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ISO 690 | Guinchard, A., Pasche, P., Lymphadénite tuberculeuse cervicale et réaction paradoxale : diagnostic et traitement, Rev Med Suisse, 2012/356 (Vol.8), p. 1860–1865. DOI: 10.53738/REVMED.2012.8.356.1860 URL: https://www.revmed.ch/revue-medicale-suisse/2012/revue-medicale-suisse-356/lymphadenite-tuberculeuse-cervicale-et-reaction-paradoxale-diagnostic-et-traitement |
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MLA | Guinchard, A., et al. Lymphadénite tuberculeuse cervicale et réaction paradoxale : diagnostic et traitement, Rev Med Suisse, Vol. 8, no. 356, 2012, pp. 1860–1865. |
APA | Guinchard, A., Pasche, P. (2012), Lymphadénite tuberculeuse cervicale et réaction paradoxale : diagnostic et traitement, Rev Med Suisse, 8, no. 356, 1860–1865. https://doi.org/10.53738/REVMED.2012.8.356.1860 |
NLM | Guinchard, A., et al.Lymphadénite tuberculeuse cervicale et réaction paradoxale : diagnostic et traitement. Rev Med Suisse. 2012; 8 (356): 1860–1865. |
DOI | https://doi.org/10.53738/REVMED.2012.8.356.1860 |
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Tuberculous lymphadenitis is a frequent presentation of extrapulmonary tuberculosis. It corresponds to about 10% of tuberculosis cases in adults in developed countries, on the rise because of HIV, migrants and immunosuppressive therapy. The clinical diagnosis is often difficult and differential diagnosis is extensive. The patient presents with a history of painless swelling of one or a group of cervical lymph nodes. The mass may be present for 3 weeks to 8 months before the first consultation. The treatment of choice is an oral antimycobacterial treatment and is not surgical. This article reviews the specific clinical manifestations, diagnositc tools and treatment of tuberculous lymphadenitis through two cases.
La lymphadénite tuberculeuse est une présentation fréquente des tuberculoses extrapulmonaires. Elle correspond à environ 10% des cas de tuberculose de l’adulte dans les pays développés, en recrudescence en raison du VIH, des migrants et des traitements immunosuppresseurs. Le diagnostic clinique est souvent difficile et les diagnostics différentiels vastes. Le patient se présente avec une tuméfaction lente d’une ou d’un groupe d’adénopathies cervicales, souvent non douloureuses. Les symptômes sont présents depuis trois semaines à huit mois avant la première consultation. Le traitement de choix est un traitement antituberculeux per os et n’est pas chirurgical.
Cet article revoit les présentations cliniques, les méthodes diagnostiques et les traitements des lymphadénites tuberculeuses cervicales à travers deux cas.
Mme F., 78 ans, bonne santé habituelle. Présente une tuméfaction basi-cervicale gauche depuis un mois, traitée par antalgique pour suspicion de thyroïdite par son médecin traitant (figure 1a).
Depuis dix jours, elle présente une douleur et un érythème avec un état fébrile intermittent et des céphalées.
A l’anamnèse ; pas de dysphonie, pas de toux, pas de dyspnée. Pas de facteurs de risque. Pas d’allergie connue. Elle prend un traitement d’œstrogène. Elle est originaire d’Iran où elle a vécu 30 ans. En Suisse depuis des années, sans voyage récent.
Elle consulte en ORL.
Sérologies sanguines : Bartonella hensellae -, VIH-, CMV-, EBV-. Radio du thorax normale. US cervical : lésion jugulaire inférieure gauche, mal délimitée, polylobée, hétérogène, de 4 × 2 cm avec une extension sous-claviculaire mal évaluable.
Pour cette raison, une IRM est effectuée, qui montre un phlégmon latéro-cervical gauche autour d’une adénopathie abcédée, nécrotique, avec extension dans le médiastin supérieur (figure 1b).
Les cytoponctions montrent une forte inflammation, des polynucléaires neutrophiles, un contenu de lésion abcédée, sans cellule maligne. L’examen microscopique au fluorochrome montre 1-10 BAAR (bacilles acido-alcoolo-résistants) par champ.
Culture et PCR positives pour Mycobacterium tuberculosis complex (614 000 copies/ml). La patiente commence un traitement antituberculeux.
Peu après, elle se représente en ORL pour une augmentation de la taille de l’adénopathie et une fistulisation à la peau malgré un traitement par quadrithérapie depuis dix jours. Drainage et rinçage quotidiens, suivi hebdomadaire et amélioration progressive en deux mois.
Mme Y., 29 ans, bonne santé habituelle. Découverte d’une masse cervicale dans la région supraclaviculaire droite. Pas d’état fébrile, pas d’odynodysphagie, pas de douleur, pas de sudation nocturne, pas de toux, pas d’expectoration. Pas de contact avec des animaux.
Originaire de Thaïlande, en Suisse depuis trois ans.
Au status, multiples petites adénopathies sur la chaîne jugulaire antérieure droite.
Une adénopathie de 3 × 3 cm au niveau sus-claviculaire droit, douloureuse à la palpation, érythémateuse, fluctuante (figure 2a). Une adénopathie spinale inférieure de 3 cm non érythémateuse, non fluctuante. Reste du status ORL dans les normes.
Bilan sanguin : VIH-, Bartonnella hensellae-, EBV-. PCR sur des expectorations positives pour une tuberculose. US et cytoponctions : BAAR positifs. Cultures et PCR : Mycobacterium tuberculosis complex. CT du thorax : infiltrat tree-in-bud au niveau du segment apical du lobe supérieur droit. Adénopathies nécrotiques latéro-cervicales droites et sus-claviculaires droites (figure 2b).
Traitement par quadrithérapie antituberculeuse. Evolution favorable de l’adénopathie sus-claviculaire. Progression puis abcédation de l’adénopathie spinale. Ponctions évacuatrices itératives, nécrose cutanée en regard. Bonne évolution en trois mois.
L’infection aux mycobactéries est une cause commune de granulome cervical. Celui-ci peut être dû à une mycobactérie tuberculeuse (M. tuberculosis, M. bovis, M. africanum) ou une mycobactérie non tuberculeuse, atypique. La lymphadénite tuberculeuse est la plus fréquente des présentations de tuberculose extrapulmonaire, anciennement connue sous le nom de scrofula. C’est une manifestation unique de la maladie due à Mycobacterium tuberculosis complex.
Elle représente 43% des lymphadénopathies dans les pays en voie de développement, 5 à 10% dans les pays développés.
Il existe des facteurs de risque : pays endémiques (Asie, Afrique Noire), VIH, précarité sociale, usage de substances, vie dans les collectivités, réactivation tuberculeuse chez la personne âgée (50-70 ans après une primo-infection) ou chez la personne immunodeprimée.1,2
Patients adultes, la plupart migrants de pays où la tuberculose est endémique. Arrivés depuis en moyenne cinq ans dans le pays. Prédomine chez les jeunes femmes avec un ratio de 3 :1 et l’âge moyen est de 30 à 40 ans.3 60% des patients sont VIH+.
Les lymphadénopathies tuberculeuses sont la conséquence d’une réactivation d’une ancienne tuberculose. Le site est contaminé par voie hématogène durant une première infection, des années auparavant. Il a été postulé que les lymphadénites cervicales seraient le résultat d’une primo-infection tuberculeuse de l’anneau de Waldeyer.4
M. bovis présentait une fréquente cause de lymphadénite, mais la pasteurisation a éliminé la plupart des sources dans les pays développés.5
Tuméfaction lente d’une ou d’un groupe d’adénopathies cervicales, souvent non douloureuses. Les symptômes sont présents depuis trois semaines à huit mois avant la première consultation.3,6,7
Les manifestations cliniques montrent une atteinte cervicale (une à trois adénopathies isolées, souples avec une taille médiane de 3 cm de diamètre)8 dans 63 à 77% des cas chez un adulte jeune.3,4,6,7,9
Le patient décrit peu ou pas de douleurs. La fistulisation est présente dans 8 à 10% des cas.3,8,9
Les adénopathies sont bilatérales chez 11% des patients sans VIH, beaucoup plus fréquemment chez les patients VIH+.10 Des symptômes systémiques peuvent être présents : EF (19%), cachexie (16%), sueur.3 Une tuberculose pulmonaire associée est reportée chez 18 à 42% des patients.
Le diagnostic différentiel des adénopathies isolées périphériques est extensif et inclut les pathologies tumorales : lymphomes (Hodgkin et non hodgkiniens), tumeurs d’origine ORL, autres mycobactéries, maladie des griffes du chat, infection fongique (actinomycose), sarcoïdose, adénite bactérienne, CMV, Lyme, EBV, tularémie, maladie de Kikuchi (lymphadénite nécrosante) (tableau 1).
Le diagnostic clinique est difficile à poser. Le délai depuis les premiers symptômes jusqu’au diagnostic est de trois semaines à huit mois.3,11
Il faut effectuer une recherche de VIH, des sérologies à la recherche de Bartonella henselae, tularémie (si contact avec des animaux), toxoplasmose, CMV, EBV, Lyme, et une recherche de mycobactéries en fonction de l’anamnèse devant une adénopathie cervicale persistante, en plus d’un examen ORL complet.
Si une lymphadénite tuberculeuse est suspectée, il faut effectuer une ponction-aspiration à l’aiguille fine pour prélever du matériel pour un examen au microscope (sensibilité 77%, spécificité 93%). Si aucun résultat n’est confirmé, une adénectomie est indiquée avec l’envoi des prélèvements en microbiologie, cytologie, PCR (tissu frais) (tableau 2).
Le diagnostic peut être posé par la cytoponction si toutes les composantes de la lésion sont présentes sur le frottis : nécrose caséeuse avec des débris cellulaires, lymphocytes, cellules épithélioïdes en amas et parfois cellules géantes de Langerhans (sensibilité 88%, spécificité 96%).3,12-14
Le gold standard pour le diagnostic de tuberculose est la mise en culture : la croissance est lente (quatre à six semaines) et peut donner des résultats faussement négatifs. Deux colorations permettent la mise en évidence du bacille : la coloration de Ziehl-Nielsen sur des prélèvements tissulaires, grâce à leur acido-alcoolo-résistance et la coloration à l’auramine sur les prélèvements liquidiens, qui donne une fluorescence jaune sur fond noir.
La PCR permet de révéler la présence d’ADN spécifique aux mycobactéries et de poser un diagnostic précoce après trois jours.
En fonction de la suspicion clinique, il est possible d’effectuer une culture d’expectoration (0-14% positifs), un Mantoux (74-100% des cas positifs avec TST > 15 mm), une PCR sanguine à la recherche de Mycobacterium tuberculosis et une imagerie.15
L’imagerie de choix est la radiographie du thorax (une ancienne tuberculose peut montrer des signes d’épaississement pleural et de fibrose apicale).16 Mais 90 à 100% des patients avec lymphadénite n’ont pas d’évidence pour une tuberculose pulmonaire active !
Les patients VIH+ montrent souvent une atteinte pulmonaire associée typique d’une tuberculose pulmonaire. Un ultrason cervical peut aider à bien délimiter la lésion tout comme l’IRM et le CT-scan avant une cytoponction ou une adénectomie.
Une radiographie du thorax normale, un Mantoux négatif (< 5 mm) et un T-spot négatif permettent d’exclure une tuberculose.
Selon les recommandations de l’IDSA (Infectious Diseases Society of America) : un traitement antituberculeux médicamenteux per os est indiqué : rifampicine (600 mg), isoniazide (300 mg), éthambutol (15-20 mg/kg) ou streptomycine, pyrazinamide (25 mg/kg) 1 ×/jour pendant deux mois puis rifampicine et isoniazide 1 ×/jour ou 3 ×/semaine pendant quatre mois (grade 2B). La durée du traitement est de six mois sous contrôle des infectiologues.
Les cultures sont à répéter après deux mois de traitement. Après trois mois, elles doivent être complètement négativisées.
Les effets secondaires du traitement sont une hépatotoxicité, une toxicité oculaire, un rash, un état fébrile réactionnel.
Plus de 4% des patients présentent une résistance à la rifampicine (gène RpoB).
Le bénéfice d’un traitement de routine par corticostéroïdes n’est pas connu. Une étude en double aveugle effectuée chez 117 enfants a révélé une amélioration chez ceux ayant reçu 37 jours de stéroïdes.17 Pas d’étude fiable chez l’adulte. L’IDSA ne recommande pas de traitement par stéroïdes dans les lymphadénites tuberculeuses.
Lors d’adénopathies abcédées, il faut effectuer des cytoponctions évacuatrices (attention à la contagiosité au niveau du liquide), rincer avec du NaCl et couvrir avec des pansements stériles. Pas d’incision de l’abcès.
Les patients avec un IMC bas et/ou des adénopathies bilatérales présentent plus de complications et un traitement plus long.8
La réaction paradoxale se présente comme une augmentation de la taille des adénopathies ou l’apparition d’une fistulisation malgré un traitement antituberculeux adéquat d’au moins dix jours, avec amélioration au départ (5 à 30% des cas sans déficit immun). Elle est attribuée à la réponse immunitaire due au traitement.18-20 Présence de granulomes mais pas de BAAR.
La réaction paradoxale apparaît en moyenne 3,5 mois après le début de la thérapie (0,5 à 16 mois)18 avec une augmentation de la taille des adénopathies (12%), une fluctuation (11%), un érythème et une décharge spontanée (7%). Des nouvelles adénopathies peuvent apparaître dans 27 à 36% des cas.21
Chez les patients VIH, 23% de réactions paradoxales, surtout à l’initiation de la thérapie antirétrovirale.
• Diagnostic différentiel : récurrence de tuberculose, résistance au traitement, non-compliance, autre diagnostic (lymphome, néoplasie), malabsorption intestinale.
• Traitement : observation, ponctions évacuatrices à répétition, excision chirurgicale si adénopathie résiduelle.22,23
Un traitement par corticostéroïdes (1 mg/kg) quatre à six semaines peut diminuer la réaction locale.20,24 La culture doit être négativisée. La PCR peut rester positive longtemps. La plupart des patients présentent une résolution spontanée sur environ 2,5 mois et 7 à 11% ont des adénopathies résiduelles à la fin du traitement.
Le diagnostic de lymphadénite tuberculeuse est un diagnostic auquel il faut penser chez les patients migrants, immunodéprimés, ayant bénéficié d’un traitement de radiothérapie et/ou chimiothérapie et les patients âgés en raison d’une réactivation possible plus fréquente. La clinique la plus fréquente montre une adénopathie cervicale indolore, fluctuante, de plus de 3 cm de diamètre. Il n’y a généralement pas d’atteinte pulmonaire associée.
Les sérologies usuelles sont négatives. Le Mantoux n’est pas l’examen de choix et il est préférable d’effectuer un T-spot en attendant les résultats des cultures.
Une échographie cervicale avec cytoponction et PCR permet une identification rapide de l’organisme. Le traitement est un traitement per os antituberculeux pendant six mois avec un suivi par les pneumologues, les infectiologues et des drainages de l’adénopathie si nécessaires par l’ORL. La contagiosité est présente tant que les cytoponctions contiennent des BAAR. Il faut connaître la réaction paradoxale au traitement, avec une augmentation de la taille de l’adénopathie et une fistulisation possible.
> Une adénopathie cervicale chronique, fluctuante, non douloureuse doit faire suspecter une lymphadénite tuberculeuse
> En cas de suspicion d’une infection aux mycobactéries, l’ORL et l’infectiologue doivent être consultés pour la prise en charge
> Des cytoponctions doivent être effectuées avec recherche par PCR et, dès le diagnostic connu, un traitement antituberculeux per os instauré
> Il faut connaître la réaction paradoxale avec possibilités d’augmentation de l’adénopathie et fistulisation pendant le traitement antituberculeux
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