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ISO 690 Maitre, S., Kaeser, A., Lucca, J., D., Spertini, F., Ribi, C., « Qui s’y frotte s’y pique » : réactions urticariennes aux insectes de nos régions, Rev Med Suisse, 2016/513 (Vol.12), p. 691–697. DOI: 10.53738/REVMED.2016.12.513.0691 URL: https://www.revmed.ch/revue-medicale-suisse/2016/revue-medicale-suisse-513/qui-s-y-frotte-s-y-pique-reactions-urticariennes-aux-insectes-de-nos-regions
MLA Maitre, S., et al. « Qui s’y frotte s’y pique » : réactions urticariennes aux insectes de nos régions, Rev Med Suisse, Vol. 12, no. 513, 2016, pp. 691–697.
APA Maitre, S., Kaeser, A., Lucca, J., D., Spertini, F., Ribi, C. (2016), « Qui s’y frotte s’y pique » : réactions urticariennes aux insectes de nos régions, Rev Med Suisse, 12, no. 513, 691–697. https://doi.org/10.53738/REVMED.2016.12.513.0691
NLM Maitre, S., et al.« Qui s’y frotte s’y pique » : réactions urticariennes aux insectes de nos régions. Rev Med Suisse. 2016; 12 (513): 691–697.
DOI https://doi.org/10.53738/REVMED.2016.12.513.0691
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allergo-immunologie
6 avril 2016

« Qui s’y frotte s’y pique » : réactions urticariennes aux insectes de nos régions

DOI: 10.53738/REVMED.2016.12.513.0691

Itchy skin rashes are a frequent reason to seek medical advice. The symptoms may be caused by hypersensitivity reactions to arthropod bites, waterborne parasites or setae from moth caterpillars and are sometimes mistaken for spontaneous urticaria or eczema. Some of these pests are resurging in Switzerland and elsewhere and increasingly responsible for emergency consultation. In this article we review itchy skin rashes caused by bed bugs, scabies, lice, cercariae, Pyemotes spp, caterpillars and harvest mites, which may be confounded with urticaria and allergic contact dermatitis. We detail here clinical manifestations, topographical distribution of skin lesions, epidemiology, treatment and preventive measures.

Résumé

L’apparition de lésions cutanées prurigineuses est un motif de consultation fréquent. Le diagnostic différentiel des dermatoses prurigineuses aiguës est vaste et inclut notamment les réactions d’hypersensibilité à des agressions par divers invertébrés (arthropodes et helminthes), dont certaines espèces sont en recrudescence. Dans cet article, nous passons en revue les dermatoses prurigineuses occasionnées par les punaises de lit, la gale, les poux, les puces de canards, les aoûtats, Pyemotes spp et les chenilles processionnaires, qui peuvent être responsables de réactions urticariennes ou confondues avec de l’eczéma. Nous en détaillons les caractéristiques cliniques, y compris la topographie des lésions cutanées et l’épidémiologie, et abordons les recommandations de traitement et les mesures de prévention.

Introduction

Depuis quelques années, nous observons la réémergence de la problématique des punaises de lit, un véritable fléau dans les grandes villes, et la Suisse n’est pas épargnée. Le réchauffement climatique favorise quant à lui l’apparition des puces de canards dans les lacs d’eau douce et fait remonter vers le nord les chenilles processionnaires.

Face à un tableau de dermatose prurigineuse ou d’urticaire, il est utile de rechercher à l’anamnèse et à l’examen clinique des indices nous orientant vers l’incrimination d’un insecte, au vu des divergences dans les implications thérapeutiques et sur l’environnement du patient en cas de suspicion d’infestation. Nous relevons ici les caractéristiques épidémiologiques, saisonnières et cliniques des principales ectoparasitoses de l’homme et autres attaques d’arthropodes, susceptibles de se manifester sous forme de réactions pseudo-allergiques ou d’urticaire, résumées sous forme de tableau synopsis (tableau 1), ainsi que leur prise en charge thérapeutique globale.

Tableau 1

Récapitulatif des caractéristiques épidémiologiques et cliniques des ectoparasites/insectes rencontrés responsables de lésions cutanées prurigineuses dans nos contrées

Punaises de lit

Epidémiologie

Déjà mentionnées à l’époque des Pharaons et dans les premières écritures chrétiennes, les punaises de lit ont suivi un déclin progressif jusqu’à la fin du siècle dernier. Une augmentation exponentielle de cas d’infestations est observée ces dix dernières années en Amérique du Nord, en Europe et en Asie, principalement dans les villes et indépendamment du niveau d’hygiène. Cette émergence est liée à l’abandon de certains insecticides (DDT), au développement de résistances à ces derniers et à une diffusion du parasite facilitée par les voyages.1 Aucune estimation de prévalence n’a été retrouvée pour la Suisse, où la punaise à fait son retour en force dans de grandes agglomérations comme Genève, Lausanne et Zurich.

Les deux espèces de punaises de lit inféodées à l’homme, Cimex lectularius (cosmopolite) et Cimex hemipterus (zones tropicales), brunes et à corps plat de 5-7 mm, sans ailes (figure 1), sont exclusivement hématophages. Elles sont attirées par la chaleur et le CO2 de l’hôte et se déplacent de quelques centimètres à plusieurs mètres la nuit pour se nourrir pendant quatre à dix minutes. Leur robustesse leur permet de survivre à des températures entre 7 et 45°C et de jeûner jusqu’à 24 mois, rendant leur éradication particulièrement laborieuse. Leur corps plat facilite leur dissimulation dans tout anfractuosité (coutures de matelas, recoins de sommier, valise, livres…). Les femelles y pondent 2-4 œufs/jour, soit 400-600 œufs par vie de punaise. Des nymphes éclosent 4-10 jours après et poursuivent un cycle de six à douze mois pour atteindre une phase adulte. Les endroits à forte concentration humaine (hôtels, EMS, croisières, refuges…) sont à risque d’infestation rapide (en quelques semaines). La salive injectée contient un analgésique qui rend la morsure indolore, ainsi que des substances vasodilatatrices et anticoagulantes. Ces dernières peuvent être responsables des réactions d’hypersensibilité.1 Les zones découvertes (bras, jambes, cou, visage) sont touchées de façon caractéristique, la mandibule de l’insecte étant trop courte pour traverser du tissu. Les morsures peuvent rester asymptomatiques (environ 30 % des personnes exposées2) ou occasionner des manifestations cutanées variables, classiquement papuleuses, très prurigineuses, groupées ou en ligne (figure 2) (déjeuner, dîner, souper) et centrées par un point de morsure parfois hémorragique. La réaction peut occasionnellement s’avérer plus sévère, sous forme de vésicules, de bulles, ou d’une urticaire généralisée.1, 3 Dans ces cas, des anticorps IgG dirigés contre des antigènes salivaires de C. lectularius ont été détectés, mais ne sont pas encore disponibles de routine.1, 4 De rares cas d’anaphylaxie ont été décrits.1 Les complications sont principalement les surinfections secondaires au grattage (impetigo, cellulite), et l’impact psychosocial parfois sévère (déprivation de sommeil, dépression, isolement, phobies). Une anémie peut se développer suite aux piqûres répétées. Les punaises de lit pourraient agir comme vecteur de maladies infectieuses (hépatite B, maladie de Chagas), mais une transmission de pathogènes chez l’homme n’a jusqu’à présent pas pu être démontrée.1, 5

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Fig 1

Punaise de lit

Fig 2

Lésions d’allure urticarienne sur piqûre de Cimex lectularius (punaise de lit)

Diagnostic

La suspicion clinique se base sur l’anamnèse (voyages ? Prurit communautaire ? Amélioration en dehors du domicile ?) et les lésions cutanées. Des traces de sang sur les draps et une odeur âcre de la literie sont très évocatrices. L’examen histopathologique des lésions n’est pas spécifique. Les IgG anti-C. lectularius ne sont pas recherchés en routine.

Le diagnostic de certitude ne peut se faire qu’en identifiant le parasite amené par le patient lui-même, ou lors de l’inspection de son domicile. Il y a lieu de rechercher les insectes préférentiellement dans les recoins du matelas. Depuis ces dernières années se développent des entreprises de détection de punaises, notamment à l’aide de chiens dressés spécifiquement à cet effet, et de désinfestation, auxquelles il est possible de faire appel.1, 6

Traitement1,2,6

Le prurit peut être soulagé par dermocorticoïdes et antihistaminiques. En cas d’infestation du domicile, l’éradication est souvent laborieuse et onéreuse, et il ne suffit pas de traiter la literie. Plusieurs passages par des professionnels peuvent être nécessaires.

Les stratégies de prévention en voyage sont limitées. Porter des habits longs permet de limiter l’étendue des piqûres. En cas de doute sur une infestation, il est conseillé de sortir le strict minimum de son sac, à emballer dans un sac poubelle, pour éviter un transport passif des punaises dans les bagages. Au retour d’un voyage, la décontamination des bagages doit se faire immédiatement, la technique dépendant du type de matériaux (laver les vêtements/sacs à > 55°C ; congélateur à -20°C pendant > 24 heures, insecticides pour rampants).

Gale

La gale ou scabiose est une parasitose cutanée ubiquitaire et très contagieuse, de transmission interhumaine, liée à la colonisation de la couche cornée de l’épiderme par l’acarien Sarcoptes scabiei variante hominis, sous-espèce spécifique à l’homme (figure 3).

Fig 3

Acarien de la gale (Sarcoptes scabiei, variante hominis)

Epidémiologie

La gale touche indifféremment tous les âges et tous les milieux sociaux, avec une prédominance dans les milieux précarisés.7, 8 Dans nos pays industrialisés tempérés, les épidémies ont lieu principalement dans les collectivités et pendant les saisons froides (promiscuité). La transmission se fait par la femelle adulte, essentiellement par contacts directs rapprochés et prolongés, classiquement par les relations sexuelles (MST), ou le contact mère-enfant. L’adulte survit 2-4 jours hors de la peau, les formes plus jeunes et les œufs jusqu’à dix jours.

La femelle, mesurant 0,3 x 0,4 mm, soit la limite de la visibilité à l’œil nu, creuse un sillon de 1-2 mm/jour dans la couche cornée de l’épiderme en y pondant plusieurs œufs quotidiennement. Les œufs éclosent en 3-4 jours. Quinze jours sont nécessaires aux larves pour atteindre le stade adulte. Le prurit est attribué à une réaction d’hypersensibilité retardée aux déjections (salive, matières fécales) et aux œufs.

Clinique

La période d’incubation de la gale est d’environ trois semaines pour une primo-infection.7, 8 Nous ne décrirons pas la gale profuse et hyperkératosique, ni la gale de l’enfant, et nous concentrerons sur la gale commune de l’adulte et la gale dite « des gens propres » ou gale « invisible ».

Un prurit intense généralisé à prédominance crépusculaire et nocturne est au premier plan. La topographie du prurit est caractéristique : espaces interdigitaux dorsaux des mains, face antérieure des poignets, zones axillaires antérieures, fesses, aréoles mammaires (femmes), organes génitaux (hommes). Le dos, le cou et le visage sont en général épargnés. Les lésions spécifiques de gale sont les sillons, les vésicules perlées et les nodules scabieux. Ils peuvent manquer ou être masqués par les lésions de grattage. Les sillons et les vésicules perlées se recherchent particulièrement dans les espaces interdigitaux et sur les poignets. Les nodules scabieux siègent avec prédilection sur les organes génitaux masculins et dans les plis axillaires. Occasionnellement, la gale peut se présenter sous forme inaugurale d’urticaire généralisée.9, 10

Diagnostic

Le diagnostic est essentiellement clinique : caractéristiques du prurit, topographie des lésions et contexte épidémique. L’examen parasitologique peut aider au diagnostic. Toutefois, la technique est très « opérateur-dépendant » et sa sensibilité est mauvaise dans les gales paucilésionnelles. Il consiste à repérer (plus ou moins par test à l’encre de Chine) puis à gratter les sillons et/ou les nodules scabieux à l’aide d’une curette, puis d’examiner directement au microscope optique les sérosités et les squames prélevées à la recherche de sarcopte, d’œufs ou de larves.

La dermatoscopie semble aussi performante que le prélèvement parasitologique et permet un diagnostic rapide in vivo indolore pour le patient11 (figure 4). Le sarcopte ainsi visualisé apparaît comme un accent circonflexe caractéristique.

Fig 4

Gale : sillon scabieux, dermatoscopie

Traitement/éradication

Il n’y a pas de guérison spontanée. Le traitement de choix est l’ivermectine per os, qui peut être associée à un traitement topique de perméthrine en cas de forte infestation.7 L’enquête d’entourage est obligatoire, car les cas contacts doivent être traités de la même manière et en même temps. De plus, les mesures de désinfection du linge et de la literie (lavage à 60°C, acaricide) doivent être effectuées de façon synchrone.

Pédiculose8, 12

Les poux (figure 5) peuvent également provoquer des réactions urticariennes ou eczématiformes. Ce sont des ectoparasites stricts de l’homme, hématophages, de transmission interhumaine et directe dans la grande majorité des cas. Il en existe trois espèces :

  1. la pédiculose du cuir chevelu est la plus connue et la plus fréquente (enfants), et se manifeste le plus souvent par un prurit lié aux morsures de poux au niveau du cuir chevelu, des tempes, du pourtour des oreilles et de la nuque, avec lésions de grattage. Elle peut être occasionnellement confondue avec un eczéma. Le diagnostic se base sur la mise en évidence de poux ou de lentes, à proximité du scalp, à l’aide d’un peigne fin. Plusieurs catégories de traitements sont possibles : en première intention, des insecticides topiques (crème perméthrine 1 %, pyréthrines, malathion 0,5 %). Le traitement de l’environnement est aussi nécessaire, en lavant à 60°C les habits et textiles ayant été en contact avec la tête durant les trois jours précédents.12

  2. La pédiculose corporelle (Pediculus humanus corporis) est devenue rare et touche les individus en situation de précarité. Les poux infestent les vêtements. Les morsures peuvent provoquer une éruption urticarienne. Le prurit occasionne des lésions de grattage et une éczématisation, prédominant sur les zones couvertes (emmanchures, régions scapulaire et lombaire). Le diagnostic repose sur la clinique et la mise en évidence de poux. Le traitement par désinfection de l’environnement, à savoir le lavage de la literie et des vêtements à 60°C, suffit à éradiquer l’infestation. Il faut l’associer à une douche au savon et à un traitement des éventuels contacts (rapports sexuels).12

  3. La pédiculose pubienne (Phtirius pubis), de transmission surtout sexuelle. Les piqûres provoquent de petites lésions bleuâtres, mais également parfois des réactions pseudo-allergiques assez importantes, aux niveaux pubien, périanal et des cuisses. Les lentes sont visibles à la base des poils, comme les poux de tête. Les modalités thérapeutiques sont les mêmes que pour la pédiculose du cuir chevelu, en traitant toutes les zones pileuses du tronc et des cuisses, et en lavant les vêtements comme indiqué précédemment. Il faut également rechercher les autres MST et traiter le (les) partenaire(s) sexuel(s).12

Fig 5

Pou (Pediculus humanus)

Puces de canards1315

La bilharziose des canards est connue pour provoquer une dermatite cercarienne chez les hommes. La larve de Trichobilharzia (figure 6), dont neuf espèces ont été décrites dans le monde, est un parasite à cycle aquatique, dont le réservoir principal est le canard de nos lacs d’eau douce. Les œufs sont éliminés dans les excréments et éclosent dans l’eau. La miracidie colonise ensuite un mollusque qui est l’hôte intermédiaire et qui va libérer des milliers de furcocercaires lorsque la température de l’eau dépasse 22-23°C. Ces cercaires doivent ensuite traverser le tégument d’un autre hôte, principalement le canard, afin de poursuivre leur cycle.

Fig 6

Larve de Trichobilharzia

Parfois, les cercaires peuvent « se tromper » et tenter de passer à travers la peau de l’homme, provoquant des lésions cutanées prurigineuses, suite à une réaction immunologique et notamment la libération d’histamine. Les lésions apparaissent généralement dans l’heure suivant la baignade, parfois le soir suivant ou le lendemain, et durent en moyenne quatre jours.

Un premier contact avec le parasite occasionne la production d’anticorps anti-Trichobilharzia. De ce fait, la présentation clinique est généralement plus rapide et plus intense lors d’une réexposition. Le traitement n’est que symptomatique par la prescription d’antihistaminiques afin de calmer le prurit.

Sur le plan de la prévention individuelle, la méthode la plus efficace est d’éviter la baignade. Sinon, il convient de se doucher immédiatement en sortant de l’eau et de se sécher, afin d’éventuellement éliminer les cercaires restant sur la peau. Sur le plan collectif, il n’y a à notre connaissance pas de mesures prises aux abords des lacs suisses romands. A Annecy, un ramassage des mollusques ou le traitement des canards à large échelle ont été tentés, sans grand succès jusqu’ici.

Aoûtats

Les aoûtats sont des larves d’acariens de la famille des trombiculidés, appelés également rouget, vendangeon ou vendangeron.16 On les trouve de juillet à octobre à la surface des sols herbacés et ils parasitent les mammifères qui se contaminent en passant dans l’herbe. Ces larves se nourrissent de lymphes et sont généralement plus actives à la fin de l’été, d’où leur nom.

Elles cherchent ensuite sur leur hôte un endroit humide et couvert. Les lésions sont donc classiquement retrouvées au niveau des plis de l’aine, des aisselles, des creux poplités, sous les seins et au niveau des parties génitales.

Au moment de la piqûre, il est possible de ressentir un picotement avec apparition d’une macule, qui évolue en quelques heures en papules et vésicules prurigineuses, parfois accompagnées d’un œdème. Les surinfections ne sont pas rares et en guérissant, il est possible d’observer une pigmentation résiduelle. Le traitement est également symptomatique (antihistaminique) et il faut veiller à une bonne désinfection locale. Sur le plan de la prévention, il convient de se couvrir lorsqu’on est en contact avec de l’herbe, en utilisant une couverture par exemple lors de pique-nique.17

Pyemotes ventricosus18, 19

Cet « acarien de la paille » (figure 7), de la famille des trombiculidés comme les aoûtats, est un « hyperparasite » cosmopolite : il vit aux dépens de certaines larves d’insectes, qui ellesmêmes parasitent diverses plantes cultivées (paille, céréales) ou le bois (de feu, meubles). Il peut, accidentellement ou en quête de nourriture, s’attaquer à l’homme ou à d’autres mammifères, en cas de contact direct. Des cas isolés ou des petites épidémies sont décrites, principalement en milieu rural, et plutôt en période estivale (mai à septembre), mais restent plutôt rares ; il n’y a pas d’estimation de prévalence.

Fig 7

Pyemotes ventricosus (acarien de la paille) en microscopie électronique

La dermatite du Pyemotes (grain itch, hay itch) commence par un prurit dans les heures après le contact avec le matériel contaminé (paille, céréales, bois/sciure de bois,), suivi 10-20 heures après par une éruption de papules urticariennes centrées par une petite vésicule, souvent détruite par le grattage, qui ressemblent à d’autres piqûres d’insectes. La piqûre reste souvent inaperçue car elle est indolore ; de plus, l’acarien est invisible à l’œil nu et ne reste pas sur le corps. La répartition des lésions dépend des circonstances du contage. Le « signe de la comète » (figure 8) serait relativement spécifique :19 il s’agit d’un trajet linéaire partant de la lésion urticarienne primaire, qui refléterait une lymphangite superficielle non bactérienne, dont la pathogénie est inconnue.

Fig 8

Signe de la comète (Pyemotes ventricosus)

Le diagnostic n’est souvent basé que sur la clinique et sur une anamnèse environnementale détaillée compatible avec un contage avec du matériel contaminé par des Pyemotes. Il est rare de poser un diagnostic de certitude car il nécessite l’identification de l’acarien sur ce matériel au moyen d’outils appropriés, d’où probablement le peu de cas rapportés.

C’est une dermatite bénigne et transitoire, qui se traite symptomatiquement par antihistaminiques et corticoïdes topiques, et se résout en quelques jours après éradication du matériel en cause.

Chenilles processionnaires

Les chenilles processionnaires du pin (Thaumetopoea pityocampa, figure 9), et dans une moindre mesure du chêne (Thaumetopoea processionea), sont responsables d’infestation massive et défoliatrice des pins, surtout en Europe du Sud et en Afrique du Nord.20, 21

Fig 9

Chenilles processionnaires

Leurs poils peuvent provoquer des lésions cutanées, oculaires et respiratoires potentiellement graves chez l’homme. En raison du réchauffement climatique, on observe ces dernières années, une expansion géographique importante de ces lépidoptères. En Suisse, on les trouve notamment dans la vallée du Rhône et la région du lac Léman, au Tessin et dans les vallées grisonnes du sud des Alpes. Bien qu’elles privilégient les forêts éparses et ensoleillées, on en trouve également dans les parcs, les jardins privés et certains sites chauds de haute altitude.

Les réactions observées chez l’homme sont liées soit au contact direct avec leurs poils fortement urticants qui pénètrent dans le derme et les muqueuses, soit de manière aéroportée par les poils qui peuvent rester dans les nids après la disparition des chenilles. Elles se développent dans les deux heures qui suivent l’exposition et se manifestent par une urticaire, une conjonctivite allergique, un bronchospasme et parfois même un choc anaphylactique. La période à risque est le printemps, lors de la sortie des chenilles du nid en procession vers le sol.

La prise en charge initiale consiste en un nettoyage minutieux de la peau au savon, l’ablation des poils incrustés dans le derme, le rinçage des yeux à l’eau claire et le lavage des vêtements à au moins 60°C. Le traitement est composé d’antihistaminiques pour soulager le prurit, de dermocorticoïdes et éventuellement d’un bronchodilatateur selon la présentation clinique.

De nombreux moyens de lutte sont mis en place par les cantons concernés par cette problématique, notamment la suppression des nids durant l’hiver, l’aménagement de nichoirs à mésanges qui se nourrissent de chenilles et l’utilisation de pièges à phéromones en été afin de restreindre le nombre de papillons mâles.

Conclusions

Les piqûres d’ectoparasites et les réactions aux poils de chenilles processionnaires sont en augmentation et peuvent être confondues avec de l’urticaire. Devant tout patient présentant des lésions cutanées prurigineuses, il est donc utile de rechercher les indices pour une ectoparasitose ou une exposition environnementale. La topographie des lésions cutanées peut être particulièrement informative. Le traitement est symptomatique, à l’exception de la gale et de la pédiculose qui nécessitent une approche spécifique. Les mesures d’éviction et de prévention diffèrent selon l’espèce animale impliquée.

Conflit d’intérêts :

Les auteurs n’ont déclaré aucun conflit d’intérêts en relation avec cet article.

Implications pratiques

▪ Lors d’apparition aiguë/subaiguë de lésions cutanées prurigineuses, y compris sous forme d’urticaire généralisée, il faut penser à exclure une ectoparasitose ou une exposition à des chenilles processionnaires

▪ La topographie des lésions cutanées est souvent révélatrice de l’insecte responsable

▪ Les infestations par les punaises de lit sont de plus en plus fréquentes, notamment dans les villes

▪ En cas de gale, de pédiculose ou de punaises de lit, des mesures de prévention et d’éradication adéquates doivent être entreprises

Auteurs

Sylvie Maître

Spécialiste en immuno-allergologie et médecine interne générale
Rue du Petit-Berne 14, 2035 Corcelles
sylvie.maitre@hin.ch
www.ecosante.ne.ch

Amélie Kaeser

Service de médecine interne CHUV
1011 Lausanne
amelie.kaeser@chuv.ch

Julie Di Lucca

Service de dermatologie, Département de médecine, CHUV
1011 Lausanne
julie.di-lucca@chuv.ch

François Spertini

Médecin-associé, ME Division d’immunologie et d’allergie Département de médecine
CHUV 1011 Lausanne

Camillo Ribi

Service d’immunologie et allergie, Centre hospitalier universitaire vaudois
1011 Lausanne
camillo.ribi@chuv.ch

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