Les médecins de premier recours et les médecins hospitaliers, internistes généralistes ou spécialistes, vont être confrontés de plus en plus fréquemment à des patients atteints de démence. Que celle-ci soit la pathologie principale du patient ou une comorbidité, la démence a un impact majeur sur la prise en charge du patient et complique la relation thérapeutique.
Lors du suivi de patients atteints de maladies incurables, il convient de différencier trois périodes : la situation palliative (cancer solide métastatique d’emblée, insuffisance d’organe irréversible, démence…), les soins palliatifs (gestion des symptômes prioritaire, enjeux éthiques importants, anticipation des inévitables périodes de crise, préoccupation des proches…) et enfin la fin de vie ou agonie. Dans la démence, le décours de ces étapes s’étale sur de nombreuses années, ce qui en fait sa particularité (figure 1).
Selon la situation, pour une prise en charge optimale, l’abord du patient et de son entourage sera différent, et par conséquent les questions à se poser aussi.
Pour les patients dont la démence sera la cause de décès, il faut connaître quel est le décours habituel d’une fin de vie, quels sont les symptômes auxquels il faut être attentif, quels sont les enjeux éthiques et les décisions à prendre pour le médecin et l’équipe interdisciplinaire ? Deux autres questions importantes sont : comment préparer l’entourage et les soignants en charge, et qu’estil possible de faire à domicile pour qu’ils puissent y assumer la fin de vie ?
Pour les patients dont la démence n’est «qu’une» comorbidité de gravité variable, les principales questions sont de savoir pourquoi il est utile de poser le diagnostic de la pathologie cognitive, à quoi devonsnous être attentifs, comment évaluer les symptômes, comment garder le patient comme partenaire, comment prendre les décisions et avec qui ? Que faire lorsque les troubles du comportement interfèrent avec les thérapies ?
Enfin, de manière générale, il est utile de s’interroger au sujet des informations dont ont besoin les patients et leur entourage, ainsi que sur la manière de donner la parole («tendre le micro») le plus longtemps possible au patient afin que ses objectifs et souhaits soient prioritairement pris en compte ?
Pour le médecin, il vaut aussi la peine de réfléchir au moyen de garder à la fois une approche médicale rigoureuse, «dans les règles de l’Art», et la souplesse nécessaire pour effectuer une médecine «à la carte» ? Comment évaluer les symptômes et les prendre en charge ?
Prendre en charge un patient dément jusqu’au bout de sa vie nécessite des connaissances spécifiques, qu’il décède de cette pathologie ou d’une autre. Il est prioritaire de lui demander son avis le plus longtemps possible et de travailler avec ses compétences résiduelles. L’anticipation, l’interdisciplinarité interprofessionnelle et le soutien du ou des proches aidants sont incontournables.
‣ Poser un diagnostic cognitif est utile et nécessaire dans tous les cas
‣ Il faut en informer le patient puis décider de la prise en charge avec lui et/ou son représentant thérapeutique
‣ Anticiper la suite de la prise en charge est important (lieu de soin, gestion des symptômes, soutien des proches, durée…)
‣ Il est souvent difficile pour les soignants et les médecins de se faire aider pour la gestion de la fin de vie (positionnement, atmosphère apaisante, gestion de la douleur, des angoisses, limitation de l’impact des fausses routes…) alors que d’autres professionnels peuvent leur transmettre les «outils» nécessaires, acquis par des formations spécifiques