Depuis quelques années, la profession médicale fait l’objet d’une nouvelle attente : la transparence. Cette attente, voire cette exigence, provient simultanément de plusieurs acteurs de la santé. En tout premier lieu, des patients. De tous les patients ? Probablement pas ! Certains en effet attendent de nous une attitude soignante bienveillante sans demander davantage. Mais ils sont toujours plus nombreux à demander des informations détaillées, telles qu’une copie des résultats de leurs tests de laboratoire ou de radiodiagnostic, voire la copie intégrale de leur dossier. En pratique quotidienne, nous accédons volontiers à ces demandes légitimes, d’autant plus que la transparence renforce le lien médecin-patient. Le dossier informatisé du patient s’inscrit d’ailleurs dans cette tendance.
«… la transparence renforce le lien médecin-patient …»
Cette transparence est également la volonté du législateur, donc du monde politique. Rappelons que les nouvelles dispositions légales stipulent que l’information médicale doit être bien comprise, donc claire et… transparente ! Pas de doute : nos parlementaires, en bons représentants des concitoyens et concitoyennes de ce pays, ne font finalement que suivre une évolution irrémédiable : l’autodétermination du patient. Cette évolution, venue des pays anglo-saxons, gagne maintenant la plupart des pays occidentaux.
Après les patients et le législateur, c’est au tour des chercheurs et des éditeurs de souhaiter, voire d’exiger plus de transparence. Non seulement il n’est plus possible de publier un essai clinique sans que son protocole ait été préalablement publié sur des sites publics,1 mais de plus en plus de grands journaux scientifiques (Annals of Internal Medicine, British Medical Journal…) invitent les auteurs de publications médicales à mettre à disposition leurs bases de données. Cela confirme non seulement l’exigence de plus en plus élevée de la recherche médicale clinique, mais également le souci du monde scientifique de partager l’intégralité des informations qui sont à la base des nouvelles connaissances. A ce sujet, un récent article du New England Journal of Medicine 2 montre de manière éloquente l’évolution des perspectives dans ce domaine. En effet, les auteurs tirent un premier bilan positif de l’initiative d’un grand groupe pharmaceutique (GlaxoSmithKline) permettant à des investigateurs externes d’interroger les bases de données de ses études cliniques, parfois pour aborder des questions de recherche inédites.
Cette nouvelle donne s’inscrit bien dans le souci de partage et de transparence que ces mêmes éditeurs ont ressenti en exigeant la déclaration des conflits d’intérêts. Rappelons que ce n’est pas le fait d’avoir un conflit d’intérêts potentiel qui est problématique – ils sont parfois inévitables – mais bien de ne pas le déclarer. Selon les règles éditées par l’International Committee of Medical Journal Editors, tout financement externe, et ce pour les 36 mois précédents, doivent être déclarés, ainsi que les dons et les cadeaux !
Cette évolution vers plus de transparence est à nos yeux inéluctable et souhaitable. Elle n’est pas à craindre, pour peu qu’elle se fasse dans le respect du secret médical, Cette exigence de transparence doit également s’accompagner d’une symétrie des efforts. Elle doit donc aussi être appliquée par les autres partenaires de la santé. On pense en particulier aux assureurs : même si les dispositions légales sont – à ce jour – moins contraignantes pour eux, il serait étonnant qu’ils échappent à ce mouvement.
Comme le montre la majorité des enquêtes d’opinion dans le monde occidental, la profession médicale est l’une des professions qui jouit de la plus haute crédibilité au sein de la population. En plus de nos compétences professionnelles, notre disponibilité et notre empathie, ce souci de transparence n’est finalement que l’une des expressions de notre crédibilité.