Trois familles canadiennes viennent d’engager des poursuites en justice contre une société américaine commercialisant des échantillons de sperme humain. Motif de leur plainte : un donneur (le n° 9623) était, sur catalogue, présenté comme un homme d’une particulière intelligence – or il y avait erreur sur la personne.
La plainte vise, pour tromperie sur la marchandise, la société américaine Xytex Corp et son distributeur canadien Outreach Health Services (« créateurs de familles depuis 1999 »). Les plaignants réclament des dommages de 15 millions de dollars canadiens (10,4 millions d’euros).
L’affaire dépasse la seule plainte. Il apparaît aujourd’hui qu’au moins trente-six femmes (en Grande-Bretagne, au Canada et aux Etats-Unis) ont donné naissance à des enfants durant les dix dernières années à partir d’inséminations artificielles toutes réalisées avec le sperme de cet homme. Le n° 9623 était présenté par la banque et le distributeur comme une personne en parfaite santé, dotée d’un quotient intellectuel élevé et titulaire d’un doctorat d’ingénieur en neurosciences.
C’est une banale erreur de transmission qui a conduit à découvrir la vérité (Xytex avait, par inadvertance, joint dans un courriel les coordonnées du fournisseur). Une erreur de mail, une recherche sur internet et les couples receveurs de découvrir que l’homme était en fait âgé de 39 ans, qu’il souffrait de schizophrénie, ainsi que de troubles psychotique et narcissique de la personnalité en lien avec sa consommation de drogues. Il avait été emprisonné pour divers délits et cambriolages – puis avait abandonné ses études universitaires il y a une vingtaine d’années. Son sperme aurait continué à être commercialisé jusqu’en janvier de l’an dernier.
Où l’on en vient à une question de fond : les données connues sur la génétique (et celles plus récentes sur l’épigénétique) permettront-elles de démontrer qu’il y a, ici, perte de chance ? Ce passé de délinquant toxicomane est-il transmissible dans les gènes (comme on pensait que l’étaient un QI élevé et une carrière brillante) ? Où l’on voit, aussi, ce qu’il peut en être de la commercialisation des éléments du corps humain, à commencer par ses cellules sexuelles.
les données connues sur la génétique permettront-elles de démontrer qu’il y a, ici, perte de chance ?
Des chercheurs américains estiment avoir pour la première fois établi « avec certitude » que l’infection d’une femme enceinte par le virus Zika peut induire des malformations cérébrales chez le fœtus ; et notamment une microcéphalie. La démonstration synthétique est apportée dans The New England Journal of Medicine.1 Les auteurs de la publication, dirigés par la Dr Sonja A. Ramussen (CDC d’Atlanta), n’ont en revanche pas encore pu établir avec certitude de lien entre une infection par le virus Zika et le syndrome de Guillain-Barré.
« C’est désormais clair, les CDC ont conclu que le Zika provoque bien la microcéphalie et d’autres défauts sévères du cerveau chez le fœtus. Il y a encore beaucoup de choses que nous ignorons mais il n’y a plus aucun doute, le Zika est une cause de la microcéphalie » estime le Dr Tom Frieden, directeur des CDC. Selon lui, cette étude de ses services « marque un tournant dans cette épidémie ». Cette dernière affecte surtout l’Amérique du Sud – et plus particulièrement le Brésil où l’on aurait dénombré plus de 1,5 million de cas et observé une forte augmentation des cas de microcéphalie. Des doutes demeurent toutefois quant à la fiabilité des chiffres avancés.
« Cette confirmation est basée sur une analyse étendue des meilleures indications scientifiques menée par les CDC et d’autres experts en santé maternelle, du fœtus et des maladies transmises par des moustiques, a précisé le Dr Frieden. Ces recherches épidémiologiques, cliniques et moléculaires ont chacune produit de nouvelles données qui nous ont aidés à résoudre le puzzle. Nous pensons que la microcéphalie fait probablement partie d’un éventail de défauts de naissance qui pourraient affecter les femmes, soit à un moment particulier de la grossesse, ou durant toute la grossesse. Jamais avant cela nous n’avions connu une situation dans laquelle la piqûre d’un moustique pouvait provoquer une malformation dévastatrice chez le fœtus. »
Pour autant, rien n’est encore définitivement acquis : selon lui, il faudra peut-être encore des années avant de pouvoir répondre à des questions essentielles – à commencer par situer la période de la grossesse durant laquelle le risque de cette malformation cérébrale est le plus grand. En pratique, rien ne change quant aux recommandations destinées à protéger les femmes enceintes, comme d’éviter de se rendre dans des pays à risque. Le Dr Frieden rappelle notamment l’importance du préservatif chez les partenaires des femmes qui attendent un enfant ou pourraient tomber enceintes, revenant d’une zone où l’infection est active. Il en va de même pour « les couples qui résident dans ces zones ».
Les CDC ne disent rien quant à la question (hautement politique en Amérique du Sud) de l’interruption de grossesse. Ils recommandent que les hommes qui ont été infectés utilisent des préservatifs durant six mois après le début de l’infection (qui est le plus souvent asymptomatique…). On notera aussi, toujours dans le New England Journal of Medicine, une étude française démontrant une totale corrélation génétique entre la souche du virus présente chez un homme ayant contracté le Zika au Brésil et celle d’une femme n’ayant jamais voyagé dans une zone épidémique mais ayant eu, ensuite, des rapports sexuels avec lui.2
Nous évoquions, il y a peu, l’annonce faite à Paris par la société espagnole BioDan Group de la fabrication de « la première peau au monde 100 % humaine » (Rev Med Suisse 2016;12:812-3). Une peau utilisable pour tester des produits cosmétologiques mais aussi à des fins thérapeutiques. « Ce tissu, prélevé sur des donneurs sains, est composé de deux couches distinctes que sont l’épiderme et le derme, ainsi que des deux principaux constituants cellulaires de la couche épidermique et dermique, les kératinocytes et les fibroblastes. » Rien, toutefois, ne nous était dit sur les « donneurs sains » de Madrid.
Nous avons posé la question et reçu, fort obligeamment, la réponse du Dr Jose Luis Jorcano, président du comité scientifique de BioDan Group. « Il existe des lois spécifiques qui régulent les dons pour les biopsies réalisées aussi bien pour la recherche que pour des raisons commerciales, explique-t-il. Les biopsies se font sur des donneurs sains qui doivent signer un formulaire de consentement éclairé. Leurs cellules, du fait qu’elles sont cultivées, sont testées par une batterie de virus, bactéries et champignons. Les dons ne servent pas spécifiquement à la production de notre tissu. Nous profitons d’une opération chirurgicale programmée chez le patient / donneur pour prélever de la peau. »
Le Dr Jocarno ajoute : « Dans le cadre de la loi, il est interdit de rémunérer ou de percevoir de l’argent pour des dons d’organes. Et ce d’autant plus dans notre travail, où nous utilisons des résidus opératoires de chirurgie esthétique (liposuccion, phimosis…). » Dont acte.