Signalons deux avancées en gestation dans les colonnes du New England Journal of Medicine, l’une préventive, l’autre diagnostique.
Un groupe international travaillant sous l’égide (et avec le financement) de la multinationale pharmaceutique GlaxoSmithKline (GSK) vient de publier dans The New England Journal of Medicine1 les résultats d’un essai clinique international établissant l’efficacité d’un nouveau vaccin contre le zona.
On sait que le zona est la conséquence de la réactivation du virus de la varicelle (Varicella Zoster Virus, ou VZV) resté quiescent dans les ganglions nerveux. Cette réactivation à distance de la primo-infection (le plus souvent à l’occasion d’une baisse des défenses de l’immunité cellulaire) se traduit par des éruptions vésiculaires caractéristiques, particulièrement douloureuses dont la topographie correspond aux métamères des ganglions dans lesquels le virus s’est réactivé. Les séquelles douloureuses peuvent ensuite perdurer sur de longues périodes. On estime que plus de 90% des adultes ont été infectés par le VZV et sont, de ce fait, exposés à un risque de zona, le plus souvent dans la deuxième partie de l’existence.
Le zona est aussi une maladie sporadique sans prévalence saisonnière dont la fréquence et la sévérité augmentent avec l’âge. Chaque année, plus de 1,7 million de personnes en Europe en souffrent et les deux tiers de ces personnes sont âgées de plus de 50 ans. L’incidence du zona est comparable dans les différents pays européens et plusieurs données laissent penser que cette incidence augmente.
Les auteurs du New England Journal of Medicine prennent soin de préciser qu’il existe sur le marché un vaccin vivant atténué contre le zona (Zostavax, Merck) – un vaccin contenant la souche Oka du VZV. Ils soulignent aussi les limites de son efficacité. «Contrairement au vaccin contre la varicelle (Varilix) qui ne contient qu’environ 2000 UFP (unités formant des plaques) de cette même souche virale, le Zostavax en contient un titre quatorze fois plus élevé (plus de 19 400 UFP). La vaccination consiste en l’administration d’une seule dose par voie sous-cutanée» précisaient pour leur part en 2014, dans ces colonnes, Julien Vionnet, Karen Hart et François Spertini en fournissant une analyse médico-économique de la recommandation vaccinale.2 Ils rappelaient aussi que l’efficacité du vaccin Merck avait été établie par deux grandes études cliniques de phase III :
La Shingles Prevention Study (SPS) est une étude randomisée, contrôlée, multicentrique de grande échelle, impliquant 38 546 sujets de plus de 60 ans (âge médian 69 ans ; environ 7% de plus de 80 ans). Avec un taux de suivi de 95% à trois ans, cette étude montre que le vaccin contre le zona permet de diminuer le fardeau de la maladie dans cette population. En effet, le Zostavax permet de réduire significativement : l’incidence du zona de 51,3%, le fardeau total de la maladie de 61,1% et l’incidence des névralgies postzostériennes (NPZ) de 66,5%. Dans une analyse post hoc de la SPS, l’incidence des formes persistantes et sévères de NPZ est réduite de 73% dans la population vaccinée. Environ 80% de ces cas sévères touchent des sujets de plus de 70 ans. De plus, bien que l’efficacité du vaccin sur l’incidence du zona soit moins importante chez les patients de plus de 70 ans, l’effet du vaccin sur la sévérité de la maladie est supérieur dans cette sous-population.
Le «Zostavax» efficacy and safety trial (ZEST) est une étude randomisée, contrôlée, multicentrique impliquant 22 439 sujets âgés de 50 à 59 ans en Amérique du Nord et en Europe. Cette étude montre une diminution significative de 69,8% de l’incidence du zona dans cette population. Le vaccin était généralement bien toléré.
L’essai clinique avec le nouveau vaccin était une phase 3 (randomisée contre placebo) mené avec une sous-unité glycoprotéique virale associée à un adjuvant (AS01B adjuvant system ou HZ/su). L’étude a été menée dans dix-huit pays chez des personnes âgées de 50 ans et plus, réparties selon trois groupes d’âge (50-59 ans, 60-69 ans, 70 ans et plus). Les participants ont reçu deux doses intramusculaires (soit de vaccin, soit de placebo) à deux mois d’intervalle. Au total, 15 411 personnes ont participé à ce travail, respectivement 7698 (vaccin) et 7713 (placebo). Le suivi moyen a été de 3,2 ans. Un zona a été confirmé chez six participants dans le groupe vaccin et chez deux cent dix dans le groupe placebo. L’efficacité globale du vaccin était de 97,2% (95% intervalle de confiance, de 93,7 à 99,0 ; p < 0,001). L’efficacité du vaccin se situait entre 96,6% et 97,9% pour tous les groupes d’âge. Les proportions de participants qui ont eu des effets indésirables graves et les taux de décès ont été similaires dans les deux groupes.
Ces nouvelles données vont rebattre les cartes quant à la nécessité d’inclure ou non la prévention contre le zona dans les schémas de vaccination des adultes.
En France, où il a obtenu une autorisation de mise sur le marché (AMM) dans la prévention du zona et des douleurs post-zostériennes chez les adultes de 50 ans et plus, le Zostavax de Merck est considéré comme ayant une «efficacité modeste sur l’incidence du zona», sa protection «diminuant avec l’âge de vaccination et au cours du temps». Selon les recommandations officielles du Haut Conseil de la santé publique, il n’est conseillé que chez les sujets non immunodéprimés, âgés de 65 à 74 ans. Cette donne va-t-elle changer et, si oui, dans quels délais ?
Un groupe de chercheurs américains annonce, dans The New England Journal of Medicine,3 avoir élaboré un test moléculaire de nature à améliorer la capacité diagnostique de la bronchoscopie pour détecter la majorité des cancers bronchopulmonaires. Ce groupe était dirigé par les Drs Avrum Spira (Division of Computational Biomedicine, Boston University Medical Center) et Jerome Silvestri (Division of Pulmonary and Critical Care Medicine, Medical University of South Carolina).
En pratique, le travail a été mené sur un total de 639 fumeurs (actuels ou anciens) devant subir une bronchoscopie pour suspicion de cancer du poumon (détectée par imagerie). Les participants étaient inscrits dans vingt-huit centres (Etats-Unis, Canada, Irlande) au travers de deux études prospectives multicentriques (AEGIS-1 et AEGIS-2). A partir des bronchoscopes, des échantillons de cellules des voies respiratoires supérieures de ces patients étaient prélevés. Les résultats montrent, schématiquement, que l’association bronchoscopie-test moléculaire a une sensibilité plus grande, 97% contre 75% pour la bronchoscopie seule – et ce quels que soient la taille de la lésion, sa localisation, le stade et le type cellulaire tumoral en jeu.
Là aussi, la question soulevée est celle de savoir si cette nouvelle approche est ou non de nature à faire l’économie des procédures invasives aujourd’hui utilisées. On estime, en pratique, que l’efficacité de la bronchoscopie pour diagnostiquer un cancer du poumon varie grandement selon la taille et la localisation de la lésion bronchique suspecte. D’autres prélèvements peuvent alors être réalisés : biopsie à l’aiguille fine sous scanner réalisée à travers la peau (transpariétale ; biopsies effectuées au cours d’une médiastinoscopie ou d’une thoracoscopie). Ces examens complémentaires ne sont pas toujours sans risques. Or, invasifs et coûteux, ils se révèlent finalement avoir été inutiles dans une proportion nullement négligeable de cas.