mesure préventive permettant de diminuer la formation d'ATI (ATI : anticorps anti-infliximab) ainsi que la fréquence et la sévérité des réactions liées à la perfusion.
L'administration d'infliximab s'effectue au cours des semaines 0 et 2. La réponse au traitement doit être contrôlée quatre semaines après la seconde perfusion (semaine 6). Si le traitement n'entraîne pas d'amélioration par rapport à l'état initial, il n'est pas recommandé de pratiquer d'autres perfusions.2 En revanche, si le patient répond au traitement, celui-ci doit se poursuivre par une perfusion à la semaine 6.
Après un traitement d'induction efficace, se pose la question d'une poursuite de celui-ci à titre de traitement d'entretien basé sur des perfusions à huit semaines d'intervalle. En cas de MC luminale comme en cas de MC fistulisante, les patients restant en rémission sont plus nombreux lorsque l'administration d'infliximab se fait de façon régulière toutes les huit semaines que lorsque le traitement se poursuit de façon épisodique (on demand). De plus, un traitement régulier toutes les huit semaines semble être supérieur à une administration épisodique d'infliximab pour certains critères cliniques. Il a ainsi été constaté que la formation d'ATI était plus faible et que les patients nécessitaient moins de séjours hospitaliers et/ou d'interventions chirurgicales. En résumé : si l'infliximab est utilisé pour le traitement de la MC, il convient de commencer par un traitement d'induction au cours des semaines 0, 2 et 6. L'état actuel des connaissances indique que ce traitement doit ensuite se poursuivre à long terme.1,2,8
Si une perte d'efficacité de l'infliximab apparaît pendant le traitement à long terme, il est généralement possible de rétablir l'efficacité en augmentant la dose à 10 mg/kg de poids corporel. Si une rechute se produit avant huit semaines, il est possible de raccourcir l'intervalle entre les administrations.2
Dès qu'un patient traité par infliximab obtient une rémission, il faut tenter de supprimer une éventuelle corticothérapie associée (dose supérieure à 20 mg de prednisone : réduction de 5-10 mg prednisone/semaine ; dose inférieure à 20 mg de prednisone : réduction de 2,5-5 mg prednisone/ semaine).2
Les fumeurs doivent être encouragés à s'abstenir de fumer avant un traitement par infliximab. Un tabagisme actif peut significativement réduire la durée d'efficacité de l'infliximab et entraîner une réponse plus faible.9
L'action de l'infliximab a été étudiée en cas de fistules de types différents. On ignore actuellement pour quel type de fistule il existe une indication primaire d'un traitement par infliximab (simple, complexe, entéro-cutanée ou recto-vaginale). Dans les études, si les fistules entéro-cutanées et recto-vaginales peuvent souvent être traitées de manière efficace avec l'infliximab, il n'existe pas de connaissances globales sur les fistules internes.
Avant un traitement des fistules, un examen clinique réalisé sous anesthésie (par exemple, à l'aide d'une endo-échographie) ou un examen IRM doit établir avec exactitude l'anatomie de la fistule afin d'exclure une abcédation.7 Si des abcès sont diagnostiqués, ceux-ci doivent alors être traités par un drainage approprié avant le traitement par infliximab.
Les patients atteints de MC fistulisante, qui ne répondent pas suffisamment aux traitements classiques, reçoivent d'abord une perfusion de 5 mg/kg de poids corporel, puis deux autres perfusions de 5 mg/kg de poids corporel aux semaines 2 et 6. Dans le cas des fistules ayant un trajet complexe, l'association d'un drainage par fil de Seton ou par drain à l'administration de l'infliximab a également fait ses preuves dans une étude. Une augmentation des effets indésirables n'a toutefois pas été observée.10
Si le traitement se révèle efficace, l'infliximab présente un bon effet en ce qui concerne la sécrétion et l'obtention d'une fermeture de la fistule. En général, les canaux fistulaires persistent en dépit d'une fermeture en surface ; c'est la raison pour laquelle, le traitement par infliximab doit absolument être poursuivi dans le cadre d'un traitement à long terme en respectant un intervalle de huit semaines entre les administrations.8 Un traitement immunosuppresseur associé doit être envisagé.
Une interruption du traitement n'est généralement pas recommandée. Si des signes et symptômes de la maladie réapparaissent après une longue pause thérapeutique, l'infliximab peut à nouveau être administré dans un délai de 16 semaines après la dernière perfusion. Il a été constaté que l'administration d'infliximab après un intervalle de 2 à 4 ans sans administration du médicament s'accompagnait de réactions d'hypersensibilité retardées plus fréquentes. Le risque d'une réaction d'hypersensibilité retardée après un intervalle de 16 semaines à 2 ans n'est pas connu. Après une interruption prolongée du traitement (d'une durée supérieure à 16 semaines), il est donc absolument recommandé d'administrer une prémédication (voir ci-dessus).
Au cours de la maladie, les manifestations extra-intestinales entraînent des symptômes supplémentaires chez plus de la moitié des patients. L'infliximab n'est pas autorisé pour le traitement de la plupart de ces manifestations extra-intestinales de la MC. Un grand nombre de cas rapportés et de petites études ont toutefois bien confirmé l'efficacité de l'infliximab chez des patients présentant des manifestations extra-intestinales, notamment une pyodermite gangréneuse.11 C'est la raison pour laquelle, il est possible d'utiliser l'infliximab, en cas de besoin thérapeutique pour le traitement des manifestations extra-intestinales de la MC malgré l'absence de données confirmées par des études.
L'infliximab est contre-indiqué chez les patients atteints de tuberculose, d'autres infections sévères telles qu'un sepsis, des abcès non drainés ou des infections opportunistes et chroniques (même en cas d'atteintes par le virus VIH et d'hépatite B). Il est contre-indiqué chez les patients atteints d'insuffisance cardiaque modérée ou sévère (NYHA III-IV) ainsi que chez les patients présentant une intolérance connue à la substance active, à d'autres protéines murines ou à un des excipients. Une attention particulière doit être portée aux patients atteints d'affections démyélinisantes, de tumeurs malignes et de lymphomes.
Même si l'efficacité clinique de l'infliximab est confirmée chez les patients M 64 ans, il est recommandé de démarrer le traitement avec prudence chez ce groupe de patients car ils présentent souvent une insuffisance hépatique, rénale ou cardiaque.
L'expérience clinique a montré que les mécanismes de défense contre les infections étaient affaiblis chez certains patients traités par infliximab. Les patients doivent par conséquent être placés sous surveillance pendant et après (pendant six mois) un traitement par infliximab, afin de déceler toute infection éventuelle (y compris une tuberculose disséminée). S'il apparaît une infection, le traitement doit être arrêté et une antibiothérapie rapidement instaurée.
La réactivation d'une tuberculose latente représente une complication potentielle en cas de traitement anti-TNF-a. Depuis sa mise sur le marché, 709 cas de tuberculose ont été signalés sur les 634 191 patients traités par infliximab (soit 1 611 152 années-patient) (date des données PSUR 11, février 2005). Le taux cumulé de déclaration était donc de 0,44 cas pour 1000 années-patient. 8,7% des cas ont abouti au décès du patient.6
Avant l'instauration d'un traitement par infliximab, il est recommandé de rechercher une tuberculose active ou inactive (latente) chez les patients. Cette recherche comprend une anamnèse détaillée incluant la recherche d'une tuberculose dans les antécédents personnels, celle d'un éventuel contact antérieur avec la tuberculose et celle d'un traitement immunosuppresseur antérieur et/ou actuel. Une radiographie du thorax est également recommandée. Sur la base des recommandations nationales et internationales ainsi que sur celles du fabricant le test cutané (test de Mendel-Mantoux, 5 unités de tuberculine de PPD standard injectées par voie exclusivement intradermique) est préconisé.12 Une induration d'une dimension égale ou supérieure à 5 mm doit être considérée comme positive.
Comme les patients concernés sont généralement des patients immunodéprimés, le test à la tuberculine de Mendel-Mantoux peut présenter un résultat faussement négatif. Il faut également noter qu'un résultat faussement positif est possible chez les patients vaccinés contre la tuberculose. Dans les pays où, par le passé, des campagnes de vaccination ont été réalisées de façon systématique, comme par exemple la Suisse, un test de Mantoux positif ne permet de tirer aucune conclusion catégorique sur l'existence d'une infection latente. C'est pourquoi, la valeur concluante du test cutané de dépistage d'une tuberculose, malgré les recommandations, est discutable et ne remplace absolument pas une anamnèse détaillée et les radiographies du thorax.7 Des tests plus spécifiques de dépistage de la tuberculose (par exemple, test QFT) sont actuellement en cours d'évaluation en Europe.
Si une tuberculose active est diagnostiquée, un traitement par infliximab ne doit pas être instauré et la tuberculose doit être traitée conformément aux recommandations actuelles. Dans le cas d'une tuberculose inactive (latente), il est indiqué d'administrer un traitement préventif par isoniazide (300 mg/jour) pendant six à neuf mois. La durée de ce traitement avant l'introduction d'un traitement par infliximab n'est pas étudiée ; mais en fonction de la situation clinique, une administration d'infliximab est envisageable après un à deux mois de traitement par isoniazide.8
Lorsque le dépistage d'une tuberculose s'est révélé négatif, les patients devraient être informés de la possibilité de survenue d'une tuberculose. Ils doivent être attentifs à des symptômes tels que toux, difficultés respiratoires, fatigue, lassitude, asthénie, états subfébriles, hypersudations nocturnes, symptômes abdominaux et uro-génitaux ainsi que symptômes méningés. Si, pendant le traitement, le patient présente des symptômes de ce type permettant de conclure à une tuberculose, le traitement par infliximab doit être immédiatement arrêté et la tuberculose doit faire l'objet d'examens complémentaires.
L'apparition de troubles de la fonction hépatique a été rapportée dans de rares cas pendant un traitement par infliximab. Trente-quatre cas au total ont ainsi été rapportés pendant la surveillance postmarketing au cours des 1,3 million d'années-patient. La plupart de ces cas ne comportaient qu'une élévation transitoire des paramètres de la fonction hépatique et ont eu une évolution bénigne. Une insuffisance hépatique aiguë nécessitant une transplantation hépatique est apparue dans trois cas et deux autres cas ont eu une issue fatale. Un lien de causalité avec l'administration de l'infliximab n'a pas pu être clairement établi en raison de facteurs aggravants tels qu'un traitement immunosuppresseur concomitant, une affection immunitaire primitive ou l'absence de données sur le patient, mais ne peut toutefois pas être exclu.
Si, pendant le traitement par infliximab, un patient présente un ictère et/ou une élévation des GPT M 5 fois la limite normale supérieure, l'infliximab doit être arrêté et cette anomalie doit faire l'objet d'examens complémentaires détaillés.
Comme pour les autres immunosuppresseurs, il est apparu, dans quelques cas isolés, une réactivation de l'hépatite B chez des patients qui étaient traités par infliximab et qui étaient porteurs chroniques du virus de l'hépatite B (par exemple, résultat positif à la recherche de l'antigène de surface Ag HBs).13,14 En raison du risque existant, même faible, de réactivation d'une hépatite B, il est recommandé d'effectuer un dépistage de l'hépatite B avant l'instauration d'un traitement par infliximab. Chez les patients présentant une hépatite B dans leurs antécédents, il convient de bien évaluer les bénéfices et les risques d'un traitement par infliximab ; une prophylaxie antivirale peut être indiquée dans ces cas.
Selon l'expérience actuelle, le risque péri-opératoire pendant un traitement par infliximab n'est pas plus élevé.15 La planification d'une intervention chirurgicale élective peut donc se faire indépendamment des perfusions. En raison du risque plus élevé d'infection éventuelle, tous les patients traités par infliximab doivent être placés sous surveillance en cas d'interventions chirurgicales afin de déceler une infection éventuelle. Ceci s'applique également aux patients, qui sont opérés dans les six mois qui suivent un traitement par infliximab.
En raison de l'absence de données sur les réactions à une vaccination par des vaccins vivants ou sur la transmission secondaire d'infections par des vaccins vivants, il est recommandé de ne pas administrer des vaccins tels que le BCG, le vaccin antipolio oral, le vaccin oral contre la typhoïde ainsi que les vaccins contre le choléra, la varicelle, les oreillons et la fièvre jaune pendant le traitement par infliximab.
Une contraception doit être utilisée pendant le traitement par infliximab. Comme une élimination quantitative de l'infliximab de la circulation sanguine nécessite environ six mois, des méthodes contraceptives appropriées sont recommandées pendant une durée minimale de six mois après le dernier traitement.
Comme on peut s'y attendre avec toute immunoglobuline, un passage transplacentaire a également été observé avec l'infliximab. L'état actuel des données permet de conclure qu'une exposition à l'infliximab pendant la grossesse ne s'accompagne pas d'une augmentation du pourcentage de malformations.16 L'infliximab ne devrait toutefois être administré pendant la grossesse que si cela s'avérait absolument nécessaire. Un passage dans le lait maternel n'a pas été constaté.
Une étude de pharmacocinétique a été réalisée chez des patients pédiatriques âgés de 11 à 17 ans, atteints de la maladie de Crohn. En ce qui concerne la pharmacocinétique d'une administration unique d'infliximab, aucune différence importante n'a été constatée entre les patients pédiatriques et les patients adultes atteints de la maladie de Crohn.
Comme pour toute protéine perfusée, des réactions liées à la perfusion sont également possibles avec l'infliximab. Dans ce cas, il convient de faire la distinction entre réactions aiguës (qui apparaissent pendant une à deux heures après l'administration) et réactions retardées (deux à quatorze jours après la perfusion). Dans l'ensemble, de telles réactions liées à la perfusion apparaissent rarement (dans environ 4,5% des perfusions) et sont généralement d'intensité légère. Des réactions sévères liées à la perfusion ne sont observées que dans 0,16% des perfusions administrées. Il est néanmoins essentiel de placer les patients sous surveillance étroite pendant l'administration d'infliximab ainsi qu'une heure après.
Au cours des trois premières perfusions, il est recommandé de surveiller le patient pendant une période de deux heures, cette durée pouvant être réduite à une heure pour les perfusions ultérieures s'il n'est pas apparu de complication.
Les mécanismes à l'origine du déclenchement des réactions liées à la perfusion sont obscurs et il n'existerait une réaction d'hypersensibilité de type I liée aux IgE que dans un faible nombre de réactions liées à la perfusion (notamment celles s'accompagnant d'une hypotension et d'un bronchospasme). Les constatations suivantes plaident contre une origine allergique :3
En revanche, une corrélation entre le développement d'anticorps anti-infliximab (ATI : anticorps à l'infliximab) et des réactions liées à la perfusion a été confirmée par des études cliniques. Le risque de développement d'une réaction est deux à trois fois plus élevé si la recherche d'anticorps ATI est positive.4 Une analyse du taux d'anticorps ATI n'est toutefois pas recommandée car elle n'a aucune valeur prédictive (il est à noter d'une part que les patients sans ATI peuvent également développer une réaction liée à la perfusion et d'autre part qu'une présence d'anticorps ATI n'entraîne pas obligatoirement une réaction liée à la perfusion).
Les réactions aiguës liées à la perfusion sont classées de la manière suivante :
* Légères : hyperémie, palpitations, hypersudations, céphalées, vertiges, nausées.
* Modérées : hypo/hypertension avec ± 20 mmHg par rapport à la pression artérielle systolique, hyperémie, symptômes thoraciques tels que sensation de striction, de pression, dyspnée, augmentation de la température corporelle, palpitations, urticaire.
* Sévères : hypo/hypertension avec ± 40 mmHg par rapport à la pression artérielle systolique, augmentation de la température accompagnée de frissons, hyperémie, symptômes thoraciques tels que sensation de striction, de pression, dyspnée importante, stridor (s'il existe un risque d'obstruction des voies respiratoires, alertez l'équipe des urgences).
Les mesures à prendre dépendent de la gravité de la réaction liée à la perfusion. Les mesures vont d'un ralentissement de la perfusion à son arrêt (figure 2). Pour faire face aux cas d'urgence, il est nécessaire d'avoir à portée de main des médicaments (par exemple : antihistaminiques, corticoïdes, adrénaline et/ou paracétamol), un masque respiratoire, une canule d'intubation en vue du traitement immédiat des réactions.
S'il apparaît des réactions sévères liées à la perfusion, il faut, en général, immédiatement arrêter le traitement et renoncer aux perfusions ultérieures. Néanmoins, si une poursuite du traitement par infliximab devait être envisagée en raison de la situation pathologique des patients (en évaluant minutieusement le rapport bénéfice-risque), le traitement doit absolument être administré en milieu hospitalier par une équipe spécialisée dans le traitement par perfusion.
En principe les patients qui ont présenté une réaction légère à modérée liée à la perfusion, peuvent généralement poursuivre leur traitement sans problème avec une prémédication prophylactique par antihistaminiques et hydrocortisone.3 La figure 3 expose la procédure exacte à suivre pour réduire les réactions ultérieures liées à la perfusion.
Les réactions retardées liées à la perfusion se manifestent deux à quatorze jours après l'administration d'infliximab par des symptômes tels qu'arthralgie, myalgie, urticaire, fièvre et malaise. Ces symptômes peuvent également être contrôlés en administrant du paracétamol, des antihistaminiques et/ou des corticoïdes. Des réactions d'hypersensibilité retardée semblent apparaître notamment quand il existe de longues pauses entre les perfusions répétées d'infliximab.3
L'existence d'une réaction retardée liée à la perfusion dans les antécédents n'est pas une contre-indication absolue à une nouvelle administration d'infliximab, mais celle-ci doit se faire avec une prémédication d'antihistaminiques, de paracétamol et d'hydrocortisone.
Une augmentation de l'incidence des tumeurs est théoriquement possible étant donné le rôle capital joué par le TNF-a au sein du système immunitaire. L'évaluation d'une relation entre le développement d'une tumeur et le traitement par infliximab est en principe difficile car ces patients ont reçu, par le passé ou en parallèle, de nombreux autres médicaments comme l'azathioprine, le 6-MP, les corticoïdes, etc. De plus, leur risque de présenter des tumeurs, du moins des tumeurs d'un certain type, est plus élevé ne serait-ce qu'en raison de leur affection chronique très inflammatoire. Il a ainsi été rapporté une plus grande fréquence de lymphomes tant chez les patients atteints de polyarthrite rhumatoïde que chez ceux atteints de la maladie de Crohn.
D'après le onzième rapport actualisé sur la sécurité (PSUR 11), présenté par Centocor le 14 avril 2005 aux Autorités européennes de la santé, il n'a pu être relevé aucun nouvel indice en faveur d'une fréquence éventuellement plus élevée de lymphomes et de tumeurs solides sous l'effet d'un traitement par infliximab en cas de maladie de Crohn. Les données actuelles du registre TREAT (Therapy, Ressource, Evaluation and Assessment Tool) n'indiquent pas non plus d'augmentation significative du pourcentage de lymphomes par rapport à une population de patients atteinte de la maladie de Crohn non traitée par infliximab.
Le rôle potentiel des inhibiteurs du TNF-a n'est toujours pas clair. C'est la raison pour laquelle, la prudence est de rigueur lorsqu'un traitement par infliximab est envisagé chez un patient présentant des antécédents d'affection lympho-proliférative ou de tumeur maligne.
Le taux de mortalité sous infliximab relevé au cours des études cliniques en vue de l'autorisation du médicament, dans le registre TREAT et au cours des études rétrospectives est comparable à celui obtenu dans les études épidémiologiques réalisées chez des populations générales de patients atteintes de la MC. Chez les patients plus âgés, présentant une comorbidité importante, le risque de mortalité semble néanmoins plus élevé. Des rapports postmarketing reposant sur des déclarations spontanées, font état de taux de mortalité de 0,86 à 1,23/1000 par an chez les patients traités par infliximab.10
L'infliximab a été considéré comme une cause possible du décès de certains patients. Mais, jusqu'à présent, il n'a pas encore été possible de savoir avec certitude s'il existait effectivement un lien direct. Une raison à cela est que les patients concernés avaient souvent présenté des immunodépressions multiples et de longue durée et que tout traitement immunosuppresseur est associé à un risque d'infection à issue létale. Dans le registre TREAT, les corticoïdes, mais ni l'infliximab ni les immunomodulateurs classiques (azathioprine, 6-MP), étaient associés à une mortalité plus élevée ou à un plus grand risque d'infection.
En raison du risque d'infection généralement plus élevé, l'indication à un traitement par infliximab doit être établi de façon très précise chez tous les candidats potentiels, afin de limiter les autres risques.
Après une expérience clinique de plus de dix ans, l'efficacité de l'infliximab dans le traitement de la maladie de Crohn luminale ou fistulisante et d'autres maladies inflammatoires chroniques est indiscutable. Si son indication est bien définie et que les patients sont suivis de façon attentive, le rapport bénéfices/risques du traitement est positif. L'état actuel des données permet de conclure que l'administration de l'infliximab selon une périodicité régulière (traitement d'entretien) permet de minimiser les effets indésirables liés aux ATI et d'optimiser l'efficacité du médicament. Un traitement médicamenteux concomitant par immunomodulateurs ou sinon par administration prophylactique de corticoïdes juste avant la perfusion a fait ses preuves dans certaines études pour réduire la formation des anticorps anti-infliximab et ainsi les complications qui y sont liées. En résumé, l'infliximab représente une composante importante et bien établie de la prise en charge de la maladie de Crohn.