Le traitement de première intention du cancer du rein est avant tout chirurgical. En cas de tumeur de petite taille (≤ 4 cm) limitée au rein, la néphrectomie partielle est logiquement devenue le traitement de référence. Lorsqu’elle est techniquement possible, cette procédure peut s’appliquer à des tumeurs allant jusqu’à 7 cm de grand axe selon les recommandations 2010 de l’European Association of Urology. Les indications de cette chirurgie robot-assistée sont en cours de validation et la chirurgie à ciel ouvert reste encore actuellement la technique de référence. Pour les patients, les conséquences de cette évolution mini-invasive sont nettes : le confort et la récupération postopératoires sont respectivement accrus et plus rapides par rapport à la chirurgie ouverte classique.
Le cancer du rein représente 2 à 3% des cancers solides de l’adulte et est le troisième cancer le plus fréquent de l’appareil urogénital, après ceux de la prostate et de la vessie. Il est la sixième cause de décès par cancer dans les pays industrialisés.1 Son incidence est en augmentation et le sex-ratio est de deux hommes pour une femme. Il atteint des personnes de plus de 65 ans en moyenne.
L’utilisation de plus en plus répandue de l’échographie et du scanner abdominal a augmenté la proportion de diagnostics des cancers du rein à un stade asymptomatique, celui-ci avoisinant désormais près de 70%. Ces tumeurs sont de petites tailles et de bon pronostic tumoral.2,3
La prise en charge du carcinome à cellules rénales évolue constamment et les bénéfices de la préservation néphronique sont maintenant parfaitement établis. La chirurgie minimalement invasive n’a de sens que si ses résultats oncologiques et/ou fonctionnels sont équivalents ou supérieurs à une technique antérieure largement répandue, reconnue et étant de ce fait la technique de référence.
La néphrectomie partielle à ciel ouvert s’est largement affirmée ces vingt dernières années comme le traitement de référence des petites tumeurs rénales (≤ 4 cm) avec des résultats oncologiques comparables à ceux de la néphrectomie radicale, tout en ayant l’avantage de préserver une partie de la fonction rénale. Le respect de celle-ci exerce un impact favorable sur les risques cardiovasculaires et la survie globale du patient.4,5 Plus récemment, l’indication à la néphrectomie partielle a été étendue à des tumeurs allant jusqu’à 7 cm de grand axe, selon la localisation de la lésion et la fonction rénale.6 La voie laparoscopique a été initialisée il y a une quinzaine d’années et ses résultats oncologiques sont satisfaisants, associés à une morbidité réduite et une durée d’hospitalisation plus courte qu’après une chirurgie identique par voie ouverte.7,8 L’abord laparoscopique ne s’est toutefois pas disséminé, en raison de sa difficulté technique élevée liée principalement à la nécessité de suturer la tranche de section rénale en un temps limité par le clampage artériel indispensable (20 à 30 minutes). Ainsi, le nombre de centres européens pratiquant régulièrement et efficacement cette technique reste extrêmement restreint. La néphrectomie partielle laparoscopique avec assistance robotisée est une technique émergente qui associe les avantages mini-invasifs de la chirurgie laparoscopique à ceux techniques de la robotique (vision en trois dimensions et dextérité instrumentale augmentée). Ainsi, cette dernière rend l’intervention plus facile, permettant sa dissémination à un plus grand nombre. S’agissant d’une technique opératoire récente, l’incidence et les risques de complications sont encore mal connus, bien qu’un parallèle puisse être fait avec les débuts de la chirurgie laparoscopique.
La chirurgie robotique est aujourd’hui en plein essor dans l’ensemble des disciplines chirurgicales, comme en urologie où l’intérêt du robot a été clairement démontré. Dans la prostatectomie radicale par exemple, la technique robotique s’est avérée au moins aussi efficace que la chirurgie ouverte en termes de résultats oncologiques et fonctionnels, tout en étant moins invasive que cette dernière.9,10 Nous nous focaliserons sur le robot da Vinci, qui est aujourd’hui de très loin le plus utilisé (figures 1, 2 et 3).
L’intervention robotique reste techniquement exigeante car elle nécessite de réaliser une dissection hilaire et tumorale précise, ainsi qu’une suture rapide et étanche du parenchyme rénal, tout en visant un temps d’ischémie chaude minimal. La courbe d’apprentissage est significative et requiert une expérience importante à la fois laparoscopique et robotique. Cependant, la mobilité intracorporelle des instruments laparoscopiques robotiques et la vision en trois dimensions facilitent la dissection tumorale et la suture endocorporelle du lit tumoral et des berges de résection. Le robot raccourcit la courbe d’apprentissage de la néphrectomie partielle laparoscopique comme a pu le mettre en évidence l’étude de Deane :11 en onze procédures, le chirurgien débutant en néphrectomie partielle robotisée obtenait des résultats opératoires similaires à ceux de ses confrères laparoscopistes purs expérimentés pour cette chirurgie. L’intervention est réalisée à l’aide de quatre ou cinq trocarts et d’une optique de 0° ou 30°. Généralement, seuls trois des quatre bras du robot sont utilisés avec un ou deux trocarts supplémentaires réservés à l’assistance opératoire. Dans certains cas de figure, le quatrième bras du robot peut être sollicité. La figure 4 met en évidence les tumeurs les plus classiquement réséquées par ce type de chirurgie.
La tumeur du pôle inférieur peut entrer en considération pour ce type de chirurgie. En gris et jaune, glande surrénale et graisse périrénale respectivement.
Cette intervention est réalisée depuis maintenant plus de cinq ans et de nombreuses séries ont été publiées (tableau 1), dont la première en 2004 par l’équipe de Gettman. Les auteurs des différentes séries décrivent des bénéfices subjectifs tels que l’augmentation de la dextérité lors de l’exposition des tumeurs complexes et de la reconstruction rénale.
Aucune série n’a rapporté de différence en termes de complications per ou postopératoires entre la néphrectomie partielle laparoscopique et celle avec assistance robotisée. Benway et coll.12 ont rapporté la plus grande série rétrospective internationale menée dans quatre centres, de 183 néphrectomies partielles robotisées pour des tumeurs de 28 mm de diamètre en moyenne (10 à 79). Le temps opératoire moyen était de 210 minutes (86-370) dont 24 minutes en moyenne d’ischémie chaude (10-51). Une réparation des voies excrétrices a été réalisée dans 52% des cas avec un temps moyen d’ischémie chaude de 25 minutes, alors qu’il n’était que de quatorze minutes lorsqu’il n’y avait pas de brèche calicielle (p < 0,0001). Les pertes sanguines moyennes peropératoires étaient de 131 ml. Les auteurs faisaient part de 1% de conversion (deux cas pour des difficultés opératoires ; matériel (1x) et du morphotype du patient (1x)) et de 10% de complications (mineures et majeures) per ou postopératoires. A noter dans les complications majeures, deux reprises chirurgicales pour lacération hépatique et splénique. Enfin, le taux de marge positive était de 4%. Une autre série rétrospective comportant 100 patients, cette fois-ci monocentrique, est rapportée par Scoll et coll.,13 dont les résultats sont sensiblement identiques à ceux décrits dans la série de Benway. La durée opératoire moyenne était de 206 minutes (85-369) avec une durée moyenne d’ischémie chaude de 25 minutes et des pertes sanguines peropératoires moyennes de 127 ml (50-800). Il est rapporté 2% de conversion et un taux de complications graves de 6%. Par ailleurs, le taux de marge positive était de 6%, ce qui rend la technique robotique oncologiquement comparable à la chirurgie ouverte (tableau 1).
La série des HUG comporte à ce jour dix-neuf patients dont l’âge moyen était de 63 ans et le diamètre moyen de la tumeur réséquée de 29 mm (fourchette 13-45) (74% étaient malignes). Elle rend compte des résultats d’un seul opérateur portant à son actif plus de 250 interventions robotiques à l’initiation de la série. La durée d’hospitalisation a été de moins de cinq jours. Pour comparaison, la durée moyenne de séjour pour néphrectomie partielle à ciel ouvert est de 7,4 jours aux HUG. Malgré un carcinome dont les marges sont positives, la série ne compte à ce jour aucune récidive oncologique. Les complications ont concerné trois des dix-neuf patients (16%), ce qui est comparable à ceux d’autres séries 14 (tableau 1). Elles ont été répertoriées chez les huit premiers patients de la série, ce qui corrobore la notion de courbe d’apprentissage de la technique.
Le robot da Vinci contribue actuellement à disséminer la néphrectomie partielle laparoscopique, car elle semble en accélérer très sensiblement la courbe d’apprentissage. En augmentant la dextérité et l’amplitude des mouvements, elle facilite la résection tumorale et la suture du parenchyme rénal au niveau du site réséqué. L’exérèse d’une tumeur peut nécessiter des modifications de l’angle de résection qui sont facilitées par la robotique. L’agrandissement permet également de mieux reconnaître d’éventuelles marges chirurgicales macroscopiques. Après l’exérèse de la tumeur, la suture des vaisseaux et l’éventuelle suture du système collecteur sont accélérées par le robot qui apporte de surcroît une plus grande précision et une meilleure visualisation du lit tumoral. L’exérèse de certaines tumeurs d’accès difficile (postérieures ou hilaires) devient possible, alors qu’elles auraient été inaccessibles en laparoscopie pure, même pour un opérateur expérimenté. Enfin, la diminution du temps d’ischémie chaude, de la durée opératoire et de la durée d’hospitalisation a été également observée et démontrée en faveur de la robotique dans une étude comparative rétrospective comparant cette technique à la laparoscopie conventionnelle.15
La mise en route de la néphrectomie partielle robotisée reste un défi tant oncologique qu’hémostatique, même pour un opérateur habitué à la chirurgie robotique. La méta-analyse présentée ainsi que notre expérience démontre que la néphrectomie partielle robotisée est oncologiquement efficace et diminue la durée de séjour par rapport à la chirurgie ouverte. Ceci corrobore l’une des tendances maîtresses de la chirurgie actuelle : la «mini-invasivité». Elle offre par ailleurs une prestation oncologique similaire à celle de la chirurgie ouverte. A noter que ces résultats ont été atteints sans que les temps opératoires laparoscopiques deviennent prohibitivement longs. En conclusion, la néphrectomie partielle avec assistance robotisée da Vinci comporte des bénéfices indiscutables pour le patient, car elle permet d’obtenir des temps d’ischémie chaude acceptables, de raccourcir les durées de séjour et de convalescence.
Surgery is the first line of treatment of renal cell carcinoma. For small tumours confined to the kidney (≤ 4 cm), partial tumour resection has logically become the standard treatment. When technically feasible, partial nephrectomy may be applied to treat tumors less than 7 cm, according to 2010 recommendations of the European Association of Urology. In addition, nephron-sparing surgery has proven to positively impact on quality of life.
Robotic-assisted laparoscopy partial kidney resection has recently emerged. Its indications are as yet undergoing validation, while open surgery still remains the gold standard. For the patients, the consequences of this minimally invasive evolution are evident : The comfort and postoperative recovery are respectively greater and faster compared to conventional open surgery.