Les chiffres les plus divers circulent quant à la fréquence des urgences médicales d’origine pulmonaire survenant lors des vols aériens. Une étude publiée dans le numéro de décembre 2007 du Journal Européen de Pneumologie (ERJ) par l’équipe de Robina Coker (service de pneumologie de l’Hôpital Hammersmith, Imperial College Healthcare NHS Trust, Londres) apporte des précisions sur ce thème. Elle montre notamment qu’une consultation soigneuse avant l’embarquement associée à une bonne surveillance pendant le vol (avec possibilité d’oxygénothérapie) devraient permettre de réduire les risques de manière substantielle.
Il faut ici rappeler que la pressurisation des cabines des appareils commerciaux, volant à une altitude d’environ 10000 à 12000 mètres, correspond en principe à une altitude de 2438 mètres. Il n’est toutefois pas rare que l’on atteigne 2700 mètres et plus. Dans ces conditions, la pression partielle en oxygène dans le sang artériel (PaO2) baisse très nettement. Chez le sujet sain, elle peut ainsi aisément passer de 100 mmHg (pression normale) à 53-64 mmHg. Ce phénomène peut avoir en revanche des effets importants chez les personnes souffrant d’une pathologie pulmonaire chez qui la PaO2 est déjà relativement basse au niveau de la mer. Les auteurs de la publication soulignent que si des recommandations existent bien aux Etats-Unis et en Europe, elles ne concernent généralement que les patients atteints de bronchopneumopathie chronique obstructive. Seul le Royaume-Uni a émis des guides de bonne pratique pour d’autres pathologies respiratoires.
Pour préciser le niveau de risque, Robina Coker et ses collègues ont conduit une enquête prospective auprès, initialement, de 616 personnes Ces personnes étaient suivies par des pneumologues et devaient effectuer un voyage aérien sur une ligne commerciale. Elles présentaient des pathologies variées: asthme et bronchopneumopathie chronique obstructive (54%); maladie pulmonaire intersticielle (23%). Près de la moitié d’entre elles (275) ont subi un test d’hypoxie qui a abouti une fois sur deux à une recommandation d’oxygénothérapie en vol.
Un peu plus de 10% des patients n’ont finalement pas effectué leur voyage, le plus souvent en raison d’une aggravation de leur état, et souvent sur les conseils de leur médecin. Une dizaine d’autres à qui l’oxygénothérapie avait été recommandée a posé problème: refus personnel, refus de la compagnie aérienne ou coût prohibitif des assurances. Sept patients sont décédés avant la date du vol, pratiquement tous à la suite d’un problème respiratoire. D’autres, enfin, ont changé d’avis pour des raisons personnelles.
Sur les 431 sujets ayant finalement effectué leur voyage, près d’un sur cinq (18%) a présenté des manifestations respiratoires pendant le voyage, à l’aller et/ou au retour. Une aggravation de la difficulté de respirer (77%), une toux (44%) et des douleurs thoraciques (23%) ont été les symptômes les plus fréquents, le plus souvent d’intensité modérée. Cinq décès ont été recensés dans le mois suivant le voyage. Pour ces auteurs, cette étude prospective multicentrique tend à montrer qu’une pathologie respiratoire même sévère n’est pas une contre-indication à un voyage en avion sous la réserve de passer d’abord un examen spécialisé. « Les malades doivent aussi vérifier au préalable qu’ils sont couverts par leur assurance, et prévoir éventuellement un surcoût pour l’oxygène, précise, pragmatique, Robina Coker. Mais même en prenant toutes les précautions, ils n’ont pas de garantie absolue que tout se passera bien. »