Elle. «Alors ça, c'était un examen à quatre mains», s'exclame hilare cette habituée de la maison. Elle connaît la musique, Elisabeth. Elle participe, comme d'autres vont aux lotos ou aux soirées du chur mixte, à tous les Enseignements chez le praticien (ECP), examens FMH ou autres cours destinés aux apprentis docteurs. «Il faut bien les former ces jeunes !», ajoute cette professionnelle de l'enseignement en rajustant sa gaine échouée sur ses hanches épanouies.Lui. Grand, plutôt beau gosse ignorant son charme, il croque la scène avec gourmandise en se régalant de cette vie de stagiaire «hors des murs». Enfant du village, il slalome avec adresse entre les «tu» et les «vous», montrant une passion pour ces contacts directs et chaleureux.Moi. «Est-ce que ça vous dérange si
» Non, visiblement, ça ne dérange pas les patients que nos cabinets soient devenus un lieu de transmission du savoir. Les consultations à trois se donnent à un rythme certes plus lent, mais tellement créatif. Et moi, qui suis-je dans tout cela ? Probablement un Compagnon, mais aussi un Passeur qui offre son esquif pour aller d'un monde vers un autre, de la connaissance vers l'expérience.Eux. Samedi 29 septembre 2007, Amphymax, UNIL, Devenir Généraliste, la rencontre de tous les espoirs, de tous les possibles est enfin arrivée. Mines réjouies, ils sont là, jeunes et vieux mêlés dans un brouhaha bon enfant. Une bourse d'échange permet à ceux qui cèdent quelque chose (badge rouge) de rencontrer l'âme sur à la recherche de la perle rare (badge vert). Et l'on parle ensemble, qui de ses craintes de choisir cette profession, qui de rassurer ou de témoigner de ses bonheurs et de ses contraintes. La discussion s'enflamme aussi autour de l'étude présentée par la Santé publique démontrant qu'une des raisons du découragement à devenir généraliste est l'attitude de la Faculté elle-même ! Espérons que la création de l'Institut universitaire de médecine générale lausannois modifiera au mieux la vision centro-nombriliste qui fait que vus du CHUV par exemple, Chavornay ou Ollon sont assimilés à Tombouctou ou Oulan-Bator ; la qualité professionnelle diminuant au prorata de la distance kilométrique et de l'accroissement de la ruralité. Cette intoxication ravageuse du citoyen et de l'étudiant lambda conduit à des a priori et à des questions souvent touchantes qui justifient pleinement la tenue de telles journées d'échange. «Est-ce vrai qu'à la campagne, vous voyez beaucoup moins de cas intéressants qu'en ville ?» Naïveté ou aveuglement ? Le stage chez le praticien, obligatoire dès 2010, en principe, dans le canton de Vaud, permettra de comparer, in vivo, les rats des villes et les rats des champs. Le caractère obligatoire de cette expérience initiatique reste, par contre, à mon avis, plus discutable, le libre choix étant, dans ce domaine comme dans d'autres, un critère de qualité en soi.Moi. Je reçois ce matin un carton par la poste. Il me laisse songeur car il contient un podomètre, un centimètre de couture et une clé USB. Publicité tapageuse pour une pilule à quatre balles par jour. Je me sens seul. Le stage est terminé et j'ai peur de m'être à nouveau trop attaché. «Oui, je veux vous aimer, mais vous aimer à peine», disait Guillaume Apollinaire. Chassant cette idée, je m'en vais la quérir à la salle d'attente.Elle. «Alors, il n'est plus là le jeunot ? Dommage, je l'aimais bien».Moi. Soupir.28.11.2007