Les Hôpitaux universitaires de Genève (HUG) ont créé, en 2014, le premier Centre certifié du cancer de la prostate en Suisse romande. 29 entités impliquées dans le diagnostic et le traitement de cette pathologie y sont intégrées, assurant que toutes les ressources disponibles aux HUG soient offertes aux patients, indépendamment de leur porte d’entrée. La force du Centre réside dans la synergie et l’échange constant qui y règnent, ceux-ci se développant grâce à son forum : le tumorboard. Par le biais de colloques réguliers, des réunions du bureau du Centre et de registres prospectifs, le Centre évolue dans un climat de progression et d’autocritique qui lui permet de se situer dans un contexte compétitif de la prise en charge du cancer de la prostate. Les vérifications annuelles par la Deutsche Krebsgesellschaft garantissent la qualité élevée de cette prise en charge.
Le cancer de la prostate est le cancer le plus fréquent chez l’homme et fait régulièrement l’objet de vifs débats dans la communauté médicale, dont certains ont été abordés dans ce journal.1 De la tumeur indolente et asymptomatique découverte fortuitement chez l’homme âgé au cancer hautement agressif touchant l’homme dans tous les aspects de sa vie – sexualité, fonctions physiques, douleurs – c’est une pathologie multiforme dont la prise en charge est pluridisciplinaire par excellence. Au niveau thérapeutique, l’urologie, la radio-oncologie et l’oncologie sont au premier rang, tandis que le diagnostic repose sur l’expertise des pathologistes, radiologues et médecins nucléaristes. Finalement, la sexologie, la psycho-oncologie, la physiothérapie ou la médecine palliative vont répondre à des besoins bien précis.
En parallèle à la création du Centre d’oncologie des Hôpitaux Universitaires de Genève (HUG), des démarches ont été entreprises afin d’approfondir et d’affiner la prise en charge pluridisciplinaire du cancer de la prostate. Ainsi, l’année 2014 a vu naître, au sein des HUG, le Centre du cancer de la prostate.
Dès sa création, nous avons veillé à ce que sa structure et son fonctionnement soient conformes aux normes nécessaires à l’obtention d’un label de qualité. Par manque d’option suisse, la certification de la Société allemande d’oncologie (DKG, Deutsche Krebsgesellschaft) a été choisie. Avec le soutien de la direction générale, du Centre d’oncologie et des nombreux services impliqués, le processus d’une certification particulièrement stricte et détaillée vient d’arriver à terme. Avec son aboutissement, il sera le premier Centre du cancer de la prostate certifié en Suisse romande et le troisième dans toute la Suisse.
Le but de cet article est de résumer les grands axes de travail de ce Centre et d’en exposer les profils de pluridisciplinarité.
La collaboration étroite entre 29 entités spécifiques des HUG est ancrée dans le règlement interne du Centre. Elle regroupe l’activité de toutes les spécialités impliquées dans le traitement du cancer (urologie, radio-oncologie et oncologie), dans son diagnostic (pathologie, radiologie, médecine nucléaire) et dans le soutien médical ou paramédical des patients (sexologie, psycho-oncologie, physiothérapie, médecine palliative, psychiatrie, assistance sociale, soins paramédicaux de santé publique, soins hospitaliers, ambulatoires et à domicile) (figure 1). Le Centre dispose d’un directeur, d’un coordinateur et d’un quality officer, ainsi que de réunions d’un bureau au cours desquelles sont prises les décisions. Il fait partie intégrante du Centre d’oncologie, qui met à disposition des ressources managériales fondamentales.
L’intégration des activités de ces services se fait à plusieurs niveaux, la pièce centrale étant le tumorboard d’urologie hebdomadaire. Celui-ci regroupe systématiquement les urologues, radio-oncologues, oncologues, radiologues et pathologistes. Tout autre professionnel de la santé concerné peut y participer, par exemple un médecin référent installé en ville.
Les clichés radiologiques ainsi que les lames histologiques y sont présentés et discutés. Le rapport de tumorboard préparé au préalable est finalisé sur place et reflète le consensus de l’assemblée. Il mentionne explicitement les différentes options thérapeutiques et doit faire référence aux bonnes pratiques émises par les sociétés savantes.
La certification impose que tout patient du Centre soit présenté au tumorboard avant d’être mis au bénéfice d’un traitement. Ainsi, les patients adressés en vue d’une intervention, radiothérapie ou chimiothérapie, font l’objet d’une discussion pluridisciplinaire. Un des effets les plus notables de cette approche est l’élargissement des connaissances des participants au-delà de leur spécialité. D’autre part, les contacts personnels se développant lors des réunions facilitent la collaboration et la communication entre les services, souvent dispersés sur différents sites de l’hôpital.
La création du Centre et les préparatifs à la certification ont aussi amené la tenue commune de colloques mortalité-morbidité et de formations continues pour médecins et soignants.
En plus de l’approche pluridisciplinaire systématique, le fonctionnement du Centre vise à assurer que toutes les ressources disponibles soient offertes aux patients, indépendamment de leur porte d’entrée. Tandis que le tumorboard assure une concertation pré- et post-thérapeutique, des itinéraires cliniques formalisent les étapes successives de la prise en charge, du diagnostic initial jusqu’au suivi post-thérapeutique. Ceux-ci ont été élaborés en collaboration avec les spécialités impliquées et veillent à l’enchaînement sans délai des consultations et des examens.
Concrètement, ces itinéraires sont représentés sous forme d’arbres décisionnels figurant dans un livret format poche, comprenant les étapes-clés du parcours du patient, les délais, le soignant responsable ainsi que l’outil de documentation utilisé (figure 2).
Elle fait l’objet d’une enquête annuelle auprès des patients hospitalisés. Les résultats sont analysés par le quality officer du Centre, qui identifie les éléments à améliorer. De même, des sondages auprès des médecins référents du Centre auront pour but d’améliorer la collaboration entre l’hôpital universitaire et la pratique privée.
Elle se définit à de multiples niveaux. Sur le plan médical, les critères de certification comprennent un volume minimal d’activités diagnostiques (biopsies, pathologie) et thérapeutiques (par les chirurgiens, radio-oncologues et oncologues) afin de garantir une réelle expertise. Un taux de marges chirurgicales positives ne doit par exemple pas être dépassé lors des prostatectomies radicales, de même que tout écart entre la dose de radiothérapie prescrite et délivrée doit être justifié.
Le suivi oncologique et fonctionnel après traitement doit lui aussi être documenté systématiquement. En particulier, les taux de PSA sériques et les scores de qualité de vie doivent être répertoriés et analysés à long terme.
Une discussion des complications chirurgicales et de la toxicité des traitements de radio ou de chimiothérapie a lieu dans le cadre de colloques M&M (mortalité-morbidité) au minimum quatre fois par année. Ces complications sont analysées annuellement.
De même, le Centre doit pouvoir démontrer une activité scientifique sous forme d’études cliniques approuvées par un comité d’éthique, avec un pourcentage minimal de patients à inclure dans les études. Actuellement, des études de radiothérapie, de détection de récidive tumorale par tomographie par émission de positons et de surveillance active de cancer à bas risque sont en cours.
Les critères de labellisations imposent des mesures de contrôle strictes, contraignantes. Lors des audits, les listes de cas, de colloques, les résultats d’enquêtes, les fichiers de suivi sont contrôlés. Tout écart par rapport aux normes doit être justifié.
Outre l’implémentation des critères de la DKG, le Centre a introduit un système de gestion, qui a permis d’obtenir une certification de qualité aux normes ISO 9001. Un manuel qualité répertorie et structure la base documentaire du Centre.
L’établissement de centres certifiés en Suisse se fait à un rythme remarquable. Tandis que quatorze centres du cancer du sein ont été approuvés par la Ligue suisse contre le cancer en trois ans, le nombre de centres certifiés en Allemagne est en croissance exponentielle.2 Néanmoins, l’expérience outre-Rhin montre que des déficits persistent.3 Le rapport annuel de l’organisme de certification fait état d’une documentation insuffisante du suivi postopératoire, empêchant une analyse globale de précieuses données épidémiologiques et révélant un manque de communication entre cabinets et hôpitaux. De même, un consensus entre urologues et radio-oncologues fait défaut dans un certain nombre de centres, malgré le principe de pluridisciplinarité.
D’autre part, les actions exigées par la certification occasionnent une augmentation considérable du travail administratif, tandis que la balance coûts-bénéfices reste incertaine. Une étude de l’Hôpital de la Charité (Berlin) a certes fait état d’une amélioration de certains critères de qualité (importante chute des taux de marges chirurgicales) et d’une diminution initiale des coûts de traitement par patient.4 Néanmoins, ceux-ci restaient inférieurs aux frais supplémentaires occasionnés par le maintien de la certification.
En élaborant leur Centre du cancer de la prostate, les HUG ont affiné et finalisé une prise en charge intégrée, précise et efficace pour tout patient porteur d’une néoplasie prostatique. La force du Centre réside dans la synergie et l’échange constant qui y règnent, ceux-ci se développant grâce à son forum : le tumorboard. Par le biais de colloques réguliers, des réunions du bureau du centre, des données archivées et des échéances de recertification, le Centre évolue à la fois dans un climat de progression et d’autocritique qui lui permet de se situer dans un contexte compétitif de la prise en charge du cancer de la prostate.
La certification ainsi que les vérifications par la Deutsche Krebsgesellschaft garantissent la qualité élevée de cette prise en charge.
Développé en 2007 dans un contexte d’utilisation inflationniste du terme «centre», ce label repose sur un catalogue de critères établi par les sociétés d’urologie (DKG, BDU), d’onco-urologie (AUO), d’oncologie médicale (AIO), de radio-oncologie (DEGRO), de médecine nucléaire (DGN), de psycho-oncologie (DGP), de techniciens médicaux et d’infirmiers (KOK) et d’associations de patients (BPS) allemands et autrichiens. Le nombre de sociétés impliquées reflète l’esprit pluridisciplinaire. Actuellement, 96 centres ont été certifiés en Allemagne et deux en Suisse (Zurich et Berne), aucun dans une région francophone. Fin 2012, 33% des hommes nouvellement atteints d’un cancer de la prostate en Allemagne ont été traités dans un centre certifié.
Le Centre d’oncologie a été créé en 2012 dans le cadre des centres d’excellence des HUG. Il a pour mission de répondre aux besoins de toutes les personnes concernées par le cancer, pour sa prévention, son diagnostic ou son traitement. Il s’agit d’une structure transversale regroupant des activités, des unités et des services médicaux rattachés à des départements différents. Il coordonne l’ensemble des soins, services et acteurs afin d’assurer à chaque patient les meilleurs soins basés sur une prise en charge multidisciplinaire et un parcours de soins personnalisés. Le Centre d’oncologie chapeaute des programmes et des centres spécialisés dans la prise en charge de cancers spécifiques.
Un des buts principaux du Centre est d’optimaliser la collaboration avec les médecins installés en pratique privée. Une enquête sera menée en 2015 pour recueillir les souhaits de ces derniers.
Le secrétariat du Centre du cancer de la prostate est joignable par téléphone au 022 372 79 60.
Le site internet du Centre est : www.hug-ge.ch/centre-oncologie/centre-de-la-prostate
Biopsies prostatiques tridimensionnelles avec fusion d’images échographiques et IRM, permettant de cibler les zones suspectes identifiées sur l’IRM 3 Tesla à antenne endorectale.
Ultrasons focalisés de haute intensité (système FocalOne) pour le traitement de tumeurs localisées sélectionnées, ainsi que pour le rattrapage des cancers de prostate en cas de récidive après radiothérapie.
Robot Da Vinci SI, permettant une précision de travail lors de la prostatectomie laparoscopique.
Equipement de radiothérapie comprenant les accélérateurs linéaires Novalis TX avec système de repositionnement stéréotaxique ExacTrac et le True-Beam avec système de détection électromagnétique Calypso.
PET-IRM de fusion pour la localisation d’éventuelles récidives tumorales. Des nouveaux radio-traceurs sont évalués dans le cadre d’essais cliniques.
Accès à des nouvelles molécules pour le traitement du cancer métastatique dans l’Unité de recherche clinique en onco-hématologie.
> Tout nouveau patient adressé aux HUG pour la prise en charge d’un cancer de la prostate sera présenté au tumorboard du Centre
> La prise en charge des patients suit des itinéraires cliniques et de bonne pratique élaborés au sein du Centre sur la base de recommandations internationales
> Le Centre se veut ouvert aux médecins installés en pratique privée, qui sont invités à participer à ses différentes activités telles que les tumorboards
Les Hôpitaux universitaires de Genève (HUG) ont créé, en 2014, le premier Centre certifié du cancer de la prostate en Suisse romande. 29 entités impliquées dans le diagnostic et le traitement de cette pathologie y sont intégrées, assurant que toutes les ressources disponibles aux HUG soient offertes aux patients, indépendamment de leur porte d’entrée. La force du Centre réside dans la synergie et l’échange constant qui y règnent, ceux-ci se développant grâce à son forum : le tumorboard. Par le biais de colloques réguliers, des réunions du bureau du Centre et de registres prospectifs, le Centre évolue dans un climat de progression et d’autocritique qui lui permet de se situer dans un contexte compétitif de la prise en charge du cancer de la prostate. Les vérifications annuelles par la Deutsche Krebsgesellschaft garantissent la qualité élevée de cette prise en charge.