On savait que les risques de cancers du sein et de l’ovaire pouvaient être associés à certaines mutations des gènes BRCA1 et BRCA2. L’évaluation de ces risques avait jusqu’à présent, pour l’essentiel, été faite à partir d’études rétrospectives, sur des données provenant de femmes jeunes, atteintes d’un cancer et avec des antécédents familiaux. Or une vaste étude prospective internationale, publiée dans le JAMA,1 vient de fournir des précisions importantes sur les risques encourus par les femmes porteuses de mutations BRCA1 ou 2 ; précisions fournies que ces femmes aient ou non déjà un cancer, en fonction de leur histoire familiale, de leur âge et des emplacements précis de leur mutation génétique.
Dirigé par Antonis C. Antoniou (Université de Cambridge, Angleterre), ce travail a inclus (entre 1997 et 2011) 6036 femmes porteuses de mutations BRCA1 et 3820 femmes porteuses de mutations BRCA2. Au moment de l’entrée dans l’étude, 5046 femmes n’avaient pas eu de cancer et 4810 étaient atteintes d’un cancer du sein, de l’ovaire ou des deux. Les femmes qui n’étaient pas atteintes avaient pratiqué un test génétique en raison d’antécédents familiaux de cancers ou d’un cas familial de cancer précoce. Le suivi s’est terminé en décembre 2013.
« Globalement, les chercheurs estiment que les risques cumulés de cancer du sein à 80 ans sont respectivement de 72 % et de 69 % pour les femmes mutées BRCA1 et celles mutées BRCA2, résume le site medscape.com.2
Ils notent que l’incidence du cancer du sein augmente rapidement jusqu’à 30 à 40 ans pour les porteuses de mutations BRCA1 et jusqu’à 40 à 50 ans pour les porteuses de mutations BRCA2, puis qu’elle devient constante jusqu’à 80 ans (20-30 pour 1000 personnes-année). En parallèle, les risques cumulés de cancer de l’ovaire à 80 ans sont respectivement de 44 % et de 17 % pour les femmes mutées BRCA1 et les celles mutées BRCA2. »
une dépendance économique et logistique qui réduit notre force de négociation dans la recherche d’antivenins sûrs et efficaces
Comparées aux femmes sans antécédents familiaux de cancer du sein, celles dont au moins deux parents ont eu un diagnostic de cancer du sein ont un risque relatif de cancer du sein de respectivement 1,99 (lorsqu’elles sont mutées BRCA1) et de 1,91 (lorsqu’elles sont mutées BRCA2). En d’autres termes, et à titre d’exemple, le risque cumulé de cancer du sein à 70 ans chez des femmes porteuses de la mutation BRCA1 est de 53 % s’il n’y a pas d’antécédents familiaux, de 68 % s’il y a un cas de cancer du sein et de 73 % s’il y en a deux. L’étude établit d’autre part que la position de la mutation sur les gènes BRCA1 et BRCA2 a un impact sur le risque. Autant d’éléments qui, à l’évidence, plaident en faveur de conseils individualisés tenant compte à la fois des antécédents familiaux mais aussi de la position de la mutation.
L’Organisation mondiale de la santé vient de décider de porter les morsures de serpent «au premier niveau de la liste des maladies tropicales négligées ».
On estime à plus d’un million le nombre de morsures de serpent qui surviennent chaque année en Afrique subsaharienne où les envenimations causeraient chaque année entre 25 000 et 30 000 décès – et autant d’invalidités permanentes. La décision de l’OMS était très attendue par les spécialistes. Elle devrait permettre d’améliorer considérablement le traitement des envenimations en favorisant l’accès aux antivenins et leur emploi dans les centres de santé, y compris dans ceux qui sont les plus isolés en Afrique subsaharienne.
« L’ampleur de la négligence de ce problème de santé publique est accentuée en Afrique par l’inaccessibilité des antivenins : contrairement à l’Asie ou l’Amérique latine, la plupart des pays subsahariens manque de producteurs d’antivenins. Cela impose une dépendance économique et logistique qui empêche une réponse autonome à la crise et réduit notre force de négociation dans la recherche d’antivenins sûrs et efficaces » souligne le Pr Achille Massougbodji, président de la Société africaine de venimologie (SAV) qui a joué un rôle déterminant dans cette décision.
Pour Jean-Philippe Chippaux, directeur de recherche à l’Institut français de recherche pour le développement (IRD), la prise en charge des morsures de serpent fait face en Afrique à un cercle vicieux dénoncé régulièrement depuis une vingtaine d’années. « La plupart des victimes préfèrent s’adresser à un thérapeute traditionnel plutôt que de se rendre au Centre de santé pour y recevoir l’antivenin, dont le prix est hors de proportion avec le revenu moyen d’une famille de paysans, explique-t-il. Le marché des antivenins est instable du fait de l’incapacité des producteurs reconnus à fournir un antivenin de qualité à un prix abordable… ».
C’est dans ce contexte que la SAV a mis en œuvre un plan d’action destiné à remplacer le cercle vicieux par un cercle vertueux (www.sav-asv.org) pour améliorer le recueil de données épidémiologiques, former le personnel de santé à la prise en charge des morsures de serpent, définir les caractéristiques des antivenins appropriés pour l’Afrique et identifier les sources de leurs financements.
La génétique et la santé publique donnent parfois naissance à des serpents de mer. Comme celui du retour de la variole sous la bannière du bioterrorisme. Officiellement disparu des réservoirs humains depuis 1980, le virus variolique réapparaît à échéance régulière : des équipes scientifiques annoncent dans des conclaves avoir l’intention de le « reconstruire » ; ou y être (presque) parvenu. Ce sont alors des émotions médiatisées, associées aux interrogations éthiques sur ce que les biologistes sont ou non en droit de réaliser dans leurs cornues généticiennes.
L’affaire rebondit aujourd’hui avec une savante indiscrétion de la revue Science.3 Où l’on apprend qu’un groupe dirigé par le virologiste David Evans (Université de l’Alberta, Edmonton, Canada) est parvenu à synthétiser le horsepox, un vieux virus cousin issu de germains de celui de la variole – et ce à partir d’éléments génétiques commandés à distance et livrés par la poste – le tout pour un coût global de 100 000 dollars.
« Aucun doute : si c’est possible pour le horsepox, c’est possible pour la variole », explique à Science Gerd Sutter (Université Ludwig-Maximilians, Munich). Avec toutes les conséquences que l’on imagine : l’ensemble de la population mondiale à vacciner pour la protéger contre cette menace sanitaire hautement contagieuse, tenue pour éradiquée depuis près d’un demi-siècle. La simplicité du processus mis en œuvre par les chercheurs canadiens et, plus généralement, la banalisation des techniques (hier sophistiquées) de génie génétique font que le spectre d’une utilisation terroriste à visée criminelle ne peut nullement être exclu. A l’inverse, les optimistes parient ici sur une maîtrise grandissante de techniques qui ouvriront la voie à de nouveaux vaccins.