Après un premier épisode d’embolie pulmonaire (EP) sans facteur déclenchant identifiable, le risque de récidive est significatif, avec une morbidité incontestable. Prolonger l’anticoagulation (AC) au-delà des 3 à 6 mois recommandés permet de diminuer ce risque, mais expose aux complications hémorragiques, et les données de la littérature ne permettent pas de déterminer la durée optimale d’anticoagulation. Dans ce but, les auteurs de l’étude multicentrique française PADIS-PE ont inclus 374 patients adultes ambulatoires, sous AC pendant 6 mois pour une première EP. Les patients ont été randomisés en deux groupes parallèles, afin de comparer la poursuite de l’AC par une antivitamine K à la prise d’un placebo, pour une durée de 18 mois. L’étude a été conduite en double aveugle, une procédure intéressante ayant permis de générer des INR factices chez les patients sous placebo. A la fin de la période de traitement de 18 mois, les patients ont été suivis pendant 24 mois en médiane. L’issue primaire d’intérêt était la survenue d’une récidive thromboembolique symptomatique ou un saignement majeur durant la période de 18 mois de traitement, les mêmes événements étant observés dans la période de suivi après l’arrêt du traitement, comme issue secondaire. Les résultats montrent que l’AC prolongée permet de diminuer significativement le risque d’issue primaire (3,3% vs 13,5% ; HR : 0,22 (IC 95% : 0,09-0,55)), essentiellement dû à une baisse des événements thromboemboliques, mais que le risque de récidive s’égalise après l’arrêt de l’AC.
Commentaire : Cette étude confirme l’intérêt de poursuivre l’AC au-delà de 6 mois après une première EP, dans une population de patients plutôt jeunes, qui bien que présentant un risque de saignement évalué au départ (score ACCP) globalement plutôt élevé, ont très peu saigné. La généralisation des résultats à une population plus âgée, avec un risque hémorragique évidemment plus élevé, n’est pas certaine. PADIS-PE suggère également que l’AC ne semble que repousser la récidive thromboembolique, cette dernière survenant à l’arrêt du traitement dans la même proportion, quelle que soit la durée de l’AC. Comment agir en pratique ? A la fin de la période d’AC standard, il faut évaluer la tolérance au traitement et le risque hémorragique, et discuter avec le patient de la poursuite de l’AC pour une durée de 18 mois, si la balance paraît favorable. L’arrivée des anticoagulants oraux directs, potentiellement plus efficaces et grevés de moins de complications hémorragiques, pourrait renforcer encore cette attitude, avec une prolongation du traitement peut-être au-delà des 18 mois. Vers une anticoagulation à vie pour tous les patients avec EP dans le futur ?