C’est un phénomène que l’on commence, en France, à observer sur les réseaux sociaux : des «centaines de femmes» s’y plaignent de «maltraitance gynécologique». Au point de commencer à inquiéter la profession. Ces mécontentements sont-ils nouveaux ? La nouveauté tient-elle dans la prise de parole de ces femmes ? Comment comprendre, expliquer, interpréter ce phénomène né des réseaux sociaux ?
«Plusieurs enquêtes dans la presse et sur internet ont signalé les pratiques archaïques dont les femmes peuvent être victimes dans leur parcours de santé. Au printemps 2014, des sages-femmes alertent sur le «point du mari» : un geste clandestin – ou pas – qui consiste à recoudre une épisiotomie par quelques points de suture supplémentaires – supposé accroître le plaisir de l’homme lors des rapports sexuels. En février 2015, surgit sur la toile, le scandale des touchers vaginaux sur patientes endormies. Quelques mois avant sur tweeter «#PayeTon Utérus» avait déjà «fait le buzz». Des centaines de femmes ont raconté leurs expériences douloureuses chez le (ou la) gynécologue : paternalisme, sexisme, conseils dépassés, examens brutaux, paroles humiliantes, homophobie, absence de consentement,…».
«Des jeunes filles, des mères, des célibataires y relatent des événements malheureux, douloureux, offensants, voire traumatisants qui se sont déroulés lors de consultations ou d’examens gynécologiques. Les femmes évoquent des remarques maladroites, des jugements déplacés, de la brutalité, un mépris de la douleur, une intimité bafouée, voire l’absence de consentement pour certains actes médicaux.»1
Le Figaro a interrogé sur ce thème le Pr Bernard Hedon (CHU de Montpellier), président du Collège national français des gynécologues-obstétriciens : «Je déplore les souffrances évoquées par certaines femmes ou les phrases qui ont blessé et je m’en excuse en tant que responsable de la profession. Par ailleurs, l’absence de consentement est inadmissible. Ces problèmes de maltraitance sont minoritaires, mais nous devons en tenir compte, prendre du recul et y réfléchir.»
Pour sa part, le Conseil national français de l’Ordre des médecins n’a jamais eu connaissance de dérive particulière. Hormis les cas (toujours très médiatisés) de médecins jugés pour viol après avoir été accusés par des patientes, la profession ne semble pas, statistiquement, recéler plus de coupables aujourd’hui que par le passé. Elle ne saurait, pour autant, ne pas s’interroger collectivement sur les causes du phénomène qui enfle sur la Toile. Au-delà du seul cas des gynécologues, il s’agit, aussi, de permettre collectivement à la médecine de se défendre face à cette opprobre moderne ; une réprobation publique montante qui reste à comprendre – sans tarder.
Publication dans le New England Journal of Medicine de deux travaux a priori inquiétants. L’un démontre la persistance au-delà de 9 mois du virus dans le sperme d’hommes apparemment guéris,2 l’autre établit les bases moléculaires de la transmission sexuelle.3
Ces publications ont aussitôt été relayées par une mise au point de l’OMS sous la forme d’un communiqué de presse.4 L’organisation onusienne souligne que ces données, établies en Sierra Leone, surviennent alors que l’épidémie est sur le point d’être maîtrisée. Elle évoque aussi les nouveaux problèmes de santé publique que soulève la démonstration de cette nouvelle possibilité de contamination, via des relations sexuelles, chez des hommes guéris et, à ce titre, tenus pour n’être plus contagieux.
«Cette étude fournit une preuve supplémentaire que les survivants ont besoin d’un soutien continu substantiel pour les douze prochains mois afin de répondre à ce défi et d’assurer leurs partenaires qu’ils ne sont pas potentiellement exposés au virus», explique Bruce Aylward, représentant spécial pour la réponse Ebola du directeur général de l’OMS. Concrètement, quatre-vingt trois hommes âgés de plus de 18 ans, vivant à Freetown, ont fourni un échantillon de sperme qui a été testé pour détecter la présence de matériel génétique du virus Ebola. Ces volontaires avaient été contaminés entre deux et dix mois avant l’étude. Tous les hommes testés dans les trois premiers mois étaient positifs (9/9 ; 100%). Plus de la moitié des hommes (26/40 ; 65%) qui ont été testés entre quatre à six mois l’étaient aussi – de même qu’un quart (11/43 ; 26%) de ceux testés entre sept à neuf mois. Tous les volontaires ont été informés des résultats. On leur a prodigué des conseils et fourni des préservatifs.
Et maintenant ? Tous les survivants de sexe masculin à l’épidémie d’Ebola des trois pays africains touchés, vont-ils être testés et recevoir les informations nécessaires pour prévenir les risques de contamination sexuelle ? Depuis mai dernier, l’OMS donne des «recommandations intérimaires sur la transmission sexuelle de la maladie à virus Ebola».5 Elle recommande que tous les survivants testent leur sperme à partir de trois mois après le début de la maladie. Pour ceux qui sont positifs, un test mensuel est ensuite conseillé jusqu’à ce que le sperme soit négatif par deux fois consécutives à au moins une semaine d’intervalle. Jusqu’à l’obtention de ces deux tests négatifs, l’OMS recommande l’abstinence sexuelle ou le port de préservatifs, une bonne hygiène des mains, y compris après une masturbation.
« Il y a plus de 10 000 survivants à l’épidémie d’Ebola. On est en train de découvrir la maladie à distance de la phase aiguë. La possibilité d’une persistance et d’une réactivation virales pose beaucoup de questions, explique le Pr Eric Delaporte, (CHU de Montpellier, Institut français de recherche pour le développement) en charge du suivi de la cohorte Ebola en Guinée. Il semble bien exister une clairance du virus au fil du temps. Même si la transmission sexuelle par des survivants avec du virus persistant est une possibilité, elle semble rare».
Une équipe de chercheurs cambodgiens, thaïlandais, britanniques et américains vient de publier dans Nature Communication6 les conclusions d’un travail lourd de menaces quant à l’efficacité, dans l’avenir, des antipaludiques à base d’artémisinine. Ce travail a été dirigé par le Pr Rick M. Fairhurst (Laboratory of Malaria and Vector Research, National Institute of Allergy and Infectious Diseases, Rockville, Maryland). On sait que des souches du parasite Plasmodium falciparum résistant à l’artémisinine se répandent rapidement en Asie du Sud. Pour autant, on ne sait rien, ou presque, quant à leurs modes de transmission. «Ce manque de connaissances et la possibilité que ces parasites vont se répandre en Afrique mettent en danger les efforts mondiaux pour éliminer le paludisme» écrivent les auteurs.
Ils expliquent aussi comment ils ont pu progresser dans la connaissance des mécanismes de transmission via des isolats de gamétocytes de parasites cliniquement résistant à l’artémisinine, transmis à des moustiques vecteurs indigènes et non indigènes. «Nous montrons que les isolats actuellement résistant à l’artémisinine au Cambodge se développent et produisent des sporozoïtes dans deux vecteurs d’Asie du Sud, Anophelesdirus et Anopheles minimus, ainsi que chez le principal vecteur africain : Anopheles coluzzii (anciennement Anopheles gambiae M).»
Pour ces chercheurs, la capacité (anciennement le génie infectieux) des parasites résistant à l’artémisinine à infecter les diverses espèces d’Anopheles et la prévalence plus élevée de leurs gamétocytes chez les patients, peuvent expliquer l’expansion rapide de ces parasites au Cambodge et dans les pays voisins. Ils soulignent que des efforts doivent rapidement être accomplis pour prévenir leur propagation mondiale dont les conséquences seraient à bien des égards catastrophiques.