Les dix dernières années ont été marquées par l’émergence d’une série de questions à fort potentiel médiatique dans le domaine de la psychiatrie. D’une part, l’intérêt croissant pour la détection précoce a alimenté l’espoir d’une prévention primaire des troubles mentaux, jamais explorée jusqu’ici. L’ère des biomarqueurs de vulnérabilité et des prodromes est celle de l’opportunité de traiter plus tôt et peut-être plus efficacement mais aussi du risque de nouvelles formes de stigmatisation à travers la crainte d’une incurabilité déjà présente in utero. A l’autre extrême, on retrouve une préoccupation sociétale grandissante dans tous les pays occidentaux autour de la prétendue dangerosité des patients souffrant de psychoses, des troubles de la personnalité ou des comportements addictifs sévères. La dangerosité, notion si floue, n’est toutefois pas une caractéristique inhérente à la pathologie psychiatrique. De nombreuses études ont démontré que ces patients ne sont pas dans leur ensemble plus à risque de passage à l’acte délinquant que la population générale, leur comportement étant le plus souvent orienté vers l’évitement, le repli et l’isolement social. Ceci est également vrai pour les patients en crise aiguë nécessitant des soins hospitaliers. Nonobstant cette observation, l’association de la violence avec la folie reste tenace et le travail sur la dangerosité de certains patients psychiatriques fait partie intégrante des plans de soins hospitaliers et ambulatoires. En effet, la meilleure manière pour diminuer ce risque chez les patients psychotiques ou ayant des troubles graves de la personnalité est de leur donner une vraie perspective de rétablissement à travers une palette d’interventions qui restituent le sens du soin et une meilleure intégration sociale.
«… La dangerosité n’est pas une caractéristique inhérente à la pathologie psychiatrique …»
Ce numéro est consacré à cet autre visage de notre discipline à travers une série de réflexions cliniques qui décrivent les différentes facettes du danger en lien avec les pathologies psychiatriques mais aussi les soins complexes et novateurs qui sont offerts à ces patients particulièrement vulnérables. L’exemple du soutien à l’emploi ou de nouvelles perspectives de collaboration avec les médecins de premier recours en sont des exemples.
Bonne lecture !